lundi 28 janvier 2019

NAOMI #1, de Brian Michael Bendis, David F. Walker et Jamal Campbell


Naomi est la deuxième série estampillée "Wonder Comics", après Young Justice (et avant Wonder Twins et Dial H, à venir en Février). Brian Michael Bendis en est le créateur mais il partage l'écriture avec David F. Walker et le dessin a été confié à Jamal Campbell. Ne vous fiez pas aux apparences : sous ses airs modestes, le titre est ambitieux car ses auteurs veulent en faire le point de départ d'une addition comparable au "Quatrième Monde" de Jack Kirby !


Une petite ville de l'Oregon est le théâtre d'une brêve bataille entre Mongul et Superman, que celui-ci remporte facilement. L'événement met la jeunesse de cette localité en émoi. Sauf Naomi, qui a raté la scène.


Ruminant sa frustration, cette adolescente afro-américaine de dix-sept ans a pourtant droit à une seconde chance quand son amie Annabelle la prévient par texto que l'homme d'acier est de retour. Mais sa visite est plus calme et aussi rapide que la précédente.


En échangeant avec sa psychothérapeute, Naomi confie avoir l'impression d'être passée à côté de quelque chose d'important pour elle, pas seulement par rapport à Superman. Peut-être parce que comme lui, elle a été adoptée et se sent spéciale.
  

Après qu'un camarade du lycée ait mentionné un précédent événement similaire il y a longtemps, Naomi interroge plusieurs adultes, qui jurent ne se souvenir de rien. Mais la jeune fille est certaine qu'on lui ment.


Elle décide alors de questionner l'impressionnant Dee, garagiste. Et lui confirme que la bourgade n'en est pas à son premier choc. Le premier a eu lieu il y a dix-sept ans, un quatorze Mars. Le jour de l'adoption de Naomi.

De tous les projets mainstream qu'il a amorcés chez DC depuis son arrivée, Naomi pourrait bien être le plus important pour Brian Michael Bendis. C'est en tout cas le premier où il affiche clairement sa volonté d'enrichir la continuité de l'éditeur tout en créant un personnage original.

Et il l'assume avec ce qui peut passer pour du panache ou de la prétention car Naomi annonce un secret aussi important que la création du Jack Kirby's Fourth World, qui a donné les New Gods, Mister Miracle, Darkseid, Apokolips, New Genesis, etc. Tout ça en partant d'une ado de dix-sept ans dans l'Oregon.

Selon qu'on sera bien disposé ou pas, l'entreprise a de quoi intriguer et accrochera (ou pas). En partageant l'écriture avec David F. Walker (sans doute selon le schéma suivant : Bendis et Walker conçoivent l'intrigue ensemble, puis Walker rédige le script que Bendis valide et corrige le cas échéant), Bendis a quand même sans doute dû céder à un emploi du temps déjà bien chargé et délégué.

Mais ce premier épisode, essentiellement introductif, ne trompera personne : les éléments sont "Bendisiens" au possible, avec une jeune héroïne métisse, adoptée, apprentie détective, bref un mix entre Miles Morales et Jessica Jones. Superman fait deux apparitions aussi. Et les dialogues occupent une place essentielle (c'est donc "bavard" selon les critères des grincheux qui, apparemment, souhaiteraient lire des comics muets).

La partie graphique est l'oeuvre d'un jeune artiste, Jamal Campbell, qui travaille en free-lance (mais à qui DC aurait tout intérêt de faire signer une contrat d'exclusivité). Il assume dessin et encrage et le résultat est excellent.

Tout d'abord, il maîtrise parfaitement son découpage en diversifiant beaucoup ses effets, que ce soit des doubles pages en continuité séquentielle ou des "gaufriers" de douze cases en passant par des échanges entre deux personnages dominés par des vignettes occupant toute la largeur d'une bande. C'est toujours admirablement fluide et tonique.

Ensuite, sur la base d'un casting majoritairement jeune, Campbell est très à l'aise et les anime de manière très expressive, qu'il s'agisse de leurs visages ou de leur gestuelle. Les compositions de chaque image prouve que le dessinateur sait placer les éléments de manière aérée et harmonieuse (même s'il est évident qu'il travaille les décors avec des fichiers numériques).

Qu'on ne se méprenne pas : le cliffhanger est assez convenu (on devine rapidement qu'il y a un lien entre ces visites de surhommes et l'héroïne, et que le fait qu'elle soit adoptée dissimule quelque chose tout comme l'attitude des adultes), mais c'est efficace. En commençant modestement tout en promettant gros, les auteurs piquent notre curiosité tout en veillant à livrer un épisode divertissant et mystérieux.

Naomi a tout pour être la véritable pépite du label "Wonder Comics" (sur lequel on fera un premier point le mois prochain avec ses deux dernières productions).
   
La variant cover d'Emanuela Lupacchino.

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