mardi 4 février 2014

Critique 402 : AQUAMAN, VOLUME 2 - THE OTHERS, de Geoff Johns et Ivan Reis

AQUAMAN, VOLUME 2 : THE OTHERS receuille les épisodes 7 à 13 de la série écrite par Geoff Johns et dessinée par Ivan Reis, dans le cadre du "New 52", publiée par DC Comics en 2013.
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Arthur Curry alias Aquaman est traqué par son pire ennemi, Black Manta. Ce dernier s'en prend aux membres de son ancienne équipe, avant que le héros ne rejoigne les rangs de la Justice League, the Others (les Autres), dont chacun possède une relique du royaume déchu d'Atlantis (une orbe permettant de se téléporter détenue par Ya'Wara, une clé ouvrant tout en possession de l'Operative, des chaînes permettant de générer un champ de force aux poignets de Prisoner of War, un casque donnant à Vostok X la capacité de respirer sous l'eau comme dans l'espace, et un artefact conférant la capacité de voir l'avenir immédiat et de localiser les autres reliques pour Kahina). 
Mais qu'est-ce qui motive la vengeance de Black Manta ? Un sombre secret qu'Aquaman a même caché à sa compagne, Mera...
Après un premier volume, disons moyen (The Trench), la série connaît un spectaculaire redressement dans son développement avec ce deuxième tome, riche de 7 épisodes formant une seule histoire. Il est toutefois recommandé d'avoir lu les épisodes précédents pour en apprécier pleinement le contenu, notamment l'évolution du personnage principal et les révélations sur son passé.
Geoff Johns donne ici sa pleine mesure en introduisant une menace bien plus palpitante, des rebondissements haletants, une galerie de seconds rôles charismatiques et un méchant qui éprouve vraiment le héros. En prime, on a droit à des révélations sur le passé d'Aquaman, le royaume d'Atlantis et le dénouement est une passerelle pour le crossover entre la série et celle consacrée à la Justice League, Throne of Atlantis (qui est écrit par Johns et dessiné par Reis).

Dans le premier volume, suite à l'attaque des monstres de la fosse, Aquaman entrait en possesion d'une mystérieuse relique atlante. D'autres artefacts de cette civilisation sont au coeur de l'intrigue, convoitées par Black Manta (même si on finit par découvrir qu'il ne les récupère pas pour son compte...). Johns applique un traitement vigoureux à ce vilain qui devient terriblement menaçant, agressif, avec un sérieux contentieux vis-à-vis d'Aquaman : muni d'une nouvelle origine et d'un mobile à la fois simple mais qui se révèle plus complexe en fin de parcours, il est le grand gagnant de cet arc narratif.

The Others est l'autre invention inspirée du scénariste : il a créé de toutes pièces cette équipe de personnages immédiatement mémorables (une fille de la jungle, un ex-aspirant cosmonaute russe, un ancien marine noir hanté par la mort de ses amis soldats, un agent secret, et une musulmane). Leurs motivations pour protéger les reliques atlantes sont également très bien vues et donnent encore du relief à la confrontation avec Black Manta, mais aussi aux raisons pour lesquelles Aquaman et eux se sont séparés. 
De fait, on apprend donc que le héros a fait partie d'un groupe avant de rejoindre la Justice League, ce qui nourrit sa mythologie puisque le reboot du "New 52" a établi que les justiciers ne sont en activité que depuis cinq ans (avec l'apparition de Superman). Johns suggère donc que d'autres équipes ont existé avant la Justice League, de manière clandestine, et continuent d'être actives toujours en secret.
Bien entendu, l'écueil avec cette injection subite et massive de nouveaux personnages (qui n'existaient pas avant le reboot de DC), c'est qu'il est délicat de les présenter de manière complète et équitable dans une seule histoire de 7 épisodes. De fait, le passé d'un des Autres comme Vostok X est à peine et rapidement abordé, et même si Ya'Wara a droit à beaucoup plus d'espace on n'en sait guère plus à son sujet. En revanche, tout en étant aussi concis, voire évasif, Johns réussit à donner beaucoup plus de relief à the Operative (dont le masque cache une surprise totalement imprévisible) et Prisoner of War.

En ce qui concerne directement le personnage d'Aquaman, Johns souligne ce qui était déjà avancé dans le tome précédent, à savoir qu'il ne s'agit pas d'un héros forcément très sympathique : son tempérament demeure ombrageux, et il n'hésite pas à dissimuler à Mera des pans entiers de son passé. On le découvre plus jeune à l'occasion de flash-backs avec les Autres et plus enclin à assouvir sa soif de vengeance qu'à sauver des innocents. A présent, il préfère encore faire cavalier seul, assurant qu'il veut d'abord protéger ses anciens co-équipiers et sa compagne. C'est un profil intéressant que le scénariste ne cherche pas à adoucir et qui permet par conséquent au lecteur d'apprécier avec ses nuances, souhaitant sa victoire comme on l'espère pour tout héros tout en portant un regard lucide sur ses méthodes ambiguës.
Quant à Mera, elle apparait évidemment moins que dans les premiers épisodes mais Johns lui réserve quelques belles scènes - mieux : des scènes importantes. Surtout, il s'amuse avec le fort caractère de cette femme de tête, volontiers jalouse (un moment amusant lors de sa rencontre avec Ya'Wara, ce qui est notable pour un auteur comme Johns, maniant peu, et quand il le fait, maladroitement, l'humour).  

La conclusion de cet arc est épique, et promet des développements à court et long termes très accrocheurs (en plus du crossover Aquaman/Justice League qui se déroule immédiatement après, DC annonce un spin-off, Aquaman & the Others pour Avril). Par ailleurs, même si on en sait un peu plus sur la déchéance d'Atlantis, il reste encore de quoi alimenter la mythologie de la série avec cela, ce qui donne envie de poursuivre l'aventure.

Je ne peux pas parler de cette histoire sans, bien sûr, mentionner, l'extraordinaire contribution d'Ivan Reis, qui signe l'intégralité des dessins de cet arc. Le brésilien abat un boulot incroyable, très impressionnant. Non seulement, il a réussi à designer une galerie de personnages de façon attractive, mais surtout son storytelling est redoutablement efficace, quand bien même sur la fin il a recours un peu facilement à des pleines et doubles pages. Mais ses décors sont très détaillés (plus que la moyenne de beaucoup de comics), ses personnages possèdent toujours une allure folle, il se dégage de ses pages une énergie qui rend la lecture euphorisante.
On ne peut que regretter que DC n'ait pas offert aux lecteurs quelques bonus comme dans le précédent volume (comme, justement, les characters designs).
De bien petites réserves cependant en comparaison avec le plaisir qu'on prend à lire ces épisodes, brillamment écrits, puissamment illustrés, et qui confirment la renaissance d'Aquaman. Si tout cela aurait sans doute pu être accompli sans le procédé d'un reboot, c'est  assurément une des réussites majeures de l'opération "New 52" que d'avoir su redonner un tel lustre à ce personnage.

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