vendredi 19 août 2022

BATMAN - SUPERMAN : WORLD'S FINEST #6, de Mark Waid et Travis Moore


Ce sixième épisode de Batman - Superman : World's Finest est presque un hors série, ou du moins un numéro de transition. D'ailleurs, comme pour l'indiquer au lecteur, le dessinateur n'est pas le même : on est gâté car c'est Travis Moore qui suppléé Dan Mora (qui reviendra le mois prochain). Mark Waid, lui, revient sur le sort de Robin perdu dans le passé et c'est une vraie lettre d'amour au personnage.


Après avoir résolu le problème du démon Nezha, Supergirl explique avoir perdu Robin dans les couloirs du temps. Mais Batman sait que son sidekick saura laisse des indices pour être retrouvé.


Robin a atterri en 1892 et a intégré un cirque itinérant qui passait près de l'île de Corto Maltese. Le meurtre de deux récrues récentes accuse les fauves du dresseur César. Robin enqûete.


Batman et Superman surgissent et aident Robin dans ses investigations. Lors d'une représentation, le châpiteau prend feu. Superman évacue le public. Batman sauve un homme dans la cage du lion.


Mais dans la panique, Robin a gardé son sang-froid et découvert qui était le véritable meurtrier...

Franchement, on est verni avec cette série car même sans Dan Mora, qui achève la série Once & Future avec Kieron Gillen, DC donne à Mark Waid un partenaire de choix avec Travis Moore. La qualité est donc au rendez-vous, mais le scénariste semble avoir préparé l'absence de son dessinateur régulier.

En effet, World's Finest #6 est un épisode de transition entre deux arcs. Durant l'histoire qui s'est achevée au précédent épisode, Supergirl et Robin ont remonté le temps pour savoir comment les Guerriers de Ji étaient parvenus à enfermer le démon Nezha. Mais sur le chemin du retour, un orage avait séparé les deux amis et Robin était perdu dans les couloirs du temps.

Comment alors le retrouver ? Batman comptait sur l'ingéniosité de son sidekick pour avoir laissé un indice permettant de le localiser. Et justement, sur l'île de Corto Maltese où se trouve la tombe de Nezha, sous un rocher, Superman découvre une message gravé dans la pierre.

Cependant, Robin, en 1892, a intégré un cirque itinérant où deux recrues récentes ont été tué, visiblement par les animaux d'un dresseur de la troupe. Il obtient un délai avant l'exécution des bêtes pour prouver leur innocence et identifier le véritable assassin. Peu après Batman et Superman arrivent à cette époque...

Qu'importe si le moyen pour réunir Robin avec son mentor et son oncle est un peu grossier, là n'est pas l'essentiel. De toute manière, depuis le début de la série, Mark Waid a pris le parti de se ficher de toute vraisemblance pour renouer avec un esprit silver age, cette époque entre les années 50 et 70 où les histoires privilégiaient la fantaisie, l'action.

Ce qui compte, c'est que l'épisode, où les retrouvailles entre Robin, Batman et Superman étaient attendus, prévisibles, est une lettre d'amour au personnage de Dick Grayson. Et, sans vouloir être désobligeant avec Tom Taylor qui s'occupe de lui désormais dans la série Nightwing, Waid donne une leçon en la matière.

L'épisode est en effet une véritable synthèse de qui est Dick Grayson, de ce qu'il représente, de ses qualités héroïques. Tout est là : son passé circassien, ses talents de détectives, son amour des animaux, sa bonté naturelle, sa pugnacité, son sens de la camaraderie, le respect que lui vouent ses aînés. Tout ça en une vingtaine de pages et une enquête rondement menée. La révélation du nom de l'assassin et de son mobile est très bien vu, pas si facile à deviner. Le tout est raconté avec cette légèreté presque insolente, ce storytelling irrésistible de Waid, qui ficelle sa mini-intrigue avec une fluditié réjouissante.

Il y a ce classicisme élégant dans l'écriture de Waid, une écriture qui n'a rien à prouver, qui eest tellement juste dans la caractérisation, tellement précise dans la narration. Pas décompression inutile, pas de dialogues ronflants, pas de subplots tarabiscotés, juste du comic-book de haute volée, simple, accessible, cool. Hors mode, donc intemporel, donc imparable. 

Et puis World's Finest est une belle série, visuellement parlant. Dan Mora absent, on pouvait craindre que DC file un artiste passable à Waid pour attendre le retour de son partenaire. Mais l'éditeur compte visiblement sur cette série et veut faire plaisir au scénariste et au lecteur car c'est Travis Moore qui joue les fill-in de luxe. Actuellement, le dessinateur est occupé par une mini en creator-owned chez Image, mais il a dû produire ces pages depuis quelques temps car il n'est pas, comme Mora, capable de dessiner deux titres en même temps.

Et puis le résultat est trop impeccable pour avoir été casé en vitesse. Les planches, toujours colorisées par Tamra Bonvillain, sont magnifiques. Moore représente Robin à la perfection et chaque cadre témoigne d'un investissement sérieux. Les décors sont superbes et les animaux qui jouent un rôle décisif dans l'histoire sont parfaitement croqués (ah, ce lion !).

Moore a un trait moins dynamique que Mora, mais il réussit quelques scènes épatantes quand il s'agit de découper les acrobaties de Robin, rejoint par Batman puis Superman. Lors de l'incendie du châpiteau, l'action s'emballe mais le découpage est ultra fluide, avec une palette nuancée. Impossible de ne pas tomber sous le charme.

Ce que ça fait du bien de lire une telle série. Non seulement parce qu'elle se distingue par son ton, mais surtout par l'excellence de son écriture et de ses dessins. 

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