Comme je n'en attendais plus rien, ce quatorzième épisode de Thor par Donny Cates ne m'a pas déçu : il n'a fait que confirmer qu'il était aussi médiocre que les précédents et que ce que fait ce scénariste avec ce personnage n'est pas pour moi. Nic Klein est en roue libre. Rideau.
Son esprit transféré dans l'armure du Destructeur, Thor fait enfin face à Donald Blake. Refusant de se rendre aux injonctions de Loki et Odin, l'alter ego du dieu du tonnerre reçoit une raclée par l'arme la plus puissante d'Asgard.
Mal en point mais pas vaincu, Blake invoque le marteau Mjolnir mais Odin rappelle ce dernier à lui. Pourtant c'est Beta Ray Bill qui s'en saisit le premier et reprend ainsi sa place de maître de guerre à laquelle l'avait promu Thor.
Ramassant la canne brisée de Blake, Loki la reconstitue et la jette au Destructeur, libérant ainsi Thor. Le Dr. Strange contient Blake avec sa magie et Odin pense alors en finir avec celui qu'il avait jadis créé. Mais Thor s'interspose et congédie son père, avec lequel il aura une explication plus tard.
On ne pourra pas me reprocher de ne pas avoir insisté mais ça n'aura pas pris : j'attendais beaucoup de la reprise de Thor par Donny Cates après le run interminable de Jason Aaron (dont la seule bonne idée aura été de donner le rôle, pendant un temps, à Jane Foster - idée finalement briévement tenue, hélas !). Mais passé un premier arc mi-figue, mi-raisin, et un intermède de deux épisodes inutile et affligeant, ce deuxième arc, Prey, aura eu raison de ma patience et de mon indulgence.
Le pire dans tout ça, c'est que la conclusion de cette histoire est totalement stupide et gâche encore un peu plus le personnage de Thor, dont on comprend qu'il est un régent idiot, ingrat et brutal. Entretemps, Donald Blake a lui aussi pris cher et n'aura même pas eu droit à une fin digne de ses méfaits : au lieu de ça, Donny Cates a préféré que Loki dispose de lui en l'enfermant dans une oubliette avec un serpent, ce qui veut dire que Blake refera inévitablement des siennes quand il aura trouvé un moyen de se libérer, plus ivre de vengeance que jamais. L'astuce est tellement grossière qu'elle est presque risible.
Je fais un peu mon "grumpy" critique en écrivant ces lignes, mais honnêtement, je me demande ce qu'on peut trouver de si extraodinaire à Donny Cates. Sur YouTube, je suis la chaîne de Max Faraday ("Max Faraday's comics & stuff"), un libraire qui cause comics, vf et vo, et qui, lui, est un fan du scénariste. Récemment, je lisais une de ses vidéos, pertinente, dans laquelle il exposait comment Cates avait patiemment bâti tout un univers à lui au sein du Marvel-verse, à travers les différentes séries dont il a eu la charge. Une démonstration probante que Cates n'est pas un manchot mais bien un type avec un plan cohérent, particulièrement dans la branche "cosmique" puisqu'il a écrit Thanos, Silver Surfer : Black, Guardians of the Galaxy, Venom, Thor.
Mis bout à bout, ces titres, ces runs, forment une continuité assez épatante, qui rappelle d'ailleurs ce que fit Rick Remender avec Uncanny X-Force et Uncanny Avengers (où il développa une vaste intrigue avec Apocalypse, Kang, Wolverine, Thor, Crâne Rouge, etc.). Mais alors pourquoi ça ne prend pas avec moi ?
Je crois que mon souci avec Cates, c'est son style même. Il partage avec d'autres auteurs contemporains cette façon de démarrer très fort, puis de patiner, et enfin de conclure à la vas-comme-je-te-pousse. Le problème, c'est que, jusqu'à présent, tout ce que j'ai lu de lui, répéte ce modus operandi. Mais fondamentalement, cela vient, à mon avis, d'un manque de sentiment frappant pour les héros qu'il anime (même si je ne peux pas parler pour Venom que je ne lis pas).
J'ai déjà comparé Cates et son Thor au Daredevil de Chip Zdarsky, qui finalement semble tout faire pour éviter d'écrire Matt Murdock et son alias, au point de l'avoir envoyé en prison et de l'avoir remplacé par Elektra comme ange gardien de Hell's Kitchen. Cates a le même penchant avec Thor dont on a pu constater dans ses deux arcs qu'il était relégué au second plan, quand il n'était pas réduit à de la figuration. Dans l'arc The Black Winter, Thor devenait le héraut de Galactus, une façon de le déplacer du centre du récit, d'autant que la menace à affronter concernait Galactus et pas Asgard. Dans l'arc Prey, Thor a passé les 3/4 de l'histoire dans la dimension où avait été oublié Blake, et il était littéralement incapable de s'en extraire (un comble pour le nouveau Père-de-tout, dont la puissance devrait lui permettre de se sortir de ce genre de situation).
Pendant ce temps, on a eu droit à une sorte de défilé de seconds rôles et d'invités qui affrontait Blake (Beta Ray Bill, Lady Sif, l'armée d'Asgard, Throg, Dr. Strange, Valkyrie). Les scènes avec Thor se limitaient à le montrer coincé dans l'enfer de Blake en train de hurler et de déclencher des éclairs... Lorsque, à la fin de l'épisode du mois dernier, on a vu le Destructeur et Odin entrer en scène, ce n'était encore une fois qu'un leurre pour promettre quelque chose au fan... Dont Cates les prive dans ce numéro. Le Destructeur se contente de balancer quelques bourre-pifs à Blake, et Odin... Ne sert strictement à rien, sinon à être congédié comme un malpropre par son fils. Thor et son père ont toujours eu des rapports compliqués mais enfin reprocher à Odin le bazar des derniers épisodes, c'est quand même fort puisque c'est Thor qui a décidé de ramener Blake pour aller consulter les anciens dieux !
Peut-être assiste-t-on à une sorte de mode où mal écrire (quand il ne s'agit pas de refuser sciemment) d'écrire un héros est tendance. En tout cas, ce n'est ni ce que j'aime lire ni ce que j'estime digne. De ce point de vue, Cates ne fait pas mieux que Aaron et son questionnement obsessionnel sur la "dignité", le "mérite" de Thor (à brandir Mjolnir, à prétendre au trône d'Asgard, à être une dieu, à être un héros) : Thor continue d'être mis en scène comme un abruti, un imbécile, sans noblesse, dans des combats minables. Quel est l'objectif, le propos de tout ça ? Je l'ignore.
Nic Klein est aussi une déception. Si c'est un excellent dessinateur dont le style et la technique solide, le trait vif, brut, conviennent au personnage et son univers, il ne tient pas la distance. Jamais je n'ai eu le sentiment que Klein était en mesure d'élever son niveau de jeu, de produire des planches audacieuses, de camper un Thor marquant. Le contraste avec le Thor que représente Olivier Coipel sur les couvertures de la série est terriblement désavantageux pour Klein dans la mesure où Coipel, avec trois arcs en tout et pour tout sur ce personnage (deux avec JMS et un avec Fraction), a réussi à imprimer sa patte sur le personnage, à lui conférer un charisme, une présence, une majesté après laquelle tous ses successeurs ont couru (en vain).
Quand le script ne lui demande pas d'efforts dans le découpage, Klein assure pour produire des splash pages (ou quasi), qui ne manquent pas d'une certaine puissance, mais qui soulignent aussi, cruellement, ses limites de narrateur. Les torts sont cependant bien partagés parce qu'on ne peut pas attendre d'un artiste des miracles quand il dispose d'un script de toute manière insuffisant. Mais bon, c'est tout de même pauvre graphiquement.
Je suis sans doute excessif, méchant avec cette série et son équipe artistique. Mais je ne peux pas dissimuler ma déception et faire comme si, au fond, c'était juste passable. Peut-être que si Cates passait moins de temps à relier ses séries entre elles et plus de temps à concevoir des intrigues originales et suffisantes, ça fonctionnerait mieux. Mais ce n'est pas le cas, donc j'arrête les frais.
le châtiment que Loki fais subir à Donald Blake est une référence à la mythologie nordique, on nous dit que après que Loki est tué Balder, Odin le punis en l'attachant à un rocher sous un serpent dont le venin goutte sur son visage. Et lors du Ragnarok, Loki se libéra, puis mena les géants vers une guerre contre les dieux nordique.
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