jeudi 14 septembre 2023

AVENGERS INC. #1, de Al Ewing et Leonard Kirk

 

Ce nouveau projet de Al Ewing m'a suffisamment intrigué pour que je me procure son premier numéro. Avengers Inc. n'a pas grand-chose à voir avec un titre Avengers classique puisqu'il s'agit d'une detective story avec seulement la Guêpe en vedette. Ewing bénéficie du talent de Leonard Kirk au dessin pour nous entraîner dans une intrigue accrocheuse et atypique.



Cyclone, un des ennemis de la Guêpe, meurt, tué dans la prison spéciale du Raft. Janet Van Dyne rencontre Luke Cage, maire de New York, qui accepte de la laisser enquêter à condition qu'elle fasse ça sans costume. Mais quand elle retourne à la morgue, l'affaire connaît un rebondissement inattendu...


Au début de cette année, Al Ewing proposait avec l'artiste Kasia Nie une mini-série Wasp centrée à la fois sur Janet Van Dyne et Nadia et sa belle-fille Nadia. Cette mini complétait celle consacrée à Ant-Man parue en 2022 (dessinée par Tom Reilly). La volonté du scénariste était claire : remettre sur le devant de la scène deux des fondateurs des Avengers, éclipsés par Thor, Hulk et Iron Man.


A la fin de la mini Wasp, on nous promettait le retour de Janet Van Dyne. C'est chose faite avec Avengers Inc., cette nouvelle série (visiblement illimitée cette fois) où Al Ewing déjoue les attentes en ne proposant pas un team book spectaculaire (le titre The Avengers de Jed McKay et C.F. Villa est là pour ça) mais une detective story.


C'est un postulant très curieux et très accrocheur. D'autant que tout démarre là où la mini Wasp finissait quand Janet recevait un appel de la prison pour super vilains, le Raft, lui apprenant que la Toupie venait d'être tué dans sa cellule.

David Cannon était un ennemi de la Guêpe qu'il tenta de voler avant d'être vaincu par Giant-Man. Plus tard, obsédé par elle, il payait des prostituées pour qu'elles se griment afin de lui ressembler puis les agressait. Quand la Guêpe mourut, il le reprocha à Hank Pym et menaça de détruire l'Académie des Vengeurs qu'il dirigeait.

Comme on peut le voir, Ewing n'a rien laissé au hasard en éliminant la Toupie. Mais il ne s'en tient pas à un simple whodunnit : il va plus loin et comme il aime à le faire (comme il est un des rares à savoir le faire), i raccroche les wagons de la continuité et emploie des personnages quelque peu délaissé pour enrichir son scénario.

C'est ainsi que Luke Cage est à nouveau mis en scène dans son rôle de maire de New York, rôle dans lequel il a succédé à Wilson Fisk/le Caïd. Cage a pourtant encore à traiter la gestion de Fisk, notamment en ce qui concerne sa loi sur les super héros qu'il avait interdit (même si on se souvient que dans le run de Charles Soule sur Daredevil, Matt Mudock réussissait à imposer une jurisprudence sur la préservation de l'identité secrète des justiciers masqués). 

Dans les faits, ici, cela se traduit par le souhait que la Guêpe enquête certes mais sans être costumée - ce qui n'est pas un problème pour elle car tout le monde sait que Janet Van Dyne est la Guêpe et qu'ensuite elle a des vêtements civils en molécules instables qui peuvent supporter le fait qu'elle devienne minuscule. C'est à ces détails qu'on voit qu'une histoire est bien conçue, bien pensée.

Lors de se seconde visite à la morgue du Raft, Janet va découvrir un indice qui l'intrigue et l'affaire va prendre un tour vraiment inattendu et imprévisible car David Cannon revient à lui et prétend s'appeler Vctor Shade... Qui fut l'alias de Vision ! Mais qui a fait ça à Cannon ? Et pourquoi ? Il faut attendre la dernière page pour connaître l'identité du responsable. Mais on ignore encore son mobile. C'est le but d'une bonne detective story que de laisser le lecteur avec plus de questions que de réponses : on n'attrape pas les mouches avec du vinaigre.

Al Ewing est soutenu dans ce projet par Leonard Kirk. Kirk est un vétéran des comics, il a travaillé pour DC et Marvel, sur une quantité ahurissante de titres. Et il dessine vite. Pas toujours impeccablement car il va parfois trop vite. C'est quand il est aidé par un (bon) encreur qu'il donne le meilleur de lui-même, ou quand il a un vrai bon script dans les mains. Ici, il dessine et encre mais il a un sacré bon script et donc il ne bâcle pas.

Kirk m'a toujours fait penser à ces artistes considérés sur le tard en prenant en compte leur production et leur curiosité. Un peu comme Jim Aparo ou Sal Buscema. Pas forcément ceux qui font le plus beau dessin, sont placés sur les meilleures séries, mais capables de tenir sur de longs runs si on les laisse bosser tranquille. Il a une technique solide, il peut tout dessiner, il tient les délais. Donc on peut espérer que si Avengers Inc. vend bien, il sera là pour un moment. Pour Ewing, c'est un avantage car, à part sur Immortal Hulk (avec Joe Bennett), on ne peut pas dire que Marvel lui laisse ses artistes très longtemps.

Kirk découpe chaque scène de manière classique, il n'est pas du genre à déborder du cadre : ce qui lui importe, c'est de rester lisible. Néanmoins, il compose ses plans en variant les angles et les valeurs, de façon toujours appropriée, et ça rend la lecture très agréable. Parfois ce style de dessin est rassurant : ce n'est pas le clinquant, le plus spectaculaire, mais c'est régulier, on sait qu'il n'y aura pas de perte de qualité, comme chez certains artistes qui démarrent un arc en force et s'essouffle petit à petit (et donc, pour tenir les délais, finissent par zapper les décors par exemple).

J'ai donc beaucoup aimé ce début de série. Bien plus par exemple que Batman and Robin de Joshua Williamson et Simone de Meo dont je voulais parler initialement et qui m'a découragé parce que, justement, c'est tout l'opposé de Avengers Inc. : un comic-book au dessin trop informatisé avec un scénario sans relief, avec des persos vus et revus. Ici, il y a de la substance et de l'efficacité, avec une espèce d'humilité ambitieuse (quelque chose qui a du fond mais qui ne se la pète pas). Et ça fait du bien.

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