samedi 30 avril 2022
THOR #24/750, de Donny Cates et Nic Klein, avec Walter Simonson, Dan Jurgens, J. Michael Straczynski et Olivier Coipel, Al Ewing et Lee Garbett, Jason Aaron et Das Pastoras
ROGUES #2, de Joshua Williamson et Leomacs
vendredi 29 avril 2022
KNIGHTS OF X #1, de Tini Howard et Bob Quinn
jeudi 28 avril 2022
DARK KNIGHTS OF STEEL #6, de Tom Taylor et Yasmine Putri
mercredi 27 avril 2022
CATWOMAN : LONELY CITY #3, de Cliff Chiang
lundi 25 avril 2022
BLACK HAMMER : REBORN #11, de Jeff Lemire et Caitlin Yarsky
Black Hammer : Reborn, c'esst bientôt fini, et comme Jeff Lemire ne fait rien comme les autres, pour le pénultième épisode de cette série, il n'écrit pas la suite directe du dernier épisode paru, mais nous ramène au quatrième. Ce twist n'est pas innocent et appuie le thème qui court dans toute l'oeuvre du scénariste. Caitlin Yarsky, en toute complicité, s'aligne sur cette situation avec un dessin simple et sobre.
samedi 23 avril 2022
THE NICE HOUSE ON THE LAKE #8, de James Tynion IV et Alvaro Martinez
The Nice House on the Lake entre dans son dernier quart avec ce huitième épisode. Le récit de James Tynion IV évolue tranquillement, sur un rythme de sénateur, et on lit tout ça avec parfois un ennui poli, comme si la machine était grippée après le hiatus de la série. Néanmoins, grâce notamment au dessin extraordinaire d'Alvaro Martinez, on se laisse porter jusqu'à un cliffhanger qui nous réveille opportunément.
Et cette découverte, bien entendu, je vais m'abstenir de vous la révéler mais, soyez-en sûr, elle va avoir des conséquences sur la suite et fin de la série. James Tynion IV sait soigner ses sorties et rien que pour cela on sera indulgent avec ce qui a précédé dans cet épisode.
Car, avouons-le, on s'ennuie un peu. Cette impression diffuse depuis la reprise de la série, après son break éditorial, se confirme ici : la machine semble grippée, comme si le scénariste cherchait un deuxième souffle pour accrocher à nouveau le lecteur. C'est le piège, inévitable, d'une série qui mise beaucoup sur l'ambiance. Et où le lecteur en sait (un peu) plus que les protagonistes.
La narration choisie par Tynion est casse-gueule car quand on décide de donner au lecteur des éléments qu'ignorent les héros de l'histoire, le risque réside dans le fait qu'on a le sentiment que lesdits héros ne comprennent pas assez vite la situation. Ou que le scénariste gagne du temps.
Puisqu'on sait que The Nice House on the Lake comptera douze numéros, forcément on s'interroge sur la capacité de l'auteur à tenir sur la durée. Que prépare-t-il dans la dernière ligne droite ? Il est acquis, vu les premières pages de chaque épisode, se déroulant après le coeur du récit, que ça ne s'est pas bien terminé. On voit à chaque fois un membre du groupe des amis de Walter évoluer dans un cadre flou mais apocalyptique, vêtu de haillons, parfois armé, et monologuant sur sa rencontre avec Walter, l'impression première qu'il lui a fait, et le bilant de tout ce qui s'est passé ensuite.
Si à chaque fois l'épisode s'ouvre sur un personnage isolé, ça signifie que l'histoire a vu le groupe éclater et que le projet de Walter a échoué. Dans cet épisode, on suit Sarah Radnitz, qui, dans la vie d'avant, officiait en qualité de consultante - un terme assez vague mais qui l'identifie comme quelqu'un dont l'avis compte pour des décisionnaires. C'est aussi un poste qui engage l'individu qui l'exerce puisqu'il est payé pour sonder, avoir une opinion, qualifier qualités et défauts.
A cet égard, Sarah témoigne avec une acuité intéressante puisqu'elle explique n'avoir pas apprécié Walter de prime abord. Elle le trouvait condescendant, comme s'il jugeait, jaugeait, toisait les autres. Puis elle a baissé la garde, comme les autres. Au coeur de l'épisode, les deux personnages ont un échange instructif : Walter évoque son envie de satisfaire ses amis même dans la situation extraordinaire et tragique dans laquelle ils sont désormais, et pour cela il les encourage dans divers projets (constructions d'un hangar, d'un spa, d'un observatoire - même si ce dernier semble embarrasser Walter -, d'une ferme). Mais Sarah le reprend, en douceur, car, estime-t-elle, en voulant trop bien faire, l'attitude de Walter peut paraître plus dirigiste qu'encourageante. Or, un leader se doit de rester à l'écoute de chacun, quitte à laisser faire.
Plus tard, Walter rejoint Norah dans la seconde maison où il la retient et elle complète le discours de Sarah en pointant l'hypocrisie de son hôte. Forcément qu'un jour, et peut-être arrivera-t-il plus vite qu'il ne le pense, le groupe découvrira ce qu'il a fait. Toutes ses bonnes intentions ne péseront pas lourd face à l'incompréhension et à la colère que cela suscitera alors. Walter s'emporte, perdant, comme c'est l'usage, son apparence humaine, persuadé de ne manipuler les autres que pour leur bien. Mais c'est justement là son hypocrisie (son aveuglement même) : il ne fait rien pour le bien des autres, il fait tout pour son bien à lui, depuis le début de cette aventure où il a piégé ses amis en détruisant le monde et en les cloitrant dans cette villa paradisiaque.
Un troisième grain de sable va encore plus enrayer la machine de Walter et c'est Ryan qui l'incarne. Ella a remarqué, sans comprendre pourquoi, que Walter l'évitait désormais. En voyant cela, elle s'est rendu compte de manière blessante de sa position dans le groupe dont elle est la benjamine et la dernière recrue. Elle se confie à Reg qui ne trouve pas les mots pour la rassurer, aussi sort-elle prendre l'air. Ses pas la conduisent, inconsciemment, jusqu'à la seconde maison où, donc, elle va découvrir quelque chose de bouleversant.
Tout cela mériterait d'être plus dynamique, et même si l'épisode est ponctué de splash-pages avec les plans des futures installations, on a l'impression que Tynion avance avec le frein à main, comme s'il se retenait pour ne pas aller trop vite. C'est dommage, et peut-être (mais, pour le savoir, il faudra attendre le dernier épisode) en vérité sa série est-elle un peu trop longue ou manque-t-elle de matière pour douze épisodes. Mais bon, ça devrait quand même bouger davantage le mois prochain.
En revanche, si le déroulement de l'action pêche un peu par manque de tonus, la série reste incontournable par sa qualité graphique. Alvaro Martinez éblouit à chaque fois et ce numéro ne fait pas exception à la règle.
Il y a une forme d'expressionnisme fascinant dans le traitement du dessin, quelque chose de brut, mais aussi de finement ouvragé. L'image est souvent sombre, avec des à-plats noirs profonds, et les sources lumineuses dans chaque plan sont précieuses. Mais ça ne signifie pas que c'est pénible à lire car c'est toujours étonnamment clair. Tout ce qui ressort est comme dégagé à l'acide, ainsi qu'on procède en verrerie.
Par ailleurs, le soin apporté aux expressions des visages, aux attitudes, à tout le body language est épatant. On sent que Martinez a eu à coeur de donner à chacun des protagonistes une véritable identité à ce niveau-là, sans doute pour compenser le fait que ce casting fourni pouvait parfois égarer le lecteur qui a plus l'habitude d'identifier les héros sur des bases plus simples comme les visages ou les costumes. Moi-même, parfois, je ne sais plus trop qui est qui, et en fait, c'est le groupe tout entier qui devient une entité, avec un narrateur différent à chaque épisode, comme une balise pour se repérer.
Ajoutez à cela que la colorisation de Jordie Bellaire épouse cette exigence graphique, avec des jeux de teintes anti-naturalistes, qui brouillent les cartes encore davantage. Il est certain qu'une fois qu'on pourra (re)lire The Nice House on the Lake d'un trait, ce sera certainement plus facile (et pour ma part, j'attends la vf, en un seul volume, chez Urban Comics, même si ça risque de ne paraître qu'en 2023 à ce rythme - car la série va faire un nouveau break après le #9... Et on ne sait toujours pas quand sortira le #10 !).
Bref, pour résumer, un épisode un peu cahin-caha. Si le titre mérite qu'on persévère, il faut tout de même reconnaître que c'est un cran en dessous du premier acte.
vendredi 22 avril 2022
BATMAN - SUPERMAN : WORLD'S FINEST #2, de Mark Waid et Dan Mora
S'en prenant, via des intermédiaires, à plusieurs super-héros, Supergirl et Robin partent à la recherche des guerriers ayant vaincu Nheza. Mais ils sont attendus par ce dernier.
Menacé par Felix Faust, Billy Batson (Shazam) reçoit l'aide de Superman et Batman. Mais le sorcier leur tend un piège...
C'est avec une intense jubilation que j'ai lu ce deuxième épisode de World's Finest, une série qui résume un état d'esprit trop rare dans les comics actuels, quelque chose de l'ordre de plaisir pur et du partage, une sorte de feel-good comic.
Il n'est pas étonnant que Mark Waid ait situé son histoire dans le passé (sans préciser exactement l'époque, mais en tenant malgré tout à préciser ce point) : c'est une manière simple et efficace de se démarquer de la production actuelle et de fuir une forme de dramaturgie contemporaine. Comme un retour aux sources, un âge de l'innocence.
Il se dégage en effet de World's Finest un parfum légèrement rétro, vintage comme on dit, mais sans que cela soit trop prononcé. Ce n'est pas un exercice de style passéiste ni nostalgique, mais plutôt une note d'intention de la part du scénariste pour avertir le lecteur qu'il se fiche d'être moderne et préfère être divertissant, intemporel.
Après le cliffhanger dramatique du précédent épisode, Waid ne perd pas de temps et expédie l'opération de Superman par le Chef de la Doom Patrol, une séquence spectaculaire qui met en valeur les méthodes hors du commun de cette équipe de freaks, en relation avec la nature extraordinaire de leur patient. La consigne est de ne pas perdre de temps, ni pour sauver le man of steel, ni pour faire avancer l'intrigue.
On apprend donc ensuite que la Doom Patrol a récemment récupéré une épée légendaire ayant appartenu à un cruel seigneur chinois revenu d'entre les morts et ayant acquis à la fois un pouvoir et une fortune immense avant d'être contenu par un groupe de guerriers. Mais ce Nezha s'est écahppé et s''attaque, avec la complicité de super-vilains, à des justiciers comme il l'a fait avec Superman.
Waid a une nouvelle fois recours à des invités, ce qui va sûrement devenir un gimmick de la série : cette fois c'est au tour de Supergirl d'apporter du renfort à Superman et Batman. Le scénariste, avec un art de la suggestion consommée, nous régale en montrant que la relation entre Supergirl et Robin est glaciale. Il ne nous l'explique pas autrement qu'en faisant allusion à une aventure partagée entre les deux personnages : c'est très drôle tout en invitant le lecteur à imaginer ce qui s'est vraiment passé. En tout cas, les voilà partis à la recherche des guerriers qui neutralisèrent ent incarcérèrent Nezha.
En passant, on voit aussi que Flash, Wonder Woman sont assaillis, et on nous dit que Green Lantern a également des problèmes. Mais un autre membre de la Jusrice League est dans une mauvaise passe : Billy Batson essuie les attaques de Felix Faust qui l'a réduit au silence, l'empêchant ainsi de se transformer en Shazam. Le piège tendu aux trois héros aboutit une fois encore à un cliffhanger plus que parfait (c'est-à-dire qui donne hâte de lire le prochain n°).
On ne s'ennuie donc pas une seconde et tout est bien dosé dans cet épisode, dense sans être indigeste, rythmé sans être précipité. Waid réussit à exprimer un nombre importan d'informations sans perdre le lecteur, et ménage temps calmes et mouvementés avec une maîtrise insolente. C'est l'oeuvre d'un auteur expérimenté qui sait raconter une histoire, simplement, mais avec brio. C'est aussi la différence entre les rockstars des comics actuels qu'on porte peut-être parfois trop vite aux nues et quelqu'un qui n'a plus rien à prouver et qui du coup ne prend pas la pose pour montrer à quel point il est fort.
C'est le même sentiment qu'on ressent en s'extasiant devant les planches de Dan Mora. Il est de ces artistes qui dessinent en donnant l'impression que tout est facile - mieux : que tout ça est follement amusant. Et ce plaisir pris par Mora est contagieux.
Alors que cette semaine on a assisté à un débat présidentiel et que des commentateurs ont reproché au candidat sortant d'être arrogant parce qu'il était simplement compétent (plus que sa concurrente), on pourrait alors pareillement dire que Mora est à la limite de la suffisance. Sauf que c'est tout bonnement un artiste doué, exceptionnellement inspiré et heureux de faire son job. Une sorte de privilège de surdoué, peut-être agaçant je vous l'accorde quand on dessine soi-même en ramant souvent, mais qu'on serait bien ingrat de pointer.
Il y a dans ce dessin une formidable énergie, galvanisante. C'est celle qu'on trouve chez les grands comme Immonen ou Samnee par exemple, des artistes qui ont travaillé pour atteindre le niveau qu'ils ont aujourd'hui et qui l'utilisent non pas pour briller mais pour améliorer l'histoire sur laquelle ils oeuvrent. Mora trouve toujours la bonne façon de raconter une scène par l'image, sa complicité avec Waid est totale, sa maîtrise des personnages, la composition de ses plans, l'expressivité, tout y est. Et la colorisation de Tamra Bonvillain est au diapason, avec un sens de la nuance très appréciable, et un respect absolu du trait.
Par ailleurs, j'ai été soulagé d'apprendre que Mora réalisera tout le premier arc (qui comptera 5 n°) - et j'espère qu'il ne s'arrêtera pas là !
Non, honnêtement, ne pas aimer Batman-Superman : World's Finest me semble aberrant. C'est un grand cru, chaque planche est un kif, l'histoire est jouissive. What else ?