jeudi 22 juin 2023

THE AVENGERS #2, de Jed MacKay et C.F. Villa


Sans avoir été impressionné par le premier épisode de The Avengers, j'étais curieux tout de même de voir ce que Jed MacKay avait en réserve pour sa reprise de la série. Ce n'est toujours pas renversant, et c'est même curieusement assez mou, comme si le scénariste jouait la montre. Ce n'est même pas non plus super bien dessiné par CF Villa. Et pourtant c'est agréable, curieusement prenant.



Captain Marvel ressort du trou noir dans lequel elle a été englouti en portant dans ses bras Kang, sévèrement blessé. Il lui a transmis une liste d'actions à accomplir pour sauver mille vies en 24 heures. Un test pour des épreuves plus importantes qui attendent les Avengers contre ceux qui ont voulu le tuer.


Les images avec lesquelles j'illustre cette critique ne reflètent qu'à moitié le contenu de ce deuxième épisode de The Avengers, ponctué par des scènes d'action spectaculaires mais aussi très brèves. De fait, c'est une lecture frustrante, mais c'est aussi une volonté assumée par Jed MacKay.


Trop tôt pour affirmer s'il s'agit de ce qui formera la signature de son run, ou du moins de ce premier arc - même si tout laisse à penser que le scénariste va feuilletonner pour développer une intrigue au long cours. En tout cas, c'est assez culotté de démarrer ainsi.


Pour l'instant, tout semble être comme si MacKay respectait un quota : il donne au lecteur son lot d'action, de spectacle, valorisant la puissance et la bienveillance de ses Avengers. Mais il paraît aussi évident que ce n'est que ça : un quota, une sorte de minimum syndical pour rester dans les clous, avant de plus ambitieuses manoeuvres.

Et quoi de plus normal, me direz-vous ? En effet, quand on choisit (ou qu'on vous a imposés) un méchant comme Kang (car tout indique que Marvel a fait le forcing pour que ce soit lui afin de coller à ce qui se prépare dans le MCU), mieux vaut ne pas trop en dire trop vite. Le conquérant est aussi un manipulateur et donc il ne dit évidemment pas tout, même s'il est en piteux état, surpris ou franchement dominé par des adversaires qui le forcent à demander l'aide des Avengers.

A la fin du premier épisode, après leur combat contre Terminus, Captain Marvel était aspirée dans un trou noir et se trouvait face à Kang salement amoché. Il lui livre ici une liste d'actions à accomplir pour sauver mille vies en une journée. Black Panther sauve des civils d'un groupe de l'Hydra, Thor évite un drame avec un train qui déraille, Vision et Iron Man empêchent un avion de ligne de se crasher, et Captain America prend le volant d'un camion transportant des médicaments car le chauffeur est exténué. Les infos de Kang sont correctes et attestent de sa bonne foi.

Certes, tous ces coups d'éclat ne se valent pas et Jed MacKay semble parfois à cours d'idées pour trouver de quoi faire briller ses Avengers (en particulier avec Captain America et le chauffeur routier). Ce n'est pas très encourageant. Ou plutôt ça prouve que le scénariste se réserve pour plus tard. Mais bon, il n'en reste pas moins qu'on aurait aimé un épisode beaucoup plus impressionnant, éprouvant vraiment les Avengers, qui, là, ne forcent pas leurs talents.

Qui plus est, ces sauvetages sont des ponctuations dans ce qui forment le coeur de l'épisode, c'est-à-dire le dialogue entre Captain Marvel et Kang. Celui-ci, gravement blessé, pissant le sang, a quand même la force de faire quelques révélations tout en restant cryptique. Captain Marvel se montre d'abord, légitimement, méfiante, puis baisse la garde et finalement la nouvelle leader des Avengers ne fait que que ça pendant l'épisode. Jed MacKay s'appuie sur le one-shot Incoming publié en 2022, qu'il avait écrit, pour dévoiler un peu ce qui a frappé Kang et ce qui attend les Avengers (en gros un groupe de vilains très puissants et inédits, capables de se déplacer dans l'espace-temps comme le conquérant, et dont il faut attendre des tribulations events - on ne sait pas ce que ça signifie mais c'est censé nous faire frissonner...).

On est donc logiquement(re)parti pour une saga d'envergure et le choix de CF Villa pour illustrer ça n'est pas mal trouvé. Il s'agit d'un dessinateur rapide, jeune, qui n'est visiblement pas impressionné par le fait de dessiner la série. Pourtant, si en qualité de fill-in artist sur X-Men (quand Pepe Larraz ou Javier Pina n'étaient pas dispos), il assurait, là on constate quand même quelques insuffisances.

Certes la partie avec Captain Marvel et Kang se passe dans un endroit proche du néant, donc sans décor, mais on aurait apprécié un peu plus d'effort sur ce plan-là, histoire de souligner la dramatisation du dialogue. Quant au reste, Villa se limite à l'essentiel pour montrer les exploits de l'équipe d'Avengers. Il y a des cases aux dimensions généreuses, mais toujours cette impression d'économie, comme si tout ça avait mis en images rapidement, sans trop d'investissement.

La seule fois où cette impression disparaît au profit d'un découpage un peu plus élaboré, c'est avec la première scène de sauvetage qui met en scène Black Panther contre un commando de l'Hydra. Villa a recours à une pleine page puis un "gaufrier" montrant uniquement les coups portés par le justicier et subis par ses adversaires, ce qui traduit fort bien la rapidité et l'efficacité de T'challa.

En dehors de ça, souvent, on remarque que CF Villa ne se préoccupe pas de flatter les personnages : leur expressivité est limitée, leur langage corporelle dénuée de singularité, et ils sont disposés dans des compositions qui privilégient la lisibilité au dynamisme (quand Vision et Iron Man interviennent sur l'avion qui va se crasher, tout est beaucoup trop figé. Thor est montré une fois le train qui a déraillé stoppé. Etc.). On a souvent l'impression que l'artiste, lui aussi, arrive après la bataille.

Malgré tous ces défauts, faiblesses, lacunes, The Avengers a quelque chose d'étonnamment prenant. On a envie de savoir ce qui va arriver, on espère être surpris, on souhaite vibrer. Le tout maintenant est qu'on ne doive pas attendre trop longtemps avant que tout ça se mette en mouvement, faute de quoi le couperet risque de tomber assez vite, lui, et nous, d'aller voir ailleurs s'il n'y a pas mieux à lire.

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