Décidément, cette mini-série Winter Soldier est une chouette surprise, qui mériterait d'être prolongée en série régulière. Kyle Higgins a trouvé à Bucky Barnes un rôle original et logique et lui a concocté une intrigue efficace. Pour ne rien gâcher, Rod Reis la dessine avec brio. Un tel potentiel mériterait d'être développée au-delà de cinq épisodes.
Après l'avoir sauvé de Mr. Colt, son recruteur de l'Hydra, Bucky invite RJ à vivre dans son repaire en Indiana. En contrepartie, le garçon doit suivre une thérapie auprès de Doc Samson - à laquelle il se plie bon gré mal gré.
Le premier diagnostic révèle la situation complexe de l'adolescent, formé pour tuer un homme dont il a pris l'apparence (Bucky) puis trahi par son recruteur (Colt). Bucky explique à RJ qu'il peut changer de vie et lui faire confiance.
Pour lui prouver sa bonne foi, Bucky décide d'entraîner RJ en mission. Un agent du SHIELD doit être exfiltré. Il est suivi et menacé par the Spot. RJ s'occupe de l'agent, Bucky du tueur - mais celui-ci le domine.
RJ revient aider Bucky. The Spot maîtrisé, le garçon reproche à Bucky ses mensonges : il a lu le journal intime de son sauveur et compris les démons qui le hantent. Changer de vie n'est pas si simple. Mais Bucky promet de soutenir RJ.
Après cette virée dans le Michigan, ils rentrent à la base, auprès de Sharon Carter. mais Bucky remarque un homme dans les parages : il sort de l'ombre en se présentant comme le père biologique de RJ...
J'ignore si cette mini-série se vend bien (même si je me doute qu'elle ne doit pas réaliser de gros scores - c'est un fait : les mini-séries performent rarement car les lecteurs rechignent à investir dans des productions sans avenir... Alors que c'est justement en les aidant qu'elles peuvent devenir des séries régulières). Mais en tout cas, Winter Soldier mériterait plus de considération.
Il ne s'agit pas d'un comic book étonnament original mais il est très bien conçu et édité. En fait, l'équipe à son origine a su l'encadre intelligemment, sans dénaturer le personnage (re)créé par Ed Brubaker. Rien que pour ça, ça vaut le coup d'oeil.
Dans cette humilité, il y a un vrai propos sur la rédemption, la seconde chance. Bucky Barnes en est l'incarnation, sans facilités : "mort" au combat durant la seconde guerre, récupéré par les russes, transformé en tueur, Captain America un temps avant que son passé criminel le rattrape, exfiltré, puis réhabilité, toute sa vie est une ode chaotique pour le rachat.
Kyle Higgins a préféré déplacer le personnage vers d'autres sphères que celles auxquelles le vouait Brubaker (une sorte de super espion clandestin) pour en faire un type vaguement super-héroïque qui, à son tour, permet aux autres une nouvelle vie. Et qui a croisé la route d'un ado, comme lui au début de sa carrière dans les années 40, embrigadé, manipulé, chair à canon d'une organisation criminelle.
Le scénario raconte comment, dans un jeu de miroir troublant, Bucky veut éviter à RJ de traverser l'enfer qu'il a connu. Et l'auteur en profite pour inviter, discrètement mais avec à-propos, des seconds rôles adéquats (Tony Stark d'abord en mécano de service, Sharon Carter en assistante de choc, et cette fois Doc Samson en auditeur attentif). Le récit formule subtilement l'opportunité qui s'offre à RJ mais aussi les doutes légitimes du garçon quand il découvre le trauma de Bucky, le risque que ça ne marche pas.
En outre, la mini-série assure son quota d'action en convoquant des méchants originaux, comme the Spot (les lecteurs du Daredevil de Waid se souviennent de lui et de son potentiel de nuisance).
Rod Reis manque peut-être une peu de souplesse dans son dessin mais le résultat, c'est que ses planches ne manquent pas d'allure pour autant. J'ai déjà cité ses références dans mes précédentes critiques, mais l'artiste en les combinant produit un mélange finalement atypique, à l'image de la série.
Reis, de ce point de vue, se rapproche d'un Mitch Gerads, dont les audaces formelles sont à la fois discrètes et radicales, mais sont surtout remarquables parce qu'elles ne revnoient pas aux standards des comics super-héroïques. Les personnages ne sont pas des armoires à glaces, les femmes pas des bombasses, les scènes d'action ne sont pas des feux d'artifices aux cadrages éclatés.
Plus que d'épater la galerie, on est en présence d'un dessin qui vise une atmosphère, qui joue le contraste entre le sujet et sa représentation. Ce qu'on perd donc en exagération typique, on le gagne en singularité esthétique.
Le cliffhanger est évidemment trop beau pour être vrai. Ou, s'il est vrai, il relance de manière intéressante la relation alambiquée entre RJ et Bucky. De quoi fournir à Winter Soldier une suite et fin accrocheuses.
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