jeudi 25 août 2022

DO A POWERBOMB ! #3, de Daniel Warren Johnson


Sorti la semaine dernière, le troisième épisode de Do a Powerbomb ! prouve à nouveau que l'imagination de Daniel Warren Johnson ne connaît aucune limite. Avec cet auteur complet, tout est permis, y compris les idées les plus farfelues, les mélanges les plus inattendus. A partir de là, on aime ou on déteste, il n'y a pas d'entre-deux : ce n'est pas de la BD pour les tièdes.


Cobrasun et Lona traversent le passage qui les mèent au royaume de Willard Necroton. Ils s'inscrivent pour le tournoi de catch où il les a invités, parmi d'autres combattants venus de tout l'univers.


Après une halte au bar où ils ont été pris à parti par deux concurrents ivres et où ils ont rencontrés deux autres adversaires, Cobrasun et Lona assistent à la présentation du tournoi et des prétendants au titre.


Confrontés à un duo d'ourang-outangs, Cobrasun décide de débuter le match. Mais il reçoit une raclée. Pourtant, il refuse de laisser entrer Lona en jeu alors qu'une défaite les exclurait de facto.


Lona prend l'initiative de monter sur le ring et renverse le cours de la partie avec quelques coups acrobatiques spectaculaires. Cet exploit ne passe pas inaperçu auprès de leurs futurs opposants...

Attention, spoilers ! le deuxième épisode s'achevait par la révélation de la véritable identité de Cobrasun : il s'agit en fait du père de Lona et donc mari de Yua Steelrose. Cela complexifie drôlement la situation puisqu'il a tué accidentellement sa partenaire sans que leur fille le sache et qu'aujourd'hui il a accepté de lutter à ses côtés dans le royaume de Willard Necroton dans le fol espoir de ramener Yua à la vie.

Si on est un lecteur attentif aux détails, cette révélation était, disons-le, assez convenu (en effet, le mari de Yua s'éclipsait juste avant son dernier combat) et il fournissait à Daniel Warren Johnson un moyen facile d'élever émotionnellement l'enjeu de son histoire. D'un côté, un homme qui porte la culpabilité d'avoir tué sa femme et d'avoir privé une fille de sa mère, de l'autre la fille qui a perdu sa mère et ignore que le responsable est son propre père avec lequel elle est déjà brouillée depuis des années.

Ceci étant posé, on peut se questionner sur ce qui a motivé Johnson à dévoiler si vite une part importante de son histoire. Pour comparer avec Murder Falcon, on apprenait tardivement que le héros était malade du cancer et en phase terminale, et lorsqu'on le savait, cela ajoutait à son dernier duel contre le vilain une dimension sacrificielle poignante. Ici, le lecteur est dans la confidence tandis que Lona ignore ce fait, donc quel impact cela aura pour la suite ?

En attendant de le savoir, on est tout de même bluffé par l'imagination débridée de l'auteur qui déplace le récit dans la dimension de Willard Necroton. Visuellement, c'est une claque avec des décors imposants, une figuration impressionnante, un univers très solide et délirant. Johnson ne s'économise pas pour nous épater.

Les scènes s'enchaînent sur un rythme soutenu, ce qui ne surprend pas les fans de l'auteur. Toutefois, on attend surtout que le tournoi commence et quand on voit la gueule des participants, ça promet ! Les adversaires viennent de toute la galaxie et on a affaire à des spécimens croquignolets. On aura donc droit à des combats avec une sacrée allure, où Johnson va se défouler et nous, nous régaler.

Le fait que le premier match de Lona et Cobrasun les oppose à des ourang-outangs dotés de parole renseigne sur le degré de loufoquerie de la série. Si vous n'êtes pas prêts à accepter cela, passez votre chemin, mais je n'en attendais pas moins de Johnson après Murder Falcon.

Pourtant une part indéniable du travail de Johnson repose aussi sur l'emotion, qu'il ose faire éclore dans des situations improbables. Et quand on découvre pour quoi luttaient les deux singes et la réaction de Lona, on ne peut s'empêcher d'être saisi. C'est la magie de ce genre de comics qui s'autorise tout et réussit à nous cueillir sans qu'on s'y attende, au moment le moins évident. J'adore, mais je comprends que ça puisse dérouter, voire laisser des lecteurs sur le bas-côté.

J'insiste beaucoup sur tout cela, à dessein. Mais je crois que c'est crucial : les comics indés, pour ce que j'en sais, à l'heure actuelle sont énormément influencés par le genre horrifique, et cela déborde sur des publications mainstream. C'est sans doute dans l'air du temps, mais pour ma part, ça le laisse complètement froid et surtout j'ai envie d'autre chose, dans une époque plombée par les guerres, les épidémies, le populisme, cette gravité écrasante.

Alors que, au milieu de tout ça, une BD comme Do a Powerbomb ! et un auteur comme Daniel Warren Johnson existe, c'est une sorte de miracle, de machin invraisemblable mais qui fait du bien, parce que ça met la patate et ça vous prend aux tripes sans vous éprouver davantage. Merci à lui pour ça. Et bravo pour la manière, car c'est bigrement costaud et osé.

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