mercredi 2 décembre 2009

Critique 116 : PLANETARY, VOLUME 2 - THE FOURTH MAN,de Warren Ellis et John Cassaday


PLANETARY : THE FOURTH MAN rassemble les épisodes 7 à 12 de la série créée et écrite par Warren Ellis et dessinée par John Cassaday, publiés en 2000-2001 par DC Comics dans la collection Wildstorm.
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L'équipe de l'organisation Planetary vient en aide à un détective spécialisé dans le paranormal (comme John Constantine, le héros de Hellblazer) qui a dû simuler sa mort pour les besoins d'une enquête. Puis Elijah Snow, Jakita Wagner et The Drummer répondent à l'appel d'Allison, une femme morte et dont le fantôme hante une base scientifique désaffectée dans le Nevada, où ont été effectuées des expériences sur des cobayes humains.
Par le passé, un autre membre de l'équipe a trouvé la mort en mission : c'était le prédécesseur d'Elijah Snow, un certain Ambrose Chase. 
Snow retrouve dans un laboratoire une paire de bracelets ayant appartenu à des amazones (référence à Wonder Woman), puis une arme en forme de lanterne (comme celle de Green Lantern) et une cape au tissu indestructible (évocation de celle de Superman)
Toutes ces investigations finissent par révéler à Snow qui il est vraiment en lui permettant de recouvrir la mémoire : il découvre alors qui est le fameux "quatrième homme" autour de qui plane bien des mystères en relation avec Planetary.

Warren Ellis continue d'explorer l'histoire des comics en jouant sur deux plans narratifs : d'abord grâce à une suite d'enquêtes étranges et palpitantes, puis avec un commentaire subtil et immersif sur la bande dessinée et la pop-culture américaines. 

De prime abord, les aventures de l'équipe de Planetary se suivent mais sans se ressembler, exotiques, étonnantes, sans lien apparent, avec un protagoniste (Elijah Snow) souvent à la ramasse, comme dépassé par ce à quoi il est confronté (tout comme le lecteur). 
Mais à partir du cinquième épisode de ce recueil (le 12ème de la série), un retournement de situation s'opère et altère profondément la lecture des événements lorsque Snow reprend le dessus sur ses acolytes, Jakita Wagner et The Drummer, en découvrant ce qui soude tous les éléments de leurs enquêtes depuis le début. 
Warren Ellis réussit ce twist magistralement et entraîne alors toute la série dans une nouvelle direction, sur fond de conspirationnisme et de fantastique.

Au second plan, le scénariste manipule des références précises pour mieux les détourner et en livrer sa version, ce qui donne à sa saga une perspective inédite. Warren Ellis montre comment les auteurs anglais qui ont investi les comics dans les années 80 les ont profondément et durablement métamorphosés, accélérant leur passage à l'âge adulte et affectant aussi la manière dont les fans ont appréhendé cette littérature. 
L'interprétation qu'il donne d'icônes populaires telles que Superman, Wonder Woman et Green Lantern permet d'apprécier à quel point il s'agit de créations fantaisistes tout en expliquant ce qui en fait des productions nobles et populaires, après avoir adressé un hommage appuyé aux épisodes de Hellblazer par Jamie Delano et Swamp Thing par Alan Moore.

Pour mettre en images ce mix de comic-book premier degré et méta-textuel, John Cassaday a choisi de privilégier de splendides illustrations à l'art séquentiel classique. C'est une option cohérente avec celle de son scénariste en cela qu'elle invite à donner également toute la place nécessaire pour de nouvelles versions, esthétiques, atmosphériques, de figures reconnaissables.

Par ailleurs, Cassaday réussit à donner corps aux concepts les plus délirants de l'histoire et le soin qu'il apporte à chaque plan, chaque planche, avec une magnifique colorisation (signée par Laura Depuy Martin et David Baron) force le respect et suscite l'émerveillement, que ce soit pour représenter un pentagramme enflammé, des insectes mutants géants, des races extraterrestres, des planètes lointaines, des vaisseaux mythiques et des personnages célèbres. 
Cassaday assume pleinement l'influence de Jim Steranko et de ses épisodes de Nick Fury, agent of SHIELD.

Après avoir terminé le volume un, le lecteur avait l'impression claire et nette qu'une oeuvre conséquente était en développement avec cette série. Ce nouveau tome confirme ce sentiment : chacune des six histoires fonctionne toujours aussi bien individuellement, mais en fin de compte elles forment une vaste tapisserie qui relate l'Histoire secrète du monde, creusent encore plus le passé de ses protagonistes (en premier lieu, celui d'Elijah Snow au sujet duquel on va découvrir des informations déterminantes), exploitent le filon conspirationniste qui donne une partie de sa saveur si particulière au projet. Bref, c'est déjà assurèment une oeuvre majeure qui se construit.

Au-delà même de la superbe qualité littéraire de ces histoires - surpassant en inventivité celles du précédent recueil - c'est précisèment cette idée que la série ne va cesser de surprendre et de dévoiler progressivement ses merveilles et ses étrangetés qui maintient l'intérêt du lecteur - et le fait même croître.

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