samedi 8 juin 2013

Critique 399 : NEW AVENGERS (VOL. 2) #31-34 - END TIMES, de Brian Michael Bendis, Michael Gaydos, Carlos Pacheco, Mike Avon Oeming et Mike Deodato


New Avengers : End Times est le 7ème et dernierc arc du volume 2 de la série, rassemblant les épisodes 31 à 34, publiés en Décembre 2012 et Janvier 2013 par Marvel Comics, écrits par Brian Michael Bendis. Les dessins sont signés Michael Gaydos (#31), Carlos Pacheco (#32), Mike Avon Oeming (#33) et Mike Deodato (#34, auquel participent aussi, pour une page chacun Chuck BB, Farel Dalrymple, Ming Doyle, Lucy Knisley, Becky Cloonan et Yves Bigerel).
The New Avengers a toujours été une série à part. Il ne s'agit pas d'une série "Avengers" classique, traditionnelle, "old school". Bien sûr, il y a des membres historiques du titre, mais quand on y repense, l'avoir appelée "New" Avengers marquait une rupture avec les "Old" ou "Classic" Avengers.
Aujourd'hui, avec cet arc sobrement intitulé End times, un chapitre se clôt. C'est non seulement la fin du volume 2 de la série mais surtout la fin du run de son scénariste, Brian Michael Bendis, aux commandes depuis 2005.

Quand vous pensez aux Avengers, vous pensez à ses trois piliers : Captain America, Iron Man, Thor. Mais aucun d'eux ne se trouve dans cette série désormais (même s'ils font quand même une apparition dans le dernier épisode). Les New Avengers, c'étaient d'abord Luke Cage, Jessica Jones, Iron Fist, Dr Strange : des outsiders, promus au premier rang.

Au lendemain de la saga Avengers vs. X-Men, les New Avengers apprennent que leur leader, Luke Cage, quitte l'équipe pour protéger sa famille. Mais ces choses-là ne se déroulent jamais comme prévu dans un comic-book, et pour son chant du cygne, Brian Michael Bendis en profite pour conclure plusieurs intrigues en cours depuis longtemps.

Examiner la composition du groupe donne une indication claire de son aspect atypique, hors norme : il y a aussi bien Luke Cage et sa femme Jessica Jones, Captain Marvel (Carol Danvers), la Chose, Iron Fist, Spider-Man, Wolverine, Dr Strange, Mockingbird, Daredevil que Victoria Hand, sans compter la "nanny" de la fille de Cage et Jones, Squirrel Girl. Cela a toujours contribué à assimiler davantage cette équipe de Vengeurs à celle des Défenseurs, la "non-équipe" par excellence : il y a fort à penser d'ailleurs que si la série et l'équipe s'étaient appelées ainsi, les détracteurs de Bendis et autres gardiens du temple des Vengeurs classiques auraient été moins virulents, tous si appliqués à reprocher à l'auteur de ne pas raconter ce titre comme une pseudo-tradition l'imposait.
 

End Times revient sur les évènements du story-arc Possession (NA, vol. 2, #1-6, 2010).
Jericho Drumm alias Frère Voodoo était alors devenu le nouveau Sorcier Suprême, maître des arts mystiques, mais trouva la mort dans un combat contre Agamotto. Sob frère, le spectre Daniel Drumm, promit aux Nouveaux Vengeurs et au Dr Strange en particulier de revenir se venger.
C'est ainsi qu'il prend possession du corps et de l'esprit de Virginia Hand et s'en prend à Daimon Hellstrom, le Fils de Satan, allié de longue date de Strange et des Défenseurs (et ex-époux d'Hellcat, membre des Vengeurs), puis Jennifer Kale, autre magicienne, avec le projet de faire croire que Strange les a tués. Le SHIELD en la personne de sa directrice Maria Hill et le FBI s'en mêlent. Luke Cage et Jessica Jones prennent la fuite, sur le conseil de Captain Marvel...


Les Vengeurs arrivent au Manoir où tout se joue, après que Strange ait découvert que Daniel Drumm ait resurgi. Il prend successivement possession de plusieurs d'entre eux pour malmener Strange, après avoir tué Victoria Hand....


Strange défie Drumm tandis que Luke Cage, qui a assisté à la bataille en regardant la télé, a rejoint le champ ses amis. Qui va gagner ce face-à-face magique ? Notre dimension regagnera-t-elle un Sorcier Suprême ? Et Luke Cage survivra-t-il à l'épreuve ?
*
Plus qu'apprécier l'histoire et en analyser les défauts et les qualités, il faut d'abord en souligner la brièveté : Bendis termine son run en quatre épisodes (même si le dernier est plus long qu'à l'accoutumée). Celui à qui on a souvent reproché ses arcs trop longs, aux dénouements expéditifs, a bouclé la boucle de manière concise, efficace, en renouant avec sa passion pour la série noire (la première partie où Strange identifie le coupable, fuit, est accusé, revient se battre) et les codes élémentaires des récits super-héroïques (le combat final spectaculaire et décisif). 
Par ailleurs, chaque épisode est illustré par un artiste différent, chacun avec un style fort et original, et l'épisode 34 accueille même 6 invités, venant tous des comics indés, pour dessiner une page chacun. 
Michael Gaydos livre une copie un peu décevante, visiblement peu à l'aise. 
Carlos Pacheco n'est plus, depuis belle lurette, le grand dessinateur qu'il fut (qui plus est avec trois encreurs peu inspirés), mais il réussit quelques belles pages. 
Mike Avon Oeming détone lui aussi dans ce registre mais son énergie visuelle contrebalance et sa complicité avec le scénariste est palpable. 
Quand à Mike Deodato, le recordman d'épisodes dessinés pour ce titre, il signe un superbe dernier effort, très puissant. 
Les contributions de Chuck BB, Ming Doyle, Farel Dalrymple, Becky Cloonan, Yves Bigerel et Lucy Kinsley sont inégales mais utilisées de manière très astucieuse. C'est audacieux de laisser un espace à des styles si atypiques dans une série mainstream, qui plus est pour le finale de ce volume.

Tout cela contribue à rendre cette histoire tout à fait surprenante, comme si, une dernière fois, Bendis avait voulu montrer sa différence, surprendre son monde, bousculer aussi bien ses fans que dérouter les puristes.

Ce récit met l'accent sur la face mystique et même spirituelle de la série telle qu'écrite par Bendis : ce n'est pas un hasard si les deux vedettes ici sont Stephen Strange d'un côté et Luke Cage de l'autre. Le premier doit affronter celui qui a juré sa perte, lui imputant la mort de son frère, qui fut lui-même le successeur du Docteur comme Sorcier Suprême. Le second doit composer entre son choix de quitter sa vie de Vengeur et celui de les aider une dernière fois, éternellement tiraillé entre son devoir de héros et celui de mari-père de famille. 

Il y a manifestement chez Bendis, dans ce dernier arc (tout comme dans la fin de son run sur Avengers) une volonté à la fois de tourner la page tout en rangeant les jouets qu'il a utilisés. Il restaure un personnage important (Strange) dans son statut historique, il éloigne le personnage le plus emblématique de son run, l'âme, la conscience du groupe (Cage) en laissant ouverte la porte vers de nouvelles aventures, un nouveau projet (il a été question d'un relaunch de Heroes for Hire, avec Mike Deodato, mais rien n'a été communiqué officiellement depuis, et désormais Bendis est bien occupé avec deux séries mutantes tandis que Deodato alterne épisodes des Avengers et New Avengers écrits par Jonathan Hickman).

Comme toute fin, surtout après un run aussi long (le plus long effectué par un auteur avec un titre "Avengers"), il flotte sur ces épisodes et sur leur dénouement un parfum mélancolique, mais néanmoins serein. Le scénariste a eu ce privilège de choisir le moment de partir, privilège mérité (quoi qu'on en dise) car il a fait de ce titre un succès commercial et de la franchise "Avengers" une marque à la popularité telle qu'elle a permise d'aboutir au film sorti l'an dernier. Grâce à Bendis, les Nouveaux Vengeurs ont conquis quantité de lecteurs, et finalement suscité des réactions passionnées comme seuls les runs historiques en engendrent.

Pour ma part, je n'avais jamais porté un grand intérêt aux Vengeurs avant Bendis. Je n'ai pas non plus tout aimé dans ce qu'il y a apporté - j'ai vraiment commencé à adhérer qu'à partir des tie-in à Civil War. Mais il a su me parler de ces personnages, y injecter de l'humour, ce côté "soap" et "sitcom" attachants, avec le concours d'artistes parfois moyens, parfois exceptionnels. C'est devenu une des rares séries dont j'ai lu tous les épisodes, sans décrocher.

Comme je suis d'abord les auteurs, je ne poursuivrai pas la lecture des New Avengers (qui plus est maintenant qu'ils sont pilotés, dans une incarnation très différente, par Jonathan Hickman, un auteur qui m'insupporte). Par contre, j'ai hâte de découvrir comment Bendis va diriger ses séries mutantes (All-New X-Men et Uncanny X-Men), voire cosmique (Guardians of the Galaxy), où il est graphiquement très bien accompagné (Stuart Immonen, Chris Bachalo, Frazer Irving, Steve McNiven et Sara Pichelli).
*
Qu'ajouter ?
Simplement : merci. Ce fut une belle aventure, un bon moment de lecture. Oui, merci.

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