lundi 1 octobre 2018

PETER PARKER : THE SPECTACULAR SPIDER-MAN #310, de Chip Zdarsky


Je n'avais pas prévu cette lecture puis, encouragé par de bons retours, je l'ai tenté. C'est un épisode spécial que ce 310ème numéro de Peter Parker : The Spectacular Spider-Man puisque c'est le dernier écrit par Chip Zdarsky, qui en assume aussi le dessin. Et, comme souvent, au moment des adieux, c'est l'occasion de mesurer la vision d'un auteur sur le personnage qu'il a animé.


Lors d'une de ses patrouilles nocturnes, Spider-Man surprend trois voyous en fuite. Il en arrête deux facilement et coince le dernier dans une impasse. Surpris, il découvre qu'il s'agit d'un adolescent payé pour faire le guet. La police arrive mais le Tisseur ne livre pas le garçon aux flics.


Plusieurs anonymes (et un super-héros célèbre) témoignent ensuite au sujet de Spider-Man, comment il affecte, positivement ou non, sur leur vie quotidienne, l'impression qu'il leur fait, la qualité de ses interventions. Parmi ces intervenants, une femme se distingue par sa bienveillance.


Il s'agit de la mère du garçon épargné par Spider-Man. Remis dans le droit chemin, il devint un élève modèle à qui le Tisseur rendait régulièrement et discrètement visite chez lui, l'aidant à faire ses devoirs. Sachant les efforts déployés par le héros pour son fils, sa mère estime qu'il est un exemple dans son genre.
  

Malheureusement, l'histoire s'est tragiquement terminée pour le garçon puisque les deux malfrats qu'il avait aidé profitèrent de leur libération sous caution pour le traquer et l'abattre pour se venger. Spider-Man, en apprenant cela, réconforta la mère et arrêta à nouveau les gangsters, cette fois jugés pour crime.


Puis Spider-Man rencontre un étudiant dont il a ouï dire qu'il réalisé un documentaire sur lui. Autrefois, lors d'un combat contre le Dr. Octopus, le Tisseur lui sauva la mise. Mais comment a-t-il su qu'il préparait ce film ? Parce que, sans le savoir, le jeune homme avait interrogé Peter Parker parmi ses témoins.

Je ne me permettrai pas de juger le run de Chip Zdarsky sur cette série dont je n'aurai lu en tout et pour tout que les trois derniers épisodes. Mais je peux affirmer que l'auteur a réussi sa sortie avec ce numéro très touchant, qui sonne juste.

Récemment, Dan Slott a lui aussi quitté le Tisseur (pour la série Amazing Spider-Man) et avait tiré sa révérence en compagnie de Marcos Martin : ils saluaient eux aussi l'aspect héros de proximité de Spider-Man en l'observant à travers les yeux d'un quidam. Zdarsky opte pour une approche similaire mais plus émouvante.

L'astuce narrative de présenter le Tisseur à travers des témoignages permet au scénariste de ne pas sombrer dans l'hagiographie : on a droit à un portrait équilibré entre partisans du héros et ses détracteurs, chacun l'appréciant ou le dénigrant pour des raisons spéciales, parfois profondes, parfois superficielles. Zdarsky évite cependant les propos trop convenus en ne convoquant pas des seconds rôles comme J. Jonah Jameson, Mary-Jane Watson, May Parker ou des super-héros proches de Spider-Man - tout juste glisse-t-il dans une case Captain America, comme un résumé de la communauté des justiciers, le compas moral absolu.

La vraie originalité du traitement de Zdarsky tient au fil rouge qui ponctue cette collection de témoignages avec la relation tissée (si j'ose dire...) entre Spider-Man et un adolescent mêlé à un braquage. Il devient une sorte de tuteur pour ce dernier, alors que Peter Parker n'en a justement pas eu après la mort de son oncle Ben. On voit le héros à l'oeuvre dans ses saynètes qui illustrent ses liens avec d'autres civils (un vendeur de hot-dogs dont le stand faillit être détruit par Venom et le Scorpion, et qui, depuis, offre quotidiennement un sandwich gratuit au justicier pour le remercier).

Puis, la fin approchant, le récit prend un tour dramatique inattendu mais poignant. Zdarsky reste exemplairement sobre, restant même muet lors de trois pages qui se suffisent à elles-même. Pour ceux qui ne connaissent pas le dessinateur de Sex Criminals, c'est l'occasion de découvrir son talent, sans fioritures, mais à la simplicité payante. Le découpage qui privilégie le "gaufrier" à neuf cases (très en vogue en ce moment) évite tout racolage, toute complaisance. L'image est plus que jamais là pour servir le script, et c'est parfait dans le cas présent.

Le dénouement est plein de malice, donnant à Peter Parker la permission étrange de parler de son alter ego avec des mots qui ont valeur de synthèse pour tous ceux qui voudraient écrire sur ce héros unique qu'est Spider-Man - soit un type qui ne se voit pas comme un super-héros mais comme un "ami du quartier", qui tente de faire de son mieux. Qui continue, sans cesse, de faire mieux.

Chip Zdarsky, comme Dan Slott dans Amazing Spider-Man #801, a parfaitement saisi l'identité réelle du Tisseur et le quitte en résumant idéalement ce pour quoi, comme lui, on l'aime.    

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