samedi 4 juin 2022

THE NICE HOUSE ON THE LAKE #9, de James Tynion IV et Alvaro Martinez


C'est avec un sentiment étrange qu'on lit ce neuvième épisode de The Nice House on the Lake puisqu'on ignore à quand la série reprendra - mais j'y reviendrai. Car, en attendant, l'épisode en question est excellent. James Tynion IV fait bouger les choses, sans avoir l'air d'y toucher, et à la fin on ne demande qu'à voir ce qui va suivre - même si, donc, il faudra attendre. Alvaro Martinez, avec Jordie Bellaire, continue d'illustrer magistralement ce cauchemar en quasi huis-clos.



Ryan a donc découvert que Norah était retenue dans la seconde maison et celle-ci l'informe de la nature extra-terrestre de Waltr, qui a effacé les souvenirs du groupe et auquel il ne faut pas se fier.


Dans la première maison, Arturo Pérez, l'acupuncteur, s'installe dans la cabane dans les arbres que Reg a conçu. Il promet à ce dernier de lui rséerver sa première séance.


Le soir venu, Walter rejoint Norah dans la seconde maison. Elle lui répéte que le groupe lui en voudra de lui avoir menti quand il apprendra la vérité. Mais elle peut aider à faire passer la pilule...


Et au même moment, dans la première maison, Reg et Arturo font part de la stupéfiante découverte qu'ils ont fait lors de la séance d'acupuncture pratiquée dans l'après-midi...

Ce neuvième épisode est franchement épatant et James Tynion IV relance son histoire de main de maître alors qu'on pouvait trouver que la série patinait un peu. Toutefois, l'évolution de l'intrigue jusqu'à un double cliffhanger saisissant nous laisse dans une grande frustration.

Vous allez dire : c'est le jeu. Et c'est vrai : un bon scénariste se doit de frustrer ses lecteurs pour que ceux-ci aient envie de revenir au prochain numéro, avec l'espoir d'en savoir plus, que les héros progressent. Mais la frustration ici est d'une nature différente.

En effet, ce neuvième épisode est le dernier qu'on lira au moins jusqu'en Septembre ! En consultant les sollicitations de DC Comics (le calendrier des sorties prévues dans les prochains mois), le titre n'apparaît plus en Juillet ni en Août. J'ai interrogé Alvaro Martinez sur Twitter à ce sujet sans qu'il me réponde. Donc, en étant optimiste, je table sur un dixième épisode en Septembre. Mais sans aucune garantie. Récemment, le dessinateur a renoué avec les séances de dédicaces dans des conventions et on pouvait s'attendre en conséquence à ce que ce n°10 ne soit pas pour Juillet. Mais il semble bien que The Nice House on the Lake connaisse à nouveau un long hiatus.

D'habitude, je ne fais pas grand cas de ces délais car ce qui m'importe, plus que d'avoir ma dose mensuelle de comics, c'est que la qualité soit au rendez-vous, que l'intégrité de la série soit conservée. De ce côté-là, peu de danger puisque The Nice House... est un creator-owned, il appartient donc à ses auteurs, James Tynion IV et Alvaro Martinez, et donc DC n'a pas le droit de leur imposer des fill-in. Par ailleurs, l'éditeur a consenti des efforts pour que le scénariste, qui a lâché toutes ses autres séries chez lui, publie ce projet au sein du Black Label plutôt que sur Substack (et incidemment chez un éditeur indépendant type Image ou Boom ! ou Dark Horse). Donc, DC est prêt à accorder à Tynion et Martinez le temps qu'il faut pour sortir la suite et fin.

Mais je trouve quand même ça terriblement ingrat pour le lecteur car ces interruptions à répétitions sans savoir à quand s'effectuera la reprise gâche quelque peu la lecture. C'est dommageable pour une histoire comme celle de The Nice House... avec son casting fourni, son intrigue labyrinthique, son ambiance chargée. Il faut à chaque fois faire l'effort de s'y replonger, de se refamiliariser avec tout ça, et ce n'est pas évident. C'est là qu'on mesure l'avantage à attendre (même si, là aussi, c'est long) la vf chez Urban Comics où on pourra lire les douze épisodes dans un seul recueil.

D'une manière plus générale, cela donne à réfléchir au modèle du Black Label. Strange Adventures (King/Gerads + Shaner) tout comme Mister Miracle (King/Gerads) avaient terminé leur publication en devenant bimestriel, afin que les artistes n'aient pas à bacler ou soient remplacés. Batman/Catwoman a vu débarquer Liam Sharp pour suppléet Clay Man au bout du sixième épisode (alors que ce dernier planchait depuis plus d'un an sur la mini-série !). The Human Target (King/Smallwood) a été clairement programmé en annonçant sa reprise après uun hiatus de six mois - c'est l'exemple le plus semblable à The Nice House..., avec Catwoman : Lonely City, où Cliff Chiang a promis la suite et fin en Août prochain.

Ne sachant donc rien sur la date du retour de la mini-série, on ne peut que subir. Je le répéte : c'est dommage de ne pas avoir plus de visiblité, de la part des auteurs comme de l'éditeur. Je n'ai rien à reproché sur le fond à James Tynion IV : ce numéro est excellent encore une fois. Le fait que Ryan connaisse la situation de Norah et les mensonges de Walter tout comme ce que découvrent, au terme d'une séance d'acupuncture, Reg et Arturo, qui partagent ça avec le groupe, relancent la partie de manière très efficace.

Idem en ce qui concerne cette scène parfaite entre Walter et Norah où le premier est mis devant le fait accompli (ses manigances finiront pas lui causer l'inimitié de ceux à qui il a voulu offrir une chance). Ryan étant toujours dans le coin, elle assiste à leur sortie la nuit venue et les suit dans un endroit vraiment très zarbi : c'est redoutablement accrocheur, digne des meilleurs cliffhangers de Lost (auquel The Nice House... fait souvent penser).

Visuellement, c'est une série extraordinaire. Alvaro Martinez expérimente et teste les limites de son art et du lecteur. C'est très fort, très audacieux, et le traitement des couleurs par Jordie Bellaire ajoute à cette expressionnisme rarissime. Pour tout cela, The Nice House... évoque ce qui se faisait sous la houlette de Karen Berger aux grandes heures du label Vertigo. Perso, si le résultat me désarçonne quelquefois et que la lisibilité n'est pas toujours évidente, je soutiens quand même ces prises de risque graphique chez un gros éditeur qui a l'immense mérite de donner un tel espace de liberté à ses meilleurs auteurs (tandis qu'en face, chez Marvel, cela n'existe absolument pas).

Comment ne voulez-vous pas être agacé après ça ? On a envie de lire la suite, vite, ou du moins dans un délai raisonnable, ou en tout cas en sachant quand cette suite sera disponible. Ne rien savoir à ce sujet, c'est vraiment le pire des suspenses. Je ne vais pas faire un caprice de vo-iste (c'est un choix assumé d'avoir priviligié ce type de lecture et de fréquence), mais pour le coup, je m'en mords un peu les doigts.

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