samedi 3 avril 2010

Critique 139 : GOTHAM CENTRAL - THE QUICK AND THE DEAD, de Greg Rucka, Michael Lark, Stefano Gaudiano, Kano et Gary Amaro

Gotham Central : The Quick and the dead est le quatrième receuil de la série rassemblant les épisodes 23 à 25 et 28 à 31, tous écrits par Greg Rucka et illustrés par Michael Lark (pour la dernière fois), Stefano Gaudiano, Kano et Gary Amaro.
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- Corrigan (Gotham Central 23-24) est écrit par Greg Rucka et dessiné par Michael Lark et Stefano Gaudiano.
Le détective Crispus Allen fait l'objet d'une enquête de la police des polices après que l'agent de la brigade scientifique corrompu Jim Corrigan ait dérobé une preuve sur une scène de crime. La mort du super-vilain Black Spider et l'implication d'une vieille collectionneuse sont les clés de cette affaire que Renee Montoya, la partenaire d'Allen, va aider à résoudre en révèlant sa nature violente (un élément amené à être développé ultérieurement).
- Lights Out (Gotham Central 25) est réalisé par la même équipe (Rucka, Lark et Gaudiano).
Sur ordre du commissaire Akins, le Bat-Signal est enlevé du toit du commissariat central. Le justicier masqué est déclaré hors-la-loi : c'est le point culminant du conflit entre les policiers et le vigilant, après les morts de plusieurs agents (Charlie Fields, Nate Patton et Ron Probson) contre Mr Freeze et le Joker.- Keystone Kops (Gotham Central 28-31) est écrit par Greg Rucka et dessiné par Stefano Gaudiano, encré par Kano.
Un agent en uniforme est transformé en monstre après une intervention l'ayant conduit dans un laboratoire abandonné par un des ennemis de Flash, le Dr Achemy. Or celui-ci est incarcéré à Keystone et prétend être le seul capable de sauver le policier. Malgré la mise en garde de Batman, conseillant de ne pas négocier avec le criminel, le G.C.P.D. échoue à guérir leur collègue, mais pour Renee Montoya, c'est l'occasion de se rabibocher avec son père, indirectement lié à l'affaire.
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En l'absence d'Ed Brubaker, bien que la série reste d'un niveau remarquable, elle perd quand même de sa force et cet album est en deçà des deux précédents (In the line of duty et Unresolved targets).
Greg Rucka seul aux commandes, cela révèle la particularité de chacun des deux scénaristes : Brubaker est indéniablement celui qui soigne les intrigues, construit les enquêtes, tandis que son partenaire est plus concentré sur l'étude de caractères, la caractérisation des personnages.
Les trois histoires de ce recueil atteste des préférences de Rucka : négligeant le suspense (sans toutefois bâcler le déroulement des récits), il nous gratifie de grands moments avec ses personnages favoris, en particulier la détective Renee Montoya qui n'hésite pas à faire le coup de poing avec le ripou Jim Corrigan pour innocenter son collègue Crispus Allen, ou le commissaire Akis défiant Batman dans le parking du G.C.PD. après avoir fait retirer le Bat-signal du toit de l'immeuble en affirmant que ses hommes meurent à cause du justicier et de ses ennemis.
Rucka sait aussi écrire avec une admirable subtilité et une étonnante économie narrative le rejet puis le rapprochement du père de Montoya avec sa fille (dont il désapprouve le lesbianisme). Deux scènes lui suffisent pour décrire sobrement mais puissamment ces situations : une vraie leçon de storytelling.
Cela dit, même mineur, The Quick and the Dead démontre que Gotham Central doit surtout être considéré comme un ensemble, une oeuvre globale, qui s'apprécie vraiment au-delà des forces et faiblesses, des pleins et des déliés, des sommets et des creux de chaque arc ou même de chaque épisode.
Il est aussi assez troublant de constater à quel point chacun de ses deux auteurs a marqué son territoire à travers certains des protagonistes : Ed Brubaker s'exprime clairement via Marcus Driver tandis que Greg Rucka a choisi Renee Montoya comme porte-voix. Il a fait d'elle une des héroïnes de comics les plus passionnantes de ces dernières années, en se jouant des clichés (la fliquette déterminée, rongée par une colère intérieure croissante, et homosexuelle) : jamais il ne cède à la facilité en étant complaisant sur l'intimité de la jeune femme ou sur sa caractérisation vis-à-vis des autres personnages.
Mais la contrepartie de ce soin particulier accordé à la détective, c'est qu'on a le net sentiment que cette attention s'effectue un peu au détriment de la série elle-même : Rucka aime tellement "sa" Montoya qu'il néglige le reste du commissariat et le travail de ses agents. C'est visible dans une scène dramatique comme celle où Montoya et son partenaire Crispus Allen négocient avec le Dr. Alchemy pour sauver la vie d'un auute officier du G.C.P.D. : en échange de son aide, le vilain réclame (et obtient) des confidences sur l'intimité de la jeune femme, dont il se moque. Allen est réduit alors à un rôle immérité de figurant.
Le favoritisme de Rucka l'empêche de traiter avec la même rigueur le personnage d'Allen comme tous les autres dès qu'ils apparaissent dans la même scène que Montoya. Il n'est donc pas étonnant que le scénariste ait continué à explorer la progression de son héroïne par la suite, une fois Gotham Central annulé, et The quick and the dead peut être considéré comme le vrai point de départ de la mutation du personnage telle que décrite dans 52 (puis la back-up de Detective Comics/Batwoman) où la policière deviendra le successeur de la Question.
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Malgré ces réserves sur le script, cet album reste indispensable, ne serait-ce que parce qu'il contient les ultimes épisodes dessinés par la paire Michael Lark-Stefano Gaudiano (23 à 25) : ce sont de nouvelles planches superbes, jusqu'à la dernière séquence dans le parking avec Akins et Batman d'une intensité fabuleuse malgré un découpage finalement très simple. Du grand art !
Puis Gaudiano signe un chapitre seul : le résultat n'est pas déshonorant mais un ton en dessous.
Lorsque Kano (puis, pour un épisode, Gary Amaro) vient le seconder à l'encrage, on obtient à nouveau des pages de belle facture, évoquant encore et toujours l'immense Mazzucchelli, dont l'influence graphique hante la série depuis le début.
Dans le recueil suivant (Dead Robin), les rôles s'inverseront avec encore plus de bonheur (Gaudiano encrant Kano). En tout cas, Gotham Central bénéficie d'une cohérence esthétique notable car rare chez DC, où trop souvent les équipes créatives tournent trop fréquemment.
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C'est un peu un volume de transition : décevant peut-être, mais on aimerait être déçu comme ça plus souvent car cela reste tout de même au-dessus de la moyenne... Et surtout la suite (et fin) va prouver que la série a encore beaucoup de belles choses à offrir !

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