samedi 11 mai 2019

BLACK HAMMER : AGE OF DOOM #10, de Jeff Lemire et Dean Ormston


Depuis le précédent numéro de Black Hammer : Age of Doom, c'est comme si la série entrait dans son dernier acte. Ce qui ne signifie pas que le dénouement est pour tout de suite car Jeff Lemire a sa manière bien à lui de balader le lecteur. Avec Dean Ormston, il a même osé une sorte de reboot insensé mais passionnant, qui prend dans ce dixième épisode une dimension encore plus captivante.


Musée de Spyral City, la nuit. Abraham Slam surprend Lucy Weber et Talky-Walky et ne les reconnaît pas. La mémoire ne lui revient pas davantage quand il accepte de toucher le marteau de Lucy, qui décide alors de le frapper avec.


Méthode radicale mais efficace car tout revient à Abe. Et l'orage qui gronde dehors dans un ciel rougeoyant confirme qu'une crise d'ampleur se prépare : l'Anti-Dieu est de retour et il faut rassembler les héros.


Dans un hospice, Lucy et Abe retrouvent Gail Gibbons très vieillie et diminuée. La frapper avec le marteau pouvant la tuer, elle est kidnappée et embarquée dans la camionnette de Abe où les attend Talky-Walky.


Déguerpissant à vive allure, le groupe ne va cependant pas bien loin. En effet, au détour d'une avenue, la navette du colonel Weird leur barre la route et leur ancien acolyte les embarque pour un voyage sur Mars.


Là-bas, ils retrouvent Barbalien, qui ne les reconnaît pas non plus. Lucy lui rafraîchit la mémoire de manière musclée. Le martien convainc ensuite Gail de se transformer. Mais peu après Lucy disparaît... Pour se retrouver devant son père !

Derrière ce gigantesque mash-up super-héroïque et métatextuel qu'est Black Hammer, il ne faudrait pas mésestimer la dose de malice dont fait preuve Jeff Lemire.

Le scénariste canadien n'est pas qu'une sorte de DJ qui remixe à sa sauce les standards des comics pour en tirer une fan-fiction virtuose, c'est quelqu'un qui a à coeur de divertir intelligemment son public. Il réussit ainsi à rendre familier à n'importe qui des éléments dont chacun n'a pourtant la connaissance.

Pour filer la métaphore musicale, la série fonctionne un peu comme un album avec ses pistes et chaque nouvel épisode prolonge le précédent morceau tout en enrichissant le concept général.

On s'amusera donc ainsi beaucoup de la référence aux "Crisis" de l'univers DC via le ciel rouge (motif esthétique récurrent des sagas de l'éditeur) présent ici. Tout fait sens, même si, je le répéte, on n'est pas forcément cultivé à ce sujet. Le ciel rouge suggère une menace surnaturelle pour le profane aussi.

Dans la réalité réécrite des personnages, c'est l'heure du réveil et donc l'épisode progresse au rythme où chacun d'eux se souvient de sa vie passée. La malice est encore présente, et même la cocasserie puisque, pour réactiver les héros, Lucy Weber leur flanque carrément des coups de marteau (sauf pour la pauvre Gail - un peu de délicatesse pour cette petite vieille... Mais rassurez-vous, Golden Gail revient à la fin, toujours aussi mal embouchée). Ne reste aux abonnés absents que Mme Dragonfly, mais Lemire réserve certainement son retour pour une prochaine fois.

Dean Ormston, dont le style graphique désarçonne depuis le début dans ce registre super-héroïque, fait justement merveille dans ces scènes burlesques où les personnages accueillent avec plus ou moins de bonne humeur la fin de leur amnésie.

A l'occasion d'une scène d'action, Ormston prouve en tout cas qu'il est tout à fait capable d'animer ce genre de moment. Il n'a rien de gratuit puisque Barbalien a non seulement tout oublié mais surtout se lamente encore de l'assassinat de son compagnon.

Et puis, l'artiste nous réserve une ultime page à la mesure de la sidération désirée manifestement par son diable de scénariste. Encore une fois, Black Hammer part dans une direction inattendue, imprévisible, mais surtout jubilatoire.

On n'a pas fini d'être étonné, en attendant le match retour des héros contre l'Anti-Dieu.  

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