vendredi 4 juin 2010

Critiques 148 : REVUES VF JUIN 2010

BATMAN UNIVERSE 1 :
- Batman : Qu'est-il arrivé au chevalier costumé ? (1 & 2/2)
Pour lancer son nouveau bimestriel entièrement consacré à Batman (après l'arrêt de la revue Superman-Batman), Panini propose ces deux épisodes exceptionnels qui relatent les... Funérailles du héros !
L'entrée en matière est donc déroutante, mais permet à la fois de faire le point sur les derniers évènements du DCverse (Batman a été quasiment détruit psychologiquement dans la saga R.I.P. écrite par Grant Morrison et apparemment tué lors du crossover Final Crisis - en vérité, Bruce Wayne a été expédié en pleine préhistoire et son retour à notre époque servira de trame à la mini-série The return of Bruce Wayne).
Neil Gaiman continue de creuser le sillon de Morrison tout en empruntant des chemins de traverse : Batman assiste à ses propres obsèques mais le récit que font les invités de ses rencontres avec lui devient vite une occasion de maquiller les faits. Amis et ennemis déclarent en fait tous la même chose : le justicier aurait dû logiquement mourir depuis longtemps, seule sa persévérance et son intelligence lui ont permis de devenir le protecteur légendaire de Gotham.
Cela est brillamment écrit : l'ambiance onirique, les références (où l'on devine l'apport de Kurt Busiek, crédité par Gaiman), la galerie de personnages, la réinterprétation des faits, donnent matière à un script d'une grande beauté, parfois émouvant, parfois drôle, auquel il est difficile de résister - même si le sens de tout cela ne se révèle qu'à la toute fin.
Andy Kubert et Scott Williams, avec le coloriste Alex Sinclair, livrent des planches magnifiques. Le lecteur attentif pourra s'amuser à repérer les clins d'oeil à Jim Aparo ou Bill Finger dès les premières images. Il y a également des trouvailles dans le découpage, notamment lors des ultimes pages témoignant d'une invention à la hauteur du script.
Mention spéciale également au soin porté aux décors, extérieurs comme intérieurs : Gotham et ses bas-fonds y sont remarquablement reproduits.
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- Batman : Bataille pour la cape (1/3).
Ecrite et dessinée par Tony Daniel (l'artiste de R.I.P., entre autres), cette mini-série se penche sur la succession de Batman : qui pour le remplacer maintenant que son décés est connu de tous et déclenche le chaos à Gotham où, sous la houlette de Black Mask, les criminels se déchaînent ?
Le mérite principal de ce premier volet est de montrer qu'il y a beaucoup de prétendants (même si l'héritier le plus légitime ne fait guère de doutes) et que la simple absence de Batman suffit à transformer sa ville en champ de bataille. L'intervention d'un imposteur aux méthodes expéditives n'arrange rien...
Les dessins sont assez inégaux, comme souvent avec Daniel, dont le style évoque Jim Lee, avec plus d'élégance et de finesse, mais moins d'efficacité.
En revanche, pour un artiste ayant atterri sur le titre comme fill-in et finissant par devenir à la fois scénariste et artiste (une rareté aujourd'hui, surtout pour une série aussi exposée), la progression est remarquable et sa conduite du récit, sans être fabuleuse, est d'une belle fluidité.
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Les prochains numéros vont, après la fin de Battle for the cowl, accueillir les séries Batman et Batman & Robin (cette dernière étant écrite par Morrison, avec un artiste différent tous les arcs) : j'ignore si je poursuivrai longtemps l'aventure, mais ce démarrage est prometteur.

SPIDER-MAN 125 :

- Spider-Man : Peter Parker doit mourir !
Cet épisode de 37 pages est en fait l'Annual 37, ce qui explique son format exceptionnel (mais cependant modeste par rapport à ce qui suit).

Ecrite par Marc Guggenheim et illustrée par Pat Oliffe, l'histoire se déroule à Boston où, à la veille du mariage de Tante May avec le père de J. Jonah Jameson, Peter Parker va devoir affronter un certain Damon Ryder alias Raptor qui l'accuse d'avoir tué sa famille.
En vérité, il s'agit de ramener dans la série Ben Reilly, le fameux clone du Tisseur, qui fut au centre d'une saga épique, considérée par les uns comme un classique, par les autres (plus nombreux) comme un des pires récits de Spider-Man...

Se résumant à une (très) longue bagarre entre le héros et un adversaire au costume et aux pouvoirs affligeants, cet "annual" ne restera pas dans les mémoires. Le scénariste n'est guère inspiré (Guggenheim est un de ces innombrables transfuges des séries télé qui pond de mauvais comics) et on a oublié ce qu'il nous raconte rapidement après l'avoir lu.

Pat Oliffe a fait, lui, partie de l'armée de dessinateurs de la maxi-série 52 de DC : il y livrait des planches honnêtes qui se fondaient dans la masse, en se situant plutôt au-dessus de la mêlée. Mais sa faiblesse éclate ici, tout au long de cette trentaine de pages peuplées de personnages peu expressifs et où il n'a pas dû s'épuiser en concevant les décors.

Bref, c'est pas fôlichon.
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- Spider-Man 600 : Le monde selon Octopus.
Pour fêter le 600ème numéro du Tisseur, Marvel a par contre mis les petits plats dans les grands, avec au menu notamment une collection de couvertures spéciales (dont l'une par Olivier Coipel, reproduite dans la revue) et des mini-récits (dont l'un par Stan Lee et Marcos Martin, à lire le mois prochain), mais surtout avec cet épisode "king-size" de 62 pages (!) écrit par Dan Slott (l'un des animateurs principaux de la série depuis le dyptique Un jour de plus / Un jour nouveau) et dessiné par John Romita Jr (l'artiste emblématique du héros).
Le niveau est bien meilleur que pour l' "annual" même si, honnêtement, l'intrigue tient plus de la fête foraine que du chef-d'oeuvre : c'est sympathique mais pas renversant.

Le mariage de Tante May et de Jay Jameson va être célèbré mais le Dr Octopus, se sachant condamné par la médecine, a décidé de se manifester le même jour (n'oublions pas qu'il a failli lui aussi épouser la tata de Peter). Son projet est d'abord altruiste puisqu'il veut en piratant le système informatique de New York en améliorer le fonctionnement... Mais cette amélioration passe par l'élimination de Spider-Man.
Le héros voit littéralement la ville se retourner contre lui et aura bien besoin de l'aide de ses amis les Nouveaux Vengeurs, les Fantastic Four et Daredevil pour venir à bout de ses problèmes - même si les noces de sa tante se termineront sur une surprise de taille...

Dan Slott mène son récit avec beaucoup d'énergie, ramenant un vilain de premier plan sur le devant de la scène tout en le transformant radicalement et en imaginant un plan délirant. Il intègre à cette aventure trépidante des guest-stars sans que leur intervention paraisse trop forcée et l'on assiste au retour de la team-up Spidey-Human Torch en particulier avec plaisir.
Néanmoins, et c'est un défaut horripilant chez Slott, jamais il ne réussit à nous faire vraiment vibrer pour son héros, jamais on est inquiet pour lui : il traite son sujet avec une légèreté vite lassante, comme si tout ça, au fond, n'était qu'une vaste blague avant d'autres rebondissements (alors que, quand même, c'est le 600ème épisode !).

John Romita Jr (qui avait déjà dessiné le n° 500... Quand JMS était aux commandes de la série - c'est-à-dire quand elle ressemblait à autre chose que ce faux hebdo fourre-tout actuel) livre une prestation en demi-teinte.
Virtuose dans l'action, phénoménal dans la narration, il est étonnamment en-dessous quand il dessine ses persos en civil et doit mettre en images des scènes de transition où son génie du découpage est totalement absent.
L'encrage de Klaus Janson est aussi en cause : devenu pourtant le partenaire favori de JR Jr, je ne trouve pas que le complice de Frank Miller convienne à ce dessinateur et surtout soit encore au niveau exceptionnel de ses épisodes de Daredevil où ses finitions étaient somptueuses.

Bilan : un numéro vraiment atypique, mais en-deçà de ce que son contenu promettait. On passe un bon moment grâce à Romita Jr, mais ç'aurait pu être beaucoup mieux.


X-MEN 161 :

- X-Men / Vengeurs Noirs : Utopia (6).
La fin de ce crossover ne rattrape pas ses chapitres antérieurs et vient confirmer qu'il était dispensable.

Les X-Men se sont séparés en trois groupes pour affronter Norman Osborn, venu ramener l'ordre à San Francisco en supprimant Cyclope : la première formation combat les Vengeurs et les X-Men Noirs, la deuxième équipe (menée par Wolverine) a été libérer les mutants incarcérés à Alcatraz, et enfin le Club X a récupéré l'astéroïde M (ancien repaire de Magnéto) dans les profondeurs du Pacifique. C'est là que va se jouer le dernier acte.

Le souci de cette histoire, dont l'intention était louable au début (impliquer les mutants dans le "Dark Reign", ce qui semblait logique puisqu'Emma Frost fait partie de la Cabale d'Osborn), est d'abord le nombre de ses acteurs : entre Vengeurs Noirs, X-Men Noirs, X-Men, Club X, partisans de Trask, mutants rebelles, civils, n'en jetez plus, la coupe est pleine et déborde même !
Du coup, Matt Fraction survole plus qu'il ne creuse les situations, alors même qu'y sont intervenus des rebondissements importants : Namor et Emma Frost ont trahi Osborn, les X-Men ont élu domicile sur une île dans les eaux internationales (ce nouveau refuge évoque aussi le souvenir dramatique de Génosha, où périrent de nombreux mutants), Cyclope inflige un camouflet sérieux à Osborn, Emma et Scott se retrouvent...
Mais, donc, en vérité, c'est une impression de fouillis qui subsiste une fois arrivé au terme de cette saga mal fagotée, mal traitée, mal écrite, et qui semble intégré de force au "Dark Reign" (une période qui n'aura donc pas inspiré beaucoup de bonnes choses pour l'instant).

Mike Deodato illustre la conclusion du récit et nous gratifie de planches nerveuses, mais en-deçà de ce qu'il peut faire de mieux (comme sur ses Thunderbolts... En même temps, Fraction est très inférieur à Ellis).
Terry Dodson signe quelques planches et le mélange de son style avec celui de Deodato produit un curieux résultat, qui laisse aussi perplexe que lorsqu'il remplace Greg Land. Mais il est clair que le dessinateur de Songes n'a vraiment rien à faire sur les X-Men.

Un crossover à oublier.

- X-Men Noirs : Les aveux.
Se situant avant les évènements d'Utopia, ce one-shot ne met pas en scène les X-Men Noirs mais un dialogue entre Scott Summers et Emma Frost. Ces confessions croisées (Scott révèlant ses plans pour la communauté mutante, Emma son appartenance à la Cabale) restent cependant ennuyeuses et affreusement illustrées.

Le duo Craig Kyle & Chris Yost résument les faits avec molesse. Bing Cansino met ça en images dans un style qui veut rappeler Bryan Hitch mais avec encore moins de talent que son autre clone, Neil Edwards (voir Marvel Icons de ce mois).

Vous pouvez zapper.
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- Gambit : Un peu comme un prologue... Un peu comme un épilogue.
Le naufrage continue avec cet Annual de X-Men Legacy, écrit par le mauvais Mike Carey et illustré par un triste sire qui plagie Daniel Acuna, Mirco Pierfederici.

On y voit Gambit en mission pour détruire la Machine Oméga, dont se servait Osborn à Alcatraz pour priver les mutants de leurs pouvoirs durant les évènements d'Utopia.
Le héros file une raclée aux deux gardiens de l'engin (dont l'un réveille son côté obscur) et puis... C'est tout !

Aussi vite lu qu'oublié donc. Tout à fait oubliable aussi, il est vrai.
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- Les Nouveaux Mutants 4 : Le retour de la Légion (4).
Le dénouement du premier arc de cette série arrive comme une délivrance, après ce qu'on vient de lire : il s'agit sans discussion de la meilleure production de la revue.

David Haller va-t-il être maîtrisé par les New Mutants ? C'est Magie (Illyana Rasputin) qui va en décider puisqu'elle a investi la psyché torturée de leur adversaire où est prisonnière Karma. L'affrontement est délirant mais a valeur de test pour cette équipe devant se débrouiller sans les X-Men.

Zeb Wells aura réussi avec brio à relancer cette série en remettant en selle ses héros originaux, dans une intrigue certes tarabiscotée mais palpitante et singulière. Les personnages sont bien caractérisés, ce qui était essentiel dans ce récit construit autour d'un méchant aux personnalités multiples.
De plus, le scénariste a mené son affaire avec beaucoup de rythme et de densité (4 épisodes pour rassembler les héros, orchestrer leur bataille et dénouer le tout sans bâcler l'exécution).

Dommage que Diogenes Neves quitte la série au terme de cet épisode : son dessin, parfois inégal, comptait pour beaucoup dans l'attrait de l'entreprise, soutenu par un encrage de qualité et une colorisation soignée.
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Bilan : un numéro de piètre facture, hormis les Nouveaux Mutants. Je vais arrêter les frais avec la fin du story-arc de cette dernière série.

MARVEL ICONS 62 :

- Les Nouveaux Vengeurs 56 : Panne sèche (2).
l'arc entamé le mois dernier continue sur les chapeaux de roues : les Nouveaux Vengeurs neutralisés par le draineur de pouvoirs volé à Tony Stark et réparé par Jonas Harrow, seule Oiseau Moqueur fait face aux anciens complices de the Hood, mais sans résister bien longtemps.
Les dégats occasionnés par le combat à Times Square attirent sur place les Vengeurs Noirs, aussi rapidement dominés.
Pendant ce temps, Parker Robbins et Madame Masque sont transportés par Loki à Cuba : les partenaires d'Osborn y scellent leur alliance à l'insu du chef de la Cabale...

Brian Bendis mène son récit sur un rythme soutenu où l'action prime : le scénariste est bien inspiré et propose une évolution de la situation entre les criminels prometteuse. Au milieu de tout cela, les héros sont malmenés et la suite s'annonce délicate pour eux aussi (en particulier pour Luke Cage, victime de troubles cardiaques) : tout cela donne vraiment envie.

Aux dessins, Stuart Immonen livre une prestation toujours éclatante, injectant une formidable énergie aux scènes de bataille. L'intermède cubain démontre que l'artiste est aussi à l'aise quand il s'agit d' "ambiancer" une séquence intrigante à souhait - un vrai "subplot" comme savait si bien les distiller Claremont et Byrne au temps glorieux des X-Men.

Un grand cru !
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- Iron Man 16 : Dans la ligne de mire (9).
Cet arc est interminable, sans souffle, et d'une constance dans la mocheté qui épuise le commentateur. On commence à lire puis on tourne les pages avec indifférence puis... On passe à autre chose sans regret.

Faut-il encore nommer les auteurs de ce machin ? Non, ils ne le méritent pas.
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- Fantastic Four 568 : Le maître de Fatalis (3).
L'avant-dernier acte du run de Mark Millar et Bryan Hitch laisse un sentiment curieux : le scénariste a laissé Joe Ahearne rédiger les dialogues (pourtant un de ses points forts) et le dessinateur (appelé pour illustrer Captain America : Reborn) a collaboré avec Neil Edwards pour terminer cet épisode (le suivant sera signé Immonen).

Le contenu est tout aussi inégal : Millar connecte son intrigue à celle de son excellente mini-série 1985 en révèlant qui est le fameux Marquis de la Mort, le maître de Fatalis, et prépare un dénouement spectaculaire. Mais cela ne doit pas masquer le caractère parfois brouillon du déroulement de l'action : c'est dommage, on a une impression de démission, de relâchement, alors même que l'histoire gagne en densité.

Graphiquement, c'est un peu pareil : Hitch n'est plus vraiment là et les cases réalisées ou terminées par Edwards sont ratées. L'encrage de Cam Smith et Andrew Currie ne suffit plus à camoufler ces errements, et la colorisation de Paul Mounts mêlée à celle de Chris Sotomayor n'est pas heureuse.

Le final (qui comptera 38 planches) rattrapera-t-il ce chapitre bancal ? Rendez-vous le mois prochain.

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- Captain America 600 : La sentinelle de la liberté.
Cet épisode de 14 pages écrit et illustré par Marcos Martin est incontestablement le joyau de ce numéro : il fait partie des récits annexes à ceux parus le mois dernier pour la renumérotation de la série et avant le démarrage de la saga Renaissance, amenée à bouleverser les aventures de Cap'.

C'est moins ce qui est raconté (un récapitulatif de la carrière du héros et de son successeur), même si le résumé est brillant, que la manière dont c'est narré qui impressionne : chaque planche est en effet une pure merveille, au découpage élégant et inventif, faisant preuve d'un sens remarquable de la synthèse et brassant les références, les passages obligés, avec virtuosité.

Martin est vraiment un graphiste exceptionnel qui mériterait sa propre série (et pas simplement quelques piges sur Spider-Man).
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Bilan : un exemplaire mitigé, dominé par d'excellents New Avengers et un superbe hommage à Captain America, mais avec des FF en mode mineur et toujours l'épouvantable Iron Man.

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