samedi 11 août 2012

Critique 343 : X-MEN - KITTY PRYDE : SHADOW & FLAME, d'Akira Yoshida et Paul Smith


X-Men : Kitty Pryde - Shadow and Flame est une mini-série écrite par Akira Yoshida et dessinée par Paul Smith, publiée en 2006 par Marvel Comics. Ce récit complet se situe chronologiquement après le deuxième tome d'Astonishing X-Men (Dangerous) de Joss Whedon et John Cassaday, même si cette référence n'est pas obligatoire pour comprendre l'histoire. 
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Kitty Pryde reçoit à L'institut Xavier un message en provenance du Japon l'invitant à s'y rendre seule avec son dragon Lockheed. Une photo est jointe avec un dragon vert, l'ancienne "compagne" de Lockheed.
Sur place, Kitty Pryde est accueilli par Ryoko Oshiba des services secrets japonais, d'un département chargé des affaires paranormales. Mais il s'avère que le message ne provient pas du J.D.S.S. quand Kitty est agressée par des ninjas qui ne font cependant pas partie de l'organisation criminelle de la Main mais du Sentier de la Destiné, un groupe rival dont l'ancien leader était Ogun, un ancien adversaire de Wolverine et Kitty.
Pour obliger Kitty à devenir leur nouveau chef, Lockheed est empoisonné. Mais la jeune mutante refuse ce poste et, pour sauver son dragon (et récupérer l'autre bestiole verte, prisonnière des ninjas du Sentier), elle conclut un marché : dérober au Samouraï d'Argent son sabre (un des cinq épées secrètes du royaume).
Kitty devra ruser pour à la fois commettre ce larcin, deviner ce que trame vraiment le JDSS et contrecarrer les plans du Sentier de la Destinée, tout en faisant face à de vieux démons personnels.
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L'histoire imaginée par Akira Yoshida possède un charme désuet, à l'ancienne, comme pouvait en écrire Chris Claremont, mais non exempt d'intensité. Ce qui séduit d'abord dans ce récit, c'est sa simplicité, ses rebondissements bien alignés aboutissant à un final raisonnablement spectaculaire, mais le tout est efficace, se lit rapidement.
Les fils de l'intrigue ne sont pas complexes, mais réservent quelques bonnes petites surprises. Cette légèreté assumée a quelque chose de très rafraîchissant, humble, qui fait à la fois sa force et sa faiblesse (car on devine rapidement que ça n'ira pas très haut).
Le livre aurait certainement pu être plus ceci, ou plus cela, il manque un peu de chair, de morceaux de bravoure, c'est évident. Mais on ne s'ennuie pas une seconde en le lisant, et même si le projet a été lancé pour surfer sur le succès du run de Whedon et Cassaday sur Astonishing X-Men, il possède son identité propre, sans faire de références directes aux aventures des autres X-Men (tout juste Yoshida évoque-t-il avec Ogun un ancien ennemi ayant éprouvé Kitty et Wolverine, mais ce n'est pas gênant pour comprendre l'essentiel). Il n'y a d'ailleurs pas de guest-stars, pas d'autres mutants dans les environs, et l'intrigue ne s'appuie pas sur une énième fin du monde dont la solution dépend de l'héroïne.
L'héroïne, justement, parlons-en : de toutes les créatures créées par Chris Claremont, Kitty Pryde est une des plus attachantes, ses fans peuvent même affirmer qu'elle est devenue l'âme des X-Men depuis son apparition au cours de la mythique saga du Phénix Noir. Beaucoup de lecteurs ont grandi avec elle, en commençant à lire Spécial Strange à 13 ans, l'âge où elle a intégré l'institut Charles Xavier. La jeune fille gauche, amoureuse de Colossus, puis membre d'Excalibur, est aujourd'hui une jeune femme qui fait partie des enseignants de son école (voir la série Wolverine & the X-Men). C'est une des héroïnes les plus sympathiques de Marvel, et comme il est rare que la Maison des Idées offre une (mini) série à une femme (quand DC a réussi à en imposer beaucoup), c'est appréciable.
Yoshida la traite avec finesse, lui conservant sa jeunesse, sa féminité, et son caractère à la fois battant et rusé. La série met d'ailleurs à l'honneur un casting essentiellement composé de filles, avec Ryoko l'agent du JDSS, Nao, la leader du Sentier de la Destinée, ou le dragon femelle à l'origine de l'histoire.
C'est dépaysant, et la lecture est délicieuse.
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Shadow and Flame a aussi ce côté "old school" grâce à son look. Il est dû au dessin du trop rare mais toujours parfait Paul Smith.
Son trait en ligne claire, élégantissime, et son découpage si fluide tranche là aussi avec les styles plus agressifs et ostentatoires de bien des graphistes actuels. Admirez la force de chaque image, la luminosité, la concision de chaque plan, rien n'est en trop ici, Smith fuit les effets tape-à-l'oeil, dévolu au service de l'histoire sans jamais sacrifier à la beauté.
Smith a connu le succès avec son run, éphémère mais mémorable sur Uncanny X-Men (où il succéda à Byrne et Cockrum pendant un an), et il maîtrise parfaitement le personnage de Kitty, que personne n'a jamais mieux dessiné que lui. Mais il n'en fait pas qu'une jolie fille : il lui donne une expressivité remarquable, la rendant crédible dans les scènes d'action, dans l'effort. Chacune de ses émotions est traduite, elle est à la fois méfiante, forte, en colère... Et ce souci de ne pas seulement flatter son personnage principal, sans sombrer dans la caricature inverse de l'héroïne virilisée ou sexualisée à outrance, est particulièrement méritoire.
Allez, pour le plaisir des yeux, quelques pages pour apprécier le storytelling impeccable et Kitty en action :







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La combinaison de la narration classique de Yoshida et de l'élégance visuelle de Smith est parfaite, on croirait que le livre a été écrit et illustré par une seule personne. Cette cohérence et cette efficacité aboutit à un résultat qui, sans être renversant, est extrèmement récréatif.

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