vendredi 6 octobre 2023

BIRDS OF PREY #2, de Kelly Thompson et Leonardo Romero


Ce deuxième n° de Birds of Prey peut donner l'impression d'un surplace et c'est vrai que Kelly Thompson avance (un peu) lentement. Pourtant le plaisir pris par la scénariste et le dessinateur, Leonardo Romero, est palpable et communicatif. C'est un excellent team-book avec des héroïnes attachantes et complémentaires comme on a envie d'en lire.


Après avoir dévoilé qu'elles devraient intervenir sur Themyscera, Black Canary doit convaincre Zealot qu'elles n'y vont pas pour affronter les amazones. L'équipe se sépare pour se fournir en matériel : Harley Quinn a promis un moyen de transport discret et Black Canary s'adresse à John Constantine...
 
Comme je l'indiquai en préambule, ce deuxième épisode de Birds of Prey ne fait pas tellement avancer le schmilblick. Kelly Thompson n'a pourtant pas l'habitude de traîner en route sauf que cette fois, pour la première fois de sa carrière, elle doit composer avec une vraie équipe et pas une héroïne entourée d'amies opportunément là pour elle.


De faut le rythme de son écriture s'en trouve sensiblement modifié car elle doit donner à chacune de ses Birds of Prey de l'espace pour exister. Comme son casting est solide et inattendu, il n'y a pas de souci de caractérisation : les cinq héroïnes ont toutes de la personnalité. Il faut juste qu'elle ait l'occasion de le démontrer.

Ainsi l'épisode s'ouvre par un flashback entre Black Canary et Sin, une manière simple de prouver au lecteur quel lien particulier unit les deux. Kelly Thompson le fait sobrement, sans chercher à nous tirer des larmes, dans une ambiance joliment mélancolique, devant un feu de bois dans une forêt.

Puis l'action revient au présent et reprend les choses là où on les avait laissées le mois dernier. Soucieuse quand elle apprend que l'équipe va devoir intervenir sur Themyscera, Zealot pense à se retirer car elle doute que l'opération se déroule sans verser du sang et elle refuse de tuer une amazone. Black Canary la convainc, de justesse, de rester.

Après Zealot, c'est au tour de Harley Quinn d'avoir son moment quand elle persuade l'effectif qu'elle leur procurera un moyen de transport sûr et discret. Il faudra attendre les dernières pages pour le vérifier et on renoue à l'occasion avec le goût de Thompson pour une certaine excentricité, une note d'absurde qui tranche avec la gravité du propos. Mais cela confirme que la scénariste sait comment animer cet électron libre qu'est Harley.

Thompson souligne encore davantage ce qu'elle avait entamé dans le premier numéro avec le tandem Batgirl-Big Barda, qui ne se quittent plus. Le contraste physique défini par le dessin de Leonardo Romero entre ces deux justicières vient appuyer la note humoristique car l'artiste a fait de Barda une géante très baraquée alors que Cassandra Cain est petite et fluette.

Le vrai morceau de bravoure, narratif et graphique, arrive quand Black Canary suit John Constantine pour une transaction qui, évidemment, tourne mal. Les autres Birds of Prey surgissent et une bagarre spectaculaire éclate avec des golems.

On ne peut qu'être ébloui par la prouesse de Romero pour mettre en scène cette baston. Jeux sur les cadres, les angles de vue, les valeurs de plan, jusqu'à une somptueuse double page merveilleusement composée où chacune des héroïnes montre une façon distincte de se battre : voilà une vraie leçon de découpage. Le plan est bluffant, avec un décor très fourni, des mouvements fluides, des interactions synchronisées (aucune ne se marche sur les pieds) et une utilisation de onomatopées géniale.

Rien que pour ça, on a envie de dire que cet épisode mérite le détour. Il y a une vraie magie qui opère quand Thompson et Romero collaborent tout comme quand ces cinq héroïnes s'entraident. Et c'est sans doute ce qui fait de cette série déjà une grande réussite : parce qu'entre ses auteurs et ses personnages, le lecteur perçoit une complicité commune et identique.

C'est aussi la preuve qu'un comic-book exclusivement féminin n'a pas besoin de brandir un étendard féministe pour justifier son identité. Ici, rien n'est asséné, tout est naturel. C'en est même surprenant parce que Thompson est partie avec l'idée d'une formation inédite pour ce titre : elle aurait pu avoir la pression, mais en vérité elle tient fermement les rênes, elle sait où elle va. Enfin, comme je l'avais déjà écrit le mois dernier, elle fait ce qu'elle rêvait de faire depuis longtemps et ce pour quoi elle est faite, ce pour quoi elle est la plus douée. Cette aisance innée pour l'exercice si périlleux du team book fait plaisir à lire.

Alors oui, ça pourrait aller plus vite, d'ailleurs Thompson par le passé a rarement eu besoin d'une mise en place aussi longue. Mais dès le mois prochain, il suffit de voir la couverture du prochain épisode pour ça, c'est évident que ça va bouger. Je n'ai aucun doute là-dessus et même si j'en avais, c'est déjà un régal de lire une aussi bonne entame pour être ravi et attendre ce qui vient avec confiance.

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