jeudi 1 décembre 2022

X-TERMINATORS #3, de Leah Williams et Carlos Gomez


Ce troisième épisode de X-Terminators ne déroge pas à la règle de cette mini-série : c'est toujours complètement déjanté et délicieusement idiot. Leah Williams et Carlos Gomez s'en donnent à coeur joie et nous amusent avec cette aventure qui part dans tous les sens, se moquant des bonnes manières. C'est donc jouissif mais aussi instructif...


Après avoir affronté leurs sosies dans le labyrinthe de glace, Dazzler, Jubilé, Boom-Boom et Wolverine doivent maintenant éliminer des vampires chasseurs envoyés dans l'arène par Alex.


Les quatre mutantes s'en débarrassent sans faire de quartier. Mais Dazzler a alors l'idée d'utiliser le volume sonore des clameurs du public pour faire exploser le labyrinthe de glace avec Boom-Boom.


Dazzler remarque alors que Alex observe la scène depuis sa tribune et se jette sur lui. Il disparaît mais Dazzler trouve dans la logue une créature de l'Outremonde utilisé pour créer les épreuves.


Wolverine entraîne Boom-Boom et Jubilé dans le puits sous le labyrinthe où elle sent une odeur familière. Rejointes par Dazzler et la créature, les filles comprennent qu'il s'agit d'un nouveau piège...

Il ne faut pas chercher à analyser raisonnablement X-Terminators pour l'apprécier. Cette mini-série est un sommet de wtf et ce troisième épisode le confirme : ça part dans tous les sens, les héroïnes réagissent après avoir subi mais continuent de se battre n'importe comment, improvisant en massacrant leurs adversaires et en faisant tout péter au passage.

Le rebondissement final qui révèle qui est le véritable cerveau de l'affaire depuis le début, à qui Alex livre Wolverine, Dazzler, Jubilé et Boom-Boom est une preuve de plus que ce récit n'obéit à aucune règle et donne au lecteur une suite de péripéties absurdes et hilrantes autant que sanguinolentes. Mais, en même temps, comme on l'a découvert dans le numéro précédent, on sait que notre quatuor de mutantes s'en sont tirées puisqu'elles expliquent leurs actions au conseil de Krakoa. Cependant, on s'interrogera quand même sur la manière dont elles y sont parvenues puisqu'elles comparaissent les mains liées dans le dos par Krakoa, ce qui veut dire qu'elles ont dû commettre de sacrées boulettes...

Le résumé ci-dessus ne donne qu'une vague idée de ce que raconte l'épisode proprement dit cr c'est difficile à retranscrire (et que j'ai voulu ne pas tout dire). On se tape dessus, on fait exploser des tas de trucs (y compris des vampires), on coupe, on lacère, et le sang gicle en quantité déraisonnable à chaque page. Leah Williams n'y va pas avec le dos de la cuiller.

Carlos Gomez lâche aussi les chevaux dans des pages à la dynamite. Comme pourraient le faire Terry Dodson ou Frank Cho, Gomez adore mettre en valeur la plastique avantageuse de ses héroïnes et il ne s'en prive pas, mais sans sombrer dans la vulgarité. Il faut dire qu'avec toute l'hémoglobine qui tâche ce qui leur reste de vêtements, l'érotisme est bien altéré et ce sont autant des pin-ups que des furies dont on suit les exploits.

Ceci étant dir, vous vous demandez certainement pourquoi j'ai jugé que c'était aussi une histoire instructive. Et c'est sur ce plan-là que X-Terminators est sûrement le plus audacieux, le plus original.

Il est fréquent de lire que Marvel est devenu (trop) "woke" avec la création de personnages issues des "minorités ethniques", comme Miles Morales/Spider-Man ou Kamala Kahn/Ms Marvel. Dans le MCU, c'est peut-être encore plus flagrant puisque même Namor est devenu un prince des mers méso-américains, ou que Valkyrie est interprétée par une afro-américaine comme Heimdall avant elle, sans parler des Eternels qu'on a vu incarner par des comédiens venant de partout dans le monde.

L'idéologie "woke" a mauvaise presse, et pour de bonnes raisons me semble-t-il puisqu'on a érigé cette façon de penser en une sorte de dogme pseudo-progressiste. Je n'en suis pas à dire qu'il faut rester entre blancs caucasiens, occidentaux, et ne pas s'ouvrir à la diversité. Mais les partisans du wokisme, sous prétexte d'être "éveillés", voient quand même le mal partout, accusant ceux-ci d'être des colonialistes, ceux-là des racistes systémiques, er d'autres encore d'être sexistes dès qu'on ne pense pas comme eux. Or on peut être progressistes sans être aveuglèment "woke".

Injecter de la diversité et de la tolérance n'est ni une faiblesse ni une force, c'est une volonté. Quand cette démarche est forcée par des courants qui réclament cela comme un dû, alors ça ne peut pas fonctionner car cela revient à imposer une volonté contre une autre. Sans oublier que toute l'idéologie "woke" est tout de même très lestée par une culpabilité quasi-religieuse, où on doit se repentir de fautes (réelles ou supposées) commises par nos aïeux. On ne corrige pas le passé en déboulonnant des statues ou en vandalisant des oeuvres d'art, on ne réécrit pas l'Histoire parce que cela froisse certaines susceptibilités modernes. Il faut assumer ce qui a été fait et faire en sorte que le pire ne se reproduise pas, pas faire comme si tout le monde était responsable, pas croire qu'il y a des bons et des méchants de façon manichéenne.

Ce qui me ramène à X-Terminators et à ses vertus instructives. Car si on lit cette mini-série sans faire attention, alors attention les yeux ! Dans cet épisode en particulier, Jubilé donne un coup dans la poitrine de Boom-Boom et en ricane, soulignant qu'elle a des seins si gros qu'il est impossible de les manquer. Puis ensuite Jubilé et Boom-Boom se mettent à plaisanter sur le gros derrière de Dazzler. Des propos parfaitement machistes, déplacés, graveleux. Sauf que...

Sauf que X-Terminators est écrit par une femme et ça change tout. Rédigé par un scénariste, ces dialogues seraient d'une beaufitude digne d'être dénoncés par des chiennes de garde. Qu'une femme assume ce genre de propos et cherche à faire rire avec autorise le lecteur à s'en amuser sans gêne. Et surtout dynamite le reproche fait à Marvel d'être "woke".

Leah Williams se fiche ouvertement de la bienséance. Elle choisit de rigoler de bon coeur sur les gros nichons de Tabitha Smith ou le gros cul de Alison Blaire tout en charcutant des vampires. Et bon sang, que ça fait du bien de lire ça ! De lire un comic-book aussi inconvenant ! De lire un comic-book mutant aussi peu sérieux ! Tout à coup, c'est comme si Leah Williams ouvrait grand les fenêtres de la déconne tout en faisant semblant d'avertir le lecteur que ce n'était pas pour tout public.

Ce faisant, la scénariste dédouane son dessinateur qui peut dès lors dessiner ces quatre filles girondes en train d'échanger des propos salaces tout en éclatant des vampires et en faisant couler le sang sans retenue. Carlos Gomez n'est jamais vulgaire, mais il ose tout ce que le script de sa partenaire lui fournit comme cette image cartoonesque où Boom-Boom montre sa poitrine en provoquant une explosion (en fait on ne voit donc pas ses seins mais le résultat est encore plus bidonnant).

Malgré tout, il s'en trouvera certainement pour pointer qu'il n'y ait pas par exemple de noirs dans cette histoire ou d'homosexuels, ou que tout cela est simplement bête à manger du foin, que ça n'est pas digne des publications de la franchise X ou de Marvel en général. Il y aura toujours quelque chose qui ne va pas car sans ça, comment vivraient les "woke" pour qui le déclinisme est une profession de foi et l'humanité un échec.

Mais si vous voulez lire un comic-book complètement barré, volontairement wtf, écrit sans aucune bride et dessiné avec vigueur, alors vous vous régalerez en compagnie des X-Terminators ! (Et il est même très possible que vous regrettiez que ça finisse dans deux mois.)

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