dimanche 29 août 2010

BATMAN-ORSON WELLES HOAX

- Bruce Wayne/Batman
(dessin de David Mazzucchelli) :

- Alfred Pennyworth
(dessin de Kevin Nowlan) :

Joseph Cotten
- Commissaire Jim Gordon
(dessin de Michael Lark) :

Orson Welles
- Selina Kyle/Catwoman
(dessin de David Mazzucchelli) :

Audrey Hepburn

- The Joker
(dessin de Leonard Kirk) :

James Cagney

- Edward Nigma/The Riddler
(dessin de Javier Cuevas d'après Cliff Chiang) :
Basil Rathbone- Harvey "Two-Face" Dent
(dessin de Norman Breyfogle) :
George Raft
- Oswald Cobblepot/The Penguin
(dessin de Chris Samnee) :
Edward G. Robinson

- Poison Ivy
(dessin de Cliff Chiang) :

En imaginant ces castings pour des films de super-héros, je me suis souvenu d'une histoire qui y fait écho. Il s'agit de ce qu'on a appelé The Batman - Orson Welles Hoax.

En 2003, sur le Net, le scénariste Mark Millar (Ultimates, Kick-Ass)posta un article (la version originale est lisible ici : comicbookresources.com/article) qui fit l'effet d'une bombe, mais qui était en vérité un savoureux canular. Il racontait qu'en 1946, soit seulement sept ans après la création de Batman par Bill Finger et Bob Kane, Orson Welles entreprit d'en réaliser une adaptation cinématographique.
Welles avait effectivement prêté sa voix pour la version radiophonique du Shadow, une des références indiscutables du "Dark Knight", et sa carrière de cinéaste et d'acteur abonde de films noirs (dont le plus fameux est Lady of Shangaï, avec Rita Hayworth, sur lequel, d'après Millar, Welles se serait rabattu après avoir abandonné le projet Batman car les studios lui auraient refusé le droit d'incarner Bruce Wayne). Donc, une telle entreprise n'aurait rien eu d'impossible, d'autant que bien des serials furent filmés d'après des pulps fictions, feuilletons et autres comics.
D'après Millar, Welles avait établi la distribution de son film en donnant à George Raft le rôle de Harvey Dent/Two-Face, à James Cagney celui d'E. Nigma/The Riddler, à Basil Rathbone celui du Joker et à Marlene Dietrich celui de Selina Kyle/Catwoman.
Pour Batman, les studios voulaient imposer à Welles Gregory Peck - l'idée de Millar à ce sujet n'a rien de saugrenue puisque Peck et Welles ont joué ensemble dans l'adaptation du Moby Dick d'Herman Melville par John Huston, et que David Mazzucchelli, comme on peut le voir dans les bonus du tpb de Batman : Year One, s'est inspiré de Peck pour dessiner son Bruce Wayne.
Par contre, pas de trace de Robin dans l'histoire - évidemment, il s'agissait d'un film sur Batman, pas sur le "dynamic duo". Mais Millar assurait que Welles avait filmé des essais en costumes avec Peck.
Je me suis amusé à dresser ce casting, en le réaménageant et en le complétant, mais avec des acteurs de l'âge d'or hollywoodien.

samedi 14 août 2010

Critique 160 : SPIDER-MAN/FANTASTIC FOUR - SILVER RAGE, de Jeff Parker et Mike Weringo



Spider-Man and the Fantastic Four: Silver Rage rassemble les quatre épisodes de la mini-série publiée en 2007 par Marvel Comics, écrite par Jeff Parker et dessinée par Mike Wieringo.
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La race extra-terrestre des H'moj a choisi la Terre et ses habitants comme leurs nouvelle résidence et nouveaux hôtes... Jusqu'à ce qu''ils en aient épuisé les ressources et aillent voir ailleurs ! Mais ce projet de colonisation est contrarié par quelques héros, dont Spider-Man prévenu par l'Homme Impossible et les 4 Fantastiques qui décident de s'allier au Tisseur pour l'occasion...
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Silver Rage est une version "light" d'un grand classique Marvel : l'opposition entre le dévoreur de mondes Galactus et les FF. Mais l'option prise par Jeff Parker est de tourner cela en dérision pour nous offrir un divertissement rafraîchissant et entraînant : cela nous est confirmé dès la première scène où on voit apparaître le Surfeur d'Argent... Avant de comprendre qu'il s'agit de l'Homme Impossible. Ce détournement est l'amorce parfaite pour un récit dynamique qui a le bon goût de ne jamais se prendre au sérieux tout en ne se moquant pas du lecteur, grâce à une réalisation soignée.
Jeff Parker nous donne tout ce que l'on peut attendre d'une histoire réunissant Spidey et les FF. Vous voulez voir Ben Grimm râler et cogner dans la foulée ? Pas de problème ! Spider-Man et Johnny Storm se châmailler ? Vous serez servis ! Reed Richards résoudre le problème dans son coin ? C'est ici que ça se passe ! Sue Storm-Richards s'employer à diriger tout ce beau monde avec sagesse mais autorité ? Ne cherchez plus !
On pourrait juste déplorer que cela soit convenu et prévisible, mais ne boudons pas notre plaisir : conçue et réalisée après le dramatique Civil War (dont le succès a quelque peu éclipsé cette production plus modeste et à la tonalité radicalement différente), cette histoire offre une alternative efficace. En outre, s'il séduit le fan, ce récit peut aussi être lu par les profanes sans les égarer car il n'est pas encombré de références à la continuité.
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Les illustrations sont l'oeuvre de Mike Weiringo dont ce fut le dernier travail : mort prématurèment à 44 ans d'une crise cardiaque, on ne peut imaginer meilleur artiste que lui pour cette série. "Ringo" possédait un style unique, mixant avec grâce réalisme des anatomies, des proportions, des expressions, et fantaisie dans le dynamisme du découpage et des poses. Son trait était d'une magnifique élégance, fluide et clair comme le maître de l'animation Wolfgang Reitherman (Le Livre de la Jungle de Disney). L'encrage de Wade Von Grawbadger (avec Andy Lanning sur l'épisode 2), qui collabore avec Stuart Immonen, est celui qui lui convenait à la perfection.
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S'il y a finalement peu à dire sur cette bande dessinée, c'est parce qu'elle se suffit à elle-même : elle n'a pas besoin d'être défendue car elle séduira n'importe qui par son tempo, sa bonne humeur, son charme irrésistible, sa modestie. C'est une lecture rapide et amusante vers laquelle on peut revenir quand on est un peu las des récits plus sombres que Marvel comme DC nous servent abondamment.

mercredi 4 août 2010

Critique 159 : DAREDEVIL par BRIAN MICHAEL BENDIS et ALEX MALEEV (3/3)

Pour cette dernière partie de la rétrospective, nous allons donc examiner les trois derniers arches narratives de Daredevil écrites par Brian Michael Bendis et illustrées par Alex Maleev : L'Âge d'Or (Golden Age), Le Décalogue (Decalogue) et Le Rapport Murdock (The Murdock Papers), qui couvrent les épisodes 66 à 81.
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 DAREDEVIL, VOLUME 11 : L'ÂGE D'OR (Golden Age),
(#66-70),
de Brian Michael Bendis et Alex Maleev.

L'Âge d'Or introduit le personnage d'Alexander Bont, le premier parrain du crime avant le Caïd. En 1946, il tue le Défenseur, un justicier masqué : ce coup d'éclat marque le début de son règne. En 1966, stoppé par Daredevil, il est incarcéré et Wilson Fisk le remplace.
Lorsqu'il apprend par la presse que Matt Murdock est DD, alors qu'il va être libéré, il entreprend de se venger en employant le Gladiateur et en consommant la drogue produite par le Hibou.
Cependant, l'agent fédéral Angela Del Toro, nièce de feu White Tiger, aborde Murdock pour qu'il la forme comme super-héroïne (elle a hérité de la gemme de son oncle). Lorsque Daredevil disparaît, enlevé pour être torturé par Bont et le Gladiateur, elle part à sa recherche comme d'autres acolytes du diable rouge...

Brian Michael Bendis enrichit notablement la mythologie de son héros en remontant loin dans le passé... Mais, ce faisant, va se heurter au problème de la temporalité dans les comics.

Les super-héros ne vivent pas seulement dans un monde dissemblable au nôtre, ils évoluent également dans un temps différent. Dans un de ses romans, Vestiaire de l'enfance, Patrick Modiano, un auteur dont l'oeuvre est une réflexion sur le passé et ses conséquences, décrit le temps passé en exil au Mexique par son héros comme un "présent éternel". On peut considérer de la même manière le temps des comics, un présent éternel, où des évènements écrits par les scénaristes il y a cinquante ans se sont, dans cette réalité alternative, déroulés en fait il y a une semaine.

Bendis est confronté malgré cela à cette même relation au temps : il anime avec Daredevil un héros "né" dans les années 60 mais dont les aventures se sont en fait déroulées sur quelques années tout au plus. En datant l'historique de Bont et donc celle de Murdock, il joue contre cette absurdité des comics où l'on ne sait jamais quand quelque chose se passe vraiment et si on le sait en quelle année nous sommes sensés être aujourd'hui (même si les accessoires peuvent nous renseigner sur ce point - voir par exemple le design des véhicules, des décors, la présence de certains outils comme les téléphones portables).
Si ce qu'établit Bendis dans L'Âge d'Or se passe en temps réél, alors Bont est nonagénaire et Daredevil doit avoir au moins soixante ans !

Cependant, ces épisodes restent accrocheurs : avec le personnage d'Angela Del Toro, Bendis continue d'évoquer les tracas récents de Murdock (la mort du Tigre Blanc, l'enquête du FBI au sujet de sa double vie d'avocat-justicier. Angela Del Toro semble néanmoins avoir été aussi créée pour s'excuser d'avoir tué celui du Tigre Blanc, le seul héros porto-ricain de Marvel, inventé par George Pérez (lequel dessinera le costume de l'héroïne). Dans une série déjà bien fournie en figures féminines remarquables (Elektra, la Veuve Noire, mais aussi Karen Page et Milla Donovan), Angela Del Toro pâtit d'un manque de charisme certain - est-ce pour cela que Bendis ne l'utilisera plus ensuite ?

Mais la véritable attraction de de cet arc réside dans les illustrations d'Alex Maleev, qui exécute un fort bel exercice de style. En effet, L'artiste modifie son dessin en fonction des époques évoquées et s'en acquitte à chaque fois avec maestria : noir et blanc pour les années 40, couleurs tramées et sommaires pour les années 70, et trait infographié pour l'action actuelle.

Matt Hollingsworth parti travailler pour le cinéma à ce moment-là, c'est Dave Stewart qui hérite du poste et commence donc sa collaboration avec Maleev sur ce tour de force. Il gardera la place jusqu'à la fin de l'ère Bendis, imprimant une palette différente mais très convaincante (même si je dois avouer préférer Hollingsworth).
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DAREDEVIL, VOLUME 12 : LE DECALOGUE (Decalogue),
(#71-75),
de Brian Michael Bendis et Alex Maleev.

Voici la relation des événements survenus durant l'année écoulée, juste après que Daredevil ait détrôné Wilson Fisk pour devenir le nouveau Roi de Hell's Kitchen. Cette découverte est décrite via un groupe de parole composé d'habitants du quartier dans une église, chacun raconte un fait marquant dont il a été le témoin et impliquant Daredevil et ces récits sont inspirés par les dix commandements.

Un léger regret étreint le lecteur avec ces épisodes : celui que Brian Michael Bendis n'ait pas développé son idée en explorant tous les commandements, le procédé est tellement bon et bien traité qu'on rêve à ce qu'il en aurait été.

Tout le talent de dialoguiste de Bendis est à l'oeuvre dans ces cinq volets : la performance est remarquable car jamais on ne s'ennuie alors que le héros et les scènes d'action sont relégués au second plan (même si le combat contre le Pitre est mémorable).

En fait, il s'agit d'un exercice sur l'évocation, autrement dit rendre présent à l'esprit, à la mémoire, mais en quelque sorte aussi faire apparaître par des procédés magiques car Daredevil est traité autant comme un homme de chair et de sang que comme une créature mythique, une légende urbaine. Ces témoins parlent-ils vraiment d'un type en costume de diable, d'un diable bienfaiteur, ou fantasment-ils sur un démon protecteur, une silhouette de conte à la fois monstrueuse et rassurante ?

Le procédé même, qui consiste à ne presque plus montrer le héros pour mieux en suggérer l'importance, est très habile et synthétise l'approche de Bendis depuis le début de son run où il s'est employé à "effacer" DD pour mieux (et plus) utiliser Matt Murdock. En portant le personnage à une dimension iconique, il établit une passerelle entre le héros décrit par Frank Miller (vision religieuse) et Ann Nocenti (vision fantastique) : le Daredevil de Bendis est finalement un héros confronté à la morale, à sa propre moralité.

La dualité de Matt Murdock et son alter ego, avocat le jour appliquant la Loi, justicier la nuit faisant régner l'Ordre, est redessinée : les commandements sont en fait le prolongement du cadre légal, les garde-fous du vigilant. Daredevil lutte contre les voleurs, les assassins, et tous ceux qui profanent les canons moraux. Mais en devenant le nouveau Caïd, n'a-t-il pas enfreint ce code moral en réglant les problèmes de manière aussi discutable que ses ennemis ?

Bendis semble répondre que oui et que bientôt sonnera l'heure de la chute, le retour de bâton est imminent (il est intéressant d'ailleurs de savoir que c'est avec l'approbation de son successeur, Ed Brubaker, que Bendis choisira la punition de son héros et que, dans son propre run, Brubaker finira par faire passer Daredevil du "côté obscur de la force", comme s'il était devenu irrécupérable).

Au dessin, Alex Maleev réalise de somptueuses planches toute en sobriété où brille toute sa maestria pour représenter les visages, figurer leurs expressions.
La colorisation de Dave Stewart est superbe, très nuancée.
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DAREDEVIL, VOLUME 13 : LE RAPPORT MURDOCK (The Murdock Papers),
(#76-81),
de Brian Michael Bendis et Alex Maleev.

Le Rapport Murdock (The Murdock Papers) est donc la conclusion d'un run consistant de cinq ans, durant lequel Brian Michael Bendis et Alex Maleev ont fortement marqué de leurs empreintes la série et son héros. Au coeur de leur travail, les thèmes de l'identité et de la moralité : 50 épisodes divisés en deux temps (la révèlation du secret du justicier et ses conséquences), quelques déviations un peu faiblardes... Jusqu'à ce dénouement.

Matt Murdock avait presque réussi à se débarrasser de ses tracas : il a renvoyé Wilson Fisk en prison, a mis la main sur son quartier natal, a gagné le pardon de ses amis super-héros, trouvé l'amour (provisoirement), lassé le FBI... Mais comme le reporter Ben Urich, il n'avait pas envisagé l'alliance entre le Caïd et les autorités fédérales et cela va causer sa perte.
Au centre de cette intrigue, ces fameux Murdock papers : des documents rassemblés des années durant par Fisk prouvant que l'avocat aveugle est bien Daredevil. En échange de ces preuves matérielles, il obtient du directeur du FBI l'amnistie pour ses crimes. S'ensuit une palpitante course-poursuite où tous les coups sont permis pour savoir qui s'emparera du dossier compilé par le Caïd sur son ennemi.

Après trois arcs qui s'écartaient de l'intrigue mise en place au début, Brian Michael Bendis ne rate pas sa sortie en parvenant à créer un suspense riche en action, tout en exposant parfaitement les manigances des protagonistes (avec un plan diabolique du Caïd pour pièger Daredevil et Urich) et leur faculté à anticiper ce qui va se produire. Le scénariste s'offre même une parenthèse onirique dans le dernier épisode, faussement optimiste, qui prononce le point de non retour atteint par son héros et l'inéluctabilité de sa chute.

Cerise sur le gâteau, Bendis a convié pour cet épilogue tous les proches de DD, justifiant leur présence par l'intensité et la complexité de l'enjeu : ils sont venus, ils sont tous là - Foggy Nelson, Ben Ulrich, Elektra, la Veuve Noire, Bullseye, le SHIELD (avec Mariah Hill, qui a succèdé à Nick Fury), Milla Donovan, Angela Del Toro, l'infirmière de nuit, Luke Cage, Iron Fist et le Hibou.

Le run de Bendis s'achève sur une note noire mais prévisible et on mesure mieux à quel point la transition avec la première histoire de Brubaker est organique.

Alex Maleev déçoit un peu : son style a évolué vers plus de classicisme, que l'action se déroule majoritairement en plein jour ne lui permet pas de retrouver ces ambiances entre chien et loup où il excelle. Néanmoins, il réussit de fort belles scènes d'action, très fluides, et la séquence rêvée de la fin, avec notamment la nuit d'amour entre Murdock et Elektra, est superbe.
La colorisation de Dave Stewart s'appuie sur une palette réduite, dont il ne tire pas profit et qui ne valorise pas assez les planches de Maleev.
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Voilà, c'est fini : après 50 épisodes, Bendis tire sa révèrence, préférant comme il l'a expliqué ne pas livrer le combat de trop. Alex Maleev n'a pu assurer l'intégralité des dessins, cédant sa place au troisième acte, mais sa longévité sur le titre et la qualité globale de sa prestation reste d'un niveau remarquable.

Bendis et Maleev ont beaucoup expérimenté avec Daredevil, ce qui en fait naturellement une bande dessinée inégale, parfois passionnante, parfois frustrante. C'est en tout cas une période à part, comme l'ont été celles de Frank Miller, David Mazzucchelli, Ann Nocenti et John Romita Jr.
Ed Brubaker et Michael Lark ont proposé une version plus classique, très efficace, avec un dénouement encore plus radical. Mais cela a fait l'objet d'autres articles...

Critiques 158 : REVUES VF AOÛT 2010

MARVEL HEROES EXTRA 3 :
- Incredible Hulk 601-605 : Banner et fils.
Séduit par son Dark Reign : La liste - Hulk, j'ai voulu en lire davantage sur Greg Pak avec ce numéro hors série de Marvel Heroes compilant une saga complète en cinq volets sous le titre Banner et fils.
On y retrouve donc Bruce Banner, désormais incapable de se transformer en géant vert, et son fils alien, Skaar, qui ne désire qu'une chose : faire la peau de Hulk qu'il estime responsable de la mort de sa mère, la princesse Caiera. Celle-ci a péri sur la planète où le colosse de jade fut banni par les Illuminati (Red Richards, Charles Xavier, Iron Man, Dr Strange, Flêche Noire - mais pas Namor, opposé à cette sanction) et où il était devenu gladiateur puis roi.
A son retour sur terre, en compagnie de guerriers extra-terrestres rencontrés dans les arènes, Hulk a voulu se venger, mais sans succès (le crossover World War Hulk, déjà écrit par Pak et dessiné par John Romita Jr). Puis sa rencontre contre Rulk l'a privé de ses pouvoirs.
Banner a toutefois la certitude que son état n'est que provisoire et il entreprend de former Skaar au combat - dans l'espoir qu'il le tue et donc le délivre quand Hulk reviendra ? Ou pour en faire un vrai héros et non un barbare comme son double ?
Si cette histoire déçoit par rapport à Dark Reign : la liste, c'est d'abord parce qu'elle explore peu la relation entre Banner et Skaar : on a d'abord droit à une succession de combats spectaculaires mais répétitifs se concluant de manière frustrante.
Pour qui n'est pas fan à la base de Hulk, comme c'est mon cas, l'espoir de lire une production appréhendant le personnage par un biais original est de courte durée : Skaar remplace le colosse de jade dans le rôle de la brute infligeant une correction à tous ses adversaires, même s'il s'en acquitte avec plus de résignation.
Le passage le plus intéressant est celui où le rejeton de Banner rencontre celui de Wolverine, le sauvage et vicieux Daken, le seul à lui rendre la monnaie de sa pièce. Mais là encore, Pak donne le sentiment d'expédier une situation intéressante (l'offre faîte à Skaar de rejoindre les Vengeurs Noirs d'Osborn, mais comme complice de Daken).
Cela finit dans un grand n'importe quoi en compagnie des Fantastic Four, de l'Homme-Taupe (et de ses monstres) et du rival de celui-ci, Tyrannus (en bonne place dans le classement des méchants les plus grotesques de Marvel). La scène finale est intrigante à souhait mais arrive trop tard : j'ignore à quand (et même si) la suite sera publiée, mais je ne suis pas sûr de la lire de toute manière (alors que l'arrivée prochaine sur la série Hulk du tandem Jeff Parker-Gabriel Hardmann est bien plus alléchante...).
Graphiqument, Ariel Olivetti, spécialiste des illustrations digitales, livre des planches curieuses, mélange de dessins à l'ordinateur en couleur directe et d'incrustations photos : même si je ne suis pas client de cette technique, cela se laisse regarder.
A partir du 3ème épisode, Guiseppe Camuncoli intervient et, dans un registre totalement différent, produit des pages bien plus vivantes, nerveuses et personnelles.
Au dernier chapitre, Paul Pelletier joue les intérimaires de luxe et l'on regrette qu'il n'ait pas signé toute la saga tant son trait puissant, entre Alan Davis et Mark Bagley, convient à laa perfection à ce genre de personnage.
Bilan (en forme de morale) : parfois, mieux vaut se contenter d'une éphémére bonne surprise que chercher à en découvrir davantage.
MARVEL HEROES 34 :
- Thor 604 : Fatal Promethée (1).
J. Michael Straczynski parti chez DC, le titre est désormais mené par Kieron Gillen, un nouveau scénariste, et Billy Tan, en provenance des Nouveaux Vengeurs : ce changement d'équipe ne signifie pas pourtant une vraie nouvelle direction mais plutôt la suite et fin de l'intrigue mise en place par JMS.
Loki a convaincu Balder, désormais souverain des Asgardiens, de s'installer en Latvérie, le territoire du Dr Fatalis. Mais celui-ci a trahi la Cabale de Norman Osborn et le dieu du mensonge pour percer les secrets des immortels nordiques. Le résultat de ses expériences : de terrifiants monstres, mi-hommes, mi-machines. Témoin de cette abomination, l'humain Bill l'a payé de sa vie et Kelda, qui s'était épris de lui, réclame vengeance, bientôt suivi du demi-frère de Thor et de ses troupes.
Mais, et Thor justement, où est-il ? Pas très loin, préparant lui aussi son affrontement avec Fatalis...
JMS avait écrit Thor comme une série contemplative traversée par des séquences d'action spectaculaires, magnifiée par les dessins d'Olivier Coipel (et de Marko Djurdjevic en fill-in). Gillen a visiblement reçu comme consigne de ramener le titre vers la baston et les grands effets sans âme - la dernière (splash) page ne laisse guère de doute sur la suite : Fatalis va encore s'en prendre une après avoir méchamment transformé quelques Asgardiens.
Mais de quel Fatalis parle Gillen ? Le savant surpuissant de Millar ? Ou le fantôche de Bendis ? Décidemment, le méchant emblématique des FF semble avoir autant de visages que d'auteurs et il est regrettable que les éditeurs des diverses séries Marvel ne se soient pas mis d'accord : aujourd'hui, le tyran de Latvérie n'est guère plus que le jouet (rebelle) d'un Osborn ou le punching-ball de Thor. Seul Millar, malgré ses options controversées, avait rendu le Docteur à nouveau menaçant et charismatique.
Pour les dessins, Billy Tan rend une copie plutôt honorable même s'il hérite d'un job ingrat après les épisodes de Coipel et Djurdjevic. Il est néanmoins plus à son avantage ici que dans Dark Reign : La Liste - Daredevil... Mais ce n'est pas bien difficile.
En tout cas, il est plus convaincant dans sa partie que Gillen qui n'avance pas grand'chose pour son arrivée.
Toutefois, tout cela ne doit tromper personne : Tan ne restera pas (il sera remplacé par Doug Braithwaite) et Gillen est sous intérim en attendant Matt Fraction (aïe !) - qui fera équipe avec Pasqual Ferry (à partir du #611 - donc, on a le temps, vu le rythme auquel est traduit la série).
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- Les Puissants Vengeurs 32 : Puissants/Noirs (1).
Le deuxième titre "Avengers", piloté par Dan Slott (ouille !), ne m'a jamais convaincu depuis son lancement (Bendis ne s'était pas montré très inspiré en la lançant, et pourtant dans la foulée de Civil War, le potentiel d'une série pareille était prometteur). Depuis que Slott l'a remplacé aux manettes, il a non seulement profondèment chamboulé le casting mais également changé le ton (plus versé dans l'aventure et l'humour - encore faut-il être sensible au style prétendument ironique de l'auteur), sensé renouer avec la veine "old school".
Pour ne rien arranger, il a été flanqué de dessinateurs calamiteux comme Koi Pham, Sean Chean ou Harvey Talibao (Bendis avait pour partenaires Frank Cho, Mark Bagley, Alex Maleev, John Romita Jr : c'était quand même un cran au-dessus).
Aujourd'hui, ce story-arc en deux parties (fin le mois prochain) va opposer les Puissants Vengeurs (ou plutôt comme les appelle Vif-Argent, les "losers de Hank Pym") aux Vengeurs Noirs d'Osborn, qu'ils ont évité jusque-là en agissant partout dans le monde et pas seulement aux Etats-Unis.
Pour les avertir d'une menace, ils disposent soit de Jocaste, soit d'apparitions de la Sorcière Rouge - en fait Loki, ce que sait Hank Pym mais qu'il n'a pas dévoilé à Pietro Maximoff (pourquoi ? Je l'ignore. Sans doute un plan secret de Pym...). Ici, c'est l'homme absorbant, qui est sur le point de s'évader du complexe Pegasus, qui va réunir les Puissants Vengeurs et les Vengeurs Noirs. Sauf que Loki a donné à Crusher Creel l'accès à une arme terrible...
Pendant qu'Osborn pique son énième crise et que Pym agit aux quatre coins du globe, Slott nous fait lambiner avant dans les ultimes pages de révèler la raison qui va rassembler les deux formations contre un ennemi commun. Le personnage le plus important, mais traité d'une manière vu et revu, est Loki qui manipule Osborn comme un gosse.
Ceci plus une réplique sarcastique (Osborn : - Alors tu tabasses toujours les femmes ? - Pym : - Tu les balances toujours des ponts ?) et c'est tout ce que Slott est capable de faire avec des personnages sans consistance (alors que ce groupe composé de seconds couteaux pourrait être bien mieux exploité, avec ses actions à l'étranger ou ce qu'il cache à Vif-Argent) et un vague scénario dont l'argument n'occupe que les 6 dernières planches (dont une double). C'est vraiment pas fameux - et c'est à ce type-là qu'on confie aussi Spider-Man...
Koi Pham ne s'est pas beaucoup amélioré depuis les premières fois où je l'ai vu sur la série. Mais l'apport d'un encreur (même très léger) comme Craig Yeung rend son dessin un peu plus acceptable... Par moments.
Lorsqu'il se concentre sur son point fort, les expressions, Pham est capable de choses intéressantes. Mais dès qu'il voit plus grand, son découpage est d'une maladresse indigne et la composition de ses vignettes est hasardeuse. Qui plus est, il ne sait pas dessiner la géante Stature qu'il évite par tous les moyens de montrer en entier car sinon les autres personnages seraient tronqués (pour les mêmes problèmes de composition de l'image, de profondeur de champ). Les plans d'ensemble sont vaguement si décorés et détaillés que c'est difficile de ne pas ricaner.
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- Hulk 17 : Code rouge (4).
Question : faut-il commenter ce navet, aussi mal écrit que dessiné ?
Réponse : non.
Même au 36ème degré, la production de Jeph Loeb reste d'une abyssale bêtise, "agrémentée" de dessins "hallucinants" de Ian Churchill. Non, mais sérieusement, c'est quoi ce truc ? Et en plus ça cartonne aux States ? Incredible !
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- Les Vengeurs : L'initiative 30 - Cauchemar ambulant.
Au moins le titre ne trompe personne, c'est effectivement un cauchemar de 22 pages, rédigé n'importe comment, qui raconte une connerie sidérale, et qui est affreusement illustré. Les coupables : Christos Gage et Jorge Molina. Notez leurs noms, vous vous en souviendrez pour les éviter.
Bilan : terrible. Accablant. Voilà ce qui se passe quand on veut savoir ce qu'est devenu une série (Thor) qu'on a adorée. Il ne me reste plus qu'à revendre ça en jurant aux acheteurs intéressés que si, si, ça vaut le coup...

MARVEL ICONS 64 :

- Les Nouveaux Vengeurs 58 & 59 : Panne sèche (4 & 5).
Comme le mois dernier, la revue nous offre une double ration de Stuart Immonen, avec cette fois deux épisodes des New Avengers, qui viennent confirmer l'énorme bonus que représente l'artiste canadien sur la série depuis trois mois. Car c'est un véritable festival que nous offrent le dessinateur et son scénariste, Brian Michael Bendis.

Précédemment, Luke Cage acceptait, bien mal en point (souffrant d'un malaise cardiaque provoqué par le draineur de pouvoirs de Stark réparé par le Dr Jonas Harrow), de se livrer à Norman Osborn, pour permettre à ses acolytes de fuir.
Nos héros élaborent un plan simple mais spectaculaire et risqué pour à la fois mettre à mal les forces d'Osborn et récupérer Cage. Pour cela, d'autres justiciers viennent leur prêter main-forte, formant un super-gang : la famille des amis de l'ex-Power Man.
Attention, ça va dépoter !

L'initiative de Panini de publier ces deux épisodes le même mois est doublement bienvenue car, d'une part, elle permet de savourer deux chapitres réalisés par le tandem Bendis-Immonen particulièrement en verve, mais aussi, d'autre part, parce que cette partie de l'arc en cours (et qui s'achèvera au n° 60, en Septembre) se lit comme une sorte de "Giant-Size issue", s'appréciant pleinement d'un trait.
A ceux qui reprochent à Bendis de ne pas écrire des scénarios avec suffisamment d'action (reproche au demeurant infondé), ces deux épisodes donnent une formidable réponse, avec des affrontements entre New et Dark Avengers puis un double raid sur le Camp Hammond de l'Initiative et sur l'héliporteur du HAMMER particulièrement efficaces.
Sans Wolverine (absent de cet arc), l'équipe des Nouveaux Vengeurs a gagné un bel équilibre, bâti sur des binômes (Luke Cage-Jessica Jones, Ronin-Oiseau Moqueur, Spider-Man-Spider-Woman, Ms Marvel-Captain America).
La présence, en revanche de nombreuses guest-stars dans le n°59, est justifiée par l'envergure de la riposte imaginée par les héros et procure à l'auteur comme aux lecteurs l'occasion de voir la "famille" de Luke Cage, issue majoritairement des rangs des Défenseurs (Dr Strange, Hellcat, Valkyrie, Iron Fist, la Chose, Daredevil). Il est jubilatoire d'assister à cette assemblée constituée de personnages aussi variées, même si c'est ponctuel : ils représentent tous les résistants déclarés du "Dark Reign", mais soudés moins pour une cause, une idée, que pour l'homme qui la symbolise.
Et puis, outre cela, comment résister à un dialogue comme : "Ils nous voient ? - Non. On est en mode camouflage. - Je me sens nu. - C'est à cause du justaucorps intégral."

Graphiquement, donc, Stuart Immonen prouve une nouvelle fois sa maestria, aussi à l'aise dans les scènes d'exposition que dans l'action la plus débridée, alternant les cadres, la valeur des plans, tout en soignant les expressions, les poses.
Bien que son trait soit plus anguleux, l'énergie qui s'en dégage évoque celle de John Byrne qui possédait cette aisance pour dynamiser un récit et en optimiser toutes les facettes. Magistral !

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- Iron Man 18 : Dans la ligne de mire (11).
Vu ce qui a précédé et ce qui suit, j'ai décidé de ne pas commenter ce nouvel épisode (que j'ai lu en cinq minutes chrono et aussitôt oublié : tout est donc dit).

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- Fantastic Four 570 : Une solution pour tout (1).
La série accueille de nouveaux auteurs, après le run contrasté de Mark Millar et Bryan Hitch. Jonathan Hickman (par ailleurs déjà scénariste des Secret Warriors) et Dale Eaglesham (transfuge de DC, après notamment un long et formidable passage sur la JSA) vont à leur tour tenter de redonner tout son lustre au titre.

Ce premier chapitre est prometteur et frustrant à la fois : la vedette est clairement Red Richards, qui s'emploie (comme à l'époque de Civil War) de trouver un moyen de pacifier le monde. Il a ainsi élaboré une machine lui permettant de rencontrer ses doubles provenant de terres parallèles (non, ce n'est pas une série DC...) dont les connaissances serviront ce projet ambitieux.
La question qui semble amener à être exploré dans les futurs épisodes est de savoir si l'intelligence de Mr Fantastic suffit à changer le monde et, sinon, s'il est prêt à profiter du savoir de ses doubles (dont certains détiennent des répliques du Gant de L'Infini) pour y parvenir.
L'affaire devient alléchante lorsqu'on sait qu'il cache tout cela aux autres Fantastiques, en particulier à sa femme (là encore, Civil War nous a appris que les cachotteries de Red peuvent lui valoir la défiance de Jane).

Hickman pose donc des bases accrocheuses, dans une veine très différentes de celle de Millar. Il va falloir attendre un peu pour savoir si cela tient toutes ses promesses.
Eaglesham, en revanche, ne déçoit pas et livre des planches bluffantes, grouillantes de détails, avec le même souci des expressions qu'on lui a connu sur la JSA. Cependant, sa technique a évolué : il s'encre lui-même et le coloriste Paul Mounts exécute les finitions. Le résultat est parfois déroutant, la couleur dominant parfois le trait noir des contours (un genre d'effets dont je ne suis guère friand).
Mais le style d'Eaglesham reste un régal avec son aspect "old school", même si cela signifie donner des muscles et une barbe de trois jours à Red Richards, lui donnant un air étonnant d'aventurier par rapport à son allure traditionnel de savant svelte.

Bilan : un numéro... Comment dire ?... Assez extatique !

DARK REIGN HORS SERIE 2 : LA LISTE (2/2).

- Inclus : X-Men : Mort aux Atlantes ! + Daredevil : Main dans la main + Hulk : Le retour ? + Spider-Man : Le dernier nom.
Trois mois après le précédent numéro, ce hors-série de la revue Dark Reign propose donc la suite et fin des récits sous-titrés La liste. Après les épisodes concernant les Nouveaux Vengeurs (ou plutôt Clint Barton), les Secret Warriors (ou plutôt Nick Fury), le Punisher et Wolverine, il s'agit ici des X-Men (ou plutôt Namor), Daredevil, Hulk (ou plutôt Bruce Banner et son fils, nuance), et Spider-Man.
Globalement, j'ai trouvé ce recueil plus réussi que le précédent mais sans que les histoires soient renversantes : ce projet au départ excitant aboutit à une déception, malgré des équipes créatives prometteuses. Il y avait indéniablement mieux à faire avec cette liste...
- Cela commence bien avec le récit consacré à Namor : ayant quitté la Cabale de Norman Osborn, il demande, à contrecoeur, l'aide des X-Men (parmi lesquels se trouve son ex-maîtresse Emma Frost, également traître à la cause d'Osborn) lorsque les Atlantes sont massacrés par la monstrueuse créature qu'est devenue Marina (décidèment, les anciens membres d'Alpha Flight ne sont pas gâtés...).
Matt Fraction ne fait pas d'étincelles mais au moins réussit-il à restituer le caractère ombrageux et noble à la fois du Submariner tout en faisant la part belle à l'action. In fine, l'alliance entre Namor et les mutants est désormais effective.
Mais le véritable atout de ce one-shot est la présence du grand Alan Davis aux dessins : superbement encré par Mark Farmer (son meilleur partenaire à ce poste), il livre des planches explosives, au découpage impeccable. Une vraie leçon !

- Les choses se gâtent avec le segment dédié à Daredevil : tout d'abord, les lecteurs de l'homme sans peur en vf n'ont pas intérêt à le lire avant d'avoir découvert le dénouement du (magistral) run d'Ed Brubaker car ils seront spoilés, et ensuite parce qu'après Brubaker et Michael Lark, le duo Andy Diggle-Billy Tan opère nettement un cran en dessous.
Osborn envoie Bullseye éliminer DD, la bataille tourne court mais aboutit à un massacre... Massacre survolé (et pas seulement par le vaisseau véhiculant le Tireur) par le scénariste qui s'est davantage servi de cet épisode comme un prologue à son run que pour vraiment traiter son sujet. La relation Osborn-Daredevil n'est pas présentée de manière très concluante : davantage qu'un véritable ennemi, le justicier aveugle apparaît plus comme un rival, et encore assez éloigné. On a du mal à comprendre en quoi il est si urgent de se débarrasser de DD et de régner sur Hell's Kitchen pour le nouveau super-flic de l'Amérique.
Graphiquement, Tan n'est pas à son avantage alors que j'avais plutôt aimé la fin de son passage sur New Avengers : c'est très faible, qu'il s'agisse de traduire l'ambiance urbaine et nocturne ou de rythmer les scènes d'action.

- Puis c'est au tour de Hulk : la situation de départ est intéressante - Banner ne peut plus se transformer et il est accompagné de son fils extra-terrestre, lequel ne souhaite qu'une chose : faire la peau de Hulk !
Osborn, conscient de la dangerosité de l'adversaire, de son imprevisibilité, ne veut pas risquer la peau d'un agent trop précieux comme Arès ou Sentry et envoie Moonstone/Ms Marvel avec Victoria Hand.
Greg Pak détourne l'exercice de façon ingénieuse : plutôt qu'un combat physique, nous assistons à un combat psychologique, entre le génie de Banner, le vice de Moonstone et le désir de vengeance du fils de Hulk. Le dénouement est ironique à souhait.
Ben Oliver illustre ça avec ses qualités incontestables(un soin notable de la composition des images, des expressions) et ses défauts irritants (le recours abusif à des contre-jours et surtout un encrage indigne, sans parler de la colorisation affreuse de Veronica Gandini).

- Enfin, la liste d'Osborn n'aurait pas lieu d'être sans compter Spider-Man. Dan Slott écrit et Adam Kubert dessine ce piège tendu par le Tisseur à Iron Patriot pour révèler au public le côté obscur de ce dernier.
La ruse imaginée est plutôt grossière (la diffusion d'une vidéo de Norman torturant un cobaye humain, bien facilement récupérée par Spidey) mais donne l'occasion d'un face-à-face musclé dans le ciel de New York entre les deux adversaires. Le problème de ce récit est, comme celui avec Daredevil, qu'il est publié bien trop tôt en France puisqu'il préfigure la fin du Dark Reign.
Mais, enfin, bon, c'est plaisamment mené par Slott, plutôt inspiré, et très bien illustré par Kubert Jr (impeccablement encré par Mark Moralès et sobrement mis en couleurs, pour une fois, par Dean White).
Bilan : l'idée était accrocheuse, la réalisation en deçà des espérances. L'expérience reste dispensable. Surtout la publication est prématurée. Dommage.

dimanche 1 août 2010

Critique 157 : TAMARA DREWE, de Posy Simmonds



Tamara Drewe est l'oeuvre de la scénariste et dessinatrice Posy Simmonds, et a d'abord été publié sous la forme d'un comic-strip quotidien dans le journal anglais The Guardian, avant d'être édité comme roman graphique en 2008. Cette bande dessinée a fait l'objet d'une adaptation cinématographique en 2010, réalisée par Stephen Frears, avec Gemma Arterton dans le rôle-titre.
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Tamara Drewe s'inspire très librement d'un roman anglais du XIXe siècle, Loin de la foule déchaînée de Thomas Hardy. En voici le résumé : Au centre de l'intrigue est la jeune Bathsheba Everdeene (en vf, Bethsabée - l'Ancien Testament n'est pas loin...). Héritière de la prospère ferme de son oncle, Bathsheba est à la tête d'une bande d'ouvriers agricoles acceptant mal d'être dirigée par une femme. Mais en femme moderne, elle entend bien s'assumer seule et si elle doit se marier, elle le fera avec un homme qu'elle aime. La demoiselle est courtisée par trois hommes : le berger, fidèle, tendre et discret, Gabriel Oake ; son voisin, un vieux garçon, Mr Boldwood ; et le séduisant et séducteur Sergent Troy. Successivement, elle va éconduire Gabriel, charmer Mr Boldwood qui va alors la harceler, et céder au Sergent Troy...

Tamara Drewe, elle aussi, va faire tourner les têtes : celles du jardinier Andy, qui l'aime d'un amour sincère et dont elle a acquis la maison de ses parents ; de Nicolas Hardiman, un romancier marié mais infidèle ; et de Ben, l'ex-batteur d'un groupe de rock obsédé par son ex. La présence de la jeune femme dans ce décor champêtre, au centre duquel se situe la propriété des Hardiman, une retraite pour écrivains, va provoquer une série de situations d'abord comiques puis dramatiques, commentées alternativement par Beth (la femme de Nicolas), Glen Larson (un des pensionnaires des Hardiman), et de deux adolescentes, Casey et Jody.
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Révèlée par son excellente adaptation d'Emma Bovary de Gustave Flaubert, devenue sous sa plume Gemma Bovery, Posy Simmonds se pose comme une disciple inspiré du Will Eisner de Dropsie Avenue ou La Valse des Alliances : on retrouve chez cette britannique la même virtuosité de l'art séquentiel, sans qu'elle ne se contente de copier le maître américain. En effet, chez elle, le texte est aussi important que le dessin, et même davantage : de larges parties écrites se partagent la planche avec parfois des illustrations, le plus souvent des vignettes accompagnées ou non de phylactères.

Graphiquement, Posy Simmonds a un trait plus tendre que celui d'Eisner (expert pour croquer des trognes à l'expressivité volontiers outrancière) : le dessin final est proche de l'esquisse poussée, réalisée au crayon, et mis en couleurs également au crayon. Le résultat est remarquablement suggestif, d'une fausse tendresse correspond parfaitement à l'écriture. Néanmoins si elle sait se faire ironique, voire sarcastique, Posy Simmonds se distingue finalement par sa bienveillance envers son (ses) héroïnes - réservant son mordant pour les personnages masculins.
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L'auteur qu'on a adoré avec Gemma Bovery ne décevra pas ses fans avec Tamara Drewe : elle poursuit son étude sociologique amusée sur la petite bourgeoisie, dans un registre voisin d'un cinéaste comme Claude Chabrol.
En examinant à la loupe ce phalanstère rural d'écrivains libidineux et envieux les uns des autres, elle s'en donne à coeur joie et le lecteur se régale de cette galerie de personnages que la proximité avec Tamara Drewe révèle sous un jour peu flatteur : de la jalousie de Beth à la concupiscence de Glen en passant par les délires de Jody, la frustration de Ben ou l'attitude volage de Nicolas, chacun en prend pour son grade.
Pour contrebalancer cela, des personnages comme Andy ou Casey font preuve d'un recul, voire d'une sagesse bonhomme, qui ne rend que plus croustillants les tourments des autres.
Tamara, elle-même, reste finalement assez énigmatique : est-elle une vraie tentatrice, consciente des ravages qu'elle créé, revenue pour semer le trouble ? Ou est-ce une ingénue terriblement attirante mais innocente, dépassée par ce qui lui arrive ? Posy Simmonds ménage sa créature et joue avec la perception qu'on peut en avoir, la décrivant tantôt comme victime, tantôt consciente de ce qu'elle suscite.
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Parce que le récit évoque la fable, Posy Simmonds ressemble finalement à une douce moraliste : elle scrute cet échantillon de la société avec détachement mais sans condescendance, avec finesse mais sans pitié. Tout son génie culmine dans l'observation et la liberté qu'elle accorde au lecteur de juger, sans jamais lui imposer un avis sur les acteurs de cette comédie dramatique jubilatoire.
Sa narration est brillante sans être tape-à-l'oeil, d'une subtilité exemplaire, d'une réelle qualité littéraire - à la mesure des classiques auxquels elle choisit de se frotter, ce n'est pas rien. et son dessin est à la fois efficace et raffiné, au diapason du soin avec lequel elle se sert chez les autres pour produire une oeuvre à la fois référencée et très personnelle.
Ainsi le livre se dévore-t-il car il est conduit avec une science du rythme simple mais affûté : elle alterne des planches avec peu de texte qui accélèrent la lecture avec d'autres plus fournies qui servent à souligner les moments forts de l'histoire.
L'auteur partage le même souci du détail qu'un de ses personnages, une jeune femme écrivain à qui elle fait dire : « Je voudrais que tous les détails soient absolument exacts pour la scène campagnarde que j'écris ».
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Ce n'est donc pas un hasard si le talent de Posy Simmonds est salué par une presse unanime et même par des romanciers de premier plan, comme Tom Wolfe. Tamara Drewe est donc l'autre grand "graphic novel" de 2010, après Asterios Polyp de David Mazzucchelli : ne passez pas à côté !