vendredi 31 janvier 2020

JUSTICE LEAGUE DARK #19, de James Tynion IV et Alvaro Martinez


C'est donc avec ce dix-neuvième épisode que s'achève (comme je le supposais) le run de James Tynion IV sur Justice League Dark. Je reviens plus bas sur cette fin pour le scénariste lui-même, mais c'est un départ en beauté. Pourtant, cette réussite restera aussi, surtout celle du dessinateur Alvaro Martinez (et de son encreur et de son coloriste) qui donnent tout, à la fois comme pour remercier Tynion et boucler cette histoire.


Circé et sa bande ont investi la salle des reliques du Hall de Justice. Man-Bat et Bobo neutralisés, la sorcière s'en prend à Kent Nelson pour savoir où est caché le diamant d'Eclipso. C'est alors que resurgit Wonder Woman, en trois exemplaires grâce à l'Homme Inversé avec qui elle a scellé un pacte.


Le retour de l'amazone suffit à faire fuir Klarion. Papa Mid-Nite se cache comme Woodrue. Elle se débarrasse du dragon Drakul Karfang. Mais Circé n'a pas dit son dernier mot et attire le diamant d'Eclipso pour qu'il possède Wonder Woman.


La situation semble à nouveau perdue aux yeux de Zatanna et John Constantine. Mais Khalid Nassour a coiffé le heaume du Dr. Fate, malgré le risque et il renverse la partie en terrassant Circé et en libérant Wonder Woman de l'emprise d'Eclipso.


L'amazone profite de ce sursaut pour rétablir ce qui a été abîmé par Circé : elle restaure l'âme de Bobo, guérit Man-Bat du sort jeté par Klarion, et surtout enferme Circé dans un miroir magique avec l'orbe contenant le pouvoir de Hécate, comptant sur elle pour l'aider le moment venu contre l'Homme Inversé.


Contre toute attente, la Justice League Dark a eu raison de ses adversaires. Papa Mid-Nite et Woodrue sont arrêtés. L'équipe peut profiter d'un répit. mais déjà Wonder Woman pense à leur prochaine mission : sauver Swamp Thing, s'il n'est pas trop tard...

Avant de rédiger la critique de cet épisode, il faut revenir sur le sort de son scénariste. C'est donc le dernier numéro écrit par James Tynion IV, mais ce n'était pas le plan prévu par ce dernier qui s'est exprimé sur le sujet (relayé par le site Bleeding Cool).

Tynion a en effet été désigné pour succéder à Tom King sur Batman, avec la garantie que le titre redeviendrait mensuel (comme DC a décidé de publier toutes ses séries désormais). Mais l'éditeur a changé d'avis sur la périodicité et le scénariste (qui, par ailleurs, écrit des creator-owned chez Image Comics) a estimé qu'il ne pourrait pas diriger Justice League Dark et Batman. Il a donc choisi d'abréger son run sur la JLD pour se consacrer à deux épisodes par mois de la chauve-souris.

Il est évident, pourtant, que Tynion s'en va en laissant en suspens bien des intrigues (la première concernant le sort de Swamp Thing, qui alimentera le prochain arc). Son remplaçant, Ram V, a d'ailleurs la charge de s'en occuper (nul ne sait s'il restera longtemps sur la série, suffisamment en tout cas pour développer ses propres idées dans de futures histoires inédites et personnelles). Je ne connais pas assez bien le travail de cet auteur pour préjuger du résultat, mais il faut espérer que la série survive à Tynion (alors que lors de sa précédente version, durant les "New 52", elle avait sombré après le départ de Jeff Lemire).

Pour en revenir au contenu de cet épisode, il ne souffre cependant pas d'une conclusion hâtive, bâclée. Au contraire, la maîtrise affichée par Tynion est indéniable, il a terminé sa "Witching War" comme il l'entendait, avec un numéro dense, riche en action et en grand spectacle, avec des rebondissements très efficaces. On ne peut pas être déçu.

Les péripéties s'enchaînent à un rythme échevelé, montrant Circé tour à tour triomphante, Eclipso dans toute sa dangerosité (même si, finalement, son influence est fugace), le retour en majesté du Dr. Fate (avec un hôte dont on ignore encore s'il sera définitif - faudra-t-il attendre une nouvelle série JSA, tant espérée mais pas encore annoncée, pour le savoir ?). On en prend plein la vue, on est captivé. C'est exemplaire, surtout que Tynion prouve que les premiers éléments qu'il avait (laborieusement) développés dans la série reviennent à point nommé pour ce climax (voir la triple incarnation de Wonder Woman, dont l'une a l'aspect qu'elle avait sous l'influence de Hécate et une autre sous celle de Mordru - la troisième représentant plus simplement Diana telle qu'on la connaît).

En signalant que l'épisode est visuellement extraordinaire, vous aurez compris tout seul que la prestation d'Alvaro Martinez est une fois encore tonitruante. Jamais l'espagnol n'a déçu sur ce titre mais il réussit à épater, toujours, à impressionner. Il faut associer ses deux partenaires pour cet exploit car l'encrage de Raul Fernandez et les couleurs de Brad Anderson sont bluffants : le premier y fait preuve d'une précision et d'une méticulosité qui sidèrent pour une production mensuelle, tandis que le second exploite une palette aux nuances remarquables, qui font de JLD sans doute la plus belle série actuelle de DC.

Martinez mettra tout le monde d'accord car il apparaît en apesanteur, cet état que seuls les très grands atteignent à force de travail, de discipline et d'inspiration. Ses planches sont un modèle de régularité et de beauté. Il se permet des doubles pages grandioses et découpées magistralement, des compositions intelligentes et très esthétiques, des ambiances ouvragées comme on en voit rarement.

Il anime les personnages en leur donnant une envergure, une puissance, une intensité époustouflantes. Wonder Woman a droit à de grands moments, mais l'apparition de Dr. Fate est aussi une scène jouissive, et l'ultime explication entre Diana et Circé est somptueuse. Pas besoin de se forcer pour tresser des louanges à cet artiste et ses partenaires.

Je reste confiant pour l'avenir proche de la série, d'abord parce que Martinez va rester (au moins pour l'arc suivant. Après ? Je ne sais pas, mais si DC rappelait Javier Fernandez, ce serait une bonne idée pour que la qualité esthétique soit maintenue). Ram V passe après un auteur qui aura accompli un excellent passage, c'est un gros défi qui l'attend mais il dispose d'un matériau généreux pour faire ses preuves.

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