mercredi 8 avril 2009

Critique 18 : IDENTITY CRISIS, de Brad Meltzer et Rags Morales

Sue Dibny, la femme d'Elongated Man, est sauvagement assassinée. En menant l'enquête, Flash (Wally West) et Green Lantern (Kyle Rayner) découvrent le secret reliant certains de leurs collègues. Plusieurs années avant, Sue avait été violée par le Dr Light dans le satellite de la JLA. Pour l'empêcher de récidiver, les membres présents de l'équipe(le Green Lantern Hal Jordan, Flash/Barry Allen, Hawkman, Zatanna, Green Arrow, Black Canary et Atom) avaient choisi de laver le cerveau du malfrat en utilisant les pouvoirs de Zatanna. Pensant que le mobile du meurtre soit la vengeance, ils traquent donc le Dr. Light, à qui la mémoire revient lorsque son garde du corps, le mercenaire Deathstroke affronte la JLA. Le malfrat s'enfuit et sera disculpé par les premiers résultats de l'autopsie de Sue. où le Dr Mid-Nite finit par découvrir de minuscules traces de pas à la surface du cerveau de Sue Dibny. Batman déduit le modus operandi de l'assassin et son identité.
*

Aussi étonnant que ça puisse être, jamais le principe du Cluedo n'avait été transposé dans le monde des super-héros. Auteur de romans noirs, Brad Meltzer était tout indiqué pour imaginer cette histoire à la fois violente, dérangeante et poignante.
Le choix de sacrifier un personnage de troisième ordre comme Sue Dibny est d'abord déroutant mais finalement judicieux : on constate que la principale faiblesse des surhommes est leur entourage proche, des individus sans pouvoirs pour se défendre, parents, amis, amants.
Le châtiment infligé au Dr Light révèle aussi des divergences philosophiques profondes entre les justiciers : certains prônent des solutions radicales, quitte à trahir leurs camarades en les traitant comme les criminels qu'ils ont capturé ; d'autres (plus laxistes ?) refusent peut-être de considérer avec lucidité le Mal qu'ils combattent sans vraiment l'éradiquer.
Ces questions, Brad Meltzer les pose avec brutalité. Mais ainsi il fait descendre de leur piedestal des héros iconiques, comme Superman ou Batman, et rend leur relation plus humaine, réaliste, ambiguë. Les 7 épisodes de cette mini-série possèdent une densité dramatique rare qui culmine dans un dénouement déchirant, dont personne ne sort indemne. Certains ont reproché au romancier une certaine complaisance dans la représentation de la violence, mais peut-être était-ce le prix à payer pour décaper les mythes ici mis en scène.
*
Graphiquement, le dessin très expressif de Rags Morales rend parfaitement toute la théâtralité du récit. Mais pas seulement : pour son premier projet d'envergure, et compte tenu du nombre élevé de protagonistes, l'artiste s'est inspiré d'acteurs connus pour camper ses personnages, un peu comme Alex Ross, mais dans un registre qui évoque plus Dale Eaglesham. Cela aboutit à une distribution divertissante pour les lecteurs les plus physionomistes sans pour autant gêner la lecture en se semandant à qui ressemble untel. En outre, la méticulosité apportée aux décors, aux ambiances via le jeu sur les lumières, et au découpage avec des séquences de bagarre aussi percutantes que les scènes intimistes sont intenses, témoigne de l'implication et du sérieux du graphiste pour rendre justice au récit.
L'encrage sobre mais précis de Michael Bair (plus à son avantage ici qu'avec Steve Sadowski sur la JSA)renforce encore ce sentiment. Là encore, c'est de la très belle ouvrage, très soignée, redoutablement efficace.
*
Bref, un classique moderne, qui fait une forte et durable impression. 

Aucun commentaire: