vendredi 16 septembre 2022

DO A POWERBOMB ! #4, de Daniel Warren Johnson


On peut déjà, sauf surprise à venir, tirer quelques conclusions sur la nouvelle production signée Daniel Warren Johnson. Ainsi, si Do a Powerbomb ! reste une lecture originale et explosive, sa narration devient un peu trop routinière pour égaler le chef d'oeuvre de son auteur (Murder Falcon). 


Un an avant le tourno, les chevaliers de Rhyne reçoivent pour mission de s'y inscrire pour obtenir la résurrection du mage Velkus le rouge, défait par Willard Necroton.


Aujourd'hui, impressionné par sa jeune partenaire, Cobrasun propose qu'ils s'entraînent afin de parfaire leur complicité et leur efficacité sur le ring.


Le match qui les oppose aux chevaliers de Rhyne voit Cobrasun et Lona Steelrose en grande difficulté mais ils réussisent à puiser dans leurs ressources pour l'emporter.


Alors qu'ils quittent la scène, deux autres pairs de lutteurs les remplacent. Lona et Cobrasun reconnaissent alors Blood, le frère de Yua Steelrose, et assistent, impuissants, au combat qui suit...

Quelque part, c'était prévisible, mais je voulais quand même y croire car le talent de Daniel Warren Johnson est tel que rien ne semble pouvoir lui résister. Mais pourtant Do a Powerbomb ! accuse un coup de moins bien ce mois-ci et cela risque de le poursuivre.

Pour être plus clair, il faut revenir à Murder Falcon, le précédent creator-owned de l'auteur. L'histoire avait une construction assez semblable à celle de Do a Powerbomb !, avec une succession d'épisodes où, à mesure qu'on rencontrait les membres du groupe, on assistait à des combats épiques. Ici, c'est presque pareil.

Lona et Cobrasun enchaînent les matchs de catch sur le ring de Willard Necroton et chaque partie disputée est évidemment plus difficile que la précédente, et enrichie de révélations sur les personanges. On a appris que Cobrasun était le père de Lona (mais elle l'ignore) et qu'il l'avait accidentellement tuée sur le ring.

Malheureusement, ce qui réussissait si bien dans Murder Falcon, à savoir ce détonant cocktail d'action et d'émotion, a du mal à se réaliser dans Do a Powerbomb ! car, comme je le craignais, Daniel Warren Johnson me semble avoir abattu trop vite des cartes maîtresses dans son jeu. Ainsi, dès le deuxième épisode, on savait qui se cachait derrière le masque de Cobrasun. 

Dans cet épisode, l'auteur répéte un peu cette erreur en révélant que Blood, le frère de la défunte Yua Steelrose, donc l'oncle de Lona et beau-frère de Cobrasun, participe lui aussi au tournoi, avec le même objectif que les héros (obtenir de Willard Necroton qu'il ressucite Yua). 

Mais surtout l'épisode est mal construit. On apprend pour commencer, via un flashback en ouverture de l'épisode, pourquoi les chevaliers de Rhyne, futurs adversaires de Cobrasun et Lona, se sont inscrits au tournoi. Cette précision n'apporte pas grand-chose, sinon qu'il vienne se venger de l'organisateur qui a tué leur plus puissant sorcier, mais surtout comme on imagine mal Johnson éliminer du tournoi Lona et Cobrasun au bout de deux matchs, l'issue du combat contre les chevaliers ne fait guère de pli. Certes, la partie est disputée, violente, mais le dénouement reste prévisible.

Au-delà de ce fait avéré, Johnson consacre beaucoup de pages au combat en question? Si son dessin est toujours formidablement tonique, avec un découpage époustouflant, une science incomparable pour traduire les impacts des coups portés et reçus, reste qu'on trouve le temps un peu long. Toujours pour la même raison : la prévisibilité de la victoire des deux héros.

Et c'est au terme donc de cette trop longue baston que le fait le plus important de l'épisode survient avec la participation de Blood au tournoi. A peine a-t-on intégré cela, que l'affontement entre Blood et son partenaire contre le tandem Fyso se solde par une cuisante et dramatique défaite des premiers. Là encore, prévisible. Mais surtout raté parce que traité trop rapidement. Le match de Cobrasun et Lona a occupé trop de place alors qu'il est aurait été plus puissant de donner plus d'espace à celui de Blood.

On peut aussi arguer que si Blood avait dû combattre Cobrasun et Lona, Johnson aurait eu à écrire et dessiner un match encore plus tragique, mais il a manqué de perversité. Quoiqu'il en soit, Do a Powerbomb ! a le plus grand mal à susciter la même émotion poignante que Murder Falcon, sans doute parce que Johnson a plus de difficulté, à l'évidence, à explorer la notion de deuil qu'à exploiter la maladie comme c'était le cas dans sa précédente oeuvre. Il manque ce sentiment d'urgence, de nécessité, de dernière chance qui faisaient tout le sel de Murder Falcon quand le lecteur saisissait que Jake livrait son dernier tour de piste.

Parce qu'on n'arrive pas à être aussi ému par Lona vis-à-vis de la perte de sa mère, Do a Powerbomb ! déçoit. L'abondance de lutteurs, et le foisonnement graphqiue pour leur donner chair, ne comble pas ce déficit. On a l'impression que ce tournoi est déjà trop long, que chaque match est plus un morceau de bravoure, un exploit visuel que narratif, avant d'atteindre le coeur du sujet. Qu'importe au fond de savoir contre qui Lona et Cobrasun seront confrotnés en final (car s'ils n'y parviennent pas, à quoi bon tout ça ?), on aimerait vibrer davantage, être touchés davantage. Quel rebondissement pourrait insuffler une dimension iconique, sacrificielle à ce récit comme la révélation de la maladie de Jake dans Murder Falcon ?

Si on met cela de côté,ce qui n'a rien d'aisé, Johnson livre quand même quelque chose d'unique, de très spécial, d'improbablement bon. Mais "bon" n'est pas suffisant : avec un auteur pareil, on veut de l'extraordinaire, du hors du commun. En a-t-il encore sous le pied pour les trois épisodes restants ? A suivre...

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