dimanche 18 septembre 2022

SHE-HULK #6, de Rainbow Rowell et Luca Maresca


Sorti le 7 Septembre dernier, ce sixième épisode de She-Hulk confirme tout le bien qu'on peut penser de cette série. Rainbow Rowell est vraiment inspirée par son héroïne et l'intrigue qu'elle tisse autour d'elle est accrocheuse. Luca Maresca au dessin fait des merveilles en animant un casting très varié, toujours au service du scénario.


Patsy Walker/Hellcat remet à She-Hulk le dossier que les Avengers ont gardé sur le Valet de Coeur. Pourtant Jen se retient de le consulter tout de suite et remercie son amie pour ce service.
 

De retour au cabinet, She-Hulk reçoit la visite d'un client peu commun : Diablo. Il lui demande de défendre légalement les intérêts de Krakoa et elle accepte.


Contre toute attente, ce dossier enthousiasme Mallory Book, bien qu'elle ait interdit à She-Hulk de représenter des surhumains. Mais il s'agit d'un contrat en or avec de nombreux points à plaider.


She-Hulk retrouve le Valet de Coeur et lui remet le dossier des Avengers. Touché par les efforts déployés par Jen pour l'aider, il s'approche d'elle et elle le laisse l'embrasser...

Ce sixième numéro de la série marque vraiment un tournant dans sa progression : après avoir écrit un premier arc pour établir la nouvelle situation de She-Hulk, qui s'est retirée des Avengers, a repris son travail d'avocate, et a recueilli le Valet de Coeur que tout le monde pensait mort depuis longtemps, Rainbow Rowell doit maintenant passer la deuxième.

C'est en quelque sorte maintenant que commence le plus dur pour la scénariste. Si elle a réussi à intéresser les lecteurs à sa vision du personnage, elle doit à présent les garder et développer sa série. Elle maintient le cap en concentrant son récit sur la relation entre She-Hulk et le Valet de Coeur et le mystère qui entoure le retour de ce dernier, mais elle n'en reste pas là.

Rowell tient visiblement à inscrire sa série dans la continuité et pas en faire une sorte de fantiasie décalée comme cela fut le cas du temps de John Byrne ou Dan Slott. Ainsi, elle fait allusion au couple que forment désormais Patsy Walker/Hellcat et Tony Stark/Iron Man (tel que l'a imaginé Christopher Cantwelle dans son run actuel - reste à savoir si cela sera conservé par Gerry Duggan qui s'apprête à lui succéder sur ce titre).

Grâce à cela en tout cas, She-Hulk peut entrer en possession d dossier personnel du Valet de Coeur que les Avengers ont sonservé dans leurs archives. Rowell rappelle aussi à bon escient l'amitié entre Patsy et Jen et rédige des dialogues savoureux entre elles.

Dans la deuxième partie de l'épisode, c'est la vie professionnelle de She-Hulk qui est creusé. Depuis cinq épisodes, on la voit ramer pour gagner des clients au cabinet de Mallory Book. Ce n'est pas simple puisque cette dernière ne veut pas défendre de super-héros. Mais lorsque Diablo sollicite Jen pour qu'elle représente la nation mutante de Krakoa, qui doit résoudre de nombreux problèmes juridiques, l'occasion est trop belle pour la repousser.

Et, surprise, la nouvelle réjouit Mallory, qui pense surtout, elle, à la manne financière d'un tel dossier. Krakoa est une île certes, mais dont le commerce est juteux et la fortune assurée. Un client pareil, c'est la garantie de retombées en espèces sonnantes et trébuchantes mais aussi médiatiques. Narrativement, c'est aussi un terreau fertile pour de nombreux épisodes à venir et il sera passionnant d'observer comment Rowell va exploiter les relations entre les mutants et leur avocate. J'aimerai assez que cela permette de voir Jen fouler le sol de l'île et qu'on la voit donc à la fois dans sa série mais aussi dans des titres mutants (par exemple dans X-Men ou Immortal X-Men).

Enfin, le dernier tiers de l'épisode réunit She-Hulk et le Valet de Coeur et s'achève sur un twist attendu. Depuis quasiment le début de leurs retrouvailles, ces deux-là flirtent et le baiser qu'ils échangent ouvre clairement la porte à une relation plus intime. Bien entendu, tous les mystères entourant le Valet n'étant pas résolus, loin s'en faut, la suite risque d'être animée. 

Mais Rowell a fait preuve d'une finesse bien plus grande (mais ce n''était pas difficile) que Jason Aaron dans Avengers où il a voulu créer un couple franchement WTF entre She-Hulk et Thor sur le ton de la comédie. La scénariste a pris son temps mais à l'arrivée, même si c'est improbable, cette union est plus jolie et naturelle.

Luca Maresca fait aussi du très bon travail pour mettre cela en images. On peut dire (déplorer ?) qu'il ne fait pas trop d'efforts pour différencier les trois actes de l'épisode, et sans doute qu'un artiste plus inventif, plus expérimenté aussi, aurait eu à coeur de varier son découpage en fonction des scènes.

Mais cette simplicité est séduisante. Maresca n'est pas là pour faire le malin. Il est au service du scénario et son dessin est soigné, élégant, expressif. Il saisit parfaitement les attitudes et les représente avec subtilité. Quand Patsy et Jen rigolent ensemble sur leurs malédictions, Maresca réussit à dessiner ça avec un naturel qui fait souvent défaut aux artistes de comics plus doués pour la baston.

Le même compliment s'applique au dialogue entre Kurt Wagner et Jen : Rowell rend justice au mutant en lui rendant son caractère charmeur et enjoué, à mille lieues de l'elfe curaillon dans lequel on l'a si souvent cantonné (et qui doit faire se retourner Dave Cockrum sans sa tombe). La réaction de mallory Book est elle aussi très spontanée, captée avec adresse par Maresca.

Le plus difficile restait peut-être à découper dans la dernière partie car c'est souvent quand deux personnages saisis par le trouble, attirés l'un par l'autre, qu'on mesure à quel point un dessinateur est bon. Il faut que chaque plan soit cadré à bonne distance, que chaque expression des personnages soit juste, que le timing soit impeccable. Et une fois de plus Maresca y arrive. 

She-Hulk est une série sans prétention mais pas sans ambitions : c'est par son écriture très ciselée et ses dessins savamment dosés qu'elle parvient à un équilibre rare, précieux. C'est très plaisant à lire parce que c'est tout bonnement bien fait, par des auteurs inspirés, qui veulent rendre justice à l'histoire qu'ils raocntent et aux personnages qui la traversent.

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