vendredi 17 novembre 2017

THOR : RAGNAROK, de Taika Waititi


Le dieu du tonnerre a droit, comme Iron Man et Captain America, à son troisième film dédié avec ce Thor : Ragnarok, déjà fort d'un succès ayant dépassé ses deux premières aventures et de critiques favorables. Annoncé comme très différent de ses prédécesseurs, sous influence esthétique des Gardiens de la Galaxie (si on se fiait aux bandes annonces), qu'est-il ?

Thor vs. Surtur (Chris Hemsworth et Clancy Brown)

Après avoir retiré sa couronne de feu au démon Surtur (et l'avoir ainsi renvoyé au néant), Thor regagne Asgard où il surprend une représentation théâtrale donnée en hommage à son demi-frère Loki. Mais il devine la supercherie et oblige Loki à révéler qu'il a pris l'apparence de leur père, Odin.

 Thor et Loki (Chris Hemsworth et Tom Hiddleston)

Direction : Midgard (la Terre), où Loki a exilé Odin. Surpris par le Dr. Strange qui veille à toutes les intrusions mystiques, les deux asgardiens apprennent que leur père se trouve en Norvège et les y téléporte. Sur place, le père de toutes choses leur annonce qu'il est mourant mais aussi qu'il leur a caché l'existence de leur soeur aînée, Hela, déesse de la mort, sur le point de revenir après s'être échappée de sa prison, précédant le Ragnarok (la fin du monde des dieux). Odin se volatilise juste avant que sa fille n'apparaisse devant Loki et Thor dont elle brise le marteau Mjolnir. 

Hela et Scourge (Cate Blanchett et Karl Urban)

Evacués via le bifrost, les deux frères sont suivis par Hela qui les expulse du passage inter-dimensionnel entre la Terre et Asgard. Quand elle surgit sur son monde d'origine, elle tue sans sommation les guerriers Fandral et Volstagg mais se fait un allié de Scourge, puis elle part conquérir le trône vacant d'Odin et ses sujets, avec la ferme intention d'étendre son empire aux autres royaumes célestes, comme avant que son père ne la bannisse.

Topaz, le Grand Maître et Valkyrie (Rachel House, Jeff Goldblum et Tessa Thompson)

Thor s'est échoué sur la planète Sakar gouverné par l'excentrique mais puissant Grand Maître qui, pour divertir son peuple, entièrement composé d'égarés des quatre coins de l'espace, organise le tournoi des champions. Capturé par Valkyrie, Thor est livré au Grand Maître avec lequel il négocie sa liberté  contre une victoire sur le champion en titre. En revanche le dieu du tonnerre comprend que Loki, qui a gagné la confiance de son hôte, ne compte pas l'aider à fuir.

Thor contre Hulk (Chris Hemsworth vs. Mark Ruffalo

Une fois dans l'arène, Thor a toutefois la surprise de découvrir que le champion du Grand Maître n'est autre que Hulk, son collègue au sein des Avengers. Mais ce dernier ne retient pas ses coups et leur affrontement s'achève sur un match nul. Pendant ce temps, Hela extermine Hogun et la garde royale puis expose à Scourge son plan de conquête en ressuscitant des guerriers morts et son loup géant Fenris. A présent il lui faut la clé du bifrost pour se rendre sur d'autres mondes mais l'épée qui en fait office a été reprise par son possesseur, chassé précédemment par Loki, Heimdall.

Heimdall (Idris Elba)

Sur Sakar, Thor convainc, difficilement, Hulk et Valkyrie de l'aider à regagner Asgard pour vaincre Hela. Ils emmènent avec eux Loki qui, une fois la fuite de son champion avec les asgardiens, est considéré comme un traître par le Grand Maître - mais Thor, méfiant, l'abandonne après avoir trouvé un vaisseau que son frère comptait prendre seul. Les gladiateurs en profitent alors pour se révolter contre le tyran et ses sbires.

Thor et Hulk

Heimdall organise l'évacuation des asgardiens opprimés mais Hela et ses troupes leur barrent la route vers le bifrost. Ayant réussi à fuir Sakar via un passage dimensionnel, Thor, Valkyrie et Hulk arrivent juste à temps pour s'interposer.  

Le dieu du tonnerre

Le duel entre le dieu du tonnerre et sa soeur est terrible, coûtant même un oeil au premier (comme son père avant lui). Mais Thor libère toute sa puissance, autrefois régulée par son marteau, pour reprendre temporairement l'avantage. C'est alors que Loki surgit avec un gigantesque vaisseau véhiculant les révoltés de Sakar, dans lequel les asgardiens se réfugient. Le dieu de la malice reçoit l'ordre de son frère d'aller chercher la couronne de Surtur et de la replonger dans le feu pour ressusciter le démon.

Les "Revengers"

Scourge, pressentant la défaite de Hela, défend ses compatriotes contre l'armée de zombies soulevée par la déesse de la mort qui, en retour, le tue. Mais elle est ensuite surprise par l'apparition de Surtur qui provoque le Ragnarok, détruisant Asgard et la privant ainsi de la source de ses pouvoirs.

Hulk vs. Surtur

Ayant tout perdu, les asgardiens trouvent en Thor leur nouveau roi qui décide de les mener jusqu'à Midgard, avec à ses côtés Valkyrie, Hulk et Loki.

Deux scènes supplémentaires ponctuent le générique de fin :

- Loki interroge Thor sur l'accueil que vont lui réserver les terriens lorsque leur vaisseau en croise un autre, bien plus imposant et menaçant, celui de Thanos ;

- sur Sakar, après la révolte des gladiateurs, le Grand Maître est encerclé par des ferrailleurs dans la décharge de la planète et tente de les convaincre, alors qu'ils avancent d'un air peu amical vers lui, qu'une nouvelle ère s'ouvre pour eux.

Comme la trilogie consacrée à Iron Man, celle de Thor aura soufflé le chaud et le froid. Pourtant, comme l'a récemment rappelé Kenneth Branagh, si le premier film consacré au dieux du tonnerre avait été un échec, nul doute que la suite des plans cinématographiques des studios Marvel en aurait été fragilisé (quand bien même le premier Avengers fut tourné dans la foulée).

Entre temps, toutefois, le triomphe critique et commercial des deux opus dédiés aux Gardiens de la Galaxie a, de toute évidence, pesé sur la production de Thor : Ragnarok. D'abord dans le choix d'en confier la réalisation à Taika Waititi qui partage avec James Gunn la passion des fans de comics sans être un dévot, ensuite dans l'esthétique même du long métrage qui reprend les codes couleurs bigarrés des aventures des pirates de l'espace. Après le look un peu terne du premier film et celui trop sombre du deuxième, Thor 3 est nettement plus flashy.

Ce qui distingue aussi, plus généralement, les productions Marvel de celles de la Fox (avec la franchise X-Men) ou de Warner (les adaptations de DC Comics), c'est la volonté de traiter les histoires en réservant une place à l'humour. Parfois de manière efficace, parfois de façon plus balourde (pour ne pas dire déplacée). Et, là aussi, les scénaristes - le duo Chris Yost & Craig Kyle + Stephanie Folsom - ont pris le parti de rendre une copie franchement plus drôle.

A tel point, et c'est à la fois la force et la limite principale du film, qu'on a souvent l'impression que l'humour joue contre l'intrigue, que la comédie parasite l'action. A plusieurs reprises, les personnages sont dans une situation qui les ridiculise (pour les humaniser - ce qui est bien pratique quand on veut susciter de l'empathie pour des dieux ou des surhommes) ou s'échangent des dialogues ironiques (là aussi avec l'intention manifeste de rompre avec le côté un peu trop théâtral de dieux qui ne s'expriment pas naturellement). Mais l'instant d'avant ou d'après, voici les mêmes personnages aux prises avec des choix dramatiques, sujets à des émotions plus graves, et alors la blague désamorce maladroitement l'intensité invoquée pour la scène.

Waititi use (et abuse même) de ce procédé, si bien qu'on a l'impression que rien n'est jamais sérieux, compromis pour les héros. Une petite vanne et ça repart... Sauf qu'il est question d'une déesse de la mort, de la destruction du domaine des dieux, qu'on assiste à des scènes de tuerie massive. C'est tout de même assez dommage car, pour une fois, la méchante l'est vraiment, l'histoire ne lui cherche pas d'excuses, elle assume ses actes, ses méthodes (expéditives) et affiche ses ambitions (conquérantes). Le film donne d'ailleurs un coup de balai radical : plusieurs personnages secondaires apparus dans les deux premiers volets (les Trois Guerriers, Odin, sans compter les Valkyries dans un flash-back... Mais sans dire où est passée Sif, la grande absente de l'affaire) passent à la trappe, exécutés sans ménagement ni avoir eu le temps de briller une dernière fois.

L'ambition de Thor : Ragnarok s'affiche dans ses lignes narratives parallèles et simultanées, qui demeurent plutôt bien gérées entre ce qui se passe sur Asgard et Sakar (même si, là encore, on en est quitte pour savoir comment Hulk y a atterri depuis qu'il avait fui la Sokovie dans Avengers : l'ère d'Ultron). Le script opère des coupes drastiques sur certains plans (deux scènes sur Terre, mais qui suffisent avec la participation irrésistible de Benedict Cumberbatch en Dr. Strange et les adieux sobres d'Anthony Hopkins) mais, avec 130 minutes au compteur, le spectateur n'est pas volé.

Les prestations des comédiens - Chris Hemsworth très à son aise dans cette révision de son personnage, Tom Hiddleston qui se fait voler la vedette par la superbe Tessa Thompson, Mark Ruffalo épatant (le tournoi du Grand Maître est directement inspiré de la saga Planet Hulk et habilement intégré), et Cate Blanchett qui s'amuse comme une folle dans un registre inhabituel - y est pour beaucoup. La seule déception, d'autant plus grande que le comédien promettait beaucoup, provient de Jeff Goldblum, bizarrement un peu éteint (là où on attendait une composition survoltée).

Porté par la musique savamment décalée de Mark Mothersbaugh (compositeur habituel de Wes Anderson), Thor : Ragnarok est aussi divertissant que, parfois, creux et maniéré. Mais son réalisateur décape comme nul autre son héros, créant la surprise après le décevant Thor : les monde des ténèbres ou, cette année, Les Gardiens de la Galaxie 2. Prochains arrêts : au Printemps 2018 pour Black Panther, puis le gargantuesque Avengers : Infinity War l'été prochain, avant de découvrir Ant-Man & the Wasp dans un an environ. 

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