samedi 28 mars 2020

HIDDEN SOCIETY #2, de Rafael Scavone et Rafael Albuquerque


Le premier épisode de Hidden Society m'avait beaucoup plu et je vous avais encouragés à vous le procurer. Le deuxième procure le même sentiment. Rafael Scavone et Rafael Albuquerque racontent leur histoire sur un rythme toujours aussi soutenu, en s'appuyant sur des personnages accrocheurs et une intrigue simple mais efficace. On sait déjà qu'on aura envie que l'aventure se prolonge au-delà des quatre chapitres prévus.


Menacé par Mercy, le sorcier Ulloo raconte les origines de la Société Secrète qu'il veut recomposer. Au début, un dragon terrible fut réveillé puis neutralisé par un premier groupe. Ulloo reste le dernier à protéger le monde de cette menace car ses alliés ont rendu les armes.


Ses ennemis sont la Fratrie de Nihil, dont les pouvoirs abolissent le libre arbitre chez ceux qu'ils possèdent, et qui ont le projet de réveiller le dragon. Pour s'assurer le concours de Mercy, il lui offre de la libérer du contrat passé avec Belial pour sauver son fils. Et Il confie le Livre des Sorts à Jadoo, dont il a bien connu le père.


Puis Ulloo téléporte le groupe à Catane, en Italie, dans un palais, qui sert de repaire à la Fratrie de Nihil. Leur arrivée est vite remarquée et ils sont assaillis par les fidèles. Orcus, le génie de Laura, les contient un temps.


Ullo déplace l'équipe sur le toit mais la Fratrie les y surprend. Elle réclame la reddition de Jaddo, Laura, Orcus et Mercy et que Ulloo les suive. Tous refusent et doivent affronter une bourrasque magique qui blesse Mercy.


Ulloo est privé de la parole, incapable de formuler un sort, et enlevé par la Fratrie sous les yeux impuissants de ses alliés. Mercy s'éclipse. Orcus prévient Jadoo que leur sort à tous dépend désormais de lui tandis que Laura se sert de sa vision magique pour trouver où Ulloo a été emmené...

En se contraignant à établir leur projet en seulement quatre épisodes, les deux Rafael - Scavone et Albuquerque - n'ont pas de temps à perdre en salamalecs. Il faut aller à l'essentiel, vite, mais en restant clair. Après avoir consacré le premier épisode à la présentation des héros, place à celle de la menace qui les a réunis.

Evoquer la nuit des temps, un dragon surpuissant et une fratrie maléfique n'a en soi rien d'original. Ce sont des clichés et les deux auteurs les assument comme tels. la proposition de Hidden Society n'est pas de révolutionner le genre, mais bien d'offrir un divertissement simple, efficace, abordable. De manière limpide, ce comic-book s'adresse à un jeune public (mais peut s'apprécier au-delà).

Et naturellement, c'est cette fraîcheur qui contrebalance l'aspect convenu des éléments qui forment le récit. De ce côté, en revanche, impossible d'être déçu car c'est très bien mené. Scavone développe son scénario en exposant rapidement et de façon accrocheuse tout ce qui le compose et Albuquerque le met en images avec une virtuosité jubilatoire, bien mieux exploitée que dans sa dernière collaboration avec Mark Millar.

C'est bien simple : on a affaire à un page-turner redoutable. A peine a-t-on découvert les origines de la Société Secrète qu'on rebondit sur la dernière scène du précédent épisode. Ulloo convainc Mercy de ne pas l'exécuter tout de suite, confie à Jadoo une mission particulière et téléporte tout le monde en Italie, en territoire ennemie. D'une manière ironique, on lit cela au même moment où l'Italie est devenue une contrée en proie à un ennemi terrible avec l'épidémie du COVID-19.

Les péripéties ne lèvent pas le pied et on a droit à des surprises comme la révélation exacte du lien entre les pouvoirs de Laura (via son camée) et ceux du génie Orcus (capable de se transformer en quelque chose de plus imposant qu'une peluche flottante). Ce qui séduit en fait le plus dans le groupe de héros de Hidden Society, c'est qu'ils sont tous des outsiders, pas vraiment des champions sur lesquels on miserait. Mais ensemble, ils deviennent un tout, chacun mettant en valeur l'autre, chacun incarnant une sorte de figure familière mais subtilement déviée (la tueuse, le jeune magicien, le vieux sorcier, le génie grognon, l'aveugle déterminée). C'est une variation du Scooby-gang, comme on en voit ici et là ponctuellement (dans Buffy et les vampires ou West Coast Avengers version Kelly Thompson, en passant par Runaways de Brian K. Vaughan).

Les méchants sont pour l'instant moins consistants, bien que Albuquerque leur donne un aspect très original et inquiétant. De même leur plan est un peu bateau. Mais ce n'est pas très grave car ici le voyage, l'aventure compte plus que son terme, il s'agit de nous distraire et le récit y parvient sans problème.

Il faut dire que le graphisme est formidable. Chaque page déborde d'énergie, les personnages sont très expressifs et distincts les uns des autres, le découpage est varié et ultra-performant. Albuquerque est un dessinateur épatant, qui a cette facilité naturelle propre aux grands. Parfois, on peut lui reprocher de se dépenser sur des projets mineurs ou en compagnie de scénaristes un peu fumeux (comme Scott Snyder avec lequel il a collaboré longuement pour American Vampire). Mais ici, il donne sa pleine mesure et évoque, sans avoir le même style, l'esprit d'un Mike Wieringo.

Bref, je répète ce que j'ai dit : Hidden Society est un vrai sleeper, un régal. Si vous le suivez en mensuel, vous le savez déjà. Sinon, patientez un peu pour le TPB. En tout cas, soutenez cette mini, car elle mérite d'être développée.

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