JESS LONG : IL ETAIT DEUX FOIS DANS L'OUEST est le cinquième tome de la série, écrit par Maurice Tillieux et Arthur Piroton, publié en 1985 par Dupuis.
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L'album compte trois histoires :
- 1/ Il était deux fois dans l'Ouest (22 pages). Une série de meurtres au couteau sème l'effroi dans la bourgade de Weedpach, dans le Montana. Le shérif, impuissant à résoudre cette affaire, se résout à faire appel au F.B.I. qui envoie sur place les agents Jess Long et Slim Sullivan. Leurs soupçons se portent rapidement sur Handy Bull, chauffeur du bus qui conduit les ouvriers à la phosphatière et joueur invétéré aux cartes, qui réussit, malgré son modeste salaire, à payer de grosses dettes...
- 2/ Le Saut de la mort (16 pages). Angela Ross vient demander à Jess Long de mener une enquête au sujet de lettres de menaces de mort adressées à son mari, le cascadeur Sam Ross, qu doit se produire dans un numéro très dangereux au casino "El Bras" de Las Vegas. La représentation tourne mal et Jess Long demande à son ami Slim Sullivan de s'informer sur le passé d'Angela et des frères Ross...
- 3/ Pour une poignée de balles (6 pages). Tina Loon, serveuse dans un bar fréquenté par Jess Long et Slim Sullivan, est abattue en plein jour par Vittorio Plomo. L'enquête mène les deux agents du FBI jusqu'au père de la victime, receleur qui vient d'être tué par un client mécontent...
J'avais prévu d'écrire une critique sur un autre album quand, l'autre jour, la bande dessinée que j'avais commencée à lire m'est tombé des mains. J'en ai profité pour exhumer ce livre que je n'avais pas ouvert depuis longtemps et qui m'a renvoyé presque trente ans en arrière. Du coup, c'est moins une critique que je vais rédiger qu'une sorte de témoignage.
Quand j'avais 13 ans, dans la ville où je vis, au mois de Septembre 1986, je suis allé à la Foire au Pré, une fête locale où étaient parfois invités, à l'époque, des artistes de bandes dessinées. Deux ans auparavant, j'avais ainsi rencontré André Chéret, l'artiste de Rahan, qui m'avait beaucoup impressionné (il faudra un jour que je relise quelques aventures du "fils des âges farouches"). Puis, donc, Arthur Piroton fit le déplacement.
Je ne connaissais pas son travail et ma mère m'acheta un des épisodes des Histoires peu ordinaires de Jess Long, ce tome 5, écrit par Maurice Tillieux, que je choisis, accroché par le titre qui évoquait le western de Sergio Leone, Il était une fois dans l'Ouest.
Le jour venu, après avoir lu les trois histoires de cet album, je me présentai devant Piroton pour une dédicace et il me dessina un superbe portrait de son héros avec une dextérité qui me sidéra, directement au feutre et au marqueur. Je ne possède pas beaucoup de dédicaces (même si j'ai eu la chance d'en avoir de Druillet, Juillard, Pellejero, Chauzy) mais celle-ci était la première que j'obtins et elle conserve donc une place à part.
Jess Long a, il faut bien l'admettre, un peu mal vieilli : les scénarios de Tillieux sont très classiques et lestés de dialogues franchement improbables pour des récits censés se dérouler aux Etats-Unis ("Cré vingt dieux !" dans une bulle de pensée d'un habitant de Weepach, Montana, c'est quand même curieux...). Les enquêtes elles-même demeurent bien conduites sans être renversantes, leur format court suffit (plus longues, elles seraient insuffisantes).
Par ailleurs, le personnage de Jess Long évoque énormément celui de Rip Kirby, créé en 1946 par Alex Raymond (même si je préférai les épisodes de John Prentice) : physiquement et psychologiquement, c'est la même chose. Slim Sullivan est le faire-valoir typique : toujours à cran et obéissant à son partenaire comme le ferait un adjoint, il est un peu plus intéressant mais sous-exploité.
Tillieux, qui était un fou de bagnoles (il mourra en 1978 dans un accident de la route) se fait plaisir dans Le saut de la mort et trouve en Piroton un collaborateur de grand talent. Le style réaliste de ce dernier cite abondamment celui de Leonard Starr (Mary Perkins) et Stan Drake (Kelly Green), avec un trait très détaillé et élégant.
Piroton animera Jess Long de sa création en 1969 jusqu'en 1995 (un an avant sa mort) et je me souviens donc de sa main si assurée qui signa ce portrait de son héros fétiche. Mais je mesure le privilège de l'avoir vu à l'oeuvre et je reste comme le gamin que j'étais alors aujourd'hui encore quand j'observe sa belle dédicace.
Quand vous avez la chance d'observer un artiste qui signe des dessins lors d'un séance, ayez en tête ce dont je me rappelle encore presque trente ans après : un dessinateur est aussi un artisan dont, pour paraphraser Gustave Courbet, "la main est le prolongement de l'oeil". Observer comment ses traits forment une image, souvent rapidement dans ces circonstances, est un moment délicat, gracieux, suspendu - de ceux qui font de vous un fan de BD pour toujours émerveillé.
Hum, ton billet m'évoque de bons souvenirs, ceux qui me rattachent au Journal Spirou, c'est là où je lisais Jess Long ; un personnage dont je garde un assez bon souvenir (en terme de plaisir de lecture) mais assez flou je dois dire (en terme de souvenirs à proprement dits).[-_ô]
RépondreSupprimerJ'ai un souvenir du même genre, ayant rencontré Piroton en dédicace en 1986 ou 1987 ; Piroton n'a pas daté son dessin (et où était-ce ? à Illzach ? à Thann ? quelque part en Alsace, en tout cas). Lorsque je me suis présenté devant lui, je lui ai tendu l'album Jess Long n° 6, qui est resté mon préféré - et auquel j'ai consacré un commentaire sur Amazon, en 2014.
RépondreSupprimerCette dédicace est sous mes yeux : au feutre et au marqueur, comme la vôtre. « Observer comment ses traits forment une image, souvent rapidement dans ces circonstances, est un moment délicat, gracieux, suspendu – de ceux qui font de vous un fan de BD pour toujours émerveillé. » C'est tout à fait cela ! Je vous félicite pour votre remarquable billet.