samedi 1 février 2020

THOR #2, de Donny Cates et Nic Klein


Le moins qu'on puisse dire avec cette relance de la série Thor, c'est qu'elle ne manque ni de panache ni de générosité puisque Donny Cates et Nic Klein livrent un nouvel épisode de trente pages. En vérité, c'est comme si ce format les arrangeait car les deux partenaires veulent visiblement rendre au dieu du tonnerre toute sa démesure dans cette histoire. L'influence de Kirby est omniprésente, dans le cadre, la caractérisation. Et le tout ne manque pas de culot en s'adressant aussi au DCU...


L'Hiver Noir, qui jadis détruisit l'univers qui vit naître Galactus, s'abat à présent sur le notre. Il dévaste une planète qui, malgré ses surhommes, est impuissante face à ce fléau informe et sa neige noire qui réduit tout en cendres sur son passage.


Loin de là, Thor a guidé Galactus jusqu'à la première des cinq planètes dont l'énergie peut l'alimenter assez pour qu'il contre l'Hiver Noir. Mais Clypse est habitée et le dieu du tonnerre refuse que les indigènes soient sacrifiées.


Galactus est pressé et affronte son nouvel héraut qui réplique sans faire de quartier. Quand les habitants de Clypse s'en prennent à Thor, il appelle Lady Sif à l'aide pour qu'elle les évacue tous au moyen du Bifrost. 


Une fois sur Asgard, ils sont pris en charge par Volstagg et Balder tandis que Galactus consume Clypse jusqu'à la dévaster. Cette destruction provoque la colère de Thor qui à nouveau défie le dévoreur de planètes.


Mais leur dispute est interrompue par des tirs contre Galactus. Thor reconnaît l'agresseur puisqu'il s'agit de Beta Ray Bill, résolu à obtenir des explications sur ce massacre...

Après un premier épisode déjà impressionnant de puissance, l'intrigue de ce premier arc ne baisse pas en régime. Au contraire même puisque, dès les premières pages, et encore par la suite, on assiste à un enchaînements de morceaux de bravoure. 

Les influences de Donny Cates sont évidentes : il revient aux sources en empruntant à Kirby mais aussi à son fils spirituel le plus audacieux, Walter Simonson. Tout est bigger than life, un vrai souffle balaie le récit pour qu'on en savoure la dimension mythologique.

Le choix d'un méchant sans visage, ni même forme, est habile : désincarné mais ravageur dans des proportions cosmiques, il choque le lecteur en démontrant sa capacité de nuisance et son aspect irréversible. Si bien que même Thor semble impuissant à le stopper. Ainsi Cates échappe-t-il aux clichés qui oppose régulièrement le dieu du tonnerre à des ennemis asgardiens (ou créés par des forces asgardiennes).

Le scénariste représente la menace d'une manière culottée en pulvérisant une planète semblable à la notre mais surtout évoquant irrésistiblement une Terre du DCU puisqu'elle est protégée par des surhommes résumés à des rayons lumineux en pleine action et des définitions en voix off sybillines (on y parle de "dieux de la vitesse, des océans, de la force", et les couleurs de Matt Wilson rendent évidentes les références à Superman, Flash, Green Lantern, etc.).

En quelques pages donc, l'Hiver Noir annihile le DCU ! C'est savoureux, surtout quelques mois après la saga DCeased de Tom Taylor et son techno-virus provenant d'Apokolips... La concurrence appréciera.

Puis on retrouve Thor, désormais transformé en héraut de Galactus. La relation en les deux est houleuse mais le plaisir de Cates à les animer est manifeste, il aime ces deux colosses qu'il écrit à la manière de Kirby, querelleurs, têtus, ne retenant pas leurs coups, investis d'une puissance ahurissante. Quand Galactus dévore la planète Clypse, le spectacle est total et effrayant, et l'apparence du géant, à la fin de son macabre festin, irradiant d'un rouge sanguin sinistre, est saisissante.

Cates sait qu'il dispose d'un dessinateur capable de soutenir ses visions infernales avec Nic Klein. Ce dernier traduit exemplairement le déchaînement crépitant des protagonistes. Il n'est pas question ici de solliciter la vraisemblance, la suspension de crédibilité. On est dans du très grand spectacle, une imagerie violente, sauvage, inhumaine.

Cette furie en mouvement a quelque chose d'indéniablement jouissive car si on joue la série comme une pièce épique, alors autant y aller franchement. La bagarre entre Thor et Galactus est brutale, le géant est mutilé par Mjolnir et on devine que l'attitude hargneuse de Thor est certainement à l'origine de nouvelles difficultés à manier son marteau, véritable entité autonome, n'obéissant au dieu que s'il le juge méritant.

Un peuple entier est évacué via le Bifrost, et l'arrivé des réfugiés sur Asgard est un clin d'oeil sans ambiguïtés à la crise des migrants, qui, en revanche, montre la noblesse de Thor. Klein illustre toutes ces scènes, qui défilent sur un rythme soutenu (l'action est ramassée sur quelques minutes), avec toute l'ampleur qu'elles exigent. Il fournit des plans très riches, sans avoir peur de la figuration ni des décors, encore moins du déferlement d'énergie des protagonistes. Jusqu'à l'apparition de Beta Ray Bill à la fin...

Le seul petit doute qu'on peut avoir concerne le développement de l'intrigue puisqu'on sait que ce premier arc ne comptera que cinq épisodes. Cates parviendra-t-il à tout faire tenir (la bataille contre l'Hiver Noir après la consommation des cinq planètes par Galactus) en ajoutant Beta Ray Bill, l'antagonisme Thor-Galactus, la mauvaise santé de l'Arbre de Vie ?

Le programme est copieux, peut-être trop pour être résolu en trois épisodes. Mais la maestria visuelle et l'intensité narrative donnent envie de vérifier.  

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