jeudi 9 juin 2022

THE BLUE FLAME #5, de Christopher Cantwell et Adam Gorham


Avec ce cinquième épisode, nous arrivons à la moitié de la mini-série The Blue Flame. C'est tout sauf un hasard si l'intrigue entame un nouvel acte avec, notamment, le début tant attendu du procès de la Terre. Christopher Cantwell ne déçoit pas, tout comme Adam Gorham, pour entraîner ses personnages et leur histoire dans des directions imprévisibles et passionnantes.


Le procès de la Terre débute et Blue Flame présente ses arguments en faveur de sa planète natale en vantant la soif de connaissance et les accomplissements de l'humanité.


Sur Terre, pour calmer le jeu avec sa soeur, Sam Brausam accepte de participer à un groupe d'entraide auquel l'accompagne Mateo. Mais la situation dégénère lorsqu'un patient le prend à parti...


C'est au tour de Yarix d'apporter la contradiction et il ne retient pas ses attaques contre les humains en montrant leur caractère belliqueux, auto-destructeur. Blue Flame est écoeuré.


Sam invite Reed à dîner pour revenir sur son expérience au sein de la Brigade de Nuit. Elle prend des notes en douce... Comme Yarix qui partage un verre avec Blue Flame lorsqu'il échange sur le procès...

Ecrire une mini-série ne souffre pas d'approximations, le scénariste doit faire preuve d'une exigence et d'une rigueur infaillibles pour prouver au lecteur qu'il maîtrise son projet et l'a construit avec un plan solide en tête. Ce n'est pas du tout la même mécanique que lorsqu'on élabore une série régulière, au  long cours.

Dans le cas de The Blue Flame, Christopher Catwell a entrepris un récit en dix chapitres, ce qui est déjà conséquent mais pas non plus très long. Il faut que chaque épisode compte, amène quelque chose à l'ensemble, n'ennuie pas le lecteur. Aussi, quand paraît en Janvier dernier ce cinquième volet on s'attend, parvenu à la moitié de l'histoire, à la fin d'un premier acte et à l'ouverture du second.

C'est bien le cas puisque le fameux procès pour décider du sort de la Terre s'ouvre enfin. Cette fois, Blue Flame doit tout donner, c'est son plus grand combat, l'échec est interdit. S'il perd, son monde est condamné et lui avec. Il sait aussi et surtout qu'il a en face de lui un procureur aguerri et retors et des Arbitres implacables. La partie est loin d'être gagnée.

Yarix comme Blue Flame vont d'abord agumenter sur les grands qualités et défauts de la race humaine. C'est, pourrait-on dire, un match nul à l'issue de cette première séance. Les qualités vantées par le terrien valent autant que les failles exposées par son adversaire. Notre monde est décrit, sommairement, dans les grandes lignes, comme celui d'une humainité capable de merveilles, de progrès, mais aussi de désastres, de faillites. Chacun pourra en convenir et trouver dans le résumé que fait Cantwell un portrait juste, équilibré : nous ne sommes pas parfaits, nous sommes parfois monstrueux, mais nous sommes humains, perfectibles, tout en ne renonçant jamais à ce qui causera sans doute notre propre perte.

Cantwelle et Adam Gorham mettent ces deux scènes en images avec équité. Des tableaux synthétisent les grandes avanacées et les les régressions de l'humanité, avec des motifs religieux, scientifiques, technologiques, intimes. Une vignette renvoie à la fusillade de Milwaukee, indiquant que pour Yarix tous les coups sont permis, et nous renseignant sur le fait que même si Blue Flame jurait être prêt, il ne l'était pour ça.

Lorsque l'avocat et le procureur se retrouvent après la séance pour partager un verre chez Yarix, un détail troublant - encore un (mais Cantwell et Gorham les intrègren si bien) - apparaît : échangeant sur les modalités du procès et l'attitude des Arbitres, Blue Flame ignore que son hôte prend des notes dans le but évident de les utiliser contre lui. Et on va voir que cela trouve un écho dans les scènes se passant sur Terre.

Car, pendant ce temps, les choses aussi bougent sur Terre. Refusant de supporter plus longtemps les sautes d'humeur de son frère, Dee lui impose de participer à un groupe d'entraide, une sorte de thérapie collective, où il pourra parler de ce qu'il a vécu, de son expérience de survivant. Mateo l'accompagnera pour être certain qu'il ne se défile pas et passe à nouveau sa journée au bar de chez Lou.

Gorham va alors démontrer, si c'était encore utile, la finesse de son découpage dans une scène explosive. Au début, tout se passe bien : Sam se présente, on le sent flatté d'être reconnu comme l'ex-Blue Flame et aussi comme le rescapé de la fusillade tout comme pour son courage de venir se confier devant des inconnus. Placé dans des conditions idéales, il remercie son beau-frère, loue son altruisme, sa tolérance face aux difficultés qu'il leur a imposées, à lui et à sa soeur, depuis qu'ils habitent tous ensemble. Mais tout va déraper.

Sans qu'on l'ait pressenti, grâce au dessin mesuré de Gorham et à la simplicité des dialogues, un autre intervenant prend la parolet pour demander à Sam pourquoi il n'a rien fait pour sauver des gens le soir de la fusillade. Après tout il se prétend un héros, et un héros, ça sauve des innocents, quitte à se sacrifier. Comment a-t-il survécu ? N'est-ce pas suspect ? Ne se serait-il pas planqué, caché derrière ses amis, des innocents, morts en quelque sorte à sa place ? Des questions assénées sans manière, choquantes, mais devant lesquelles Sam ne peut se défiler.

Sauf que Sam encaisse mal ces reproches, ces insinuations. Il s'emporte et son interrogateur aussi. Le ton monte. Le modérateur du groupe est obligé de s'interposer entre les deux hommes et de congédier Sam. Cela aura de lourdes conséquences...

Revenu au calme, Sam, dans la soirée, téléphone à Reed pour dîner avec elle et reprendre leur discussion au sujet de la Brigade de Nuit. Sauf que, là encore, par la fausse banalité de la mise en scène, Gorham va s'illustrer pour en faire un moment trouble à souhait et qui, surtout, fait écho avec une des scènes sur Exilos un peu avant. Au lieu d'évoquer ses amis et leurs actions, Sam décide de parler du Tribunal du Consensus, de son rôle d'avocat de la Terre, d'aliens, etc. Reed, comme Yarix, prend des notes à l'insu de Sam  sur ce déballage délirant.

Depuis le début, The Blue Flame brouille les pistes et enfonce le clou dans ce cinquième épisode où on entre effectivement de plein pied dans une zone rouge, tant pour Blue Flame sur Exilos, aux prises avec un procès très difficile, que pour Sam Brausam, rattrapé par ses démons et en même temps victime de sa franchise. La suite va devenir très glissante et avec elle le lecteur va s'enfoncer dans un flou savamment entretenu, vertigineux et addictif. Stay tuned !

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