jeudi 21 mai 2020

HAWKEYE : FREEFALL #5, de Matthew Rosenberg et Otto Schmidt


Le précédent numéro de Hawkeye : Freefall était sorti le 11 Mars. Marvel a décidé d'achever sa publication uniquement sur les plateformes numériques (tout comme DC va terminer certains titres comme Supergirl ou The Terrifics). Un enterrement de première classe en somme (car les lecteurs sur ce support restent minoritaires). Dommage car l'histoire de Matthew Rosenberg et Otto Schmidt méritaient mieux... Même si la mini-série prévue en cinq épisodes ne s'achève pas avec ce chapitre...


Clint (sous le masque de Ronin) rencontre le Caïd pour neutraliser the Hood. Mais Wilson Fisk préfére déléguer cette tâche et assure à Clint le soutien du Comte Nefaria, l'ex-beau-père de Parker Robbins. Malgré ses réticences, Clint accepte cette collaboration.


Clint/Ronin s'emploie alors à ruiner le business de the Hood et à obliger ses divers complices (y compris dans la police) à l'abandonner. Parker Robbins enrage, impuissant. Mais il trouve encore le moyen de contrarier Ronin lorsque celui-ci s'en prend à un de ses "fight clubs" clandestins en misant sur lui (et donc en diminuant ce qui lui rapportent ses victoires).


Clint ne se décourage pas. Grâce à Bryce, il apprend que the Hood fête bientôt son anniversaire dans un restaurant qu'il privatise. Il loue l'établissement à sa place. Parker Robbins menace Clint mais doit renoncer à l'exécuter quand il découvre que Wesley Welch, l'assistant du Caïd, est présent aussi.


Ce succès a son revers car Clint a oublié le dîner auquel l'avait invité Linda Carter. Il doit aussi s'expliquer à Captain America, averti par Spider-Man. Mais l'infirmière de nuit lui sauve la mise en reprochant aux deux héros de ne pas faire confiance à Clint.


Toutefois, c'est la dernière fois que Linda rend service à Clint car elle rompt ensuite avec lui. De retour à son domicile, l'archer écoute un message sur son répondeur laissé par Bullseye qui s'en est pris à Bryce. Il donne rendez-vous à Clint pour une discussion avec the Hood.

Tout d'abord, il faut revenir sur les circonstances de la sortie de cet épisode. Evidemment, du temps a passé depuis le quatrième chapitre, paru en Mars dernier. Mais deux choses interpèlent : d'abord Marvel a choisi de terminer la publication de Hawkeye : Freefall en la proposant uniquement sur les plateformes numériques et non plus en version physique. Cela ressemble furieusement à une façon de boucler la série en catimini et c'est assez indigne.

Ensuite, encore plus bizarrement, alors que le titre était prévu pour cinq numéros, on découvre à la dernière page de cet épisode que l'histoire n'est pas achevée. Le to be continued indique même que le sixième volet ne sera pas la conclusion. Cela rend encore plus étonnante la décision d'arrêter la version papier, même si je doute que Hawkeye : Freefall se transforme en ongoing.

Dans ces conditions, la lecture prend une dimension nouvelle. Le format change et l'issue du récit est incertaine. Après un quatrième épisode trop bancal, abusant d'absurdités, Matthew Rosenberg resserre les vis avec bonheur. Le ton est même un peu plus grave - seule une scène joue vraiment la carte de la comédie (irrésistible moment où Linda Carter sermonne Captain America et Spider-Man).

Le scénariste introduit dans son intrigue le Comte Nefaria et rappelle utilement qu'il fut le (quasi) beau-père de the Hood quand Parker Robbins sortait avec Mme Masque (la fille de Nefaria). On comprend donc facilement qu'il ait envie de calmer the Hood et donc d'aider Ronin à cette fin. De même, l'entrée en scène de Nefaria justifie la position du Caïd qui admet que les actions de the Hood sont devenues emabarrassantes pour lui mais sans qu'il veuille se mêler de sa neutralisation (Wilson Fisk est, rappelons-le, maire de New York, il ne peut risquer de voir son nom publiquement lié à celui d'un gangster comme the Hood).

Cette base permet de redéployer les agissements de Clint Barton sous le masque de Ronin. Il peut désormais, avec l'appui de Nefaria, attaquer frontalement Parker Robbins en ruinant son business et en retournant ses nombreux complices (y compris dans la police). Mais the Hood est un adversaire coriace et trouve un moyen de contrarier Clint quand il croit l'avoir affaibli.

La scène du restaurant, en présence de Wesley Welch, est une pépite : pour la première fois, Clint a enfin le dessus sur the Hood, et cela sans perdre son temps à faire le coup de poing contre lui (par contre les gardes du corps du gangster prennent cher). J'avais trouvé que Rosenberg abusait un peu sur le côté loser de Hawkeye et il corrige cela avec efficacité.

Tout le plaisir qu'on tire de cette lecture doit aussi beaucoup à ses dessins et Otto Schmidt fait des étincelles. On est un peu surpris de sa représentation du Caïd, qui, sous son crayon, a perdu son légendaire embonpoint, mais c'est un détail.

L'artiste dynamise très agréablement son découpage, notamment lors d'une superbe double page où on suit en parallèle les efforts de Ronin pour détruire le business de the Hood et la frustration croissante de ce dernier en découvrant les résultats du héros.

Pourtant, c'est quand il a l'occasion de se poser que Schmidt est encore meilleur. Lorsqu'il met en scène un dialogue entre Bryce et Clint ou orchestre le fameux sermon de Linda Carter contre Captain America et Spider-Man, son trait vif et expressif fait des étincelles. Voir Captain America repartir tout penaud après qu'on lui ait fait la leçon est un régal, d'autant plus qu'on sait que Clint a quand même trompé le chef des Avengers.

Outre son aisance dans le registre comique, Schmidt est aussi habile quand il faut suggérer une ambiance inquiétante comme en témoigne la dernière scène de l'épisode où Clint, rentrant chez lui, découvre le message audio de Bullseye tout en suivant des traces de sang menant au sous-sol de son repaire (surnommé "Fortress of the solid dudes", un clin d'oeil à la Forteresse de Solitude de Superman) et à Bryce, blessé par le tueur à gages. La disposition des cases, le jeu sur les ombres et lumières, l'enchaînement des plans sont excellents.

Si on peut donc déplorer que Marvel prive la série de sa version physique, le fait qu'elle se poursuive encore au moins un épisode garantit encore de beaux moments. Toujours ça de pris en ces temps incertains.

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