lundi 19 juin 2023

Collection Marvel Gold - Carrefour : THUNDERBOLTS, de Jeff Parker, Declan Shalvey et Kev Walker


Vous en avez maintenant l'habitude : voici une entrée consacrée à un des tomes de la collection Marvel Gold disponible dans les hypermarchés Carrefour au prix de 3,99 E. Cette fois, c'est au tour du tome consacré aux Thunderbolts d'être commenté. Même si depuis la création du titre par Kurt Busiek et Mark Bagley, le concept a été considérablement altéré, les épisodes choisis ici renvoient au run de Jeff Parker, vraiment excellent (et qui feront l'objet d'un omnibus en vo à la rentrée), et bien accompagné au dessin.


Je disais plus haut qu'aujourd'hui les Thunderbolts n'ont plus grand-chose à voir avec l'idée (géniale) originale du titre. Aujourd'hui, Marvel l'exploite sous la forme d'une Suicide Squad avec des super-vilains qui acceptent des missions périlleuses en échange de remise de peine. Dans cet album, on retrouve 9 épisodes issus du run écrit par Jeff Parker, un scénariste que j'adore mais qui n'est plus employé hélas ! par Marvel.

Il est de prime abord surprenant d'avoir sélectionné pour démarrer des épisodes attachés à l'event Fear Itself, mais cela se justifie ensuite, et au demeurant, ces tie-in sont excellents. Les Thunderbolts sont alors composés de Moonstone, Songbird, Mach-V, Fixer (les historiques de la bande, et le Fantôme, Shocker, Boomerang, Satana, Man-Thing, Troll, Mister Hyde et Centuruis. Luke Cage commande ce groupe de gredins (une idée curieuse mais le personnage est peu présent dans ces épisodes) et il vient d'écarter le Fléau. Mauvaise inspiration : il va être choisi par Cul le Serpent, frère d'Odin, pour faire régner la terreur sur Terre.
 

Les T-Bolts se séparent en deux groupes : l'un va rattraper les détenus de la prison du Raft qui se sont échappés quand le Fléau l'a dévastée, l'autre part affronter le Fléau. Mais certains membres du premeir groupe vont surtout en profiter pour se faire la belle...

On trouve tout ce qu'on aime (ou pas) chez Jeff Parker dans ces épisodes sur-vitaminés, où ça explose de partout, où le chaos est total, où le danger est insurmontable, où beaucoup de personnages cachent leur jeu. Parker ne craint pas de submerger le lecteur : c'est même son objectif, ne pas lui laisser de répit, l'oppresser autant que les héros. Mais c'est bigrement efficace, sans aucun temps mort. Qu'il ne soit pas devenu un scénariste star est une énigme pour moi parce que, lui, vraiment, y va à fond les ballons dans le registre super-héroïque et grand spectacle.

Sur ces épisodes, il va être soutenu par deux dessinateurs en alternance et pas des manches : Declan Shalvey et Kev Walker. J'adorai le style de Shalvey à cette époque, super nerveux, et Walker ne faisait pas dans la dentelle non plus. Ils animent un casting très fourni, mettent en scène des actions ébouriffantes, ça n'arrête pas. Sur l'épisode 159, Parker avec Jen Van Meter, Joe Caramagna et Frank Tieri multiplient les points de vue dans un numéro king-sized et Valentine de Landro, Matthew Southworth et Eric Canete illustrent les segments écrits par les auteurs invités.
  

On pourrait croire qu'avec  l'arc suivant, en seulement deux épisodes, Jeff Parker va lever le pied. Que nenni ! La série suit alors la cavale des T-Bolts qui ont disparu avec la Tour qui abritait leur Q.G. ! Grâce au mélange de la technologie du Fixer, et de la magie de Man-Thing et Satana, ils ont remonté le temps et l'espace pour atterrir en pleine seconde guerre mondiale. Moonstone, Fixer, Boomerang, Troll, Mr. Hyde, Centurius, Satana croisent la route des Invaders qui traquent le Baron Zemo... Dont le fils, Helmut fondera des années plus tard les Thunderbolts ! 

Ce postulat délirant inspire à Parker une intrigue complètement échevelée et jouissive où les fugitifs changent d'apparence et essaient de modifier le cours de l'Histoire sans trop faire de dégâts, comme en suggérant à Zemo le prénom de son rejeton et de ne pas lui bourrer le crâne avec l'idéologie nazie ! Evidemment tout ça au nez et à la barbe de Captain America, Namor et la Torche Humaine (Jim Hammond) !
 

C'est évidemment très drôle et le trait de Kev Walker sied à merveille à ce joyeux bordel plein de feu, de neige, de coups fourrés et de paradoxes temporels. l'artiste se montre particulièrement à son avantage quand il s'agit malgré tout de montrer les émotions contraires qui agitent ces T-Bolts qui peuvent changer le futur tout en risquant leur peau et leur propre avenir. Walker se fiche pas mal de flatter les personnages, il excelle à leur croquer des trognes, dans des décors tour à tour à peine évoqués et grandiloquents (n'oublions pas que le gang se déplace à bord d'une tour). Et le plus amusant, c'est qu'à la fin ces crapules passent pour d'authentiques héros que Namor, Captain America et la Torche jurent d'honorer.


Enfin, l'album se clôt par un arc aussi foutraque. Si, dans le présent, Luke Cage est hors de lui en apprenant l'évasion d'une moitié de son équipe et que le Fantôme s'emploie à les localiser pendant que Songbird et Mach-V ramènent des prisonniers dans leur cellule du Raft, lui-même en pleins travaux, les T-Bolts en cavale continuent de remonter l'espace-temps.

Les voici donc en 1888 à Londres. Mr. Hyde en a profité pour fausser compagnie à ses collègues et accomplit la série de meurtres attribuée à Jack l'éventreur, en compagnie de Satana. Deux inspecteurs chargés de l'enquête reçoivent le renfort des T-Bolts, relookés pour passer le plus inaperçus possible...


Declan Shalvey a repris les dessins et produit des planches exceptionnelles, à l'énergie contagieuse, avec une spontanéité et une capacité d'évocation qu'il me semble avoir perdu depuis. Je peux comprendre qu'il ait voulu autre chose pour sa carrière ensuite, mais quel dommage de ne plus le voir sur du super-héros, avec ce dynamisme, cette inventivité.

Jeff Parker continuera encore un bon moment à remonter le temps avec ces fugitifs, dans des histoires toujours aussi marrantes, improbables et déchaînées - ça me donne envie de relire tout ça, c'était vraiment un run infernal, un comic-book comme il n'y en a plus guère chez Marvel en tout cas (les dernières mini-séries Thunderbolts étaient d'une tristesse...), et même quand la série sera retitrée Dark Avengers, il ne se calmera pas.

Le dernier épisode de l'album (le n°168), dessiné par Matthew Southworth) est dispensable : Luke Cage mène une enquête en solo pour remonter la piste des fuyards et croise Mr. Fear tandis qu'au Raft Songbird et Mach-V expliquent à des officiels que leur boss est un leader méritant mais empêché par des recrues qu'on lui impose (comme le Fléau ou Satana) et qui sont ingérables.

Vous l'aurez compris, j'ai un gros coup de coeur pour ces épisodes, cette époque, cette série, ces personnage (même si, encore une fois, le concept original a été complètement dilapidé). Et si vous ne connaissez pas tout ça, alors jetez vous sur ce tome, pour ce prix-là vous ne risquez rien.

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