jeudi 13 décembre 2018

THE MAGIC ORDER #5, de Mark Millar et Olivier Coipel


Autant prévenir d'entrée : si vous lisez le résumé de l'épisode qui suit et sa critique, ils révèlent des informations capitales. Donc je recommande de consulter cet article si vous avez lu ce cinquième chapitre de The Magic Order - ou que cela ne nous dérange pas d'en connaître le contenu avant. Mark Millar et Olivier Coipel ne ménagent personne pour leur pénultième acte.


Chicago. Gabriel Moonstone emmène sa femme, Louise, à l'Art Institute, où se situe le Q.G. de l'Ordre Magique, afin qu'elle y soit à l'abri de Mme Albany. L'oncle Edgar lui tiendra compagnie le temps qu'il aille règler son compte à l'ennemie avec Regan et Cordelia.


Le trio se téléportent dans la voiture d'Angus, le gardien du royaume de Mme Albany, afin qu'il en donne la localisation et le moyen d'y entrer. Pour obtenir ces informations, ils n'hésitent pas à recourir à des supplices sophistiqués.


Los Angeles. Regan, Cordelia et Gabriel sont devant le Charles Laughton Theater où, pour entrer, ils doivent avouer leur pire souvenir : le premier livre une anecdote dérisoire, la deuxième se rappelle du départ de sa mère, le troisième évoque l'enterrement de sa fille.


A l'intérieur, Mme Albany attend ses visiteurs tranquillement. Regan la défie. Elle demande à Gabriel de le faire taire et il obéit en le tuant ! Cordelia est médusée et comprend que son frère est l'assassin d'Albany.


Gabriel a trahi les siens, tué son père, parce qu'Albany lui a promis de ressusciter sa fille. Pendant ce temps, Lord Cornwall sous l'apparence de Louise tue l'oncle Edgar afin de voler l'Orichalcum. Cordelia est seule, destinée à être sacrifiée pour permettre à sa défunte nièce de revenir parmi les vivants.

Je vais vous ouvrir les portes de ma petite cuisine où je prépare mes critiques. Après avoir lu un épisode/album, j'en rédige un résumé puis je poste son analyse comme ça vient, inspiré (ou pas) par ce que j'en ai retenu.

La meilleure des aides, au-delà du résumé ou d'éventuelles notes, provient surtout de la bonne construction dudit épisode. Il y a un vrai plaisir à lire et critiquer un scénario bien bâti parce qu'on en distingue bien la charpente, les temps forts, les moments plus calmes, son climax.

Pour cela, il n'y a pas besoin de réinventer la roue : un bon auteur est d'abord un auteur qui sait bien raconter, mener son lecteur où il le souhaite, le surprendre au moment voulu avec l'intensité espérée. C'est pour cela que je suis bon client de Mark Millar : une fois qu'on se concentre sur ses scripts et qu'on oublie le bâteleur, on constate que, s'il ne transcende pas souvent le genre qu'il explore, il en connaît bien les ressorts. Suffisamment pour balader le fan et aider le critique.

Par ailleurs, Millar a des Lettres comme on dit : depuis plusieurs années maintenant, son "Millarworld" revisite des classiques des comics ou de la littérature, les mixe parfois. C'est à mon sens moins de la paresse qu'une déclaration d'amour sincère à ces univers.

The Magic Order, comme il l'a expliqué en interview, est une déclinaison du Roi Lear de Shakespeare - d'ailleurs Regan et Cordelia doivent leur prénom à des personnages de cette pièce. Dans les trois premiers épisodes, le scénariste soulignait les tourments de Leonard Moonstone au moment de passer la main à des enfants impréparés.

Dans cet épisode, tout tourne autour d'un fameux twist avec la révélation de la traîtrise de Gabriel dont on découvre qu'il était celui qui se cachait derrière le masque du Vénitien, l'assassin de Mme Albany. Patricide, il s'est retourné contre les siens car on lui a promis la résurrection de sa fille. Cette motivation est suffisante autant que le rebondissement était imprévisible. C'est un de ces tours de passe-passe habile mais puissant que j'apprécie et que Millar maîtrise parfaitement.

Mais la manoeuvre n'est appréciable réellement que si elle est bien mise en scène et Olivier Coipel l'a bien compris. La série a pris du retard depuis le troisième épisode, comme si ce tournant avait impacté la productivité du français et l'avait poussé à doser davantage ses effets.

Pourtant, malgré ces délais, impossible de faire la fine bouche à chaque nouvel épisode. Bien entendu, les finitions, notamment au niveau des décors, sont moins impressionnantes qu'au début : Coipel a recours à des trucs, il dissimule, il joue avec les ombres. Mais c'est judicieusement produit car les frontières deviennent plus floues à mesure que le récit avance, les théâtres des affrontements sont moins figuratifs (on se balade entre les dimensions), et donc si l'environnement est moins détaillé, il correspond à ce flou.

En revanche, Coipel soigne toujours autant l'expressivit des personnages, et je ne parle pas seulement des visages mais des attitudes, du découpage avec des compositions toujours bien senties. Chaque image livre une info sous un angle différent, il y a une vraie exigence pour diversifier chaque plan par rapport au précédent et lui donner une puissanc graphique.

Millar convoque aussi Robinson Crusoé puis L'Île du docteur Moreau le temps d'une séquence spectaculaire que Coipel sert avec une force visuelle, un sens esthétique remarquables. La dernière page offre aussi une vue menaçante et épurée où Cordelia est visée par des baguettes magiques pointées sur elle comme les quartiers d'une pendule, à l'heure du jugement dernier.

L'escapist des Moonstone sortira-t-elle de ce traquenard ? En tout cas, Mark Millar annonce, dans le courrier des lecteurs de ce numéro qu'il commencera à écrire le Volume 2 de The Magic Order après Noël... 

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