jeudi 10 mai 2018

JUSTICE LEAGUE : NO JUSTICE #1, de Scott Snyder, James Tynion IV, Joshua Middleton et Francis Manapul


Les mois de Mai et Juin vont être intenses chez DC Comics, à commencer par la publication hebdomadaire des quatre numéros de cette mini-saga Justice League : No Justice, écrite par Scott Snyder, James Tynion IV et Joshua Middleton, et dessiné par Francis Manapul (qui se faisait trop rare). Au menu : du très grand spectacle, mené à un train d'enfer, avec des enjeux cosmiques, et un casting pléthorique. Mais surtout parfaitement lisible et captivant. Prêts à embarquer dans ce grand 8 ?
  

John Stewart a convoqué tout le corps des Green Lantern pour colmater la brèche du Mur de la Source, endommagé par la dernière bataille menée par la Justice League (dans la saga Metal). L'urgence est indéniable car derrière se trouve une énergie destructrice qui pourrait anéantir notre univers, celle du Dark Multiverse.


Sur Terre, Brainiac a débarqué et enlevé une importante partie des héros. Superman a tenté de s'interposer mais son adversaire lui a montré télépathiquement la menace qui nécessite de telles mesures. Les justiciers se réveillent donc dans l'immense vaisseau du roi de Colu, rhabillés de tenues customisées.


Ils rejoignent le cockpit où les attend leur hôte qui tenant le lasso de vérité de Wonder Woman ne peut leur mentir sur la raison de leur enlèvement. Même les plus réfractaires et les plus méfiants sont obligés d'accepter leur sort en comprenant que le danger impose une alliance inédite. Inédite car des vilains sont aussi invités à grossir les rangs de cette armée pour le bien commun !


Sur Terre, le passage-éclair de Brainiac s'est présenté comme une opportunité pour d'autres, spécialement Amanda Waller, la patronne de la Suicide Squad, qui a intercepté les coordonnées de l'extra-terrestre et réuni une section de hackers afin de pirater son vaisseau et absorber ses données - officiellement au cas où les choses tourneraient mal.


Cependant, Brainiac résume la situation : jadis, quatre frères, les Destructeurs Entropie, Mystère, Merveille et Sagesse, ont ensemencé toutes les planètes où la vie s'était développée. Aujourd'hui, l'heure de la récolte a sonné et pour se sustenter, les quatre géants vont consommer leur jardin cosmique en consommant les mondes. Colu comme la Terre sont en danger. Mais Brainiac n'a pas le temps de développer son plan car Amanda Waller a lancé son piratage et il perd connaissance...

N'y allons pas par quatre chemins : en termes d'entrée en matière, cette saga est un modèle du genre et la coordination entre ses trois auteurs est parfaite. On sent que Snyder, Tynion IV (dont Snyder a été le mentor durant les "New 52") et Middleton ont vraiment beaucoup bossé en amont pour accorder leurs violons, et la lecture s'en trouve fluidifiée de manière impeccable.

L'effort est d'autant plus louable que No Justice ne fait pas les choses à moitié avec son casting très abondant, sa menace énorme, et sa narration parallèle (dans le temps - avec un flash-back sur la nature du danger - et l'espace - avec plusieurs sites exposés). Faire tenir tout ça en un seul épisode introductif sans égarer le lecteur ni le saturer d'infos est un exploit.

Il y a une ambition cinématographique digne des blockbusters ici, c'est évident : DC n'a guère d'inspiration avec ses films et c'est comme si les scénaristes, soutenus par le staff éditorial, prenaient leur revanche en profitant à fond du média comics, des moyens de la bande dessinée, pour se "payer" tout ce que la Warner échoue à produire sur le grand écran (et aussi sur le petit car des séries comme Arrow, Supergirl, Flash ou DC's Legends of Tomorrow ne valent vraiment pas tripette)..

Qu'un méchant, historiquement lié à Superman, soit à la manoeuvre pour sauver l'univers ajoute une pointe de malice au dispositif en même temps qu'elle met le kryptonien au centre du DC Univers, peu avant sa refonte par Brian Michael Bendis. C'est habile sans être forcé. Tout comme l'est le geste d'Amanda Waller, qui est à la fois tactique (se méfier de Brainiac) et opportun (prévenir plutôt que guérir, "officiellement"). Et on a à peine vue les Destructeurs (tout comme dans DC Nation #0) !

Visuellement, avoir fait appel à un artiste rapide, efficace et flamboyant comme Francis Manapul est une autre idée géniale car il se faisait rare depuis un certain temps (c'est donc un plaisir de le relire) mais aussi parce que son découpage est à la hauteur de l'événement. Il y a beaucoup de doubles pages dans ce premier chapitre (et il risque d'y en avoir un paquet dans les trois prochains numéros) mais elles sont audacieusement composées, de sorte qu'on a une proposition de lecture puissamment originale et pas simplement une succession de grandes images bien remplies. 

Ajoutez-y une colorisation qui n'hésite pas à utiliser une palette très vive mais adéquate pour ce genre de baroud : on en prend plein la vue.

Si Metal était parfois confus et pénible à suivre, donnant l'impression de vouloir être à la fois une saga globale et la rampe de lancement de spin-offs, avec son lot de retours de personnages disparus entre le passage des "New 52" à "Rebirth", Justice League : No Justice séduit par une intrigue plus directe et un but déjà défini. Stratégiquement, c'est d'une (fausse) simplicité exemplaire, en se passant de tout logo marketing artificiel : Marvel peut en prendre de la graine, quand on veut relancer ses publications mieux vaut s'appuyer sur une histoire que sur des slogans.   

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