jeudi 3 septembre 2020

EMPYRE #6, de Dan Slott, Al Ewing et Valerio Schiti


La saga Empyre s'achève avec ce sixième épisode. Enfin, presque, car il reste deux numéros à paraître en guise d'épilogue (Empyre : Avengers - Fallout et Empyre : Fantastic Four - Fallout) qui sortiront la semaine prochaine. Je doute cependant que cela suffise à compenser la déception...


Je ne vais pas rédiger de résumé car, vous vous en doutez, l'issue de l'histoire est convenue : les héros gagnent, les méchants perdent, er rien ici ne justifie les déclarations ronflantes d'usage de la part de Marvel comme quoi "plus rien ne sera comme avant".


En effet, on n'a même pas droit au classique du genre avec la mort d'un héros ! C'est dire si l'affaire est bouclée sans panache. Non pas que le sacrifice d'un justicier ou le décès d'un vilain soit une plus-value mais Al Ewing avait teasé là-dessus en racontant que Dan Slott l'avait mis en garde contre les réactions des fans...


Parti très fort avec ses deux prologues et un début de saga tonique, Empyre a ensuite traversé un "ventre mou" dont il ne s'est pas remis (même si le cinquième épisode était plus convaincant). Et ce problème de construction, de développement est symptomatique de son ratage.


En effet, et ça pour le coup, ce n'est la faute de personne, la parution d'Empyre a été impactée par la crise sanitaire. Celle-ci a contraint Marvel à publier les six numéros de l'intrigue principale à un rythme hebdomadaire (ce qui s'est avéré plutôt positif). Mais aussi à annuler des tie-in (ce qui a été plus préjudiciable).


Finalement, je n'ai lu aucun de ces récits attachés (j'avais commencé Empyre : X-Men, mais j'ai décroché, et d'ailleurs les événements relatés dans la série X-Men, lors des #10-11, suffisaient amplement). Mais on a pu mesurer qu'il manquait des pièces à l'édifice.

Le plus notable concerne Thor, absent de la saga. Empyre : Thor a fait partie des titres finalement non publiés et pourtant il aurait sans doute expliqué où était passé le dieu du tonnerre pendant tout ce temps. Marvel a préféré maintenir, par exemple, Empyre : Captain America, bien plus dispensable (si j'en crois ceux qui l'ont lu). Le fils d'Odin resurgit pour ce final comme un cheveu dans la soupe en agissant de manière spectaculaire mais au fond, son intervention est au diapason de plusieurs autres héros.

Par exemple, Tony Stark a passé la quasi intégralité de la saga dans la Montagne des Avengers à ruminer... Pour finalement concevoir une énième armure... Mais qu'il fait porter à Mr. Fantastic ! Reed Richards n'a pas non plus brillé : il s'est contenté la plupart du temps de relayer les (mauvaises) nouvelles du front à Stark et à interroger celui-ci sur son moral, alors qu'on aurait pu croire que ces deux savants, souvent alliés par le passé (notamment au sein des Illuminati) auraient collaboré plus concrétement pour résoudre la situation.

C'est étrange mais Empyre a totalement failli dans l'animation de ses personnages, comme si Slott et Ewing avaient voulu éviter les erreurs de leurs prédécesseurs, éviter de convoquer tout un aéropage de héros dans de grandes batailles épiques. Pourtant, même si ces réunions sont artificielles, elles participent aux codes de ces sagas et lui fournissent une ampleur. Là, on a quoi ? Des Avengers hors-champ, les Fantastiques éparpillés, et côté combats des miettes. 

Toute la partie concernant l'attaque de la Terre par les Cotati est réduite à peau de chagrin. Un plan sur Paris ici, un autre sur la Terre Sauvage là, c'est à peu près tout. C'est bien maigre pour s'emballer. A titre de comparaison, dans X-Men #11, Jonathan Hickman et Leinil Yu ont narré l'assaut sur Krakoa et la riposte vraiment énorme conduite par Magneto.

On se demandera longtemps où sont passés les Avengers dans Empyre. She-Hulk a fini possédée puis miraculeusement sauvée après avoir dérouillé la Chose (qui pourtant est un des rares héros capables d'en remontrer à Hulk, mais qui ici en a pris plein la tronche sans paraître capable de répliquer....). Captain Marvel est devenue une Accusatrice Kree. Black Panther était tout seul à tenter de repousser les Cotati au Wakanda. C'est quand même n'importe quoi.

Les FF n'ont été guère mieux lotis, mais tout de même ils ont été globalement plus présents. Hormis Mr. Fantastic donc, la Femme Invisible et la Chose ont donc été bien occupées. Mais Slott a greffé dans la série consacrée aux Fantastic Four une sous-intrigue avec les deux enfants Kree et Skrull récupérés dans le prologue : une addition inutile et encombrante à l'heure de conclure Empyre. Et qui semblait surtout là pour justifier le renfort de Wolverine et Spider-Man (que serait un event Marvel sans le griffu et l'araignée ? Pourtant la présence de Wolverine dans le contexte actuel, où les mutants vivent à part des autres héros, déroute et détone). La Torche Humaine a servi de faire-valoir à Captain Marvel mais in fine surtout souligné l'absurdité du Pyre (le Bûcher) dans le plan de l'alliance Kree-Skrull (absurdité liquidée d'ailleurs de façon confuse : visiblement, ce n'était pas si terrible que ça, cette idée de faire exploser le soleil).

Souvent donc, on a eu le sentiment que Empyre se déroulait en marge, dans d'autres périodiques, ou que des éléments manquaient à l'appel parce que des tie-in avaient été annulés. La plupart du temps, les héros semblaient curieusement atones, incapables, passifs, spectateurs. Même l'emploi de Hulkling s'est avéré déplorable (et ne parlons pas de Wiccan). Pas assez de héros, mais aussi trop de méchants car l'alliance Kree-Skrull n'a pas été très crédible (on va voir si les épilogues reviennent là-dessus puisque, malgré tout, ils gagnent la guerre et rebattent la carte géopolitique cosmique) et que les Cotati se sont misérablement plantés (quand bien même Quoi sort de scène en jurant qu'il n'en restera pas là, mais enfin, ce jeune pseudo-messie ne fait plus peur) - pire : ils sont à nouveau sous le joug de leurs pires ennemis et les Terriens ne sont pas prêts de leur pardonner.

Chargé de dessiner ce gloubiboulga, Valerio Schiti s'en sort plutôt bien : il ne paraît pas entamé par cet échec, son bilan est satisfaisant. Hélas ! pour lui, il n'a pas disposé d'un script lui permettant de briller autant qu'on le sait capable. J'ai souvent eu l'impression au cours de ces six épisodes qu'il était même bridé alors même qu'il produisait ses meilleures planches quand il devait composer avec les figures imposées de l'exercice (ces fameuses scènes épiques susmentionnées). C'est vraiment dommage parce que Schiti est sûrement l'artiste le plus complet pour un tel boulot depuis Immonen (et Ribic sur Secret Wars, mais qui a connu des retards). Toutefois l'italien a déjà rebondi puisqu'il travaille sur un nouveau projet, tenu secret, toujours pour Marvel (ce ne sera toutefois pas Fantastic Four comme j'en rêvais puisque RB Silva devient l'artiste régulier du titre au #25).

Vous l'aurez compris, je sors de Empyre dépité. Le résultat n'aura pas été à la hauteur des espérances. Marvel prépare déjà son prochain event (lié à Venom). Rendez-vous malgré tout pour le compte-rendu et l'avis sur les deux épilogues, censés dévoiler la nouvelle carte cosmique de Marvel et son impact sur les 4 Fantastiques et les Avengers (et au-delà puisque le dernier numéro de Guardians of the Galaxy aborde aussi le sujet).

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