vendredi 4 décembre 2020

FIRE POWER #6, de Robert Kirkman et Chris Samnee


Ce sixième épisode marque la fin du premier arc de Fire Power (les six épisodes seront disponibles en recueil en Janvier prochain sous le titre Fire Power, vol. 2 : Home in Fire). Robert Kirkman avait promis des révélations choquantes mais il en a gardé sous le coude visiblement. Chris Samnee s'amuse comme un fou et nous régale toujours avec des planches superbes.


Chez Reggie, le collègue de Kellie Johnson, l'apparition de Wei Lun provoque d'abord la joie puis la colère d'Owen quand il remarque le tatouage du Clan de la Terre Ecorchée sur le bras du maître. Les deux hommes se battent, l'un réclamant des explications, l'autre de la compréhension.


Wei Lun raconte comment il a découvert dans le Temple du Poing Enflammé un livre dont la lecture lui a permis d'apprendre un terrible secret sur l'Ordre. En proie au doute, il est attaqué par Chou Feng et contraint à la fuite. Il rejoint alors le Clan rival et demande aujourd'hui à Owen de le suivre.


Owen n'a que le temps de savoir que son père biologique est mêlé à l'affaire avant que les tueurs de la Griffe du Dragon, envoyés par Chou Feng, ne resurgissent. Wei Lung ordonne à son élève de fuir avec sa famille pendant que Reggie et lui s'occupent des assassins.


Owen finit par entendre raison, non sans avoir vu Wei Lun gravement blessé. La famille Johnson part se réfugier chez le père adoptif d'Owen...

Bon, reconnaissons-le tout de suite : Robert Kirkman est loin de tout dire dans cet épisode et donc les révélations qu'il promettait en annonçant, le mois dernier, qu'elle changerait le cours de la série et du destin d'Owen Johnson sont loin de me combler. Le scénariste joue un peu la montre, préférant souligner l'impact du retour de Wei Lun face à son ancien élève.

De fait, c'est bien le mentor qui est au coeur de l'épisode, lui qui prend la lumière et monopolise la parole et notre intérêt. On le savait dans les parages, complice de Reggie, le collègue flic de Kellie Johnson. Mais qu'en serait-il lorsque Wei Lun et Owen seraient réunis, sachant que le premier faisait désormais partie du Clan de la Terre Ecorchée ?

Evidemment, ça (se) passe mal et nous voilà entraîné dans une scène d'action un peu gratuite et longuette, qui frise la redîte avec le premier entretien de Wei Lun et Owen dans Fire Power, vol. 1 : Prelude. C'est la première fois que la série bégaie ainsi.

Grâce au talent de Chris Samnee, ça passe crême et on savoure même, entre deux attaques-contre-attaques, la mine déconfite de Kellie quand elle comprend que Reggie est au service de Wei Lun. Enfin, tout se calme et ce dernier peut s'expliquer. On entre dans le coeur de l'épisode avec un flash-back, que le coloriste Matt Wilson traite très simplement, avec une palette très réduite - une sobriété payante après l'esbroufe qui a précédé.

Kirkman doit normalement à ce moment-là nous dévoiler un grand secret. Mais il ne fait que suggérer une trahison, une découverte accablante faite par Wei Lun sur le passé du Temple du Poing Enflammé. On n'en saura pas plus, c'est très frustrant. Compréhensible certes, car le scénariste a le droit de garder ses munitions pour plus tard. Mais frustrant tout de même aprce qu'on se dit que la fin de ce premier arc aurait bien mérité, comme nous, de vraies révélations et pas de simples allusions. Surtout quand il est implicitement dit que le père biologique de Owen jouait un rôle important dans tout cela.

Peut-être aprce qu'il savait que cela ne suffirait pas au lecteur, Kirkman passe à nouveau la main à Samnee pour la scène suivante qui voit redébarquer les assassins de la Griffe du Dragon et donc produire de l'action, du mouvement. C'est un ressort un peu facile, destiné à faire diversion, la ficelle est trop grosse pour qu'on ne la remarque pas et si le spectacle tient ses promesses grâce au découpage de Samnee, ses prouesses pour animer un tel morceau, ses compositions implacables (l'artiste explique, dans le désormais rituel dialogue avec Kirkman en fin de fascicule, avoir été jusqu'à dresser un plan du rez-de-chaussée de la maison de Reggie afin que les déplacements des combattants soient logiques), il ne masque pas la filouterie de Kirkman.

Mais ledit Kirkman est malin et il sait aussi que, faute d'un vrai cliffhanger, le fan va pester contre son script. Alors il met en scène la mort d'un personnage-clé... Tout en jouant sur l'ambiguïté de cette mort dans les deux dernières cases de l'épisode (soyez attentif aux yeux de Wei Lun...). Samnee, lui, dessine ça avec ce qu'il faut de précision, comme lorsqu'il aligne en une seule bande les visages d'Owen, Kellie, leurs enfants, et le père adoptif d'Owen chez qui ils se réfugient. Pas besoin de dialogue, tout passe dans leurs expressions, leurs regards, la lumière, l'angle de vue. On a la preuve, supplémentaire, que Samnee est aussi fort pour ces close-up que pour des bastons en plan large.

Il flotte donc ici un drôle de sentiment. On a presque l'impression d'avoir été roulé dans la farine par un scénariste roublard qui a promis beaucoup pour donner peu au final. En même temps, ce même auteur, soutenu par son dessinateur irréprochable, ménage sa monture et reste dans une logique feuilletonnesque, sachant que l'aventure reprend dans un mois, là où elle en est restée. Il ne s'agissait pas donc pas tant de marquer les esprits comme si un premier acte se concluait que de dresser une rampe de lancement pour un nouvel arc et le septième épisode.

Je reste frustré, mais sans colère. Car l'attente ne sera pas longue pour connaître la suite. Fire Power paraît devenir une course-poursuite haletante plus qu'une succession d'arcs quasi-détachés. C'est un format excitant, surtout quand il est entre de bonnes mains. Et celles de Kirkman et Samnee le sont.

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