dimanche 1 novembre 2020

AN UNKINDNESS OF RAVENS #2, de Dan Panosian et Marianna Ignazzi

 

Le premier épisode de An Unkindness of Ravens m'avait beaucoup plu. Dan Panosian avait su établir une ambiance prenante, avec des personnages bien campés. De quoi continuer l'aventure, d'autant que la partie graphique assurée par Marianna Ignazzi était également très séduisante. Toutes ces qualités se retrouvent dans ce nouveau numéro qui sait ménager suspense et révélations.



Wilma a rencontré la bande des Ravens dans la forêt attenante au collège où elles étudient et a découvert qu'elles étaient apparemment de jeunes sorcières. Mais, encore réservée à ce sujet, elle ne le révèle pas à son ami Ansel. Et elle rentre chez elle, trouvant son père assoupi dans canapé devant la télé.



Après cette journée riche en émotions fortes, Wilma se réfugie dans sa chambre où elle s'endort en examinant l'avis de recherche de Waverly Good. Elle fait un rêve étrange où la disparue au milieu des Ravens lui demande de la retrouver.


Le lendeman matin, Wilma regagne le collège où Scarlett Dansforth lui donne rendez-vous dans la bibliothèque. Ansel l'y accompagne et Wilma découvre que Scarlett a mené son enquête sur ses parents tout en l'invitant à faire partie de sa propre bande, en commençant par venir faire ses devoirs chez elle.


La discussion est interrompue par la principale Andrews qui répéte à Wilma qu'en cas de problème elle se tient à sa disposition. Alors qu'elle rejoint son casier, la jeune fille est à nouveau abordée par les Ravens qui lui déconseille d'aller chez Scarlett.


Joignant leurs mains à celles de Wilma, elles font apparaître un pentacle et indique ainsi à la nouvelle venue qu'elle est des leurs, car elle possède visiblement aussi des pouvoirs magiques...

Ce qui fonctionne vraiment bien dans An Unkindness of Ravens, c'est que rien n'y est asséné. Le scénario est écrit de telle manière que l'histoire intrigue efficacement le lecteur tout en lui laissant de l'espace pour qu'il tentee de combler les trous. On est dans la même situation que Wilma, découvrant, incrédule, ce qui se joue à Crab's Eye, dans son collège, entre ces diverses bandes de filles.

C'est d'autant plus malin de la part de Dan Panosian qu'il met en scène ce récit en alignant des motifs proches du cliché. Avec sa joile héroïne blonde, la peste Scarlett, la bande aux airs gothiques des Ravens, et des adultes en retrait, on se croirait vraiment dans une série télé assez inoffensive, sur le modèle de Dawson, Les Frères Scott et autres programmes pour adolescents. Mais ce qui nuance cela, c'est l'atmosphère.

Jamais en effet Panosian n'asséne quoi que ce soit. Faut-il prendre cette histoire au premier degré ? Comme Wilma, on est souvent partagé entre deux sentiments, balloté entre deux parties. Les Ravens sont-elles d'authentiques sorcières ? Ou le collège où elles étudient n'est-il que le théâtre d'une rivalité entre filles issues de milieux sociaux différents, avec entre elles Wilma, objet de leur attention parce qu'elle ressemble à s'y méprendre à Waverly Good, portée disparue ?

Subtilement, Panosian glisse quelques indices : un rêve étrange ici, l'apparition extraordinaire mais discrète d'un pentacle formé par les mains jointes des Ravens et de Wilma. Mais rien de plus spectaculaire afin, toujours, que le lecteur s'interroge. Wilma est à cet égard un personnage parfait car on peut se demander si elle n'est tout simplement pas trop impressionnable. Elle vient juste d'arriver dans cette bourgade de Crab's Eye, elle n'y connaît personne, son père ne lui est d'aucun soutien (trop perdu dans son chagrin de veuf), et là voilà confondue avec une autre, harcelée par une fille de riches notables du coin et un groupe d'élèves qui évolue comme une meute autour d'elle.

Pas besoin de se forcer donc pour être captivé par ce récit, son ambiance, son héroïne, les intrigues dont elle est le coeur. Tout juste peut-on regretter que le personnage de Ansel ne soit pas plus exploité, plus creusé, mais nous n'en sommes qu'au deuxième épisode et rien n'est donc perdu. De même, la principale Andrews suscite la curiosité par son comportement très protecteur, donc suspect, envers Wilma.

An Unkindness of Ravens est aussi facile à aimer parce que c'est une série très joliment illustrée. Marianna Ignazzi n'est pas italienne pour rien : son dessin évoque le meilleur des fumetti, à commencer par son découpage qui privilégie les cases occupant toute la largeur de la bande et assurant une lecture très fluide. Il ne faut pas prendre cela pour une facilité graphique car ce genre de plan exige de l'artiste de soigner ses décors, la profondeur de champ, les compositions. Ignazzi brille par ailleurs par l'élégance de ces enchaînements (comme en atteste la scène du rêve de Wilma).

Pourtant, cette dessinatrice a un trait qui, étonnamment, ne m'évoque que peu de références avec la BD. Ici, tout est simple, raffiné, élégant, épuré, comme du dessin de mode. Je pense souvent au génial René Gruau quand je lis les pages de Ignazzi. Il y a de l'allure dans ce dessin, une absence d'effort, quelque chose de quasi liquide. L'artiste utilise les ressources de l'infographie moins pour créer des effets voyants que pour fluidifier la lecture, arrondir son trait, en conserver la spontanéité. C'est remarquable.

Les premiers retours, critiques et publics, ont dû rassurer Panosian et Ignazzi sur l'attrait de leur projet. C'est mérité car très bien exécuté. Voilà une petite entreprise très plaisante et addictive.

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