samedi 8 décembre 2018

MARTIAN MANHUNTER #1, de Steve Orlando et Riley Rossmo


Il était prévisible (inévitable ?) que le succès, critique et public, de Mister Miracle incite DC à produire de nouvelles maxi-séries événementielles basées sur les mêmes principes (héros méconnu, traitement atypique). Ce n'est donc pas une surprise de voir débarquer Martian Manhunter par Steve Orlando et Riley Rossmo pour ce récit qui va durer un an. Et qui démarre bien...


John Jones se réveille en sursaut après un cauchemar lui ayant rappelé son passé de martien. Il part chercher sa collègue, Diane, pour se rendre sur une scène de crime particulièrement horrible. Une famille entière a été tuée.


Mais si Bud et Ruth Addams sont morts violemment, leur fille, Ashley, est introuvable. Jones monte dans sa chambre et la sonde télépathiquement, constatant que les victimes vivaient heureuses. Néanmoins, une émanation l'effraie.


En route pour le collège d'Ashley Addams, avec Diane, Jones se remémore sa vie sur Mars il y a bien longtemps. Déjà, il était officier de police (un manhunter) et exerçait son job en n'hésitant pas à employer la manière forte.


Ses relations avec son père étaient aussi tendues tandis qu'il vivait heureux avec sa femme, M'yri'ah et leur fille K'hym. Il voulait un autre enfant, mais refusait, comme le lui demandait son épouse, de partager ses plus sombres secrets.


Perdu dans ses pensées, Jones perd le contrôle de sa voiture et finit dans un ravin. Le réservoir prend feu et Diane découvre alors son collègue sous son apparence martienne...

Bien que les mini ou maxi-séries ne soient pas réputées pour leurs bonnes ventes, la performance de Mister Miracle par Tom King et Mitch Gerads a changé la donne. Acclamée par la critique, lauréate de prix prestigieux, et succès commercial, cette production a rappelé aussi que DC avait souvent misé avec succès sur des projets équivalents par le passé, parfois via des collections parallèles (comme les "Elseworlds" - voir Kingdom Come par exemple) ou des magnum opus célèbres comme The Dark Knight returns et, bien sûr, Watchmen. Quelque chose, en somme, que n'a jamais fait Marvel...

Dans ces conditions, pas question d'en rester là et, coup sur coup, cette semaine et la prochaine, sortent deux maxi-séries en douze parties, comme Mister Miracle : avant la révision dystopique de Freedom Fighters, voici Martian Manhunter par Steve Orlando et Riley Rossmo.

Comme King (qui a adoubé ce projet) et Gerads, les deux auteurs ont souvent collaboré ensemble, le scénario est donc sur mesure pour l'artiste et semble suggérer une origin story. Encore ?! C'est que J'onn J'onzz, le limier martien, a eu droit à son lot de retcons. Mais devenu le chef de la Justice League dans la version de Scott Snyder, cela ressemble à une réactualisation du personnage dans l'ère "Rebirth".

Le récit navigue entre les passés martien et terrien - d'ailleurs l'épisode débute en indiquant que la partie terrienne se déroule déjà il y a quelques années. John Jones enquête sur un meurtre collectif et J'onn J'onzz se rappelle de sa vie antérieure, comme flic, mari et père de famille. On devine que les deux pans sont liés, mais il est trop tôt pour savoir comment.

Ce qui choquera sans doute le plus est que Orlando a choisi de décrire J'onzz comme un flic brutal, apparemment ripou, qui n'a rien d'héroïque. Mais il faut là aussi voir comment ce sera développé. C'est bien entendu frustrant, mais le format demande un peu de patience. Et le scénariste ose des choses inattendues (moins dans la violence elle-même, que dans l'intimité du personnage - voir la scène d'amour vraiment fusionnelle entre J'onn et M'yri'ah).

Le style de Rossmo ne m'a jamais convaincu pour le peu que j'en ai vu jusqu'à présent. Mais contre toute attente, c'est son étrangeté et son radicalisme qui emballe ici. 

Lorsqu'il anime des scènes avec les humains, on est proche du cartoon avec des morphologies déformées, particulièrement au niveau des visages, ce qui est assez singulier car pour le coup on a l'impression d'avoir affaire à des extra-terrestres. Alors que, pour les scènes sur Mars, sans doute parce que nous sommes familiers de l'aspect étrange de J'onn J'onzz, la bizarrerie des aliens est moins choquante.

Il y a en tout cas une vraie personnalité graphique à l'oeuvre, soulignée par la colorisation superbe de Ivan Plascencia (habitué à collaborer avec Greg Capullo).

C'est un objet curieux, mi-polar, mi-introspection, mi-SF. Pour un début, c'est certes moins fort que ne le fut Mister Miracle, mais le potentiel est évident. 
    
La variant cover de Joshua Middleton.

1 commentaire:

  1. Steve Orlando n'a pas encore fait la preuve d'une écriture aussi mature que Tom King. J'avais découvert Riley Rossmo dans des séries indépendantes, à commencer par le très bon Green Wake (scénario de Kurtis J. Wiebe). Ses dessins un psychédéliques étaient très adaptés à Drumhellar (avec Alex Link), et intéressants dans leur manière de rendre compte de la magie pour Rasputin (scénario d'Alex Grecian). J'avais cédé à la tentation de lire Deahtbed (scénario de Joshua Williamson, beaucoup plus intéressant que dans ses séries superhéros) publié par Vertigo, à nouveau les dessins de Rossmo apportant une saveur inimitable.

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