jeudi 24 septembre 2020

X OF SWORDS CHAPTER 1 : CREATION #1, de Jonathan Hickman, Tini Howard et Pepe Larraz

 

X of Swords : Creation est le premier des vingt-deux chapitres du crossover, donc c'est le vrai début de l'histoire. Aux commandes, on trouve les scénaristes Jonathan Hickman et Tini Howard et le dessinateur Pepe Larraz. Le format de l'épisode est hors normes avec ses soixante-douze pages (!). Mais quel épisode ! C'est épique. Et comme un signe de son excellence, facile à comprendre à à résumer.


Un messager gravement blessé par une flèche empoisonnée arrive à la Citadelle de Saturnyne, au centre de l'Outremonde, lui-même le carrefour du multivers. Il prévient qu'Arakko est tombée sous les assauts de l'armée d'Amenth conduite par les quatre cavaliers originels d'Apocalypse. Saturnyne consulte son tarot et voit l'avenir dans les cartes.


Krakoa. L'Invocateur revient de sa mission de reconnaissance à Arakko avec le Hurleur, gravement blessé, qui est conduit auprès du Guérisseur. Apocalypse introduit son petit-fils au sein du Conseil de Krakoa et tous deux résument la situation, depuis ses origines jusqu'à aujourd'hui.


Un vote à main levée décide qu'il faut fermer le portail external entre Krakoa et l'Outremonde. Sauf que Krakoa s'y oppose car l'île refuse d'être à nouveau séparée de sa moitié, Arakko. Un compromis est trouvé : Apocalypse doit règler seul la menace potentielle.. Il recrute sept volontaires pour retourner à Arakko.
 

De son côté, Rachel Summers s'interroge sur la mission de reconnaissance de l'Invocateur. Avec Cable, elle sonde l'esprit de Sean Cassidy et découvre dans quel piège l'Invocateur a entraîné leur ami et Unus l'Intouchable (resté prisonnier des cavaliers d'Apocalypse), et désormais la nouvelle équipe en partance pour Arakko.


Apocalypse avec l'Invocateur et leur équipe arrivent dans l'Outremonde et voient les quatre cavaliers et leur armée. Apocalypse avance à leur rencontre et leur demande comment ils ont survécu. Guerre l'Invocateur le pourfendent. L'équipe est sidérée et Siryn disperse les cavaliers pour évacuer Apocalypse.
 

Cable rejoint ses parents, Cyclope et Jean Grey, dans la Maison Summers sur la Lune et les informe de la situation. Grâce au sondage psi, il a aperçu dans l'esprit du Hurleur un endroit mystérieux mais que reconnaît Cyclope. Ensemble, ils s'y rendent car là-bas pourrait se trouver la solution à la crise.


Havok, Polaris et Monet couvrent l'évacuation d'Apocalypse, mais Rockslide est tué et Rictor blessé. Saturnyne est provoquée par Polaris et consent à intervenir. Elle négocie avec Mort un duel entre les champions d'Arakko et ceux de Krakoa, dont l'issue décidera du sort de l'île. Les dés sont jetés...

Pour moi, à chaque fois que je prépare la rédaction d'une critique, j'écris d'abord un résumé de l'épisode (ou du recueil). Et il existe un test simple pour savoir si la suite sera simple : quand la narration est intelligemment menée, alors ce résumé s'écrit tout seul. Les faits marquants de l'épisode sont distincts, saillants, le déroulement de l'histoire est limpide, les protagonistes identifiables et mémorables.

Cela paraît évident, mais ce n'est pas toujours le cas. parfois je termine la lecture d'un épisode (ou d'un album) en y ayant pris du plaisir, mais en ayant des difficultés à le résumer, comme si le contenu manquait de clarté. Parfois aussi, tout s'embrouille sous la masse de plusieurs lectures de différentes séries et en fait, on s'aperçoit que ce qui pêche, c'est que les auteurs ne font qu'écrire des histoires sans grands enjeux, sans moments forts. Ou alors c'est tout simplement moi qui ne suis plus capable de tout intégrer (et là, on prend un coup de vieux...).

Mais ce qui m'a épaté depuis House of X-Powers of X avec la méthode Jonathan Hickman, c'est précisément cette capacité à exposer clairement ce qu'il racontait. D'où aussi mon incompréhension quand je lis ailleurs que sa refonte de la franchise X est confuse. A moi, au contraire, elle paraît bien plus puissante et originale que tout ce que j'ai lu avec les mutants depuis belle lurette. Certes il y a des parti pris radicaux, des personnages pas toujours sympathiques, des innovations dérangeantes. Mais comment être nostalgiques de ce que furent les X-Men avant, quand la franchise courait sur plusieurs titres cohabitant aléatoirement, au gré de crises internes, de schismes multiples. 

X of Swords : Creation n'est pas seulement le commencement d'un grand crossover, qui vient marquer le premier anniversaire de Dawn of X, c'est aussi l'application ultime de la méthode Hickman. Un super épisode par son format et son ambition mais narré avec efficacité et un souci de lisibilité maximum. C'est à la fois dense et fluide, très rythmé et compréhensible, avec un potentiel énorme, des enjeux spectaculaires. C'est bien simple, en comparaison, Empyre fait figure de série B au rabais.

Vous trouverez dans ce numéro tout ce qu'il faut pour ne pas être perdu, à commencer par l'intégration de l'épisode du Free Comic Book Day (donc pour ceux qui n'avaient pu se le procurer, vous voilà remis à niveau). Il y a plusieurs pages détaillant la carte de l'Outremonde, le rôle de la Citadelle de Saturnyne, la signification des cartes de tarot qu'elle tire. Il y a encore des rebondissements percutants (même si l'un d'eux est finalement assez prévisible), un casting détonant (entendez : on n'a pas des mutants incontournables au premier plan). Et finalement, une double fin : l'une qui dispose de manière étonnament simple ce qui va se préparer, l'autre plus énigmatique mais qui joue habilement sur le mot Sword (mais je ne veux pas spoiler cet élément).

En tout cas, Jonathan Hickman et Tini Howard accomplissent un ouvrage remarquable, aux enjeux spectaculaires, aux fondations solides, aux protagonistes mémorables. Cela prouve aussi, au passage, qu'il ne suffit pas de deux auteurs qui s'entendent bien pour réussir à écrire une histoire réussie (comme Ewing et Slott pour Empyre), il faut deux visions qui s'accordent, deux scénaristes qui tirent dans le même sens et s'appuient sur un argument bien établi, bien construit. Ce que Hickman a développé dans X-Men (la mythologie de Okkara, Krakoa et Arakko, le rôle de l'Invocateur) et Howard dans Excalibur (la place centrale de l'Outremonde, les manoeuvres secrètes de Apocalypse) trouvent une première forme d'aboutissement dans le drame qui se noue dans Creation. Au milieu de tout cela, le personnage de Saturnyne fait à la fois figure d'arbitre, dont la puissance est effectivement montrée comme supérieure aux deux camps qui s'opposent, et de joueuse (comme elle l'avoue à Monet). Enfin, l'aventure parallèle qu'entreprennent Cable, Cyclope et Jean Grey donne une voie supplémentaire au projet. Tout cela compose un tableau très riche mais jamais indigeste, d'une grande envergure, jubilatoire.

On pouvait compter sur Pepe Larraz pour illustrer cela avec l'efficacité et le brio requis. L'espagnol a changé à sa manière l'essthétique mutante depuis House of X. Son trait vigoureux, expressif et généreux est parfait pour une saga pareille, il en établit l'amplitude et confère à ses personnages la majestie nécessaire pour que le lecteur croit à l'importance de l'histoire. La manière dont, en particulier, il représente Apocalypse est significative, tour à tour inquiet, imposant, repentant, hanté, leader. Malgré sa stature impressionnante, Larraz lui donne une sorte de tristesse, de mélancolie qui traduisent bien sa nature tourmentée, ses origines anciennes, et son sens des responsabilités face à ses pairs ou ses descendants.

L'épisode est fournie en planches spectaculaires, regorgeant d'une énergie peu commune, magnifiées par la colorisation de Marte Gracia. Pourtant là aussi, Larraz fait de la lisibilité sa priorité, pas question de se perdre dans des pleines pages trop fréquentes et donc à l'impact décroissant, ou des doubles pages trop encombrées. L'artiste sait qu'il a beaucoup à montrer, à raconter, et il sert d'abord le récit avant de se faire plaisir, même si son dessin trahit un plaisir intense à représenter tout cela. Et ce plaisir est communicatif. Avec des décors luxueux et un casting fourni, Larraz prend même le temps de s'amuser au détour d'une scène (quand Polaris explique à Havok pourquoi elle s'est portée volontaire pour suivre Apocalypse).  Du grand art.

N'hésitez donc plus à vous engager dans cette saga. Tout ne sera peut-être pas de ce niveau exceptionnel, mais il y a là une matière excitante et abondante, une écriture épatante, et des dessins somptueux. De quoi mettre en appétit, et mieux encore, en confiance.


1 commentaire:

  1. Merci pour vos articles de qualités que je suis et lis avec toujours beaucoup d'impatience!

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