vendredi 8 décembre 2017

CAPTAIN AMERICA #696, de Mark Waid et Chris Samnee


Deuxième étape du road trip de Steve Rogers à la découverte de l'Amérique profonde et en quête de réhabilitation : après le précédent épisode brillamment mis en scène par la nouvelle équipe artistique formée par Mark Waid et Chris Samnee, l'essai est-il transformé ?


Sauga River, au Nord d'Atlanta. Steve Rogers arrive dans cette bourgade de l'Etat de Géorgie après avoir expliqué par téléphone sa lassitude d'être l'éternel locataire du SHIELD ou des Avengers. En vérité, il continue à explorer le pays pour apprendre à être plus proche de l'américain moyen et savoir comment il est considéré après les événements où son double nazi (cf. Secret Empire) a failli entraîner la nation dans la tourmente. Manquant d'argent, il propose ses services de plongeur à un restaurateur qui le reconnaît aussitôt.


La présence du héros est rapidement relayée par les médias locaux et attire l'attention du successeur du Swordsman à Atlanta. Il menace sur Internet Captain America de submerger Sauga River en faisant explosant son barrage hydraulique.


Captain America se rend sur place et répond au défi de son adversaire qui s'avère plus coriace que prévu. Mais le combat tourne à l'avantage du héros, même s'il découvre alors que le Swordsman a triché en piratant l'ouverture des vannes du barrage.


Captain America tente de refermer le réservoir à mains nues, en vain, avant de se rappeler du principe d'Archimède et d'éviter in extremis la catastrophe. Il peut repartir discrètement, avant que la foule ne se rassemble pour le fêter. Mais il ne voit pas sur le toit du restaurant où il s'était arrêté une silhouette menaçante l'observer en train de s'éloigner...

En toute honnêteté, je comprendrai le fan qui terminera cet épisode un brin frustré tant il est rapide à lire. L'argument de Mark Waid tient sur un post-it et l'exécution graphique de Chris Samnee est si virtuose qu'on tourne les pages sans d'abord les savourer. Lorsqu'on referme le fascicule, "déjà ?!" est l'exclamation qui nous vient spontanément.

Mais considérons l'affaire autrement : dévorer un comic-book si avidement signifie-t-il qu'il manque de densité ? Qu'il ne rassasie pas le lecteur ? Ou bien cela veut-il dire que ses auteurs maîtrisent tellement bien leur art qu'ils livrent un produit si irrésistible qu'on le lit d'une traite ?

Chacun tranchera mais il est indéniable que ce numéro est d'une efficacité redoutable et qu'on peut le relire dans la foulée en n'échappant pas à sa fluidité. Waid pose la situation simplement et embraye aussitôt avec la suivante qui détermine l'obstacle rencontré par le héros. L'affrontement ressemble à une formalité, une sorte d'étape obligée, mais ne manque pas ni de tension ni d'allure. Et quand survient le moment attendu de la résolution, c'est avec la même facilité qu'elle s'impose à nous.

Pour obtenir cette impression de facilité, il faut, à mes yeux, posséder son sujet, l'animer de telle manière qu'on ne sente jamais l'effort et c'est ce sentiment qu'on éprouve en lisant l'épisode présent : la complicité, l'osmose même, entre Waid et Samnee sont devenues telles que tout semble facile, aisé, naturel entre eux et pour nous. On frise l'insolence devant une telle précision, une telle entente. Je suis subjugué par un tel niveau atteint sans que cela paraisse jamais forcé : on est dans un tel qualité de divertissement qu'il est impossible de ne pas être emporté. Si bien que le récit, s'appuyant sur la menace d'un barrage qui s'apprête à noyer un patelin, a valeur de métaphore : les auteurs lâchent tout et nous voilà transporté de A à B sans qu'on s'en soit rendu compte.

L'excellence de la prestation donne des ailes pour la suite : dans trente jours, c'est à Kraven le chasseur que Captain America aura affaire. Vous avez dit prometteur ?
  


En lieu et place du traditionnel courrier des lecteurs, la rédaction de la série a demandé ce que Captain America (le personnage comme sa série) signifiait pour nous tous : ce mois-ci, c'est Joe Caramagna, le lettreur du titre qui y répond en évoquant de manière éloquente un souvenir personnel, quand, fils d'un immigré sicilien, il posa, vêtu d'un tee-shirt semblable au costume du héros, en photo avec son père et comprit que l'Amérique serait le pays de tous les possibles pour eux deux. C'est la loyauté de Captain America au rêve plus qu'au drapeau qui continue de toucher le lettreur 38 ans plus tard.  

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire