dimanche 30 septembre 2018

ACTION COMICS #1003, de Brian Michael Bendis et Yanick Paquette


L'arc narratif The Invisible Mafia d'Action Comics se poursuit. Mais contre toute attente, ce 1003ème épisode n'est pas suite directe du précédent : Brian Michael Bendis en profite pour jouer avec la chronologie des événements et s'intéresser de plus près à un personnage secondaire. Il est accompagné pour ce numéro de Yanick Paquette (Patrick Gleason ne signant plus que la couverture).


Robinson Goode se rend, à la nuit tombée, au "Dragon's", un bar mal-famé des bas-fonds de Metropolis. Elle y a rendez-vous avec Candy auprès de laquelle Mr. Strong a payé pour obtenir un fragment de kryptonite.


Le lendemain matin, Clark Kent arrive en salle de rédaction du "Daily Planet" et trouve Jimmy Olsen endormi à sa place après avoir pris des photos tard le soir près des S.T.A.R. Labs. C'est alors que Kent est pris d'un malaise.


Cependant, Robinson Goode aborde Perry White à la sortie de l'ascenseur et lui soumet une proposition d'article pour la "une" à propos de la mort du caïd Moxie. Mais leur attention est vite déplacée en direction de Clark. Celui-ci refuse qu'on appelle les secours mais voit à travers le sac de Goode le fragment de kryptonite à l'origine de son état.


La journaliste se retire mais, une fois dehors, elle est surprise par Batman qui lui subtilise son sac et la boîte dans laquelle elle détient la kryptonite. Elle explique être en sa possession pour une enquête mais il ne la lui rend pas. En revanche il retrouve plus tard Superman et lui assure que le danger est écarté.


La super-ouïe de Superman l'attire ensuite au "Dragon's" où Goode se dispute avec Candy avant que celle-ci ne soit tuée par Red Cloud. L'Homme d'Acier arrive trop tard mais réconforte la journaliste. Dans l'hôtel où elle est descendue, au même moment, Lois Lane reçoit la visite de Lex Luthor...

La variant cover de David Mack.

Brian Michael Bendis a toujours aimé s'amuser avec la temporalité du récit, jouant sur des faits passés pour éclairer ceux du présent ou osant des flash-forwards. C'est le cas dans cet épisode qui vaut plus pour ce tour de passe-passe narratif que son contenu (on n'apprend pas grand-chose de nouveau, l'intrigue ne progresse guère).

Pour bien comprendre ce qu'il en est, revenons à là où nous en étions à la fin du précédent épisode : Clark Kent apprenait que Lois Lane était de retour sur Terre et à Metropolis sans qu'elle l'ait prévenu. Superman la retrouvait dans les rues de Metropolis et exigeait une explication.

On pouvait s'attendre à en apprendre le contenu ce mois-ci. Sauf que le scénariste escamote cette partie. Ou plutôt la diffère (ce sera pour le #1004). Ce n'est pas gratuit car on va deviner bien vite que ce qui s'est dit entre les époux a affecté Clark qui va être autrement touché.

Le numéro fait la part belle à Robinson Goode, la nouvelle recrue du "Daily Planet", justement engagée en remplacement de Lois. On sait qu'elle est de mèche avec Mr. Strong, un chef de la pègre de Metropolis, allié à la méchante Red Cloud, et qu'elle s'emploie à discréditer Superman par voie de presse - même si Perry White, son rédacteur-en-chef, freine des quatre fers pour passer ses articles tendancieux à la "une".

Ses idées échouant jusqu'à présent, elle a décidé de passer à la vitesse supérieure en acquérant un fragment de kryptonite au marché noir avec l'argent de Strong. En le transportant dans son sac à main jusque dans la salle de rédaction du "Daily Planet", elle va, sans le savoir, l'exposer à Clark. Pris d'un malaise, celui-ci comprend qui en est la cause. Batman intervient promptement.

Juste avant cette scène, on a pu voir Kent adresser le "bonjour" de la part de Lois à Jimmy Olsen et le lecteur a pu déceler facilement que la discussion entre Clark et sa femme a laissé des traces car le journaliste est visiblement fatigué et morose. Lorsque, à la fin de l'épisode, Lex Luthor rend visite à Lois à son hôtel, la situation devient encore plus louche...

Ce qui est intéressant dans cet épisode, ce n'est donc pas ce qui s'y passe directement - en fait, on pourrait dire que c'est anecdotique, voire qu'il n'y a rien de neuf (une nouvelle manigance de Goode, la kryptonite affaiblissant Superman, la présence providentielle de Batman - même si le dialogue qui suit est amusant : Superman : "You're the best.", Batman : "World's finest."). Non, ce qui vaut le coup, c'est ce qui est suggéré, précisément non-dit. En l'occurrence, comment diriger le crime organisé dans une ville dont le héros peut tout voir, tout entendre ? Réponse : en recourant au système "D", en ne prononçant pas certains mots, en écrivant au lieu de parler, en revenant à une forme de gangstérisme primaire. Le titre de l'arc, The Invisible Mafia, prend alors tout son sens : la pègre de Metropolis est réduite à des ruses de Sioux pour échapper à Superman et le piéger. C'est une guerre d'usure.

Cela exige de la patience de la part des criminels comme des lecteurs. Mais Bendis sait s'entourer et ça rend l'ensemble très agréable, malgré une certaine inertie. Le canadien Yanick Paquette, qui a pratiquemment abandonné les mensuels pour se consacrer à des graphic novels (Wonder Woman : Earth One avec Grant Morrison) et des couvertures variants, remet la main à la pâte.

Il a apprécié sa collaboration (et il n'est donc pas exclu qu'il revienne) et cela se voit : l'artiste déploie des expressions graphiques, testées sur ses romans graphiques, pour traduire au mieux le script, comme lorsque les cadres de ses vignettes deviennent flottants quand Clark a son malaise. Il use de plusieurs doubles pages pour souligner des actions en continu comme les écrit souvent Bendis, notamment lors du dialogue entre Superman et Batman ou quand Superman surgit au "Dragon's".

La beauté des dessins de Paquette indique le soin avec lesquels il les réalise, encrage compris. Et la mise en couleurs de Nathan Fairbairn est somptueuse.

Un épisode de transition en somme avant les révélations attendues le mois prochain, et l'arrivée de Ryan Sook au dessin (pour au moins deux numéros).  


La variant cover de Francis Manapul.

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