mardi 30 janvier 2018

THE OA (Saison 1) (Netflix)


J'ai souvent eu l'occasion, en rédigeant ici des critiques de séries, d'évoquer le choc ressenti en suivant les huit épisodes de la saison 1 de The OA pour devoir, un jour, y consacrer une entrée. J'aurai pu le faire avant mais j'ai découvert cette production lorsque je n'alimentais plus ce blog et j'ai dû, pour la peine, rassembler les notes prises à cette époque pour en tirer l'article que vous allez lire - et qui, je l'espère, vous donnera aussi envie de voir ce show. D'autant plus que, c'est officiel, le scénario de la saison 2 est enfin bouclé et le tournage imminent.

 Roman et Nina Azarova (Nikoleï Nikolaïeff et Zoey Todorovsky)

Fille d'une oligarque russe tracassé par la mafia, Nina Azarova est victime d'un accident de la route à bord d'un autobus scolaire alors qu'elle est enfant. Plongée dans l'eau glacée d'une rivière suite à une sortie de route du car, elle meurt pendant quelques instants et rencontre dans une dimension parallèle Khatun qui lui offre de survivre mais, pour cela, elle sera privée de la vue. Réanimée, la fillette est effectivement aveugle et son père, Roman, l'envoie aux Etats-Unis pour sa sécurité chez une cousine, qui s'occupe d'une agence d'adoption.

Prairie Johnson entourée de ses parents adoptifs, Nancy et Abel
(Zoey Todorovsky, Alice Krige et Scott Wilson)

Nina est receuillie par Nancy et Abel Johnson qui la rebaptise Prairie et l'élèvent avec amour. Elle devient une belle jeune fille mais derrière son allure sage, elle est la proie de prémonitions qui la trouble suffisamment pour que ses parents lui fassent prescrire un traitement. Elle se rappelle aussi de son père biologique qui lui avait promis de la rejoindre en Amérique pour lui faire visiter la Statue de la Liberté, mais elle ignore qu'il est mort entre temps. Frustrée par cette promesse non tenue et l'éducation très religieuse de sa famille adoptive, elle fugue et rejoint "Big Apple" pour découvrir le monument. Elle ignore alors qu'elle ne reviendra pas chez elle avant sept longues années...

Prairie dans le métro de New York (Brit Marling)

Une fois en ville, après s'être rendu sur l'île où se dresse l'édifice de Bartoldi, Prairie gagne sa vie en jouant du violon dans le métro. Sa maîtrise virtuose de l'instrument attire l'attention d'un voyageur particulier, le professeur Hunter "Hap" Percy, qui l'aborde et lui explique qu'il étudie le cas de personnes ayant connu une expérience de mort imminente - comme Prairie/Nina dans son enfance. Il la convainc de la suivre jusque chez lui et elle s'envole dans son avion privé. Une fois à destination, une mauvaise surprise l'attend puisque "Hap" l'enferme au sous-sol dans une cellule de verre, voisinant avec trois autres détenus - Homer, Rachel et Scott. 

Prairie entourée par son groupe d'auditeurs

De nos jours, Prairie est remise à ses parents adoptifs et son histoire fait la "une" de tous médias car son retour après une si longue disparition intrigue mais surtout la jeune femme a recouvré la vue ! Réintégrant le lycée, elle devient un objet de fascination pour ses camarades et les enseignants. Elle fait ainsi la connaissance de Steve Winchell, élève au comportement violent, à qui elle promet d'éviter un séjour en camp de redressement s'il réunit pour elle un groupe de quatre personnes prêtes à partager une expérience unique. Le soir même, Prairie rassemble Steve accompagné de Alfonso "French" Soza, Buck Vu et Brenda Broderick-Allen (dite "BBA", une professeur) dans une maison abandonnée et commence à leur narrer par le détail ce qui lui est arrivée durant son absence.

Prairie et Hunter "Hap" Percy (Brit Marling et Jason Isaacs)

Le récit de Prairie reprend quand les autres prisonniers de "Hap" lui racontent qu'il pratique d'éprouvantes expériences sur eux sans qu'ils en connaissent la raison. Pour les contrôler à chaque fois qu'il doit intervenir sur eux, il les gaze puis les ranime une fois qu'il les a attachés à un table verticale puis coiffer d'un casque. Le casque du cobaye est ensuite rempli d'eau jusqu'à provoquer une noyade et une perte de connaissance, durant laquelle "Hap" enregistre des données. Puis il procède à une réanimation et reconduit son patient dans sa cage. Lorsque c'est au tour de Prairie de subir ce supplice, elle rentre en contact avec Khatun, comme autrefois étant enfant, et elle lui enseigne ainsi, à chaque fois, un mouvement appartenant à une série dont le sens et l'effet deviendront progressivement compréhensibles.  

Prairie et l'agent du FBI, Elias Rahim (Brit Marling et Riz Ahmed)

De nos jours, les Johnson sont harcelés par la presse au sujet de leur fille - une journaliste propose de recueillir son témoignage pour en tirer un livre - et les caméras de télés scrutent toute la journée leur maison. La journée, Prairie s'entretient parfois avec un agent du F.B.I., Elias Rahim, qui souhaite arrêter son ravisseur mais procède avec patience. La nuit, elle réussit à déjouer leur présence et la vigilance de Nancy et Abel pour rejoindre la maison abandonnée où elle poursuit la relation de son histoire : ainsi, à force de morts provoquées et répétées, elle a la surprise de recouvrer la vue mais le cache à "Hap", ne le confiant qu'à Scott, Rachel et Homer. Ce dernier et elle tombent amoureux et répètent les gestes qu'apprend Prairie grâce à Khatun : cette étrange chorégraphie interroge "Hap" qui l'observe sur des écrans de contrôle.

Homer Roberts (Emory Cohen)

 Quatre ans passent ainsi. Prairie se fait désormais appeler OA (contraction phonétique de "Oh-A" ou "Away" comme elle entend Khatun la nommer). "Hap" endort Homer pour l'emmener à Cuba capturer Renata, guitariste exceptionnelle et survivante d'un accident. A son retour, Homer avoue avoir dû coucher avec elle pour la piéger, ce qui brise le coeur de OA et l'union du groupe. Scott trahit OA en révélant à "Hap" qu'elle voit à nouveau, espérant ainsi gagner sa liberté ou échapper à une énième noyade. Mais leur geôlier, contrarié par la situation, lui inflige une nouvelle séance au cours de laquelle il meurt. En attendant de trouver quoi faire du corps, il le remet dans sa cage : OA exécute alors les mouvements appris par Khatun pendant plusieurs heures, seule d'abord puis avec Homer, et un miracle se produit car Scott ressuscite. "Hap" est sidéré. 

"Hap" dans son laboratoire

Trois autres années s'écoulent. Le shérif Stan Markham vient rendre visite à "Hap" et lui confie que l'état de santé de sa femme se dégrade de jour en jour. Pour ne pas éveiller de soupçons chez le policier, "Hap" le fait entrer chez lui pour lui préparer un café. Markham inspecte les pièces et découvre sur les écrans de contrôle les cages dans lesquelles sont retenus les prisonniers de son hôte. "Hap", mis en joue, lui explique qu'il mène des recherches secrètes qui pourraient à terme soigner la femme du shérif et lui offre d'en faire la démonstration. Les deux hommes quittent la maison avec Homer et OA qui se rendent au chevet de Mrs. Markham devant laquelle ils répètent leur éreintante chorégraphie : à nouveau, le miracle se produit et la malade revient à elle. "Hap" subtilise l'arme de service du shérif et les tue, lui et son épouse.  

 (au premier plan) Renata (Paz Vega)

De retour chez lui, il enferme à nouveau Homer mais pas Prairie qu'il conduit sur une route où il l'abandonne : désormais, lui dit-il, il n'a plus besoin d'elle car il a appris les cinq gestes permettant de réveiller les morts et peut poursuivre ses expériences avec ses détenus restants. Après plusieurs jours (semaines ?) d'errance, OA est récupérée par un policier en patrouille.

 OA relâchée

Durant les nuits passées à raconter son aventure, Prairie a enseigné les gestes à Steve, Buck, "French" et "BBA" afin, que le moment venu, ils puissent s'en servir pour éviter une tragédie - sans qu'elle puisse en préciser la nature ou l'endroit. Mais les escapades nocturnes de la jeune femme ont fini par être découvertes par ses parents adoptifs et une violente dispute l'oppose à Nancy, qui l'enferme dans sa chambre. Le groupe, lui, se questionne sur la véracité des faits relatés par Prairie et quand, après avoir réussi à s'échapper de chez elle, elle leur donne un nouveau rendez-vous, Steve, "French" et Buck en profitent pour se glisser dans sa chambre et fouiller ses affaires. 

 Et si toute cette histoire n'était que le délire d'une affabulatrice ?

Ils y découvrent des livres dont les titres et les contenus renvoient à des éléments précis du récit de Prairie et les conduisant à croire qu'elle a tout inventé en s'en inspirant. Déçus, en colère aussi, ils n'iront pas la retrouver à la maison abandonnée et conviennent de ne plus se revoir. "BBA", ignorant tout cela, apprend en revanche que le lycée a décidé de la renvoyer pour sa trop grande proximité avec des élèves - ceux du groupe justement - en dehors des cours, comme s'en sont plaints leurs parents. Elle accepte la sanction qui la motive pour réaliser son projet : partir en Californie grâce à l'héritage qu'elle a reçu.

Le carnage évité

Prairie passe la nuit seule dans la maison abandonnée et finit par s'endormir en attendant les autres. Elle revient à elle, terrifiée, après avoir visiblement eu une nouvelle prémonition et rejoint le lycée. Sur place, "BBA" débarrasse ses affaires tandis que Buck, "French" et Steve se rendent au réfectoire. Un élève armé y entre et commence à tirer sur ses camarades. "BBA" entre dans la pièce et commence alors avec Steve, Buck et "French" à reproduire la chorégraphie. Dérouté, le tireur est maîtrisé par la force mais une de ses balles perdues atteint Prairie à l'extérieur de la cantine. Une ambulance la conduit à l'hôpital et elle perd connaissance en appelant Homer...

Découvrir The OA vous renvoie à ce sentiment qu'on a tous éprouvé en appréhendant une oeuvre d'art - quelle que soit sa nature : film, roman, BD, musique... - sans qu'on trouve immédiatement les mots pour communiquer à son sujet. C'est quelque chose qui vous échappe, vous glisse entre le doigts comme du sable : vous en appréciez la substance, l'effet, mais la traduire vous paraît d'abord impossible. Ce mystère frustrera certains au point de les laisser à quai, mais si vous aimez que les choses ne se donnent pas instantanément à vous, qu'elles fassent leur chemin avant de se révéler, alors The OA est une expérience fantastique.

Lorsque les huit épisodes ont été disponibles sur Netflix, les critiques ont exprimé ce vertige, cette perte de repères en qualifiant le programme d' "étrange", un terme bien pratique, qui signifiait tout et n'importe quoi, mais qui résumait parfaitement l'aspect insaisissable de l'oeuvre créée par Brit Marling et Zal Batmanglij. L'actrice-scénariste et le réalisateur ont noué leur collaboration dans deux longs métrages déjà inclassables, à l'audience confidentielle mais qui ont impressionné ceux qui les ont vu, Sound of my voice (2011) et The East (2013), mais avec cette série, ils ont franchi un palier, plus ambitieux, sans sacrifier leur style.

The OA est d'abord une série sur la narration : quasiment tout le show se déploie autour du récit que livre Prairie Johnson à un groupe d'auditeurs, aussi réduit qu'improbable, et son histoire est si insensée qu'elle prête aussitôt à caution. Le téléspectateur a rapidement des doutes sur sa véracité quand il fait la connaissance de l'héroïne disparue pendant sept années alors qu'elle était une adolescente aveugle et qui est retrouvée jeune femme ayant recouvré la vue. Par quel miracle cela est-il possible, non seulement qu'elle soit vivante mais débarrassée de son handicap ?

En éprouvant le public sur la vérité de ce que raconte Prairie, les auteurs n'en font pas une fille forcément sympathique : elle nous trouble considérablement, mais, via l'interprétation de Brit Marling, sa bizarrerie, sa fébrilité, sa sensibilité nous dérange. On ne sait jamais sur quel pied danser avec elle, tout à tour victime d'événements terribles et potentielle affabulatrice, dont les mésaventures sont si extraordinaires qu'elles invitent naturellement à se questionner à son sujet. Elle évolue également au sein d'une cellule familiale curieuse, visiblement très religieuse, ses parents adoptifs ont ce côté doucereux facilement horripilant et en même temps on a envie d'avoir de la compassion pour eux.

Ainsi en va-t-il de tous les personnages, principaux ou secondaires, qui sont mus par des comportements déstabilisants et invitant à la tolérance : Steve est un garçon violent dont les actes ne méritent guère de mansuétude mais dont l'environnement explique beaucoup de choses par exemple (son père entend plus le dresser que l'élever) ; Brenda est une enseignante aimable de prime abord mais dont la manière d'agir est équivoque, trop maternelle pour être honnête ; "French" se distingue par une méfiance tellement prononcée qu'elle trahit une irrésolution irritante. Seul Buck se distingue dans le groupe d'auditeurs, avec son androgynie qu'il veut assumer dans un environnement hostile.

A ce premier groupe répond celui formé par les détenus de "Hap", dont l'histoire occupe la majorité du récit. Les circonstances de leur rencontre avec Prairie, les traitements que chacun endure, la longévité de leur emprisonnement commun, l'incertitude planant sur leur sort à la fin de la saison, convoquent chez le téléspectateur des émotions puissantes, remuantes, intenses. Le contexte est si parfaitement campé et exploité qu'on ne peut qu'être bouleversé - pas seulement dans le sens d'être ému mais plus généralement perturbé, surpris, incapable d'anticiper - par ce que le récit dit d'eux. Nous disposons de peu d'informations sur leur passé, le seul élément que les quatre partagent est d'avoir survécu à une "near death experience", une expérience de mort imminente, ayant permis à chacun de développer une aptitude étonnante (même si dans le cas de Rachel et Scott, cela reste évasif).

Les recherches de "Hap", archétype du savant fou qui aspire à faire une découverte majeure en infligeant des supplices inhumains à ses cobayes sans intention de faire du mal, offrent au scénario et à la réalisation l'occasion de scènes impressionnantes. Lorsqu'on découvre, avec Prairie, l'installation des expériences, le procédé par lequel les sujets sont tués et ramenés à la vie, et, par contraste, la méthodique application du savant pour collecter des informations, un frisson vous parcourt l'échine. Sans jamais recourir aux ficelles faciles de l'horreur, Batmanglij et Marling convoquent chez le public des sensations d'effroi, de sidération, de malaise prégnantes. 

L'objectif des expériences de "Hap" n'est, qui plus est, pas révélé tout de suite, même s'il piège des sujets au profil identique (des survivants donc). Il reste longtemps nébuleux et les auteurs savent distiller un suspense très efficace. Il est question d'accès à d'autres dimensions, de vie éternelle, de communication avec l'au-delà, d'apprentissage de mouvements permettant de littéralement ressusciter les morts. Les conséquences de ces supplices sont aussi variés qu'imprévisibles : Prairie recouvre la vue, Scott en meurt, Homer accepte d'apprendre la chorégraphie étonnante dont Prairie reçoit l'enseignement de Khatun... Cela génère des pics narratifs comme une série en produit rarement : la résurrection de Scott après des heures de danse (de transe), la guérison de la femme du shérif Markham deviennent des "instant classics", des moments inoubliables dont la dimension extravagante nous laisse hébétés. La mise en scène insiste sur la "physicalité" de ces moments forts, possède un aspect organique, un rapport au corps qui convoquent aussi bien la danse contemporaine (façon Pina Bausch) que la physionomie des interprètes (la longiligne Brit Marling, le trapu Emory Cohen, la virilité tranquille de "Hap", le côté "hobo" hippie de Scott, la fatigue pesante de Rachel face à la vieillesse de parents de Prairie, la nervosité de Steve, etc)

Mais tout cela est donc conditionné à la véracité des dires de Prairie ? Que vaut réellement la parole de cette jeune femme qui réclame d'être appelée "OA", revenue de nulle part après sept années, qui organise des séances nocturnes dans une maison abandonnée devant un parterre d'auditeurs eux-mêmes considérés comme des freaks dans la communauté de la ville où ils vivent ? Quel crédit accorder à cette conteuse qui semble réellement raconter des fables moins pour se confier à des élus improbables que pour les apaiser, les faire voyager, leur faire croire à une situation pire que la leur ? Dans sa dernière partie, la série joue à doucher la crédulité de ce groupe et du téléspectateur en dévoilant des pièces accablantes contre Prairie, indiquant qu'elle a inventé tout cela en s'inspirant de livres et documents, improvisant peut-être ou délivrant un scénario construit pendant toutes ces années loin de chez elle ? 

Deux faits achèvent de tout tournebouler dans l'ultime épisode de la saison quand on se rappelle que Prairie a disparu aveugle et a réapparu voyante (à plus d'un titre puisque, comme elle a prétendu avoir toujours eu des prémonitions, elle a encore un flash la prévenant d'une tragédie potentielle) et qu'on se demande donc en effet comment cela est possible ; puis quand dans une séquence fabuleuse et glaçante, renvoyant à de nombreuses tueries récentes en Amérique, un carnage est sur le point d'être commis dans le lycée fréquentée par Brenda, Buck, Steve et "French" qui, pour l'empêcher, reproduisent, de manière surréaliste, la danse en cinq mouvements enseignée par Khatun et transmise par OA. La réussite de la manoeuvre semble alors prouver que Prairie n'a pas raconté n'importe quoi.

Pour incarner une histoire aussi abracadabrantesque, il faut s'appuyer sur un casting imparable, condition indispensable pour que le téléspectateur suive sans ricaner - toute distance entre le récit et celui qui le regarde tue alors la capacité à l'accepter. Brit Marling est une comédienne atypique, très belle mais avec une présence singulière, apte à troubler sans sombrer dans un jeu maniériste, affecté, et c'est cette combinaison rare qui en fait l'interprète idéale de Batmanglij, leur complicité étant absolue. Elle est remarquablement entourée, en particulier par Emory Cohen (repéré dans le chef d'oeuvre The Place beyond the pines, de David Cianfrance, où il jouait le fils de Bradley Cooper) d'une subtilité exemplaire dans le rôle de Homer, ou encore Jason Isaacs, impeccable en savant tordu, monstre séduisant. On notera aussi la participation dans un second rôle de Riz Ahmed (récompensé d'un Golden Globe pour sa prestation dans The Night of), ou l'incandescent Patrick Gibson qui donne à Steve ce feu étonnant. Il faudrait les citer tous, ceux qui composent cette distribution si bien choisie - et j'espère que la saison 2 permettra de les retrouver, comme Paz Vega (superbe actrice espagnole) ou Hiam Abbass (grande comédienne arabo-israélienne, qui incarne Khatun).

The OA est une expérience marquante : si on s'y abandonne, c'est un puits sans fond dans lequel on plonge avec un mélange d'effroi et d'excitation grisant (si ce n'est pas le cas, en revanche, mieux vaut ne pas insister, plus la série progresse, moins on l'appréciera). Je n'ai tout simplement jamais ressenti ça avant ni depuis, et, alors qu'enfin Brit Marling a annoncé la fin de la rédaction de la saison 2 (et donc son tournage imminent), on éprouve de nouveau ce délicieux frisson relatif aux suites à donner à un chef d'oeuvre : comment vont-ils faire sinon mieux, du moins aussi bien ? Réponse, certainement, à la fin de l'année : patience donc. 

lundi 29 janvier 2018

BATMAN / ELMER FUDD SPECIAL, de Tom King et Lee Weeks


En Août dernier paraissaient plusieurs épisodes spéciaux chez DC Comics, prétextes à des rencontres pour le moins insolites entre les Looney Tunes et les super-héros les plus emblématiques de l'éditeur. L'intérêt de l'initiative avait de quoi interroger, mais aussi appâter quand celle-ci était confié à des mains expertes comme dans le cas de ce Batman / Elmer Fudd Special, écrit par Tom King et dessiné par Lee Weeks (une back-up story de 16 pages, en plus des trente du récit principal était réalisée par King et Byron Vaughns mais je l'ai zappée). Deux talents pouvaient-ils transformer cet exercice de style curieux en réussite artistique ?


Elmer Fudd visite les bas-fonds de Gotham City et s'arrête au Pork'ys Bar. Là se trouve Bugs "the bunny", une fripouille ainsi surnommée pour son goût des carottes et sa dentition proche d'un lapin. Elmer est là pour le tuer.


Bugs le sait et ne cherche même pas à fuir. Sans s'être résigné à son sort, il pense pouvoir le négocier pour rester en vie car si Elmer veut venger Silver St. Cloud, la femme qu'il aimait et qui l'aimait en retour, le malfrat ne l'a pas assassinée.


En effet, Silver aurait quitté Elmer pour les bras du séduisant milliardaire Bruce Wayne, qui s'en serait ensuite débarrassé par jalousie. Elmer croit à cette version des faits et épargne Bugs pour exécuter Wayne.


Il se rend en voiture au manoir Wayne et y pénètre en racontant au majordome Alfred Pennyworth qu'il a besoin de passer un appel téléphonique urgent. Traversant le salon où boivent et devisent les invités d'une réception, Elmer repère vite sa cible et sort de sous son manteau son fusil de chasse. Il tire sur Bruce Wayne devant l'assistance médusée et profite de la confusion qui s'ensuit pour repartir.


En rejoignant à vive allure, au volant de sa voiture, son appartement, Elmer ignore qu'il est suivi par Batman. Mais un grincement sur le parquet du palier l'alerte et il sort vérifier qu'il n'y a personne, tandis que le chevalier noir se tient dans son dos, près à le désarmer.


Les deux hommes s'affrontent jusqu'à ce que Batman ait l'avantage et désarme Elmer qui avoue pourquoi il a tué Wayne. Ensemble, le justicier et le chasseur retournent alors au Porky's Bar.


Les clients de cet établissement mal famé se jettent sur les visiteurs en espérant les éliminer mais sans succès. Bugs est face à eux finalement et avoue avoir menti à Elmer en le dirigeant chez Wayne, ne faisant que suivre les ordres de Silver.


L'intéressée apparaît alors et confirme les dires de "the bunny", expliquant que pour se débarrasser de deux amants dangereux comme Wayne et Elmer, elle a eu l'idée de les pousser à s'affronter. Mais son plan a échoué et elle se retire, priant ses prétendants de ne plus la poursuivre. 


Pour se remettre des émotions fortes de cette folle soirée, Elmer, Bugs et Batman commandent un verre chacun au barman Porky.

Une fois encore, Tom King joue et gagne, avec la complicité de Lee Weeks (les deux partenaires se sont depuis retrouvés sur Batman Annual #2, avec la même réussite - à quand un arc entier de Batman ensemble ?). Le scénariste est le Midas de DC Comics, transformant actuellement en or tout ce qu'il touche.

Pourtant, reconnaissons-le, même si on est fan de l'auteur et de son dessinateur (artiste méconnu, trop rare, sous-exploité), l'affaire n'avait rien d'évident : marier l'univers de Batman avec celui des "Looney Tunes", dans un style réaliste mais sans sombrer dans une histoire trop sombre, relevait de la gageure.

L'intrigue tout d'abord est certes simple mais diablement efficace et respectueuse des deux sources d'origine des protagonistes. Dans les dessins animés de Bugs Bunny, Elmer Fudd est un chasseur obsédé par le rusé lapin qu'il n'a de cesse de traquer pour l'occire d'un coup de fusil : avec son visage porcin, il évoque une créature anthropomorphe pathétique et antipathique pour laquelle on n'éprouve que du mépris face à la malice irrésistible du lagomorphe à longues oreilles qui nargue ses adversaires avec sa fameuse réplique "what's up, doc ?" ("quoi de neuf, docteur ?" en v.f.).

Batman évolue à des lieux de ça, dans un environnement urbain, nocturne, inquiétant : c'est le protecteur de la cité, un justicier inspirant la peur chez ses ennemis, hanté par la mort de ses parents assassinés. C'est un humain se déguisant en chauve-souris pour faire régner l'ordre - là où Elmer Fudd est un cochon habillé en humain, se promenant fusil à la main.

C'est là où le choix de Lee Weeks pour illustrer cette histoire est déterminant : artiste classique, inspiré par les classiques (Joe Kubert en particulier, mais aussi Stan Drake ou John Romita Sr.), il a adapté graphiquement les personnages d'Elmer et Bugs Bunny en les dotant de physionomies réalistes, tout en leur conservant les caractéristiques visuelles qui les identifient dans les dessins animés. Elmer reste petit, trapu, coiffé d'une casquette, vêtu d'un imperméable, équipé d'un fusil à deux canons juxtaposés ; Bugs a les dents de devant exagérément prononcés, de grandes oreilles, un corps élancé, et grignote des carottes : l'effet est sidérant et superbe, l'appropriation magnifique (rehaussé par des couleurs fabuleuses et un encrage, par Weeks lui-même, renversant).

L'épisode compte une trentaine de pages et King développe son récit en deux actes : le premier met en lumière Elmer, comptant venger Silver St. Cloud, une femme fatale dont il était amoureux et qui le lui rendait bien, mais qui semble avoir été assassinée par Bugs - un morceau de carotte baignant dans une flaque de sang l'accable. Puis dans un second temps, après que "the bunny" se soit disculpé, et qu'Elmer ait, toujours apparemment, tué Bruce Wayne, accusé du crime, Batman l'affronte et apprend la raison pour laquelle il a mené cette expédition punitive. Telle une boucle, le scénario se conclut là où il a commencé, au Porky's Bar pour une explication à la fois musclé (une belle bagarre à la clé) et un twist révélé avec une magistrale luminosité.

La fluidité et l'énergie de l'histoire associées à la splendeur des pages dessinées font totalement oublier l'incongruité initiale de l'exercice : on a évolué dans un contexte intermédiaire dont chaque partie a été parfaitement intégrée et adaptée pour l'occasion. Quel brio, quelle intelligence !

La preuve, s'il fallait le rappeler, qu'entre de bonnes mains, nul n'est impossible : procurez-vous, si vous pouvez encore le dénicher (on le trouve sur des sites de vente en ligne pour des prix un peu élevés mais vous ne regretterez pas votre investissement), ce numéro promis à devenir un collector, mérité.    

vendredi 26 janvier 2018

AMAZING SPIDER-MAN #27, de Dan Slott et Stuart Immonen


Avant-dernière étape avant le dénouement de l'arc narratif intitulé The Osborn identity, cet épisode sonne la charge : Dan Slott et Stuart Immonen sont déchaînés, même si, en fin de compte, une impression de grand n'importe quoi finit par l'emporter sur l'addition des efforts de l'équipe créative. Détaillons ça.


De retour en Symkarie auprès de la comtesse Karkov, Norman Osborn, contre l'avis de son chirurgien, subit une nouvelle greffe du visage pour récupérer sa véritable figure - avec un résultat effectivement affreux. Mais désormais, il compte bien ne plus se cacher et donc, n'ayant plus besoin de ce docteur, il l'expose au sérum du Bouffon.


Cependant, Silver Sable, à bord d'un avion-cargo transportant un tas de véhicules spéciaux de Parker Industries, explique à Spider-Man comment et pourquoi elle a fait croire à sa mort ces derniers mois. Sa longue absence a hélas ! abouti à la prise de pouvoir par la comtesse Karkov et Osborn de la Symkarie mais le Tisseur lui a promis son aide pour renverser la situation.  


Nick Fury interroge, à Honk Kong, May Parker et Harry Lyman pour savoir où se trouve Peter ou Spider-Man, avant de devoir les relâcher, faute d'éléments à charge. Il contacte ensuite Mockingbird qui le dirige sur une fausse piste et lui remet sa démission avant de couper la communication. Silver Sable présente à Bobbi Morse et Spider-Man son nouveau Wild Pack.


Leur première cible est la plus grande usine de munitions de Symkarie dont ils évacuent les ouvriers avant de la détruire. Silver Sable convainc les civils d'embarquer dans l'avion-cargo pour s'abriter, juste avant que les bouffons d'Osborn attaquent.


L'intervention des héros interrompt le dîner d'Osborn et de la comtesse Karkov : elle appelle ses citoyens à rester chez eux tandis que son complice va activer son arme finale : comme le découvre Spider-Man, les bouffons ont tous été exposés au sérum de son ennemi...


... Et Osborn compte maintenant lancer un missile qui lâchera le gaz sur les habitants de Symkarie pour en faire son armée !

L'épisode se lit d'une traite, mené tambour battant, et regorge de scènes spectaculaires : ce n'est pas tous les mois qu'on assiste à l'invasion d'un pays par deux super-héros et une bande de mercenaires contre un bataillon de soldats dopés par un sérum.

Dan Slott sait qu'il peut y aller à fond puisqu'il dispose d'un formidable dessinateur avec Stuart Immonen que ce genre de débauche visuelle n'effraie pas : effectivement, les pages s'enchaînent, toujours plus ahurissantes, avec une collection de véhicules conçus par Peter Parker, à bord d'un avion gros porteur, avec un supporting cast musclé - le Wild Pack de Silver Sable. Plus le récit monte en régime, plus les pages gagnent en ampleur jusqu'à quasiment devenir des posters.

C'est donc un régal pour qui ne demande qu'à lire de l'action.

Mais la narration accumule aussi des moments WTF totalement gratuits, qui font basculer l'intrigue dans un barnum tapageur et anime les personnages de manière pour le moins limite. Ainsi l'alliance que scelle Spider-Man avec Silver Sable a de quoi interroger : le justicier s'associe tout de même avec une mercenaire, qui n'hésite pas à tuer ceux qui la dérangent (ils se sont d'ailleurs retrouvés au début de l'arc alors qu'elle tenait dans sa ligne de mire Norman Osborn) ! Mais comme ça n'a pas l'air de le déranger plus que ça, il lui apporte un soutien logistique et matériel considérable en lui prêtant véhicules armés pour elle et son gang d'assassins ! Ben, voyons...

Que dire aussi de Mockingbird ? Slott, avec la subtilité d'un éléphant dans un magasin de porcelaine, suggère que Bobbi Morse et Peter Parker vont devenir amants, comme ça, parce qu'ils sont célibataires et s'éclatent en mission. Pourquoi pas ? Mais on peut quand même tiquer devant le comportement cyclothymique de la jeune femme qui, dans l'épisode précédent, lâchait Spider-Man au beau milieu d'une course-poursuite dès que Nick Fury la rappelait à l'ordre (puisqu'elle agissait sans permission officielle en territoire étranger)... Et qui, là, trahit son chef en envoyant une unité du SHIELD au mauvais endroit, démissionne dans la foulée et prête elle aussi main forte aux mercenaires de Silver Sable : visiblement, Mockingbird est moins dérangée de renverser un gouvernement en Symkarie que de chasser Osborn à Honk Kong...

Passons sur l'énième opération dudit Osborn, qui se balade désormais avec une gueule impossible (mais qui ne coupe pas l'appétit de la comtesse Karkov) : c'est parfaitement grotesque, plus ridicule qu'effrayant. Mais même Warren Ellis (lorsqu'il écrivit le personnage, déjà complètement dérangé, dans Thunderbolts, ou Brian Bendis, de Dark Avengers à Siege) n'avaient pas osé pousser le bouchon aussi loin pour décrire la folie d'Osborn et la traduire physiquement.

Triturer les personnages, négocier des unions improbables, opter pour le coup d'éclat permanent, tout ça, en soi, n'a rien d'extravagant dans le contexte des comics super-héroïques, où rien n'est rationnel. Mais le faire de manière si compressée dans la narration devient aberrant et confine au grand n'importe quoi : on ne peut plus suivre l'histoire quand elle est si surchargé d'effets grand-guignolesques. Cela devient une farce où le lecteur a surtout l'impression qu'on se fiche de lui (ou du moins qu'on teste sa capacité à avaler tout ça).

Que Stuart Immonen dépense son énergie et son talent là-dedans est un gâchis, même s'il est en fait le seul élément qui fait qu'on s'accroche. Pas sûr néanmoins que j'insiste après le prochain numéro... 

jeudi 25 janvier 2018

MARVEL TWO-IN-ONE #2, de Chip Zdarsky et Jim Cheung


Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt : les ventes du premier numéro de cette série ont été décevantes (env. 60 000 exemplaires écoulés). Qu'est-ce que ça signifie ? Soit que la stratégie de Marvel pour préparer avec ce titre le retour d'un mensuel consacré aux Fantastic Four n'a pas convaincu, soit que les fans attendaient autre chose que ce que le premier épisode proposait (plus d'action ?) malgré ses évidentes qualités. Il serait dommage de s'y résigner et j'encourage donc ceux qui me lisent à se procurer ce deuxième numéro pour soutenir sa publication et espérer un retour des FF, mais surtout pour se régaler.


En visite à l'atelier de son ex-fiancée, la sculptrice aveugle Alicia Masters, Ben Grimm lui avoue avoir mentir à Johnny Storm, pour lui remonter le moral, en affirmant que Reed, Sue, Franklin et Valeria Richards étaient toujours vivants. Elle le réconforte à son tour en expliquant qu'il a fait cela avec de bonnes intentions et par fidélité à l'esprit d'aventure qui a toujours animé les Fantastic Four.


Deux jours après, à bord du Fantasticar, la Chose et la Torche Humaine se dirigent vers Monster Island, théâtre de la première aventure du groupe, où Mr Fantastic pourrait avoir caché le Multisect, permettant de se guider das le Multivers et donc de le retrouver. En pénétrant dans une grotte, ils tombent sur une assemblée de monstres sur le point d'élire leur chef entre l'Homme-Taupe et Googam.


Dérangés par ces intrus, les monstres attaquent et Johnny est vite sans défense car son pouvoir défaille à nouveau. Heureusement pour lui, un renfort inattendu se manifeste en la personne de l'Infamous Iron Man !


L'ex-Dr. Doom écarte les créatures de Johnny Storm et est alors désigné comme le nouveau leader de cette population à qui il demande d'écarter l'Homme-Taupe et Googam. Son armure ne détectant aucun appareil conçu par Reed Richards, il sort de la grotte, suivi par Ben Grimm à qui il explique que Mr. Fantastic l'a leurré.


Mais ce n'est pas l'avis de la Chose qui raconte ensuite à la Torche Humaine qu'en 1998, avant la formation des FF, pour ridiculiser Victor Von Doom qui avait remporté un prix face à Reed, les deux amis avaient forcé le labo, pourtant supposé inviolable, de leur adversaire. Ce fut leur première véritable aventure et la justification de la haine que leur vouera ensuite le Dr. Doom.


Johnny et Ben retournent donc à l'université où ce dernier et Reed étudièrent et trouvent dans la vitrine aux trophées une coupe. Dans le socle de celle-ci se trouve le Multisect, caché là par Mr. Fantastic : reste à savoir par où ils vont commencer leur expédition dans le Multivers maintenant qu'ils ont un compas pour y voyager...

J'avançais dans mon introduction que les lecteurs attendaient peut-être une histoire plus riche en action, et il est vrai que Chip Zdarsky a préféré débuter par un épisode mélancolique. Les choses s'animent un peu plus sans renoncer au ton choisi par le scénariste, qui multiplie les clins d'oeil au glorieux passé des Fantastic Four.

Le pari est culotté car il mise sur la nostalgie aussi bien des personnages - en particulier Ben Grimm, qui avoue avoir menti à Johnny Storm pour l'entraîner dans sa quête, et qui se remémore une aventure passée à l'université, antérieure donc à la formation des FF. La tristesse du héros est poignante et magnifiquement rendue à l'image par les détails proches de la gravure du trait de Jim Cheung.

Néanmoins il serait faux de dire qu'il ne se passe rien de mouvementé dans cet épisode qui renvoie le tandem de héros sur le lieu de leur premier fait d'armes, l'Île des Monstres. L'Homme-Taupe et Googam (récemment vu dans la série Monsters Unleashed de Cullen Bunn) font une apparition remarquée, qui donne l'occasion au dessinateur de produire des planches extraordinaires, sur lesquelles il convient de s'arrêter pour en apprécier la richesse picturale. Cheung ne dessine pas vite (il cède sa place à Valerio Schiti au prochain numéro pour revenir au quatrième) mais il en donne pour son argent au lecteur.

Zdarsky nous avait laissé sur l'image de Doom espionnant Grimm et Storm et le désormais Infamous Iron Man resurgit lui aussi à un moment déterminant. Toutefois, il semble éloigné de l'intrigue en croyant à un leurre de Mr. Fantastic motivant les recherches de la Chose et de la Torche Humaine. La dernière page ouvre grande la porte à l'aventure, l'expédition, l'exploration - ces éléments identitaires des FF - car les héros sont désormais en possession d'un outil leur permettant de voyager dans le Multivers sans s'y perdre et peut-être pour retrouver le reste de leur équipe.

On entre donc dans le vif du sujet après un début un chouia laborieux mais à l'ambiance touchante et prometteuse. Pour l'instant, The Fate of the Four ne se présente pas comme un récit d'action, préférant insister sur le poids qui accable ses héros, la possibilité de devoir faire le deuil de leur vie passée. Mais à l'issue de ce chapitre, l'intrigue est relancée et gagne en dynamisme, en espérance. Il reste des éléments à éclaircir (pourquoi les pouvoirs de la Torche faiblissent-ils ainsi ?), mais Zdarsky semble avoir un plan précis de la façon dont il veut développer son idée et préparer le retour de Reed, Sue, Franklin et Valeria Richards.

Pour qu'on le vérifie, il est donc important de se mobiliser autour de Marvel Two-in-One, seule garantie qu'une série Fantastic Four sera relancée. Cette année, on assistera au retour cinématographique des Indestructibles de Brad Bird, qui doivent quasiment tout à la first family de Marvel : il serait regrettable que les modèles originaux demeurent dans les limbes quand leurs héritiers recevront un triomphe attendu.  

mercredi 24 janvier 2018

UNCANNY AVENGERS (VOLUME III) #18-23, de Gerry Duggan, Pepe Larraz et Kevin Libranda


Voici donc les derniers épisodes d'Uncanny Avengers écrits par Gerry Duggan, et les derniers que je lis et critique : c'est une série que j'ai suivi quasiment sans interruption depuis son lancement (à l'exception de la saga Axis et des premiers épisodes de ce troisième Volume, dessinés par Ryan Stegman et Carlos Pacheco). Le titre va vraisemblablement s'arrêter au Printemps prochain (à la fin du crossover No Surrender, publié actuellement hebdomadairement) pour faire place à une refonte de la franchise "Avengers", mais avant cela Jim Zub, Kim Jacinto et Sean Izaakse ont produit des épisodes dont les previews ne m'ont pas convaincu de persister. En avant donc pour ce dernier round disponible dans le recueil Red Skull, regroupant les numéros 18 à 23.
  

Crâne Rouge, toujours en possession des pouvoirs télépathiques de feu Charles Xavier, passe à l'offensive pour détruire l'équipe "Unité" des Uncanny Avengers maintenant que Captain America ne la soutient plus. Il manipule mentalement Quicksilver pour capturer successivement le Dr. Voodoo, Synapse, et la Torche Humaine. Assaillie par un cauchemar récurrent, Rogue se confie à Deadpool et Cable lorsque la Guêpe les appelle à l'aide. Quicksilver attaque le trio et neutralise Cable. Rogue part à sa poursuite en confiant une mission à Deadpool, imperméable à l'emprise psychique de Crâne Rouge à cause de sa folie...


Quicksilver traque Deadpool pendant que Crâne Rouge s'amuse à torturer mentalement les héros capturés dans le manoir des Avengers. Lorsqu'il s'en prend à Cable pourtant, celui-ci préfère effacer son esprit plutôt que d'être le jouet du nazi. Contrarié, ce dernier envoie la Guêpe, la Torche Humaine, Synapse et le Dr. Voodoo dans les rues de New York pour y tuer autant de civils et de héros que possible.
   

Deadpool s'est réfugié dans le sanctuaire de Dr. Strange mais hélas ! ce dernier est absent. Toutefois Wong accepte de l'aider et a appelé en renfort Spider-Man. A eux trois, ils résistent vaillamment aux Uncanny Avengers sous l'emprise de Crâne Rouge. Deadpool réussit à pénétrer dans le manoir des Avengers de manière spectaculaire pour y affronter leur adversaire mais Rogue lui tombe dessus et le passe à tabac.


Heureusement, Deadpool a suivi les ordres de Rogue la dernière fois qu'ils se sont vus et a récupéré le casque de Magnéto dont il la coiffe. Aussitôt, l'emprise mentale de Crâne Rouge cesse de l'atteindre et elle peut le neutraliser. Les autres Uncanny Avengers sont à leur tour libérés et vont porter secours à Deadpool mal en point après la raclée qu'il a reçue tandis que Rogue emmène Crâne Rouge inconscient jusqu'au Fauve...


Hank McCoy extrait la partie télépathique du cerveau de Charles Xavier de Crâne Rouge mais Captain America vient la réclamer, expliquant que cela représente une menace pour la sécurité nationale. Rogue ne l'entend pas ainsi et s'envole avec la Torche Humaine qu'elle charge de brûler le résidu encéphalique. Captain America embarque Crâne Rouge, laissant les Uncanny Avengers fêter leur victoire. Pour s'excuser de l'avoir tabassé et le remercier de son aide, Rogue embrasse Deadpool : l'effet est tel qu'elle libère de l'énergie ionique, ce qui permet à Wonder Man de se re-matérialiser !


Le Fauve retrouve avec joie son ami Simon Williams et tente d'expliquer comment il a pu revenir. Deadpool doit néanmoins lui expliquer qu'il est ruiné car sa fortune d'acteur servait à financer l'équipe. Synapse parvient à réveiller Cable mais il repart voyager dans le temps après l'avoir remercier et lui avoir promise qu'elle est digne d'une grande héroïne avec un destin glorieux. Le Dr. Voodoo salue la Guêpe, la Torche Humaine, Synapse et Rogue pour retourner à la Nouvelle-Orléans où son frère, Jericho Drumm, a été repéré : ses amis proposent de l'aider à le maîtriser. Pas de repos pour les braves !

Laisser l'endroit en bon état, telle semble avoir été la résolution adoptée par Gerry Duggan à l'heure de terminer son run, tout de même conséquent (presque deux ans), sur la série lancée par Rick Remender. Pour cela, évidemment, il fallait boucler le dossier concernant Crâne Rouge dont la menace a plané sur tout le titre depuis son commencement (le tout premier arc l'opposait directement à l'équipe après qu'il se soit fait implanter les pouvoirs télépathiques de feu Charles Xavier, au lendemain de sa mort durant la saga globale Avengers vs. X-Men - ça date !).

En six chapitres survitaminés, l'affrontement tient toutes ses promesses et le scénariste le raconte avec toute la verve dont il a su faire preuve auparavant. On reconnaît tout de même son favoritisme pour Deadpool, dont le rôle est déterminant, et dont il a écrit de nombreux épisodes pour sa série dédiée, mais même si on n'est pas client (comme c'est mon cas) du mercenaire à la grande gueule, son utilisation reste supportable.

Néanmoins, le mariage de la bouffonnerie et de l'action à fond les ballons produit un mélange détonant, déroutant : d'un côté, rien de tout ce qui se passe ne semble si sérieux que c'est supposé l'être et c'est tout de même un peu problématique quand, de l'autre, on voit la puissance psychique dont use Crâne Rouge et la violence que déploie Rogue déploie sous son emprise (elle éventre carrément Deadpool !). C'est la limite du style de Duggan qui veut divertir tout en affichant un goût prononcé pour la brutalité : l'énormité de certains moments (comme lorsque Spider-Man balance Deadpool dans le manoir des Avengers) fait basculer l'histoire dans une quasi-farce, une parodie appuyée, et l'instant d'après, on assiste, médusé, à un déferlement de coups ordonné par un nazi dément et doté de pouvoirs mentaux effrayants. C'est un peu dérangeant...

... D'autant qu'à la fin, tout le monde redevient copain, sans rancune, et que les questions de responsabilité, de regrets, de remords, n'embarrassent pas les héros, continuant à s'auto-vanner (Johnny Storm constatant avec dépit qu'il a fait partie des FF pour échouer chez les Uncanny Avengers ou le Dr. Voodoo déplorant de devoir composer avec l'excentricité de Deadpool). De la même manière, le fameux baiser qu'échange Rogue avec le mercenaire cinglé est totalement artificiel, sans lendemain, et ne sert qu'à ramener Wonder Man, porté disparu depuis... Uncanny Avengers (Volume 1) #14 ! (Il avait donné toute son énergie ionique pour que Scarlet Witch puisse lancer un sort protégeant les mutants des jumeaux Apocalypse et créé la Planète X.)

Heureusement, la série dispose d'artistes plus inspirés, même si on regrette que Pepe Larraz n'ait pu réaliser les dessins de l'intégralité de cet arc. Il est suppléé sur deux épisodes par Kevin Libranda, dont le style est assez similaire au sien, tout en énergie, mais sans avoir la même texture (la faute à un encrage trop fin et des finitions un peu légères). L'espagnol, lui, possède une plus grande maturité et quand il est aux commandes, les scènes s'enchaînent avec un dynamisme ahurissant, les personnages sont plus expressifs, le découpage a un rythme effréné. Bien que Larraz ne soit plus réellement une révélation, on sourira en apprenant que Marvel vient de le nommer comme un de ses Young Guns, tradition qui met en avant des artistes supposés incarner le renouveau graphique de l'éditeur (il est honoré au même titre que Marco Checchetto - pas non plus exactement un nouveau venu - , Javier Garron, Russell Dauterman et Mike Del Mundo).

On quitte donc les Uncanny Avengers avec une pointe de nostalgie, malgré des réserves sur le traitement appliqué par leur scénariste, qui n'a jamais réussi à atteindre le niveau de Remender (ni chercher d'ailleurs à creuser ses thèmes). Cette série qui fut le navire amiral de l'ère "Marvel Now !" est devenu un titre de plus dans une franchise qui a désormais besoin d'être repensée, à l'image de son éditeur en pleine crise éditoriale et à l'image écornée. 

mardi 23 janvier 2018

MOON KNIGHT, VOLUME 2 : DEAD WILL RISE, de Brian Wood et Greg Smallwood


Passer après Warren Ellis, voilà la tâche ingrate qui échut à Brian Wood quand il accepta d'écrire les six épisodes suivant ceux de son célèbre confrère. Pourtant, il s'en tire mieux que bien et ce volume 2, intitulé Dead Will Rise, dessiné par l'excellent Greg Smallwood, réussit à exploiter des éléments du premier tome tout en développant une intrigue au traitement original.


- Blackout. La veille de l'allocution aux Nations-Unies du général Aliman Lor, leader de l'Akima, pays africain où il est soupçonné d'avoir commis des crimes de guerre, un tueur à gages équipé d'une armure perfectionnée tente de l'assassiner au milieu du convoi qui le protège. Moon Knight l'en empêche mais son adversaire provoque alors une panne d'électricité géante pour se replier et remplir sa mission. Le justicier le poursuit et parvient à le maîtriser. En dérobant son téléphone portable, il entre en contact avec le commanditaire du tueur : la propre psychothérapeute de Marc Spector !


- Live. Une prise d'otages à lieu à la Freedom Tower, assiégée par la police et les médias. Malgré cela, Moon Knight, en liaison direct avec le détective Flint sur les lieux, s'introduit dans le building et localise les prisonniers tenus en respect par un forcené portant sur lui une bombe. La charge est, d'après lui, suffisante pour raser tout le quartier. Mais son manque de vigilance l'empêche de remarquer la présence du vigilant qui n'hésite pas pour le neutraliser à lui trancher la main dans laquelle il tenait le détonateur. L'intervention de Moon Knight filmée par les caméras de sécurité et diffusée ensuite à la télé provoque une vive polémique.


- Doctor. Marc Spector décide de confronter sa psychothérapeute pour savoir pourquoi elle a engagé un tueur chargé d'assassiner le général Aliman Lor (cf. #1 : Blackout). Elle accepte à condition de l'hypnotiser pour apprendre l'origine de son trouble de la personnalité. Les voici transportés au sommet de la pyramide Gizeh en Egypte où Spector fut sauvé par le dieu Khonshu qui en fit son agent. Puis ils assistent au massacre commis en Akima par les troupes du général Lor il y a vingt ans, quand la psy perdit sa famille. Evoquant d'autres purges (en Syrie, en Amérique du Sud, en Crimée, au Mexique), elle demande à Moon Knight de l'aider à se venger mais il refuse. Elle invoque alors Khonshu qui juge sa requête justifiée et entreprend de chercher un autre agent. Spector se réveille peu avant que la maison de sa psy explose.


- HQ. Gloria Roza est agent de sécurité au siège des Nations-Unies et elle est choisie par Khonshu pour devenir son nouveau bras armé, sans quoi elle n'a plus que 36 heures à vivre. Il la convainc patiemment de tuer Lor. Mais Spector, qui a survécu à l'explosion de la maison de sa psy l'en empêche in extremis lorsque le dirigeant africain arrive à l'O.N.U.. Il est arrêté par les forces de l'ordre, qui connaissent sa double identité, et le tabassent à l'abri des regards.


- Rendered. Détenu dans un lieu secret et médicamenté pour le mater, Marc Spector est à nouveau contacté par Khonshu à qui il essaie d'expliquer que sa psy le manipule alors que la divinité l'estime en droit de réclamer réparation par des moyens radicaux. Agressé par un autre prisonnier, Spector est conduit à l'infirmerie mais il assomme la nurse et s'échappe en subtilisant son passe-partout. Il découvre, sidéré, qu'il est en vérité à bord d'un avion. N'ayant pas d'autre choix, il saute dans le vide, sans parachute.


- Diaspora. Aliman Lor a été enlevé par des mercenaires payés par la psy et séquestré dans une chambre d'hôtel. Il la reconnaît comme étant Elisa, la fille du gouverneur Adrian Warsame qu'il a renversé en 1968, alors que l'Akima était une colonie danoise. Elle avoue alors son véritable mobile : mettre la main sur l'argent qu'il a dissimulé afin de prendre sa place à la tête du pays après l'avoir exécuté. Marc Spector, indemne grâce à l'intervention de Khonshu, a la confirmation de tout cela grâce à une journaliste qui vérifie le passé de la psy pour lui. Moon Knight la neutralise avant que le détective Flint, prévenu par la journaliste, ne vienne arrêter Elisa Warsame.

La construction de l'arc narratif de Brian Wood est plus sophistiquée qu'elle n'en a l'air puisque le scénariste enchaîne les chapitres lisibles comme autant d'aventure autonome tout en les reliant grâce au personnage pivot de la psychothérapeute Elisa Warsame. Elle était apparue brièvement dans le premier épisode de Warren Ellis et Declan Shalvey, comme une figure déjà équivoque, annonçant avec un curieux sourire à Marc Spector qu'il ne souffrait pas de désordre de la personnalité mais d'une invasion psychique par une entité étrangère - le dieu Khonshu.

Wood en fait l'élément-clé de son dispositif en révélant à la fin de l'épisode Blackout qu'elle a loué les services du tueur à gages que vient d'affronter Moon Knight (ou plutôt Mr. Knight, comme il se fait appeler lorsqu'il intervient habillé en costume trois-pièces blanc - et j'en profite aussi au passage pour corriger une erreur rédigée dans ma critique du précédent volume : ce look n'est pas l'oeuvre de Declan Shalvey mais de Michael Lark, lors de l'épisode 19 de Secret Avengers, déjà écrit par Ellis).

Dès lors va s'engager un duel entre Moon Knight/Marc Spector et sa thérapeute pour connaître la raison qui la pousse à vouloir supprimer le général Aliman Lor, un dictateur africain à la tête d'une nation fictive mais où il a pris le pouvoir par la force il y a plus de vingt ans. Les agendas du justicier et de la femme médecin sont confrontés de manière subtile car Moon Knight représente le dieu de la vengeance et devrait donc aider sa psy. Mais on sait aussi qu'il a décidé d'appliquer la justice en disposant de son libre arbitre, quitte à déplaire à Khonshu. Et cela va faire basculer le récit.

Exactement à mi-parcours, dans l'épisode 8, lors d'une séance d'hypnose où Elisa Warsame tente de rallier Marc Spector à sa cause, le jugement de ce dernier est éprouvé par les souvenirs d'enfance de son interlocutrice. Persistant malgré tout à ne pas tuer pour elle et pensant lui avoir prouvé qu'elle ne l'instrumentaliserait pas, il subit un revers inattendu (pour lui comme pour le lecteur) quand elle en appelle alors à Khonshu lui-même... Qui estime légitime une intervention contre Aliman Lor !

Spector n'est plus l'agent du dieu égyptien et on le suit durant les deux épisodes suivants en train d'empêcher une autre élue de la divinité de commettre l'assassinat du dirigeant politique puis être incarcéré dans une prison dont la nature aboutit là encore à une surprise spectaculaire, impossible à deviner avant la fin de l'épisode 11 (Rendered).

Brian Wood a opéré une bascule narrative formidable, imprévisible, et d'une efficacité redoutable, qui fait vibrer le lecteur pour le héros engagé dans un combat moral, physique mais aussi politique. On aurait pu craindre que cette dernière dimension n'alourdisse le propos maladroitement dans ce qui se veut d'abord une oeuvre de divertissement au format réduit à six chapitres, mais le scénariste introduit cela avec habileté. Citer ainsi le conflit syrien, les coups tordus sud-américains, le putsch en Crimée, la criminalité des cartels mexicains, et les dictatures africaines est audacieux et délicat, mais Wood l'accomplit remarquablement.

Graphiquement, Greg Smallwood n'est pas encore parvenu à la maturité qu'il affichera lors de son retour à la série quand elle sera écrite par Jeff Lemire en 2016-2017. Mais il affiche déjà des dispositions prometteuses et pose les bases visuelles qu'il peaufinera ensuite. La continuité esthétique est assurée par la présence de la coloriste Jordie Bellaire qui conserve à Moon Knight le traitement mis au point avec Declan Shalvey, avec son aspect immaculé quand il est en costume civil.

Smallwood n'emploie la tenue super-héroïque du personnage que dans un épisode, Live : c'est d'ailleurs un tour de force puisque toute l'histoire est vue par le biais de caméras de surveillance dans un gratte-ciel. Ce qui pourrait n'être qu'un procédé un peu artificiel s'avère au bout du compte étonnamment immersif et donne à voir Moon Knight dans sa formation militaire (comme il le fut en tant que Marc Spector), efficace, précis, méticuleux, mais aussi cruel, sanguinaire (il tranche la main du terroriste qu'il doit maîtriser pour qu'il n'active pas le détonateur de sa bombe).

Le découpage de Smallwood est encore sage par rapport à son run avec Lemire, où il s'amusera avec la forme des cases et leur disposition dans la planche entière puis l'enchaînement des pages et leur sens de lecture, mais il joue déjà avec le blanc même de la case, aussi virginal que le costume de Moon Knight, et la multiplication des vignettes de taille réduite pour monter l'action de manière hyper-ciblée (voir l'épisode Blackout pour découvrir comment, ainsi, l'artiste met en scène la panique liée à la panne d'électricité sans recourir à un plan d'ensemble avec une foule de figurants désordonnée). La valeur de chaque plan est un souci constant chez ce dessinateur qui le rapproche d'un autre maniaque dans ce domaine, David Aja (avec lequel il partage aussi, dans ce volume, une simplicité du trait, un encrage un peu gras - auxquels il donnera plus de réalisme et de texture par la suite).

Il était difficile de passer après Ellis et Shalvey, mais Wood et Smallwood ont fait feu de tout bois (jeu de mots facile, mais trop tentant...) et leur bref passage sur le titre est une authentique réussite. Après cela, mieux vaut s'abstenir de lire ce qu'ont commis Cullen Bunn et Ron Ackins et passer directement au relaunch magistral dirigé par Lemire et Smallwood (dont je vous ai déjà parlé il y a quelques mois).