La Justice League de Brian Michael Bendis et David Marquez est-elle une occasion manquée ? En tout cas, ce nouvel épisode déçoit tout en mettant plein la vue. La Justice League Dark de Ram V et Xermanico en met aussi plein la vue, mais avec deux fois moins de pages réussit à rassasier davantage le lecteur grâce à une intrigue riche et des dessins tout sauf économes.
Je dois avouer que plus je progresse dans la lecture de ce premier arc de Justice League écrit par Brian Bendis, plus je suis désappointé. L'intention du scénariste est désormais claire : il a choisi de produire une sorte de "popcorn comic", ce qui en soit n'a rien de problématique, mais le résultat laisse perplexe tant il déçoit de la part d'un auteur qui m'a habitué à bien mieux avec des team-books.
Le même sentiment s'applique à la prestation de David Marquez au dessin. L'artiste livre des planches toniques, mais sans âme, et aussi sans décors (ou en tout cas pas beaucoup de décors). Sa narration graphique est d'une pauvreté indigne de son talent, avec une accumulation de double pages (pas moins de six, soit douze pages sur les vingt que compte l'épisode !) qui ne font que la souligner.
Comme je l'ai expliqué précédemment, ce qui m'a toujours plu dans les séries d'équipe de Bendis, c'est leur esprit de famille, mais aussi cette façon bien à lui de raconter en tout décontraction des histoires de super-héros pour qui le folklore qui est attaché relève de la caricature. En somme, ce qui intéressait visiblement Bendis, c'était moins les batailles, les super-pouvoirs, les costumes, les masques, que ce qu'ils permettaient de révèler chez ses personnages. De ce point de vue, ses récits étaient character's driven et Bendis n'était jamais meilleur que quand il développait des histoires au long cours où ses personnages s'affirmaient dans un environnement hostile.
Mais ici, rien de tout ça : ça bastonne à tout-va, la caractérisation est réduite à peau de chagrin, l'esprit de camaraderie est absent, la définition des protagonistes en fonction de l'action est misérable. Le méchant est monolithique : ce Brutus qui veut conquérir la Terre pour y déplacer la population de sa planète ravagée par la guerre qu'y a menée son chef, Zumbado (mon Dieu, quel nom stupide !), n'est qu'un énième avatar de tous les malabars bas du plafond qu'on croise régulièrement dans les pires séries Z de la BD, et la réponse que lui adresse la Ligue de Justice revient à rendre coup pour coup alors même qu'il est évident pour tous que cette "stratégie" est sans effet (seul Batman s'en rend compte, comme toujours, mais personne ne l'écoute).
Marquez illustre donc ça avec énergie mais il semble être en mode pilote automatique, ne forçant jamais son talent, et négligeant même des éléments esthétiques comme à la pire époque. Représenter un monde désolé comme la planète de Naomi et Brutus est une gageure, mais Marquez ne fait aucun effort pour créer un environnement original, les personnages se bagarrent dans un champ de ruines, mais à peine visible. Un seul plan permet de mesurer à quoi ressemble vraiment cette planète, une vue aérienne, par ailleurs l'image la plus frappante et réussie de l'épisode, et cela paraît suffire à Marquez, comme s'il estimait que cela fait le boulot. Ses personnages, eux, sont interchangeables, comme s'il ne lui inspirait rien (à l'exception de Hippolyta et, dans une moinde mesure, Black Canary). C'est triste à lire.
Sachant qu'après cet arc, Marquez va passer le relais, pour un épisode, à Steve Pugh, puis être remplacé par Phil Hester, et que Bendis n'annonce rien de bien excitant, j'ai bien peur de ne pas suivre bien longtemps cette publication (alors que la suite de Event Leviathan, Checkmate, où Bendis retrouve Alex Maleev, pour une mini-série plus sombre et terre-à-terre, me fait davantage envie).
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