vendredi 21 mai 2021

JUSTICE LEAGUE #61, de Brian Michael Bendis et David Marquez / JUSTICE LEAGUE DARK, de Ram V et Xermanico


Le mensuel Justice League s'est imposé à moi comme le seul dont le double programme est le plus intéressant de la nouvelle proposition éditoriale de DC; Les deux séries, Justice League et Justice League Dark, sont de qualité (presque) égale, au point que je serai prêt à payer plus pour avoir le même nombre de pages pour chaque épisode. Les intrigues de Brian Michael Bendis et Ram V et les dessins de David Marquez et Xermanico garantissent un plaisir de lecture indéniable.


En débarquant sur la terre natale de Naomi, la Ligue de Justice est dispersée. Black Canary est prise à parti par des indigènes menaçants contre lesquels elle déploie son cri. Et elle s'aperçoit alors que celui a gagné en puissance dans cet environnement.


Mais tout le mondee n'a pas cette chance. Naomi la première, qui se rend compte que ses pouvoirs sont sévèrement déréglés et qui s'en remet à Batman pour la rassurer. Toutefois, ce dernier est vite inquiété par un appel de détresse de Superman.


Brutus attaque Superman et lui inflige une raclée à laquelle assistent, médusés, ses acolytes de la Ligue. Black. Pendant ce temps, Aquaman n'est pas non plus au mieux et il perd connaissance avant d'être récupéré par des alliès de Brutus.


Batman sonne le rappel des troupes et, rejoint par Hawkgirl, Green Arrow, Black Canary et Naomi, se lance au secours de Superman. Mais ils sont devancés par Black Adam qui somme Brutus de se rendre sans délai...

Au sujet de Brian Michael Bendis, il est souvent dit qu'il ne sait pas, n'a jamais su écrire de team-books, et même, tenez-vous bien, qu'il massacre ceux auxquels il touche (rien que ça...). Pourtant, son transfert chez DC semblait avoir adouci beaucoup de ses détracteurs, qui ont apprécié ses runs sur Superman et Action Comics. De quoi être indulgent avec sa reprise de Justice League ?

Ne rêvons pas. Tout n'est cependant pas à jeter dans les remarques émises ici ou là. Brutus est un méchant bas de gamme, et cet élément plombe l'intrigue pourtant efficace. C'est dommage parce que, par ailleurs, assister au déréglement des pouvoirs de quelques membres de la Ligue sur le monde de Naomi introduit une dose d'inconnu assez accrocheuse. Et voir Superman se faire rétamer ajoute du suspense (quand l'homme d'acier est mis k.o., c'est que le reste de l'équipe peut se faire du souci).

En fait, la limite de Bendis sur ce début de run (mais qui risque fortement quand même de décourager de continuer au-delà de ce premier arc), c'est qu'il ne force pas son talent. Il produit un comic-book popcorn, comme on parle de popcorn movies pour désigner des longs métrages divertissants mais guère mémorables. Ce qui faisait la force, sinon l'intérêt de Bendis avec ses séries d'équipe chez Marvel, c'était, selon moi, leur dimension familiale, au sens d'une famille choisie, une famille de coeur, et cela absent dans la Justice League qui est et reste avant tout un groupe d'individus se rassemblant, selon la formule consacrée, pour affronter des menaces qu'un seul de ses membres ne pourrait vaincre seul. A par le coupe Green Arrow-Black Canary (qui n'a pour l'instant pas eu l'occasion de briller), il n'existe par au sein de la Justice League de fraternité, et sous la plume de Bendis (comme d'autres auteurs avant lui), les héros apparaissent davantage comme des collègues ou des camarades que comme des amis ou une famille. Je le regrette, ça me manque, ça ne rend pas la série très attrachante.

David Marquez a pris un parti risqué pour dessiner la série. Son découpage et ses compositions sont hyper dynamiques, de sorte que la puissance de certains héros (ou la faillite d'autres) est parfaitement traduite. Mais il le fait au détriment des décors, ce qui est regrettable. Certes, représenter un monde désolé par une guerre entre surhommes est un challenge car il est aisé de tomber dans les clchés et sans doute Marquez s'efforce-t-il de trouver une solution, mais on sent qu'il n'est pas très à l'aise (alors que dans un environnement urbain, c'est un artiste qui utilise l'infographie de manière très intelligente).

La colorisation de Tamra Bonvillain continue aussi de m'interpeler. Elle s'occupe également de celle de Wonder Woman et on retrouve les mêmes soucis de colorimétrie, avec parfois des teintes criardes assez embarrassantes. Problème s'impression ? Ou choix de palette peu heureux ? La répétition aurait tendance à me faire pencher en faveur de la seconde option puisque Bonvillain (ab)use du rose par exemple sur ces deux titres, une couleur qui passe de toute façon mal. Mais pas que : les cheveux blonds de Black Canary sont trop jaunes aussi, ça manque trop de nuances en général.

Espérons que ces défauts visuels seront vite corrigés. Parce que, pour le reste, n'en déplaise aux grincheux, c'est très rythmé, et cette nouvelle ère pour la Justice League tranche avec bonheur avec la précédente menée par Scott Snyder (et son interminable feuilleton avec Lex Luthor, le Batman-qui-rit et Perpétua).   

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Zatanna, John Constantine, Bobo et Etrigan viennent en renfort à Ragman dans la librairie où il affrotne les monstres invoqués par Merlin dans les livres de José-Luis Borgès. La situation réglée, Bobo déduit que le magicien doit chercher un grimoire plus puissant pour une prochaine attaque plus virulente.


Tandis que la Justice League Dark investit la Bibliothèque de Babel à la recherche de l'ouvrage, Ser Elnara Roshtu d'Anatolie, le treizième chevalier de la table ronde trahi par Merlin, se remet de ses blessures et part pour Gotham en vue d'arrêter le magicien...

Comme je l'écrivais en introduction de cette entrée, je serai volontiers prêt à payer 6 $ pour une revue de quarante pages et donc un épisode complet de Justice League et un autre de Justice League Dark car ce second titre mérite vraiment plus d'espace. Ou alors que DC lui accorde son propre mensuel, comme avant l'intermède Future State.

En l'état, c'est très frustrant à lire car on voit bien que Ram V développe une intrigue solide et captivante qui doit découper à contrecoeur au bout de dix planches. Le scénariste est heureusement brillant et mène son affaire avec une adresse formidable, qui lui permet de raconter beaucoup avec peu de place. Mais c'est du gâchis.

Par contre, contrairement à Bendis, Ram V réussit à fédérer un groupe de héros hétéroclite mais soudé par un esprit de corps. Réduite à cinq membres, la JLD est tendue vers un objectif unique et précis, qui dépasse leurs différends, leurs doutes. C'est d'autant plus méritoire donc que le scénariste parvient à créer cet esprit d'équipe en peu de pages mais sans forcer le trait, en soulignant l'urgence de la situation et la complémentarité des membres (à cet égard, quand Constantine pousse Zatanna à utiliser sa magie alors qu'elle en redoute les conséquences, c'est parfait. De même pour Bobo le chimpanzé qui n'est pas réduit ici à un personnage pittoresque mais s'impose comme un fin limier convaincant ses acolytes de la justesse de ses déductions par leurs résultats.).

Xermanico signe son dernier chapitre (avant de se consacrer pleinement à la mini-série Infinite Frontier). Il part sur une excellente note et on ne peut que louer son professionnalisme. Une double page comme celle montrant la Bibliothèque de Babel (voir ci-dessus) est époustouflante. Son successeur (Sumit Kumar, avec lequel Ram V a signé la mini-série These Savage Shores) aura fort à faire pour être à la hauteur (mais c'est un excellent artiste, qui va certainement se révèler à beaucoup de lecteurs qui ne le connaissent pas).

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