vendredi 28 juillet 2017

VALERIAN ET LA CITE DES MILLE PLANETES, de Luc Besson


Vous allez entendre et lire, si ce n'est déjà fait, beaucoup de choses (et leur contraire) au sujet de l'adaptation cinéma de Valérian par Luc Besson. Il y sera sûrement beaucoup question de chiffres ahurissants (en relation avec le budget du film), de performances diverses au box-office (décevant en Amérique, positif en France), de la qualité du film par rapport à celle de la série, etc.
Beaucoup de fâcheux et grincheux se déchaînent déjà sur les réseaux sociaux, assénant des jugements définitifs et expéditifs, souhaitant la défaite de Besson (parce qu'il n'aime pas le bonhomme) ; d'autres défendent le produit en soulignant (à raison) que l'oeuvre de Pierre Christin et Jean-Claude Mézières a été abondamment pillé (sans dédommagement) par les américains (de George Lucas à Steven Spielberg en passant par James Cameron jusqu'à J.J. Abrams).

Pas facile dans ces circonstances d'aller juger sur pièces en gardant la tête froide. Je vais quand même essayer.
 Valérian et Laureline (Dan de Dehaan et Cara Delevingne)

Valérian et Laureline effectuent ensemble leur première mission : lui est une tête brûlée, dragueur ; elle une fille qui ne s'en laisse pas compter facilement même si elle s'amuse du caractère de son acolyte. Ils dérobent un transmuteur (une bestiole qui est capable de dupliquer n'importe quel objet qu'on lui fait avaler), le dernier de son espèce après la destruction mystérieuse de la planète où il vivait trente ans auparavant.
 Le pirate d'Alpha (Alain Chabat)

Les deux agents spatio-temporels ramènent le transmuteur sur la station spatiale Alpha, qui depuis 1975, est devenu un gigantesque agglomérat de cités venues de toutes parts dans l'univers. Pour y représenter la Terre, il y a un Commandeur autoritaire soucieux de savoir qui se cache dans une partie de la station sans que personne n'ait pu l'approcher. Lorsque l'officier est enlevé, Valérian et Laureline qui étaient attachés à sa protection doivent le retrouver.
 Valérian et Bubble (Dan DeHaan et Rihanna)

Tandis que Valérian n'est rapidement plus joignable, Laureline comprend que la cible était le transmuteur et part retrouver son collègue, puis, ensemble, vont pister le Commandeur. Ce dernier a visiblement quelques vilains secrets dans son passé et la bestiole pourrait servir de monnaie d'échange...
 Au centre : le Commandeur (Clive Owen)

Pour les aider dans leurs investigations, Valérian et Laureline devront parcourir les méandres de la Cité des Mille Planètes, en affronter les pièges, mais pourront également compter sur l'aide de quelques comparses comme les trois Shingouz (des informateurs), Bubble (une métamorphe) ou un ahurissant pirate... 
Les Shingouz

Et, en fin de course, les attend une rencontre stupéfiante avec une race d'aliens présumée disparue, dont les agissements ne sont, contre toute attente, pas belliqueux.

Il ne s'agit que de mon humble avis, mais je crois qu'il a le mérite de pacifier le débat sur le résultat des efforts de Besson dans son entreprise. Comme pour Les Aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec, sûrement son opus le plus abouti ces dernières années, le mieux pour apprécier Valérian et la cité des mille planètes est de le voir comme une version, une interprétation, voire une variation de la BD de Christin et Mézières et non comme une adaptation fidèle, conçue pour contenter les fans. Après tout, c'est aussi dans cet état d'esprit que Manu Larcenet en a tiré un album et que Lupano et Lauffray préparent le leur (à paraître cet Automne) - c'est, surtout, la meilleure manière de ne pas statufier une création dont les auteurs originaux permettent qu'elle soit reprise par d'autres : en la laissant être trahie, modifiée, corrigée, bref en la laissant vivre sa (nouvelle) vie (comparez, si vous n'êtes pas convaincu, la vigueur qui irrigue encore Spirou et Fantasio et les copies pathétiques, sans saveur, d'Astérix, Blake et Mortimer, où la consigne est d'imiter plutôt que de perpétuer de façon personnelle).

Cela ne signifie pas que le résultat est sans défaut : Besson ne peut s'empêcher d'écrire Valérian et Laureline comme un couple romantique (alors que le sel de leurs aventures tenait beaucoup à l'influence de la screwball comedy, chacun refusant d'avouer ses sentiments à l'autre), de philosopher naïvement sur les dégâts de l'homme où qu'il aille (sans doute est-ce aussi pour cela que les américains n'ont guère apprécié le film : que le "gendarme du monde" soit dépeint comme des exterminateurs pour qui la fin justifie les moyens via le personnage du Commandeur jure franchement dans l'Amérique de Trump), de lisser bizarrement certains éléments (le transmuteur, qui en vérité défèque ce qu'il absorbe pour le multiplier, n'a plus rien de grognon).

Mais, par ailleurs, pour un long métrage de 2h. 15, le rythme est très soutenu, sans temps mort ; l'intrigue est prenante ; et c'est visuellement vraiment extraordinaire : tout le bestiaire (et même plus) de Mézières est là, reproduit dans des proportions colossales, colorées, le spectacle est éblouissant (et supérieur graphiquement à tous les blockbusters US, y compris les modèles cités par le cinéaste - Avatar en premier).

S'ils ne ressemblent effectivement pas à leurs versions de papier (même s'il était difficile de trouver une rouquine effrontée comme Laureline ou un jeune Hughes Aufray, modèle de Mézières pour Valérian), Dan Dehaan et Cara Delevingne s'en sortent plus qu'honorablement : lui possède ce charme canaille sans l'assurance d'un super-héros (que Christin déteste), et elle exprime très bien ce côté butée et vivace de la débutante volontaire (la jeune mannequin avait déjà prouvé son potentiel de comédienne prometteuse dans l'épatant La Face cachée de Margo). Mention spéciale aussi à l'apparition d'Alain Chabat. Et Clive Owen campe un méchant efficace.

Et puis, il y a le "moment Rihanna" : une scène étincelante, aux effets spéciaux fantastiques, dans laquelle la chanteuse (ne chante pas) mais éblouit, avant un dialogue à la subtilité épatante sur les migrants, le droit à la différence, l'identité. Superbe.

Foin des polémiques stériles : Besson a plutôt bien réussi son affaire, dont l'histoire n'est ni débile et l'ambition respectable. Tout aussi respectable que n'importe quelle production Marvel en vérité, pour rester dans un registre comparable.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

"copies pathétiques" ? "sans saveur" ?
Foin des polémiques stériles !