jeudi 25 novembre 2021

X-MEN #5, de Gerry Duggan, Javier Pina et Zé Carlos


Je n'aime pas jouer les grincheux et infliger à ceux qui me lisent des critiques chonchons mais je ne peux pas non plus dissimuler ma déception (croissante) devant  X-Men #5. Ce cinquième numéro écrit par Gerry Duggan est le pire de son jeune run : je m'y suis ennuyé. Et si visuellement, les planches de Javier Pina restent excellents, celles (heureusement peu nombreuses) de Zé Carlos sont pitoyablement moches.


Attirés dans un piège par les Reavers, ces anti-mutants transformés en cyborgs, les X-Men tombent comme des moches face à un ennemi bien préparé. Seule Polaris, protégée par un champ de force, réussit à leur tenir tête, le temps que ses partenaires se ressaisisent et achèvent la bagarre.


Alors que l'équipe reprend ses esprits, Polaris sollicite une entrevue rapide avec Marvel Girl au sujet du vote des membres lors du Gala Hellfire. Lorna Dane hésitait à accepter de faire partie des X-Men et croit que Jean Grey lui a forcée la main, mais elle reconnaît qu'elle se sent mieux intégrée désormais.


De retour à leur Q.G. à New York, les X-Men offrent aux plus démunis vivres et matériel pour affronter l'hiver qui approche. Ben Urich arrive sur place et demande à parler à Cyclope en privé. Il lui explique être en train d'écrire un article au sujet des mutants.


Et son enquête lui a permis de deviner que les mutants ont trouvé un moyen de ressuciter, comme en atteste la présence de Cyclope, ou le retour de Cable. Il donne un délai aux X-Men pour s'exprimer à ce sujet. Le Dr. Stasis assiste, en jubilant, à la scène, à l'abri des regards.

C'est difficile de lire et donc d'apprécier X-Men de Gerry Duggan sans comparer sa production à celle de son prédécesseur, Jonathan Hickman, pour qui, d'ailleurs, le terme "X-Men" ne désignait plus l'équipe de mutants mais une entité plus large et aussi un titre périmé.

On trouve là le coeur du problème : les X-Men en tant qu'équipe de héros mutants n'intéressait pas Hickman, qui était plus intéressé par la hiérarchie de Krakoa, avec le Conseil, puis le rôle de Capitaine Commandant de Cyclope, pouvant disposer de n'importe quel mutant pour des opérations spéciales. Hickman avait chamboulé la formation des X-Men pour en faire une non-équipe où tout le monde était susceptible d'être appelé par Cyclope, tout ne laissant aux autres scénaristes des personnages emblématiques dont il n'avait pas l'usage (Logan/Wolverine notamment). C'était un concept formidable, imprévisible, au service d'histoires en un ou deux épisodes maximum, le lecteur ne savait jamais qui serait de la partie.

Malheureusement, les X-Men de Duggan sont beaucoup plus (beaucoup trop) classiques. Il s'agit d'une banale équipe de super-héros mutants, avec une formation fixe. Mais le scénariste pourrait en faire quelque chose de bien s'il le voulait vraiment. Pour cela, il faudrait qu'il créé une dynamique de groupe, des relations entre les membres de ce groupe, parce que c'est dans l'ADN des X-Men, cette veine soap, avec de la romance, de la tension, des confflits internes. Toutes choses absolument abentes de la série actuelle.

Ce sont ceux-là, mais à vrai dire ce pourrait être d'autres X-Men qu'on ne verrait pas de différences. Duggan les pose là, les agite comme un marionnettiste tels des pantins désincarnés, et basta. La potentielle romance entre X-23-Synch ? Oubliée. Le couple Cyclope-marvel Girl ? Inexploité. Le caractère impétueux de Sunfire ? Inexistant. Polaris ici en vedette ? Transparente et uniquement préoccupée par ses lunettes cassées et son gobelet de café... C'est accablant.

En vérité, Duggan est aussi désinvolte ici qu'avec Marauders. Mais ça passait sur Marauders car le lecteur n'attendait rien de cette série : quand les épisodes étaient bons, il était content, et quand ils n'étaient pas bons, il espérait que ça s'améliorait. Mais quand on écrit X-Men, ce n'est pas la même chanson : le lecteur attend quelque chose de différent, de la tradition ou de la nouveauté, mais quelque chose de plus consistant. Et le compte n'y est pas : ni en termes de menaces (ici les Reavers, déjà abondamment utilisés par Duggan sur Marauders), ni en termes de narration (le principe d'un épisode, un adversaire est soporifique), ni en termes de style (inutile d'être méchant mais Duggan n'a pas le même niveau que Hickman).

Comme depuis cinq épisodes, Duggan ne semble se réveiller que dans les ultimes pages avec les subplots qu'il développe à pas comptés : d'un côté l'enquête de Ben Urich qui vient enfin en parler aux X-Men, de l'autre le mystérieux Dr. Stasis qui épie tout ce beau monde en s'amusant (mais bon, si c'est sensé faire peur, c'est raté). En tout cas, on ne voit pas bien en quoi ça pourrait constituer un gros problème pour les X-Men : si Jean Grey veut brouiller l'esprit d'Urich pour qu'il ne publie pas son article (comme elle en a visiblement déjà envie en le désignant comme un "problème"), ça ne devrait pas lui poser un gros problème moral. Et ce fameux Dr. Stasis n'a donc rien montré de bien préoccupant jusqu'à présent. Il reste Feilong, absent de cet épisode, qui s'est pas remis que Mars ait été colonisé par les mutants, mais lui non plus n'a pas un charisme débordant.

Il manque donc beaucoup (trop) de choses pour que ça fonctionne : un concept, du style, une dynamique, un antagoniste... Et un dessinateur. Pepe Larraz est encore absent (sans doute parce qu'il a dessiné une page pour le n° spécial anniversaire de Fantastic Four...), à part pour la couverture (sans aucun rapport avec le contenu). Alors Javier Pina rempile : je n'ai rien contre le résultat, c'est très bien, vraiment, Pina imite parfaitement Larraz, c'est propre, efficace. 

Mais visiblement, Pina est déjà à la limite après un épisode puisque Zé Carlos vient en renfort. Pour pas grand-chose heureusement : quatre pages. Mais c'est suffisant parce qu'elles sont affreuses. Et parfaitement inutiles par ailleurs. Cette espèce d'aparté dans l'épisode comme quoi Polaris aurait hésité à être élue et ce dialogue affligeant avec Marvel Girl où finalement elle est reconnaissaante parce que ça lui fait du bien de prouver qu'elle est digne d'être une X-woman (même si ensuite elle écrit une lettre à Vega pour lui dire qu'il serait bien utile dans le groupe)... 

Mais qu'est-ce que ça vient faire là ? Pourquoi Duggan écrit-il ça ? On n'en a rien à foutre ! C'est inutile, inintéressant. Comme lui aurait préféré compter Tempo dans l'effectif, je ne suis pas loin de penser qu'il cherche à torpiller Polaris et qu'il va l'éjecter de l'équipe dès qu'il le pourra (ce serait presque un service à lui rendre parce qu'il l'écrit vraiment d'une façon épouvantable).

Mais je m'énerve.

Franchement ? Je ne suis même plus sûr d'acheter le prochain numéro. Je suis déçu, je suis frustré, je suis en colère. Je la sens mal, la future ère post-Hickman de la franchise...

Aucun commentaire: