vendredi 23 septembre 2022

X-TERMINATORS #1, de Leah Williams et Carlos Gomez


X-Terminators a tout du plaisir coupable, mais c'était l'intention de Leah Williams qui a même été poussée à se lâcher par le staff éditorial de la franchise X. Le choix de Carlos Gomez pour dessiner cette mini-série en cinq épisodes va dans le même sens en résumant l'idée : de jolies filles, de l'action, pas de prise de tête.


Dazzler rompt avec son dernier boyfriend, Alex, après avoir découvert son infidélité. Pour oublier cette mauvaise passe, elle invite des amies mutantes à se soûler en ville.


Jubilé emmène Boom-Boom chez Mr. B's et les trois filles commandent des boissons puis vont se défouler sur la piste de danse. Mais Tabitha Smith tombe subitement malade.


Alex réapparaît et Dazzler comprend qu'il les a droguées avec la complicité de la barmaid. Accompagnés de sa bande de vampires, l'amant éconduit engage le combat.


Les trois filles, séparées,  se réveillent dans un labyrinthe, confrontées à diverses menaces. Elles se réunissent et entreprennent de fuir lorsqu'elles croisent une quatrième mutante de le connaissance...

Dans une interview récente, Leah Williams racontait la genèse de X-Terminators : on pouvait ainsi apprendre la liberté étonnante qu'on lui avait laissée pour développer cette mini-série en cinq épisodes. La scénariste voulait se défouler, lâcher les chevaux, écrire sur des mutantes, employer des gros mots et oser plonger dans le gore.

Et c'est exactement ce qu'on a dans ce premier épisode qui commence par un flashback : Alison Blaire vient de découvrir que son boyfriend l'a trompé et le fiche à la porte. Désireuse de tourner rapidement la page, elle invite en ville des copines mutantes pour se prendre une cuite.

A partir de là, évidemment, tout va dégénèrer. C'est convenu, certes, mais il n'empêche, qu'est-ce que c'est bon ! X-Terminators ne prétend pas réinventer la roue et sans doute certains elcteurs ne trouveront ça pas drôle ni intéressant. Mais j'ai beaucoup aimé car on sent l'amusement des auteurs et ce n'est pas bâclé pour autant.

C'est un équilibre délicat à trouver : écrire une histoire pour s'éclater, sans complexe ni prétention, sans raconter n'importe quoi et surtout sans le faire n'importe comment. Leah Williams est une scénariste qui souffle le chaud et le froid : je connais peur son oeuvre mais j'avais aimé son chapitre de l'anthologie X-Men : Black, avec une histoire sur Emma Frost (dessinée par Chris Bachalo). En revanche, Trial of Magneto m'était tombé des mains.

La contrainte d'un tel projet, c'est de susciter la curiosité des lecteurs avec des personnages féminins d'une part et des mutantes peu ou pas utilisées. Leah Williams n'a donc pas accès à des X-girls populaires, comme Malicia, Tornade, Jean Grey, Emma Frost, Kitty Pryde. Mais elle réussit à faire de ce handicap un atout car, sans vedettes, elle peut inventer une intrigue plus folle, plus débridée, plus imprévisible.

En même temps, elle n'est pas réduite à un casting de troisième zone : ses X-Terminators sont des héroïnes cultes. On a donc Dazzler (qui reste dans les coeurs de tous ceux qui ont commencé à lire du X-Men du temps de Claremont et Byrne), mais aussi Jubilé (pour ceux qui adorent la période Claremont et Jim Lee) et Boom-Boom (pour ceux qui sont nostalgiques des débuts de X-Force ou de Nextwave). A la fin une quatrième mutante vient se greffer à l'affaire - et Marvel, comme souvent, se spoile tout seul en l'intégrant à la couverture (il s'agit donc de Laura Kinney/Wolverine).

Le prétexte à cette réunion est facile et l'ennemi est tout sauf original. Mais Leah Williams s'en moque doublement, d'abord parce que c'est pour amorcer son histoire et ensuite ça lui permet d'ironiser sur la période vampire de Jubilé (qui a été abondamment raillée par les fans). Une fois passée cette introduction (un peu longue, mais l'épisode est aussi plus consistant, avec sa trentaine de pages), la suite se déroule pied au plancher.

Carlos Gomez a été choisi pour illustrer cette aventure, et c'est tout sauf un hasard : on peut comparer cet artiste à Terry Dodson (mais sans une épouse qui l'encrerait mal), pour son goût assumé pour les jolies femmes aux courbes pulpeuses. Récemment, il a brillé sur une autre mini-série (America Chavez : Made in the U.S.A.), il travaille vite et bien, influencé manifestement par Stuart Immonen.

Pour Gomez, le défi était de donner ce qu'on attend de lui (du "good babe art" en somme et une narration graphique énergique), mais avec une touche de gore. Car Dazzler, Jubilé et Boom-Boom se défendent méchamment dans cette histoire. Leurs adversaires sont des monstres et des vampires sacrifiables à l'envi, et le scénario ne fait pas dans la dentelle pour les expédier ad patres.

C'est l'aspect plaisir coupable de X-Terminators : voir trois jolies filles démonter des créatures moches et belliqueuses dans de grosses gerbes d'hémoglobine. Il y a un côté série B, limite Z, qui s'avère très jouissif car c'est superbement dessiné et écrit avec une belle vigueur. Le féminisme du projet n'est pas ici exprimé de manière lourdement militante, mais avec du fun, comme s'il fallait mieux en rire et se revendiquer d'un girl power rigolard. 

J'ai pris un énorme plaisir à cette lecture et tout ce que j'espère, c'est que ça va continuer sur cette lancée. Les héroïnes ont des interactions savoureuses et avec le renfort de Wolverine, ça peut être encore plus épicé. Quant à Carlos Gomez, si après ça, il n'hérite pas d'une série régulière (et ma foi, ce serait très cool que Marvel et Leah Williams fasse de X-Terminators une ongoing), ce serait diablement frustrant.

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