mardi 17 mai 2022

NIGHTWING #92, de Tom Taylor et Bruno Redondo


On commence cette semaine chargée en sorties par Nightwing #92 qui marque le début d'un nouvel arc : The Battle for the heart of Blüdhaven. Tom Taylor a promis que cette histoire marquerait un tournant dans son run, donc on espère qu'il va convaincre, après plusieurs épisodes très inégaux, parasités par des guest-stars. Bruno Redondo est de retour au dessin, en grande forme, plus sobre qu'à l'accoutumée. L'âge de raison ?


Par le passé, quand il était encore Robin, Dick Grayson a souffert de son impulsivité. Mais il ne pouvait s'empêcher d'agir contre des malfrats. Aujourd'hui, il veut protéger Blüdhaven, fort de son expérience.


Il tient à célébrer la mémoire d'Alfred Pennyworth avec une statue. Jon Kent et Bruce Wayne sont là pour l'occasion ainsi que Blockbuster qui se voit empêcher d'éliminer son rival à cause d'eux.


Mais la nuit venue, pour se venger, il envoie ses hommes vandaliser le mémorial. Nightwing intervient et démasque les importuns afin que Oracle puisse les identifier.
 

Prévenu de cette nouvelle déconvenue, Blockbuster enrage. Mais il reçoit la visite d'un allié venu négocier une alliance...

L'arc Get Grayson m'a déçu, j'ai eu le sentiment que Tom Taylor partait avec une idée forte (faire de Dick Grayson et non de Nightwing l'homme à abattre) mais qu'il l'avait complètement dilapidée ensuite, entre numéro de cirque (l'épisode "plan-séquence") et interventions de guest-stars (les Titans, Jon Kent) trop parasites. Dommage.

A partir de ce mois, le scénariste inaugure une nouvelle histoire dont le titre est éloquent : la bataille pour le coeur de Blüdhaven, et avec la promesse qu'elle consituerait un tourant dans son run. On peut déjà mesurer à l'issue de ce n°92 que Taylor rassemble ses idées, ses personnages avec la perspective d'en tirer une synthèse et j'apprécie cela.

Tout débute par un flashback qui nous ramène à l'époque où Dick était encore Robin et Barbara Gordon Batgirl. Ces pages servent surtout un objectif moralisateur sur le caractère impulsif de Dick, qui lui a coûté cher durant ses années de formation. Mais Taylor glisse aussi, et c'est plus important, une scène sur le rôle de tampon incarné par Alfred Pennyworth entre le boy wonder et Batman. La leçon de tout cela : Dick Grayson plonge tête la première dans la bagarre mais surtout parce qu'il ne peut se retenir face à l'injustice.

Aujourd'hui, c'est un jeune homme ayant acquis de l'expérience, sans renoncer à son idéal de justice. Ni à son devoir de mémoire. Il a fait ériger une statue représentant Alfred et a convié Bruce Wayne mais aussi Jon Kent pour l'occasion. Les choses se corsent quand Blockbuster s'affiche aussi, avec le projet franchement exprimé d'en profiter pour éliminer son rival en choquant l'assistance. Cela est contrarié par la présence du jeune Superman.

La suite est conveue mais efficace. On comprend que Tom Taylor n'écrit pas cet épisode pour proposer un nouveau morceau de bravoure gratuit mais davantage pour disposer ses pions et préparer une confrontation future et spectaculaire. A cette fin, il réintroduit un méchant qu'il avait délaissé depuis un moment et qui offrir à Blockbuster une alliance assez terrifante.

Il y a là tous les éléments de la série enfin rassemblés : Dick Babs, Bruce, Jon, Alfred, Blockbuster, et celui dont je tairai le nom pour l'instant. Cette réunion sert à valoriser le plan du scénariste pour souligner l'importance de cette bataille pour le coeur de Blüdhaven. Il y a de l'ambition, et il faudra convertir ces belles intentions en une narration à la hauteur. S'il réussit ce coup-là, Taylor me convaincra qu'il n'est pas que bon pour des histoires "Elseworlds" comme DCeased ou Dark Knights of Steel, mais aussi comme auteur d'une série mainstream. Il faut aussi souhaiter que DC lui fiche la paix et n'aille pas obliger la série à composer avec l'event Dark Crisis (même si Nightwing y jouera un rôle). Un arc en ligne droite, crescendo, voilà ce dont à besoin ce titre, avec un récit tendu et un artiste au taquet.

Au taquet, Bruno Redondo l'a souvent été par intermittence. Parfois ce dessinateur m'agace avec son dessin aux décors trop numérisés et son trait trop lisse, mais je ne peux lui nier une volonté réelle de mettre en images le script qu'il a avec inventivité. Toutefois, il gagnerait à plus de sobriété pour, peut-être, enchaîner plus de quatre épisodes d'affilée.

Et il me semble que ce qu'il livre là est encourageant dans la mesure où le découpage est sans doute moins emballé, plus calme, mais aussi plus direct. Ce n'est ni avec l'action du flashback ni avec l'intervention de Nightwing contre des vandales que le lecteur pourra se régaler avec des acrobaties et des pains dans la tronche, mais ce n'est pas le propos.

Ici, Redondo a une mission plus subtile : celle de faire monter la sauce. On est juste avant la grande explication. Les belligérants se jaugent, se provoquent, ils ne s'affrontent pas encore directement. Tout ou presque se passe en vérité hors champ. Comme le note Grayson, il faut montrer qui est le boss, en l'occurrence qui est le véritable protecteur de Blüdhaven. Pour l'instant, c'est encore de la chicaya, on corrige des hommes de main, on se toise. Il ne faut pas trop vite montrer son jeu, ses cartes.

Redondo ne s'accorde qu'un petit plaisir avec une double page gratuite (quand Nightwing va attaquer les vandales). Sinon, il s'efforce de rester au plus prés des personnages et glisse quelques éléments rigolos : Alfred descendant d'une échelle depuis le Batplane avec une distinction impeccable, les pizzaiolos avec les têtes de Marv Wolfman et George Pérez (j'espère que ce dernier a vu ça avant de partir), Dick et Bruce tenant chacun la laisse de leurs chiens, Babs titillant Blockbuster en lui demandant s'il veut faire un selfie avec Jon Kent, Babs encore qui confirme à Nightwing avoir photographié les visages des vandales... 

Mention spéciale à Adriano Lucas, le coloriste pour son bel effort de traiter le flashback avec des couleurs un peu passées, comme celles d'un vieux comic-book - ça n'a l'air de rien mais ça suffit pour nuancer une scène et montrer le talent du bonhomme.

On croise maintenant les doigts pour la suite. Pour moi, Tom Taylor et Bruno Redondo jouent gros : s'ils se plantent, je laisse tomber Nightwing

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