vendredi 22 mars 2019

NAOMI #3, de Brian Michael Bendis, David F. Walker et Jamal Campbell


Maintenant que l'on sait que Naomi paraîtra en "saisons" de six épisodes avec un break pour permettre à son dessinateur, Jamal Campbell, de souffler, la construction même du récit s'éclaircit. Ainsi, ce mois-ci, la couverture du numér promet la révélation de secrets et effectivement Brian Michael Bendis et David F. Walker lève une partie du voile. Qui lie la série à d'autres titres "Wonder Comics"...


Naomi confronte Dee à la photo qu'elle a trouvée où il figure avec une femme noire. Sont-ils ses parents biologiques ? Non, mais le garagiste consent à faire quelques confidences.


A commencer par le fait qu'il était membre d'un commando de l'armée de Thanagar (un des mondes de Hawkman) avec sa partenaire Qyeala. Las de la guerre, ils voulurent profiter d'un portail dimensionnel sur Gemworld pour déserter.


Mais Qyeala fut tuée avant de le franchir et Dee échoua, seul, sur Terre. La confession est brusquement interrompue par la mère adoptive de Naomi qui lui ordonne de sortir tandis qu'elle dispute Dee.


Au lieu de rentrer chez eux, les parents adoptifs de Naomi s'arrêtent en route. Son père l'entraîne sur la plage puis l'invite à le suivre dans une grotte. Elle hésite, craignant qu'il ne veuille se débarrasser d'elle.
  

Mais lorsqu'elle découvre un vaisseau extraterrestre, elle est sidérée. Et ce n'est pas fini puisque son père lui apparaît ensuite, vêtu d'une combinaison rappelant celle des soldats de Rann (la planète d'Adam Strange)...

Dans un arc narratif annoncé en six parties, le troisième chapitre est déterminant car il se situe évidemment à la moitié et donc doit marquer un vrai tournant, une vraie progression dramatique. C'est de plus la promesse indiquée sur la couverture de ce numéro.

Les deux scénariste ne peuvent donc pas se cacher ni reporter davantage les révélations et ni Brian Michael Bendis ni David F. Walker ne font faux bond. L'épisode regorge de rebondissements, qui s'expriment par le dialogue mais aussi par l'image.

Naomi n'existe que par défaut depuis le début puisqu'elle est préoccupée par sa véritable identité, ses origines. De manière suggestive, le scénario jouait sur le fait qu'elle était peut-être une extra-terrestre, ce qui expliquait sa fascination pour Superman. Et l'attitude intrigante de ses parents adoptifs.

La vérité semble plus complexe, même si elle reste encore à formuler - on a beau être au troisième épisode, il en reste encore autant à présenter, donc, non, tout n'est pas dit. Entre le passé thanagarien du colossal garagiste Dee, les allusions au Gemworld et ce qui semble être un vaisseau de Rann, la série brasse large et assume vraiment son ambition initiale (qui est de produire l'équivalent du Qautrième Monde de Kirby).

Mais, et c'est peut-être le plus important, cela cartographie davantage que le monde de Naomi : en effet, le Gemworld est aussi le cadre de l'arc en cours de Young Justice et DC a officialisé qu'un spin-off avec Amethyst est prévu. On peut même pousser plus loin en évoquant la série Hawkman de Vendetti, qui a montré que Thanagar n'était qu'un élément de la mythologie du héros ailé, ou se rappeler que Adam Strange, le terrien protecteur de Rann, est apparu plusieurs fois dans le Superman de Bendis. Naomi serait-elle le trait d'union entre plusieurs productions du scénariste, voire avec celles de ses collègues chez DC (comme le futur event Leviathan impliquera plusieurs héros importants) ?

Sur cette trame excitante, Jamal Campbell a l'intelligence de rester mesuré. Son dessin reste concentré sur les personnages et il ne s'autorise que peu de fantaisie (une double page pour montrer le commando thanagarien de Dee en action, une autre pour représenter le vaisseau du père adoptif de Naomi).

Cette approche peut sembler trop minimaliste à l'heure où le récit s'emballe et ouvre la porte sur un aspect plus cosmique. Mais en fait, c'est une méthode juste car le spectacle important, c'est celui des émotions de l'héroïne. Comme elle, le lecteur doit être ébahi par ces découvertes, leurs ramifications. En restant à la hauteur de cette ado médusée, on partage son émoi.

Il est très satisfaisant de constater la maîtrise tranquille avec laquelle l'affaire est conduite. Cette petite série contient une grande richesse et en fonctionnant à rebours, elle accroche vraiment. On entre par le petit bout de la lorgnette dans un monde insoupçonné et c'est drôlement plus efficace que d'autres histoires emberlificotées au point qu'on doute du plan de ses auteurs (voir Justice League Dark, Justice League, Avengers). Plus "character's driven" que "story's driven" donc, mais surtout simplement plus accessible.    

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