dimanche 2 août 2009

Critique 84 : AVENGERS DISASSEMBLED, de Brian Michael Bendis et David Finch



Avengers Disassembled est initialement un crossover impliquant plusieurs séries publiées par Marvel Comics : l'idée générale était que des héros majeurs de la firme (comme les Vengeurs, Spider-Man, ou les 4 Fantastiques) réagissaient à des assauts les déstabilisant physiquement et émotionnellement. Le scénariste Brian Michael Bendis jouait, avec ce titre, sur le cri de ralliement des Vengeurs : "Avengers Assemble!".
Les titres les plus affectés par cette histoire furent les Avengers, mais aussi Thor, Captain America et Iron Man. En revanche, on pouvait continuer à suivre des mensuels comme Spider-Man et Fantastic Four sans problème.
Les membres des Avengers concernés par les évènements de Chaos (c'est-à-dire le segment concernant l'équipe proprement dît) étaient l'Homme-Fourmi (Scott Lang), Captain America, Captain Britain (Kelsey Leigh), le Faucon, Hawkeye, Iron Man, Scarlet Witch, Miss Hulk, la Vision, la Guêpe et Yellowjacket.
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L'histoire débute au manoir des Vengeurs lorsque le système de sécurité de l'endroit avertit ses occupants d'une intrusion : elle est le fait du Valet-de-Coeur, pourtant mort après avoir sauvé la vie de la fille de l'Homme-Fourmi, Cassie Lang. Le Valet explose inexplicablement, tuant Scott Lang et ravageant une partie de la demeure des héros.
Peu après, la Vision se crashe avec un des Quinjets des vengeurs et libère une petite armée de robots Ultron qui s'en prennent aux rescapés. Durant l'affrontement qui suit, Miss Hulk est prise d'une crise de folie furieuse au cours de laquelle elle détruit la Vision.
A la suite de cette première vague d'attaques, plusieurs autres vengeurs (parmi lesquels des réservistes comme Spider-Man et Daredevil) arrivent au manoir. C'est alors qu'une énorme flotte de vaisseaux extraterrestre apparaît dans le ciel et ouvre le feu. Hawkeye se sacrifie pour sauver ses amis de cette soudaine invasion Kree.
Finalement, on découvre que c'est Scarlet Witch qui a provoqué tous ces évènements : devenue progressivement folle depuis la mort de ses enfants quelques années auparavant, elle s'était convaincue de leur existence grâce à des sortilèges influencés par l'essence du démon Mephisto. Ses pouvoirs causaient depuis des altérations de la réalités et ce phénomène empirait au point d'affecter l'existence de ses proches et sa santé mentale déjà fragile : elle avait fini par penser que les Vengeurs lui avaient retiré sa progéniture.
Lors d'une ultime confrontation, les Vengeurs, aidés par le Dr Strange, neutralisent Wanda Maximoff et son père, Magneto, reconnaissant les erreurs qu'il a commises en l'élevant, l'emmène avec lui pour la soigner.
Quelques mois plus tard, l'équipe se réunit dans les ruines du manoir. Quicksilver explique comment son père, le Professeur Charles Xavier et le Dr Strange s'occupent désormais de sa soeur dans un endroit tenu secret. Puis Tony Stark révèle à ses camarades qu'ils doivent se séparer car la réputation du groupe a souffert des évènements causés par Scarlet Witch et aussi parce qu'il ne peut plus financer une telle formation (son entreprise a perdu des contrats importants).
Chacun de ceux qui sont là évoquent alors un de ses plus mémorables souvenirs, comme lorsque l'équipe s'est créée, ou quand ils découvert Captain America, ou leur rôle durant la guerre Kree-Skrull, ou le mariage de la Vision et Wanda...
Comme ils quittent les lieux, les Vengeurs sont attendus à l'extérieur de leur quartier général dévasté et acclamé par une foule de civils. Une page se tourne...
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... Et avec cette page, ce sont 500 épisodes qui trouvent leur conclusion : Brian Michael Bendis a offert un final à la fois apocalyptique et émouvant à une série historique, où se sont succédés les meilleurs auteurs et les plus grands artistes depuis Stan Lee et Jack Kirby. Pour cela, le scénariste n'a pas hésité à trancher dans le vif, supprimant plusieurs personnages (dont l'emblématique Hawkeye, qui fut d'abord un super-vilain avant de se racheter une conduite comme justicier, ou la Vision, sans doute l'androïde le plus célèbre du Marvelverse) et concluant son épopée dans un déluge pyrotechnique... Qui n'était pourtant qu'une énorme illusion !
Le procédé est radical et extrèmement roublard, on peut d'ailleurs reprocher à l'auteur d'en faire trop, mais sans doute fallait-il frapper fort et couper net pour inscrire le point final à près de quarante ans de continuité et alors que le titre même se vendait mal.
Car il faut replacer les choses dans leur contexte : à l'époque de Disassembled, dopés par leurs adaptations cinématographiques, Spider-Man et X-Men dominent commercialement Avengers dans les kiosques. Même si comme les mutants, c'est une série mettant en scène une équipe, la composition des Vengeurs n'a cessé de changer tout au long de son existence, comptant un nombre écrasant de membres. Il y avait les vedettes, les "big guns", comme Captain America, Iron Man, Thor, voire la Guêpe, et (tous) les autres, parfois membres éphémères et oubliables/oubliès. Mais en tant que tels, les Avengers ne ressemblaient plus à grand'chose.
La dernière formation en date n'était par ailleurs pas la plus fameuse, et Bendis a ensuite expliqué avoir tué certains personnages parce qu'il les considéraient comme d'authentiques "tocards" (à l'image du Valet-de-Coeur). Nous verrons, cependant, que, par la suite, en animant les Nouveaux Vengeurs, le même Bendis ne s'est pas privé de ramener sur le devant de la scène des seconds couteaux, tout aussi incertains, pour en faire de nouvelles stars. Mais c'est là la finalité de ce genre de jeu de massacre : chaque auteur a ses "têtes", ses favoris, et s'amuse à les promouvoir lorsqu'il en a la possibilité. On ne peut donc pas vraiment reprocher à Bendis de répéter ce que beaucoup de ses prédécesseurs ont fait...
Narrativement, le scénariste n'a pas encore complètement systématisé la décompression dramaturgique dont New Avengers deviendront le laboratoire (et parfois la caricature) : le récit est mené avec beaucoup de rythme, les rebondissements s'enchaînant à toute vitesse, allant même crescendo dans une débauche d'explosions, d'attitudes troubles, de situations paroxystiques. On a à peine le temps de se demander ce qui se passe entre l'explosion de Jack of Hearts, le crash de la Vision, les attaques successives des Ultrons et des Krees, le coup de folie de Tony Stark à l'O.N.U. et celui de She-Hulk, le sacrifice d'Hawkeye, et l'affrontement contre Wanda puis les apparitions du Dr Strange et de Magneto.
Et quand la situation s'est calmée et que le temps des adieux est venu, Bendis ne cède pas non plus à ce qui en irritera plus d'un ensuite, soit des dialogues abondants, à l'humour potache, et dilatant la durée de certaines séquences. L'évocation des grands moments passés de l'histoire des Vengeurs est rédigée sobrement, avec une pointe de sentimentalisme indéniable, mais sans manièrisme.
Ces brefs flash-backs, illustrés sur des double-pages, sont aussi un régal pour les yeux car, pour ce Avengers finale, de grands artistes ont été mis à contribution : Steve McNiven, David Mack, Alex Maleev, Jim Cheung, Gary Frank, Mike Mayhew... Cela participe à faire de ce numéro un exemplaire vraiment exceptionnel, transition entre le titre qui s'achève et celui qui va arriver.

Disassembled a été dessiné par David Finch (avec quelques pages reprises aux épisodes de Kirby, Dick Ayers ou Olivier Coipel) et encré par ses collaborateurs habituels, Danny Miki, Mark Moralès, Allen Martinez et Victor Olazaba.
Je ne suis pas un grand fan de cet artiste. Pourtant, il fait le boulot et sait en mettre plein la vue comme le réclame une histoire de ce genre : beaucoup le font mieux que lui, c'est une évidence, mais David Finch a été au bon endroit, au bon moment. C'est aussi comme cela qu'on gagne ses galons.
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Les Vengeurs sont morts ? Vive les Nouveaux Vengeurs ! Oui, une page se tourne, mais un nouveau livre va commencer... Et la fin de cette histoire est vraiment le début d'une autre !

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