Dernier titre issu du label "Wonder Comics" de Brian Michael Bendis, Dial H for Hero est à nouveau une relecture d'un vieux concept (1966) de DC Comics. Mais le concept est si bon, si riche que ça aurait été dommage de s'en priver. Surtout que Sam Humphries, en grande forme, et Joe Quinones, déchaîné, sont aux commandes.
Enfant, Miguel a fait une mauvaise chute en plongeant dans une piscine publique. Heureusement, Superman passait par là et l'a conduit à l'hôpital après s'être assuré que sa blessure était bénigne.
Depuis, Miguel n'a eu de cesse de revivre ce frisson, multipliant les activités périlleuses. Ado, il doit pourtant se contenter de vendre des plats à emporter dans le food truck de son oncle Brant. C'est ainsi qu'il fait la connaissance de Summer, une jeune délinquante.
Peu après, en s'amusant avec des copains, il tombe du haut d'une falaise. Un appareil téléphonique lui apparaît et une voix lui commande de composer un numéro sur le cadran pour survivre. Il obéit, trop heureux de cette opportunité.
Le voilà transformé en super-héros : Monster Truck combat prestement des machines diaboliques, en causant un maximum de dégâts matériels collatéraux. Sa mission accomplie, il cède la place à Miguel.
Mais la police débarque. Miguel s'enfuit et Summer, la jeune délinquante, qui a volé le food truck de son oncle, permet au garçon d'échapper aux flics. Le téléphone sonne, il décroche, l'Opérateur le prévient que le dangereux Thunderbolt Club convoîte l'appareil.
La variant cover (extraordinaire) de Nick Derington.
Je place la variant cover de Nick Derington tout de suite parce qu'elle est d'abord fabuleuse mais surtout meilleure que la regular de Joe Quinones, résumant parfaitement le potentiel fou de Dial H for Hero.
A priori le pitch paraît désuet : un vieux téléphone magique qui quand on décroche le combiné et compose un numéro donne à son détenteur des super-pouvoirs, rien de bien folichon... Et pourtant, comme le montre l'image de Derington, c'est une véritable mine, un réservoir de personnages, de situations inépuisables.
Apparu pour la première fois dans la série House of Mystery, le fameux dispositif est réapparu depuis à plusieurs reprises, source d'inspiration pour des auteurs nostalgiques sans doute mais pourtant pas enfermés dans l'année 1966 de ses origines. Avec son apparence de relique d'un autre âge, le téléphone magique a acquis une patine vintage à nouveau tendance.
Cela, Sam Humphries l'a bien compris et l'exploite de manière géniale. Il respecte pourtant à la lettre le dispositif originel du titre : son héros reste un ado en quête d'adrénaline mais complétement et immédiatement dépassé par ce qui lui arrive. Miguel, ici, court après une sensation fondatrice, quand il fut sauvé par Superman (le lien de toutes les séries "Wonder Comics" dirigées par Bendis : l'homme de fer était sollicité par les soldats du Gemworld dans Young Justice, connaît les Wonder Twins, a provoqué les recherches de Naomi sur son adoption, et donc influé le destin de Miguel dans Dial H for Hero), ce shoot d'adrénaline, ce flirt avec le danger.
Passée l'introduction, fulgurante, le scénario fait soudainement baisser la température en présentant le garçon à l'adolescence, dans un petit boulot ingrat. Sa rencontre avec une jeune fille n'a rien d'affriolant, d'ailleurs Humphries se garde soigneusement d'en dire trop à son sujet (elle n'a même pas encore de prénom), mais ensuite elle apparaît comme un signe du destin, celle par qui tout s'accélère.
L'autre apparition est plus purement fantastique avec le téléphone du Heroverse et la voix de l'Opérateur puis la transformation en Monster Truck. Mais alors le récit s'emballe, le rythme devient effréné : comme Miguel, le lecteur est happé dans une aventure insensée.
On mesure alors le choix judicieux d'avoir confié les dessins à Joe Quinones. Cet artiste n'est pas un artiste très productif, sans doute parce que les éditeurs ne savent pas toujours comment employer un style comme le sien. Très expressif, à la limite du cartoon caricatural, et pourtant très élégant et inventif.
Quinones se fiche apparemment de faire beau, pourtant ses planches sont superbes, avec des découpages dynamiques, ludiques. Tout respire la fantaisie dans ses images et il croque à merveille les moues dépitées, excitées ou sidérées de son héros. Il est complètement à l'aise pour représenter un ado sans produire un personnage cliché. Miguel ressemble à un garçon crédible de nos jours et pourtant intemporel.
Tout le reste est à l'avenant. L'action pourrait se passer aujourd'hui comme autrefois sans problème. Qu'importe, on se régale, c'est superbe, tonique, et même franchement hilarant quand Quinones délire pour figurer Monster Truck, tout droit sorti d'un comic-book de Rob Liefeld.
Il semble que Dial H for Hero ne soit pour l'instant programmé que comme mini-série. Il fau espérer que le titre rencontre le succès et convainque l'éditeur et ses auteurs d'aller plus loin, quitte à, comme pour Naomi, à être développé en "saisons", avec une pause à la fin de chaque arc narratif. Le plaisir pris avec ce premier épisode donne trop envie que Humphries et Quinones nous régalent encore longtemps avec ce concept magique.
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